Faillites bancaires américaines: risque limité de contagion à l'Europe, selon Moody's et S&P Global

Le logo de la Silicon Valley Bank (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 15 mars 2023

Faillites bancaires américaines: risque limité de contagion à l'Europe, selon Moody's et S&P Global

  • «La structure du bilan des banques européennes limite la contagion», explique Moody'
  • Depuis le début de la semaine, les autorités européennes ont multiplié les prises de parole se voulant rassurantes

PARIS: Les perturbations que connait le secteur bancaire américain à la suite de la faillite de Silicon Valley Bank (SVB) devraient avoir un impact limité sur les établissements européens, organisés différemment, ont estimé mardi les agences américaines de notation Moody's et S&P Global.

"La structure du bilan des banques européennes limite la contagion", explique Moody's, qui a par ailleurs abaissé la perspective du secteur bancaire américain de stable à négative.

Pour justifier sa position, l'agence cite une proportion plus importante de dépôts auprès de la banque centrale de la part des banques européennes.

A l'inverse, les titres de créance représentent seulement 12% du bilan des banques de la zone euro, contre 30% pour les banques américaines.

"Nous ne voyons pas" parmi les banques  européennes suivies et notées par S&P, d'instituts dont le modèle économique et les sources de fonds "présentent le même profil", selon une note de S&P Global Ratings.

"Il est peu probable que les banques européennes notées aient une exposition directe significative à la Silicon Valley Bank et à la Signature Bank" et "le risque de contagion est limité", ajoute l'agence.

"Les dépôts sont probablement plus stables en Europe, leur croissance ayant été moins rapide", souligne également Moody's.

Enfin, la Banque d'Angleterre et la Banque centrale européenne ont mieux développé l'accès à des liquidités en cas de tensions, selon l'agence de notation.

SVB: "la stabilité du système financier doit être repensée", juge l'économiste Joseph Stiglitz

Quelques jours après la faillite de la Silicon Valley Bank, qui a secoué banques et marchés mondiaux, le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz salue dans un entretien à l'AFP la réaction des autorités américaines mais n'exclut pas d'autres défaillances.

QUESTION: Après l'accalmie constatée mardi sur les marchés, le risque d'une crise financière majeure est-il écarté?

REPONSE: "Ca fait partie des choses qu'on ne peut pas prédire. Les banques sont plus saines que par le passé, notamment en 2008. Il y a eu des progrès, mais pas autant que nécessaire. Les nouvelles technologies favorisent les +bank runs+ (paniques bancaires, NDLR). On pensait jusqu'ici que les comptes bancaires étaient difficiles à déplacer. Mais quand tout le monde gère son compte bancaire par Internet, c'est beaucoup plus facile de retirer tout son argent et de le placer ailleurs. Avant la faillite de SVB, il y avait eu très peu de discussions sur la manière dont la technologie avait influencé la probabilité des +bank runs+. La stabilité du système financier doit être repensée, en prenant en compte les nouvelles technologies."

 

Q: Vous avez écrit dans une récente tribune que la faillite de SVB était "prévisible". D'autres banques de premier plan vont-elles faire faillite dans les prochains jours?

R: "Le système bancaire est très complexe. Il y a toujours des rumeurs au sujet de telle ou telle banque qui serait vulnérable, mais sauf à connaître leur bilan comptable, leurs expositions et (leurs résultats) aux tests de résistance, c'est difficile de les vérifier. Ce qui est intéressant, c'est qu'il n'y avait pas de commentaires négatifs au sujet des prêts accordés par SVB. Par le passé, dans la plupart des +bank runs+, les gens se plaignaient de l'imprudence des banques, qui avaient fait des prêts hypothécaires plus ou moins frauduleux. Mais ici ça n'est pas un problème de prêts, c'est plutôt une asymétrie (entre l'actif et le passif de SVB, NDLR). Et cela peut se produire n'importe où dans notre système économique."

 

Q: Comment jugez-vous la réaction des autorités américaines?

R: "Il y a eu un stress énorme entre jeudi et dimanche soir. En définitive, je pense que les autorités ont bien réagi, mais très lentement. Les choses auraient été bien plus faciles si elles avaient répondu plus rapidement, particulièrement en garantissant que les clients qui avaient des dépôts de plus de 250.000 dollars n'allaient pas perdre leur argent. Au niveau macroéconomique, c'était le plus important. Si les autorités ne l'avaient pas fait, (il y avait) la possibilité d'une énorme crise financière ou d'un gigantesque mouvement de fond vers les banques +too big to fail+ (trop grosses pour faire faillite, NDLR).

