En France, une jeunesse «déter» tentée par l'action plus «offensive»

Des manifestants se rassemblent lors d'une manifestation place de la Concorde à Paris le 17 mars 2023, au lendemain du jour où le gouvernement français a poussé une réforme des retraites en utilisant l'article 49.3 de la constitution. (AFP)
Des manifestants se rassemblent lors d'une manifestation place de la Concorde à Paris le 17 mars 2023, au lendemain du jour où le gouvernement français a poussé une réforme des retraites en utilisant l'article 49.3 de la constitution. (AFP)
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Publié le Samedi 18 mars 2023

En France, une jeunesse «déter» tentée par l'action plus «offensive»

  • Les manifestations spontanées et les actions de blocages attirent depuis jeudi une vague d'opposants, souvent lycéens ou étudiants, qui se qualifie déterminée «à bloquer le pays»
  • Au-delà des propositions de désobéissance civile, ils espèrent - sans trop savoir s'ils peuvent y croire - un «printemps» de révolte, voire pour certains, de révolution

PARIS: "C'est le début d'autre chose!": dans les rues, l'opposition à la réforme des retraites en France a pris depuis jeudi un tournant plus radical, porté par de jeunes militants lassés des cortèges hebdomadaires et prêts à en découdre.

"Depuis hier, on sent quelque chose de différent. Je viens prendre des forces auprès de cette jeunesse en rage", explique vendredi, au deuxième soir de mobilisation antigouvernementale sur la place de la Concorde à Paris, un manifestant de 50 ans, impassible sous la pluie de lacrymogènes.

Autour de Norredine, qui travaille comme gazier, les vagues de jeunes encagoulés affrontent la police à intervalles réguliers sur l'immense place, célèbre pour avoir été l'un des lieux d'exécution pendant la Révolution française. En toile de fond, l'Assemblée nationale, illuminée par les gyrophares, est toute proche mais inaccessible, barricadée par un cordon de véhicules de gendarmerie, tout comme le palais de la présidence, tout proche.

La décision du président français Emmanuel Macron de tenter de faire passer en force la réforme des retraites, via l'usage de l'article 49.3 - qui permet l'adoption sans vote d'une loi sauf en cas de censure du gouvernement - a attisé la colère, les opposants dénonçant un "déni de démocratie".

Norredine attend ainsi que la contestation "monte" d'un cran.

A Paris, jeudi, "au plus fort" de la soirée, 10.000 personnes étaient rassemblées place de la Concorde. Des milliers d'autres sont venues ou revenues le lendemain soir, malgré la pluie, avec un profil plus jeune et une présence accrue de Black Blocs, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Deux soirs de suite, Savannah, étudiante libanaise à Paris, est venue apporter son expertise "des manifestations au pays" pour aider à monter des barricades de fortune.

"Notre violence est la réponse à leur violence", résume la jeune femme de 20 ans. "Des policiers mais aussi du gouvernement qui nous méprise".

Ses yeux sont rouges sous l'effet des gaz lacrymogènes, mais l'étudiante d'1m50, en jean pattes d'éléphant, non masquée, porte et accroche ses morceaux de barrière sous le nez d'une rangée de policiers casqués.

«Bloquer le pays»

 

Les manifestations spontanées et les actions de blocages relayés par des collectifs et syndicats étudiants attirent depuis jeudi une vague d'opposants, souvent lycéens ou étudiants, qui se qualifie - comme le veut le chant consacré en manif - de "déter" (déterminée) "à bloquer le pays".

Dès mercredi à Paris, sous la halle historique de la Bourse du travail, des centaines de militants de gauche de tous âges et tous bords syndicaux s'étaient réunis en "interpro" pour phosphorer, bière ou cigarette à la main, à la suite concrète à donner à leur lutte.

"Chacun prend une poubelle et on la dépose devant l'Élysée", lance un lycéen, mi-applaudi mi-hué. Une femme propose, elle, d'attacher les poubelles dans les rues pour empêcher leur ramassage par les "casseurs de grève": "Achetez des serflex (colliers de serrage, ndlr), c'est pas cher et efficace!".

Au-delà des propositions de désobéissance civile, ils espèrent - sans trop savoir s'ils peuvent y croire - un "printemps" de révolte, voire pour certains, de révolution.

Blocages, "manifestation sauvage", soutien aux piquets de grève, occupation des lycées et des facultés: ces militants veulent plus que les "manifs hebdomadaires" proposées par l'intersyndicale.

"On a eu de belles journées de grèves, mais maintenant ils nous faut un mouvement offensif", lance, sous les applaudissements, Jean, un étudiant refusant également d'être identifié par son nom. "Pour nous l'intersyndicale est morte! C'est le début d'autre chose!"

Jeudi, 310 personnes ont été interpellées en France, dont 258 à Paris lors de manifestations. Vendredi, 61 interpellations ont notamment eu lieu dans la capitale et 36 à Lyon (est), selon des sources officielles.

