Au tribunal, les manifestants, le feu de poubelle et la relaxe

Des manifestants occupent une rue à côté de la place de la République lors d'une manifestation à Paris le 21 mars 2023. (AFP)
Des manifestants occupent une rue à côté de la place de la République lors d'une manifestation à Paris le 21 mars 2023. (AFP)
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Publié le Mercredi 22 mars 2023

Au tribunal, les manifestants, le feu de poubelle et la relaxe

  • Dimanche soir, des policiers en patrouille sont prévenus par trois passants que «quatre individus», «vêtus de noir et portant des masques chirurgicaux», «sont en train de mettre le feu à une poubelle»
  • Sur les conseils de leur avocat, les trois prévenus ont exercé leur droit au silence en garde à vue

PARIS: Trois manifestants, un feu de poubelle et la relaxe: jugés en comparution immédiate, deux femmes et un homme ayant participé à un rassemblement contre la réforme des retraites ont été relaxés mardi au tribunal de Paris, un dossier "symptomatique" pour la défense.

Il est 19H50 et dans le box sont escortés trois prévenus, 48 heures après leur interpellation dans le quartier des Halles, au coeur de la capitale, lors d'une des manifestations spontanées qui se sont multipliées depuis l'usage de l'article 49-3 par le gouvernement.

Dimanche soir, des policiers en patrouille sont prévenus par trois passants que "quatre individus", "vêtus de noir et portant des masques chirurgicaux", "sont en train de mettre le feu à une poubelle", résume le président du tribunal en lisant le procès-verbal d'interpellation.

Les policiers arrêtent deux jeunes femmes ainsi qu'un homme qui avait "pris la fuite", poursuit le magistrat.

Lors de la fouille, deux fioles de sérum physiologique sont retrouvées sur Margot, 24 ans, graphiste au chômage.

"C'est pour lutter contre le gaz lacrymogène ?" demande le président. "Oui", répond sobrement cette brune en blouson vert foncé.

"Et vous, le cache-cou, c'est pour quoi ?" demande-t-il à Martin, 26 ans, agent immobilier à la haute stature, qui avait aussi sur lui "deux briquets". "Parce qu'il fait 9 degrés, M. Le président", répond ce dernier.

«Précipitation»

Les policiers expliquent que, "dans la précipitation", ils n'ont "pas pu relever l'identité" des personnes qui leur ont signalé le feu, mais ils ont fait "une recherche de voisinage", précise le président, énumérant les commerces contactés - qui étaient soit "fermés", soit "ne répondaient pas", soit n'avaient "rien vu".

Sur les conseils de leur avocat, les trois prévenus ont exercé leur droit au silence en garde à vue.

"Qu'est-ce que vous reconnaissez ?" leur demande le président.

"Dimanche soir, je suis allée à la manifestation avec mon amie Clothilde, d'un coup deux policiers nous ont interpellées très violemment et on n'a a pas compris pourquoi", déclare Margot, qui assure ne pas avoir "vu de feu".

"J'ai pas mis le feu, Monsieur", affirme à son tour Clothilde, 24 ans, frêle habitante de Marseille en service civique, également poursuivie pour "rébellion".

A sa droite dans le box, Martin conteste également. Lui est en outre jugé pour avoir refusé de donner ses empreintes en garde à vue. "C'est une opposition de ma part au fichage systémique", explique-t-il.

"Que pensez-vous des dégradations commises à Paris depuis quelques jours?" leur demande la procureure. Les trois répondent ne "pas avoir d'avis".

"C'est leur droit le plus strict, mais je vais vous donner le mien", lance la représentante du ministère public en entamant ses réquisitions. "Je déplore et regrette que des messages politiques tout à fait légitimes soient brouillés par des casseurs", affirme-t-elle.

Déclarations «surréalistes»

Parlant d'un "procès-verbal d'interpellation très circonstancié et précis", la procureure stigmatise des "faits graves: mettre le feu à des poubelles, alors qu'il y a des commerces, des habitations à côté".

Avant de requérir de 140 à 175 heures de travail d'intérêt général (TIG) ou si les prévenus le refusaient, quatre à cinq mois de sursis probatoire.

"Vous n'êtes pas au service de la répression du mouvement social", lance Me Hannah Rajbenbach, qui cite un communiqué du Syndicat de la magistrature (classé à gauche), demandant la relaxe de Martin pour son refus de "palmage".

"Ce dossier est très symptomatique de ce que nous observons depuis quelques jours", avec "des personnes interpellées très souvent à tort" puis "remises en liberté sans aucune suite judiciaire", plaide Me Raphaël Kempf.