(...) Il faut comprendre le degré de stress que ça (le retard des autorités a réagir) a mis sur tous les professionnels du secteur de la tech. C'est un traumatisme qui aura, je pense, des effets à plus long terme."

Depuis le début de la semaine, les autorités européennes ont multiplié les prises de parole se voulant rassurantes.

"Il n'y a pas de contagion directe et la possibilité d'un impact indirect est quelque chose que nous devons surveiller mais pour le moment nous ne voyons pas de risque significatif", avait déclaré lundi le commissaire européen à l'Economie, Paolo Gentiloni, à Bruxelles, avant une réunion des ministres des Finances de la zone euro.

Une porte-parole de la Banque de France avait de son côté indiqué que les banques françaises "ne sont pas exposées" à la banque américaine en faillite, quelques heures après que Bruno Le Maire avait assuré qu'il ne voyait pas de risque de contagion.

Toutefois, "la faillite de SVB a ébranlé la confiance" et le resserrement monétaire en Europe, "quelques mois en retard" sur celui de la Réserve fédérale aux Etats-Unis, "pourrait encore mettre en évidence des fragilités et nécessiter une gestion prudente et pragmatique de la part des autorités", a averti S&P Global.


Pourquoi le chocolat reste cher avant Noël malgré la baisse du prix du cacao

Des producteurs récoltent du cacao dans une plantation à Agboville, dans la région d'Agneby-Tiassa, le 4 décembre 2025. (AFP)
Des producteurs récoltent du cacao dans une plantation à Agboville, dans la région d'Agneby-Tiassa, le 4 décembre 2025. (AFP)
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  • Après des récoltes déficitaires ayant fait exploser les prix du cacao en 2024, la production repart en Côte d’Ivoire et au Ghana grâce à la hausse du prix payé aux producteurs, entraînant une baisse des cours mondiaux
  • Malgré cette accalmie, les consommateurs ne verront pas les prix du chocolat baisser pour Noël, car les coûts élevés ont déjà conduit à des hausses tarifaires, des réductions de portions et une baisse de la teneur en cacao

LONDRES: Après être montés en flèche pendant deux ans, les cours du cacao sont largement retombés cette année, mais sans répercussion sur les prix du chocolat à quelques jours des fêtes de fin d'année. Explications.

- L'Afrique de l'Ouest est le coeur de la production -

La Côte d'Ivoire et le Ghana sont les principaux fournisseurs de cabosses, les fruits du cacaoyer, desquels sont extraits les fèves de cacao utilisées pour le chocolat.

Ces deux pays d'Afrique de l'Ouest concentrent plus de la moitié de la production mondiale, le reste étant principalement réparti entre le Nigeria, le Cameroun, ainsi que l'Equateur, l'Indonésie et le Brésil.

Cette concentration de la production mondiale dans quelques zones géographiques rend le marché très vulnérable aux aléas climatiques de l'Afrique de l'Ouest et aux maladies des cacaoyers.

- Les prix ont battu des records en 2024 -

Les récoltes des "saisons 2021-2022, 2022-2023, et 2023-2024 ont été déficitaires" par rapport à la demande, entraînant une hausse mécanique des prix, explique à l'AFP Oran Van Dort, de Rabobank.

Ce déficit s'explique selon lui par les mauvaises conditions météorologiques, mais aussi des problèmes systémiques dans les plantations ghanéennes et ivoiriennes, comme "le vieillissement des arbres, la propagation du "swollen shoot virus" (oedème des pousses du cacaoyer) ou la faible utilisation d'engrais et de pesticides", faute de revenus suffisants.

Résultat, en décembre 2024, le prix du cacao a atteint le niveau inédit de 12.000 dollars la tonne à la Bourse de New York, lui qui s'échangeait entre 1.000 et 4.000 dollars depuis les années 80.

- La récolte de fèves a redécollé ces derniers mois -

Au Ghana et en Côte d’Ivoire, le prix payé aux producteurs est fixé par l'État, qui l'a largement augmenté pendant l'année 2025, après l'avoir longtemps maintenu inchangé malgré la hausse des cours.

"Pour la première fois depuis des années, j'ai l'impression que nous cultivons avec le soutien du gouvernement", témoigne auprès de l'AFP, Kwame Adu, de la région d'Ahafo au Ghana.