"L'opposition est légitime, les manifestations sont légitimes, le bordel ou la bordélisation non", a déclaré vendredi le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, sur la radio RTL.

"Si les syndicats veulent rester raisonnables, nous on appelle à être déraisonnables", soulignait de son coté un manifestant parisien, Yann Le Merrere, employé de la Poste.


Metz: un forcené tué par balles, un policier touché à la main

Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
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  • Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier
  • Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard

STRASBOURG: Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet.

Les faits ont commencé dimanche soir dans une rue très passante de la vieille ville de Metz. "Vers 22h00, un individu menace depuis sa fenêtre, avec une arme à canon long, un passant", a rapporté le maire François Grosdidier sur sa page Facebook.

Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier.

Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard.

"Il sortait alors de son studio, tenant dans chaque main un revolver, et faisait feu sur les policiers présents dans le couloir", a-t-il ajouté. "Un policier était blessé à une main, tandis qu'un de ses collègues tirait à trois reprises, touchant l'individu à l'abdomen et au bras".

L'homme de 56 ans a été hospitalisé mais est décédé lundi matin. "Son casier judiciaire porte trace de neuf condamnations", selon M. Bernard.

Le policier blessé a également été hospitalisé.

L'homme détenait "plusieurs armes, de poing et d'épaule, dans son appartement", selon le maire qui a salué l'intervention des forces de l'ordre.


Tourisme en France : entre recherche de soleil, contraintes budgétaires et destinations alternatives

Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
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  • les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget.
  • L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées

RIYAD : Alors que l'été 2025 se profile, les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget. Si 61 % d’entre eux envisagent de prendre quelques jours de congé, selon un sondage OpinionWay pour Liligo, leur comportement de consommation évolue. Pour la première fois en cinq ans, le budget moyen baisse de 74 euros par personne.

L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées comme la Bretagne, la Normandie ou le nord de la France. Cette tendance s’explique notamment par deux étés précédents jugés peu cléments sur le plan météorologique, ce qui dissuade certains vacanciers de s'y rendre à nouveau.

Dans les établissements touristiques du Grand Ouest, les professionnels constatent un recul des séjours d'une semaine, compensé par une légère hausse des courts séjours (2 à 6 nuits). Les réservations de dernière minute restent fréquentes et très dépendantes des prévisions météorologiques du dimanche soir.

Confrontés à une inflation persistante et à des inquiétudes concernant leur pouvoir d’achat, les Français adaptent leurs comportements. Ils réduisent leurs dépenses dans les restaurants, les commerces ou les activités annexes, et sont plus prudents dans la planification de leurs séjours. Les formules « tout compris », jugées plus économiques et prévisibles, rencontrent un succès croissant.

Selon le cabinet Pro tourisme, les prix des hébergements touristiques ont grimpé de 27 % en quatre ans. Dans ce contexte, les territoires proposant des tarifs plus accessibles, comme l’intérieur des terres ou les destinations proches des grandes agglomérations comme l’Eure, la Vienne, l’Ain ou l’Oise, enregistrent une forte progression des recherches, parfois jusqu’à +150 %.

Si les littoraux restent prisés, un rééquilibrage s’opère en faveur des zones rurales et périurbaines. Ces destinations sont non seulement plus abordables, puisque les locations y sont en moyenne 20 à 30 % moins chères que sur la côte, mais elles offrent également un cadre de vie plus agréable.

Ces destinations répondent à une demande croissante de nature, de tranquillité et d’authenticité. La France rurale, longtemps en retrait, bénéficie désormais d’une attractivité renouvelée. Un phénomène accentué par l’essor du télétravail, le besoin de déconnexion et la quête d’expériences plus simples. L’arrière-pays n’est plus perçu comme une alternative de repli, mais comme un véritable choix de qualité.

Sur le plan international, la France reste solidement installée comme première destination mondiale avec 100 millions de touristes étrangers en 2024, devant l’Espagne. Les métropoles touristiques qui accueillent une clientèle étrangère à fort pouvoir d’achat, comme Paris, Cannes, Nice ou les régions viticoles, affichent des perspectives encourageantes.

Les analystes estiment que les Jeux Olympiques 2024 ont amplifié la visibilité de la France sur la scène mondiale, générant un regain d’intérêt pour la capitale et ses alentours. À Paris, la fréquentation touristique devrait rester élevée en 2025 grâce à l’effet post-événementiel.

Entre contraintes économiques, recherche d’ensoleillement et désir de proximité, le tourisme en France est en pleine mutation. Les professionnels s’adaptent à une clientèle plus exigeante, plus mobile et surtout plus attentive à l’équilibre entre plaisir et dépenses. Le paysage touristique français, longtemps polarisé entre le littoral et la montagne, s’enrichit désormais d’une diversité de choix stratégiques, économiques et culturels.


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.