Tançant un dossier "extrêmement flou et insuffisant", des "déclarations ahurissantes" voire "surréalistes" des policiers, il demande la relaxe.

Après une demi-heure de délibéré, à 21H45, les trois prévenus sont relaxés pour le feu de poubelle. Seul Martin est condamné à un mois de prison avec sursis pour avoir refusé de donner ses empreintes.


Un homme tué par balle à Marseille, le 3e en plein jour depuis début octobre

Un homme a été tué mardi par balle dans les quartiers Nord de Marseille, a-t-on appris de sources concordantes, troisième homicide en plein jour dans la deuxième ville de France depuis début octobre. (AFP)
Un homme a été tué mardi par balle dans les quartiers Nord de Marseille, a-t-on appris de sources concordantes, troisième homicide en plein jour dans la deuxième ville de France depuis début octobre. (AFP)
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  • La deuxième ville de France a enterré mardi Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic, abattu jeudi en début d'après-midi devant une pharmacie
  • Les marins pompiers de Marseille sont intervenus vers 14H15 au quartier des Olives pour un homme "blessé par arme à feu"

MARSEILLE: Un homme a été tué mardi par balle dans les quartiers Nord de Marseille, a-t-on appris de sources concordantes, troisième homicide en plein jour dans la deuxième ville de France depuis début octobre.

Interrogé par l'AFP, le parquet a fait état d'un mort, âgé entre 45 et 50 ans, et d'un blessé dans le quartier des Olives (13e arrondissement), sans pouvoir établir à ce stade de l'enquête un lien éventuel avec le trafic de drogue.

Marseille est régulièrement secouée par des "narchomicides" sur fond de trafic de stupéfiants et de guerre des gangs pour le contrôle des points de vente de drogue.

Les marins pompiers de Marseille sont intervenus vers 14H15 au quartier des Olives pour un homme "blessé par arme à feu". Une source policière indiquant ensuite à l'AFP qu'elle avait été "tuée par balle dans le 13e arrondissement".

La deuxième ville de France a enterré mardi Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic, abattu jeudi en début d'après-midi devant une pharmacie. Le 9 octobre, un homme avait été tué par balle en fin de matinée dans un quartier populaire du centre.

Selon un décompte de l'AFP, une quinzaine de personnes ont perdu la vie dans des narchomicides depuis le début de l'année dans les Bouches-du-Rhône.

Une criminalité qui ne cesse de franchir des paliers: si avant 2020/2021 les victimes étaient bien ancrées dans le narcobanditisme, depuis, les cibles sont devenues les petites mains du trafic, parfois mineures et touchées à l'aveugle sur des points de deal, faisant parfois des victimes collatérales.

Avec Mehdi Kessaci, un nouveau cap a été franchi selon les observateurs, ce jeune de 20 ans totalement étranger du trafic de drogue ayant été visé volontairement, peut-être pour intimider son frère Amine engagé dans la lutte contre le narcobanditisme, selon les premiers éléments de l'enquête.


Fleurs blanches et hommages de Marseillais à Mehdi Kessaci pour ses obsèques

Cette capture d'écran réalisée le 14 novembre 2025 à partir d'une vidéo de l'AFP datée du 7 juillet 2024 montre Mehdi Kessaci, frère d'Amine Kessaci, fondateur de l'association Conscience et ancien candidat dans la 3e circonscription des Bouches-du-Rhône pour la coalition de gauche Nouveau Front Populaire (NFP).
Cette capture d'écran réalisée le 14 novembre 2025 à partir d'une vidéo de l'AFP datée du 7 juillet 2024 montre Mehdi Kessaci, frère d'Amine Kessaci, fondateur de l'association Conscience et ancien candidat dans la 3e circonscription des Bouches-du-Rhône pour la coalition de gauche Nouveau Front Populaire (NFP).
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  • Au milieu des gerbes trônent celle des Ecologistes, le parti d'Amine Kessaci, frère de Mehdi, qui selon les premières investigations, pourrait avoir été tué pour toucher et avertir Amine
  • Il y a également celle de Guy Benarroche, sénateur écologiste des Bouches-du-Rhône mais aussi de simples citoyens comme cette retraitée, présente avec un bouquet de roses blanches

MARSEILLE: Les fleurs blanches commençaient à s'accumuler mardi au rond-point où a été abattu jeudi Mehdi Kessaci, en marge de ses obsèques attendues dans l'après-midi à Marseille, dans une ville traumatisée par ce nouveau cap franchi dans les violences liées au narcobanditisme.