La hausse des revenus a permis aux producteurs d'acheter des engrais et des machines pour améliorer la récolte, ainsi que de planter de nouveaux arbres, favorisant leurs perspectives.

"L'année passée (saison 2024/2025, ndlr), ça s'est bien passé parce qu'au moment où le cacao a donné les fruits, il y avait la pluie", explique aussi à l'AFP Jean Kouassi, agriculteur ivoirien de 50 ans, qui possède 4 hectares de plantation.

- Il y a moins de cacao dans les produits -

"Le coût record des matières premières a contraint les fabricants de chocolat à prendre une série de décisions impopulaires: réduction des quantités, augmentation des prix", mais aussi la "dilution discrète de la teneur en cacao" dans les produits, souligne Ole Hansen, analyste chez Saxo Bank.

La pratique peut même coûter l'appellation "barre au chocolat" à certains produits, comme c'est arrivé aux biscuits Penguin et Club de la marque McVitie's cette année au Royaume-Uni, qui impose un minimum de teneur en cacao.

La demande des géants comme Mondelez, Mars, Ferrero ou Nestlé s'est affaiblie, ce qui, ajouté à la bonne récolte 2024-2025, a entraîné une baisse des cours. La tonne de cacao évolue désormais à New York aux alentours de 6.000 dollars.

- Le chocolat reste cher -

La baisse des prix du cacao ne profitera pas aux amateurs de chocolat durant les fêtes, celle-ci arrivant "bien trop tard pour affecter les assortiments de Noël déjà produits et dont les prix ont été fixés il y a plusieurs mois", tranche Ole Hansen

"Les récentes fluctuations des prix du cacao sont encourageantes, mais le marché reste volatil (...) il est encore trop tôt pour se prononcer sur des changements spécifiques concernant les prix", reconnaît Nestlé, interrogé par l'AFP.

L'espoir demeure pour les oeufs et les lapins de Pâques, selon M. Hansen, à condition que le marché se stabilise autour des niveaux actuels.


EDF inaugure en Guadeloupe son premier compensateur synchrone pour stabiliser le réseau

Le logo du géant français de l'énergie EDF est visible au siège social de l'entreprise à Marseille, dans le sud de la France, le 10 octobre 2025. (AFP)
Le logo du géant français de l'énergie EDF est visible au siège social de l'entreprise à Marseille, dans le sud de la France, le 10 octobre 2025. (AFP)
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  • EDF a inauguré en Guadeloupe un compensateur synchrone de 180 tonnes, une première mondiale destinée à stabiliser un réseau insulaire en forte transition vers les énergies renouvelables
  • L’équipement, sans émission de CO₂, doit réduire les coûts et renforcer la sécurité électrique

PARIS: EDF a inauguré mercredi en Guadeloupe son premier compensateur synchrone, une machine de 180 tonnes destinée à stabiliser un réseau insulaire non interconnecté, une "première mondiale" pour l'électricien.

Installé sur le site industriel de Jarry, près de Pointe-à-Pitre, l'équipement sera "mis en service très prochainement", a indiqué à la presse Hugo Gevret, qui a piloté ce projet. Il s'agit d'"un gros alternateur qui tourne à vide" et contribue à maintenir la tension et à soutenir la fréquence du réseau, deux paramètres essentiels dans un système isolé.

Dans les systèmes électriques traditionnels, cette stabilité est assurée par les turbines lourdes des centrales thermiques ou nucléaires. Leur masse en rotation fournit une inertie mécanique qui amortit naturellement les variations de fréquence.

Mais la Guadeloupe, engagée vers la décarbonation et l'autonomie énergétique d'ici 2035, doit intégrer davantage d'énergies renouvelables, dont l'intermittence ne fournit pas cette sécurité. "L'éolien et le photovoltaïque (...) n'apportent pas cette inertie qu'on recherche dans un système électrique: c'est le rôle du compensateur", souligne encore Hugo Gevret.

Son rotor en rotation permanente imite l'inertie mécanique d'une centrale classique, sans brûler de combustible. La machine peut absorber ou injecter de l'énergie réactive pour maintenir la tension, et réagir en quelques millisecondes aux fluctuations du réseau, un paramètre crucial dans un territoire non interconnecté.

L'investissement, engagé en 2019, atteint plus de 20 millions d'euros. La machine doit "faire économiser cinq millions d'euros à la collectivité et 30.000 tonnes annuelles de CO2", précise Hugo Gevret car contrairement aux turbines à combustion utilisées jusqu'ici pour stabiliser le système, elle n'émet aucun gaz à effet de serre.

