Pollution maritime: à Marseille, les «scrubbers» des navires sentent le soufre

Cette photo prise le 16 avril 2022 montre le Vieux-Port de Marseille, dans le sud de la France. (AFP).
Cette photo prise le 16 avril 2022 montre le Vieux-Port de Marseille, dans le sud de la France. (AFP).
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Publié le Mercredi 15 mars 2023

Pollution maritime: à Marseille, les «scrubbers» des navires sentent le soufre

  • La cité phocéenne a demandé mardi la mise en place d'une Zone à faibles émissions (ZFE) portuaire, où seraient interdits «les navires les plus polluants» mais aussi ceux équipés de «scrubbers ouverts»
  • Ces dispositifs censés améliorer la qualité de l'air permettent en fait de contourner une réglementation de l'Organisation maritime internationale (OMI) de 2020 qui limite les rejets en soufre dans l'atmosphère

MARSEILLE : Moins de rejets dans l'air mais davantage en mer: présentés initialement comme une solution plus respectueuse de l'environnement, les "scrubbers", ces filtres installés dans les cheminées des navires pour réduire leurs émissions de soufre, sont dans le viseur de la ville de Marseille.

La cité phocéenne a demandé mardi la mise en place d'une Zone à faibles émissions (ZFE) portuaire, où seraient interdits "les navires les plus polluants" mais aussi ceux équipés de "scrubbers ouverts".

Ces dispositifs censés améliorer la qualité de l'air permettent en fait de contourner une réglementation de l'Organisation maritime internationale (OMI) de 2020 qui limite les rejets en soufre dans l'atmosphère, en autorisant les armateurs à continuer à utiliser du fioul lourd à 3,5% de soufre au lieu du fioul à 0,5% obligatoire, mais près de deux fois plus cher.

Placés dans les cheminées des paquebots, ces filtres spéciaux "lavent" les fumées avant qu'elles ne soient éjectées dans l'air, leur permettant de respecter les nouvelles normes. Problème: la plupart de ces scrubbers sont "à boucle ouverte", et rejettent ces eaux de lavage en mer.

Alors que seulement quelques dizaines de navires dans le monde en étaient équipés en 2018, leur nombre a bondi à près de 3.700 fin 2020, dont 85% avec scrubbers ouverts, selon l'ONG International Council on Clean Transportation.

"Les armateurs ont trouvé ce moyen pour contourner la législation et continuer à utiliser du combustible lourd en soufre, car moins cher", a dénoncé mardi Guillaume Picard, ex-commandant et chef mécanicien de ferries, devenu militant antipollution de l'association "Climat zéro fossile".

"Par navire, ce sont 2 000 à 3 000 tonnes à l'heure d'eau de mer polluée qui sont rejetées": "Au final, onze navires polluent autant que tout ce que rejette le fleuve du Rhône en une année", a-t-il estimé, lors d'une conférence de presse co-organisée par la mairie de Marseille.

«Personne ne contrôle !»

Extrêmement acides, ces eaux de lavage présentent aussi des concentrations élevées de zinc, cuivre ou nickel. "Contribuant à l'acidification des océans", elles sont "d'une toxicité aiguë pour les organismes aquatiques", a démontré une étude parue en 2020 dans la revue scientifique Environmental Sciences Europe. Des conclusions confirmées la même année par l'Institut suédois de l'Environnement.

"Ces rejets en mer ne sont pas acceptables. Nous avons tous conscience que nous allons droit dans le mur si nous ne changeons pas brutalement nos modèles, responsables du changement climatique", a plaidé Hervé Menchon, adjoint au maire chargé de la biodiversité marine.

Pointée du doigt par les associations écologistes locales pour utiliser de tels scrubbers à boucles ouvertes sur trois de ses navires, la compagnie Corsica Linea s'estime elle en règle. "Tous les rejets en mer sont analysés en permanence par des capteurs en sortie, tout en suivant des limites bien précises imposées par les autorités", a-t-elle répondu à l'AFP.

Certes, la France interdit depuis le 1er janvier 2022 l'utilisation de scrubbers ouverts dans sa bande littorale des 3 milles nautiques (5,5 km) et ses enceintes portuaires. Mais certains navires bénéficient de dérogations, comme Corsica Linea, le temps de s'équiper de scrubbers à boucles fermées.

Ceux-ci permettent de récupérer les eaux sales, qui doivent théoriquement être retraitées à terre. "Mais personne ne contrôle ! Du coup, une fois au large, les navires font ce qu'ils veulent", a ironisé M. Picard.

Les associations écologistes critiquent d'ailleurs le fait que les normes encadrant ces rejets, établies lors de la Convention de Barcelone de 1976, soient aujourd'hui dépassées.

"La solution, simple, existe, même si ce n'est pas la panacée: il suffirait que les navires utilisent du gazole, composé de 0,1% de soufre", selon M. Picard. "Mais c'est trois fois plus cher que le fioul lourd", soupire-t-il.

Si la ville de Marseille veut s'attaquer aux scrubbers, ces derniers pourraient bientôt également être dans le viseur de la justice: ces dispositifs constituent la cible principale de la plainte contre X déposée début mars par des associations et riverains du port de Marseille.


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.