Ce dispositif constitue pour l'électricien une "première mondiale", a rappelé Marie-Line Bassette, directrice régionale d'EDF. Selon elle, d'autres installations sont prévues dans les territoires ultramarins, pour lesquels des appels d'offres ont été lancés.

L'archipel a été frappé ces dernières années par des délestages et coupures à répétition, aggravés par des conflits sociaux dans le secteur de l'énergie. En 2024, une grève avait même provoqué un black-out total de plus de 36 heures.


La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour 2025 et 2026 

La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine, a indiqué mercredi le gouverneur François Villeroy de Galhau, au micro d'Europe 1. (AFP)
La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine, a indiqué mercredi le gouverneur François Villeroy de Galhau, au micro d'Europe 1. (AFP)
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  • L'Insee et le gouvernement ont déjà relevé leur prévision de croissance à 0,8% pour 2025
  • La Banque de France prévoit cependant un ralentissement de la croissance au quatrième trimestre à 0,2% du produit intérieur brut (PIB)

PARIS: La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine, a indiqué mercredi le gouverneur François Villeroy de Galhau, au micro d'Europe 1.

Lors de la publication prévue le 19 décembre, "nous allons remonter un peu notre prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine. Nous étions à 0,7% pour cette année, à 0,9% pour l'année prochaine", a-t-il indiqué en ajoutant qu'il ne pouvait pas encore donner de chiffres.

L'Insee et le gouvernement ont déjà relevé leur prévision de croissance à 0,8% pour 2025.

La Banque de France prévoit cependant un ralentissement de la croissance au quatrième trimestre à 0,2% du produit intérieur brut (PIB), contre 0,5% au trimestre précédent, a-t-elle indiqué jeudi.

"Evidemment, même si on allait à 1% (de croissance l'année prochaine, NDLR), ça ne suffit pas. C'est résilient, mais non suffisant", selon le gouverneur.

"L'économie, l'activité, résistent malgré cette incertitude" politique estime le gouverneur qui rappelle qu'il y a un an "beaucoup craignaient une récession", qui a été évitée.

"Il y a une estimation assez convergente qui dit qu'au total, l'incertitude nationale plus internationale nous coûte à peu près 0,5 point de croissance (...) et que la part nationale là-dedans, c'est au moins 0,2. Donc, si on arrivait à sortir avec une stratégie budgétaire et une stabilisation politique, on peut espérer gagner 0,2%", selon le gouverneur.

Le vote du budget de la sécurité sociale mardi "je relève simplement que c'est une étape franchie", "c'est pas du tout la fin de ce chemin", a insisté M. Villeroy de Galhau.

Les députés ont adopté de peu mardi le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2026.

Les discussions sur le budget de l'Etat se poursuivront en janvier si le Sénat et l'Assemblée ne parviennent pas à un accord, a annoncé mercredi la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon, excluant de facto le recours au 49.3 pour faire adopter le texte sans vote.

"Baisser suffisamment le déficit total" 

Le gouverneur de la Banque de France a aussi rappelé mercredi qu'"on ne sait pas aujourd'hui si on va arriver à baisser suffisamment le déficit total".

"On part de 5,4% du PIB, du poids de notre économie, pour ce déficit total. Il faut être à 3% dans quatre ans (...) Donc, si on doit faire ce chemin en quatre ans, il faut faire le quart du chemin la première année. C'est pour ça que moi, j'ai plaidé un déficit à 4,8% l'an prochain".

Le gouverneur "croit qu'il reste très important d'être aussi proche que possible de ce chiffre de 4,8%", à la fois "pour sortir de l'étouffement progressif par la dette, parce que les intérêts de la dette prennent de plus en plus notre marge de manœuvre", et puis "pour ramener la confiance".

Le ministre de l'Economie et des Finances Roland Lescure a pour sa part dit mercredi sur RTL souhaiter toujours que le déficit public (Etat, sécurité sociale et collectivités locales réunis) soit à "5% (du PIB) et pas au-dessus" en 2026.

Cela implique que l'Etat renfloue les caisses de la Sécurité sociale de 4,5 milliards d'euros après le vote du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, celui-ci aggravant le déficit de la Sécu par rapport au projet initial du gouvernement.

M. Lescure considère que le vote la veille du budget de la Sécurité sociale, avec un déficit alourdi, faisait "remonter d'un cran" la difficulté d'obtenir un vote du budget de l'Etat, qui va devoir compenser.