Au milieu des gerbes trônent celle des Ecologistes, le parti d'Amine Kessaci, frère de Mehdi, qui selon les premières investigations, pourrait avoir été tué pour toucher et avertir Amine, militant engagé dans la lutte contre le narcobanditisme depuis l'assassinat d'un premier frère, Brahim.

Il y a également celle de Guy Benarroche, sénateur écologiste des Bouches-du-Rhône mais aussi de simples citoyens comme cette retraitée, présente avec un bouquet de roses blanches.

"Je suis venue pour Amine que j'ai bien connu car j'étais maîtresse dans la cité où il habitait avec sa famille. Je l'ai côtoyé ensuite lors de campagnes électorales et je trouve son engagement citoyen formidable", confie à l'AFP Christine Didon.

"Aujourd'hui, on ne peut plus s'en sortir grâce à l'école comme avant. Il y a une dégradation très rapide des conditions de vie, une pauvreté telle qu'il ne reste à certains que le trafic de drogue", ajoute-t-elle.

Mohamed Habib Errabia, 77 ans, est tout de suite descendu de chez lui jeudi quand il a entendu les coups de feu et ce matin il tenait à rendre hommage à ce jeune de 20 ans, victime innocente et totalement étrangère au trafic de drogue, selon les autorités. "On a des enfants, forcément on pense à eux. Qu'est-ce qui peut leur arriver ? On est pas à l'abri d'une balle perdue".

Les obsèques de Mehdi Kessaci se dérouleront mardi après-midi à Marseille sous forte surveillance policière. La famille, qui ne souhaite pas la présence de la presse, a annoncé qu'une marche blanche serait organisée ce week-end.

La police avait identifié des menaces sur Amine Kessaci et ce dernier était placé sous surveillance policière depuis plusieurs semaines. A la rentrée, il a publié un livre "Marseille, essuie tes larmes" (Le bruit du monde), sorte de longue lettre adressée à Brahim, tué avec deux autres jeunes hommes en 2020, dont les assassins présumés seront jugés prochainement.

Mardi matin, une réunion d'urgence à l'Elysée est par ailleurs organisée sur la lutte contre le narcobandistime qui a fait l'objet d'une loi en juin.

"Le narcotrafic est une peste, une lèpre, une venin qui court dans les veines du monde et l'empoisonne", écrit Amine Kessaci dans son livre. "On dit cartel, on dit baron, on dit empire. Moi je dis fosse commune, je dis cimetière, je dis clameur étouffée des mères qui pleurent leurs fils fauchés, des pères brisés par la poudre qui court, des enfants assassinés avant d'avoir su vivre".

 


France: une galerie du Louvre fermée au public en raison d'une «fragilité» de l'édifice

La galerie Campana est située sur la même aile sud du Louvre où un commando de malfaiteurs a réussi à s'introduire le 19 octobre, dérobant huit joyaux de la Couronne d'une valeur estimée à 88 millions d'euros. Les bijoux restent aujourd'hui introuvables. (AFP)
La galerie Campana est située sur la même aile sud du Louvre où un commando de malfaiteurs a réussi à s'introduire le 19 octobre, dérobant huit joyaux de la Couronne d'une valeur estimée à 88 millions d'euros. Les bijoux restent aujourd'hui introuvables. (AFP)
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  • Il s'agit "d'évolutions récentes et imprévisibles", assure le musée le plus visité au monde
  • A l'appui de sa décision, le musée invoque les conclusions d'un rapport d'un bureau d'études techniques qui lui a été remis vendredi

PARIS: Une des galeries du musée du Louvre à Paris sera fermée au public "par mesure de précaution" après qu'un audit a révélé la "particulière fragilité" de certaines poutres d'une des ailes du bâtiment, a annoncé lundi le musée dans un communiqué.

Abritant neuf salles dédiées à la céramique grecque antique, la galerie Campana sera fermée le temps que des "investigations" soient menées "sur la particulière fragilité de certaines poutres portant les planchers du deuxième étage de l'aile sud" du quadrilatère Sully, qui enserre la cour carrée du Louvre.

Il s'agit "d'évolutions récentes et imprévisibles", assure le musée le plus visité au monde. Contacté par l'AFP, un porte-parole de l'établissement n'a pas pu préciser quand cette décision prendrait effet ni pour combien de temps.

A l'appui de sa décision, le musée invoque les conclusions d'un rapport d'un bureau d'études techniques qui lui a été remis vendredi. Et assure avoir "immédiatement lancé une campagne complémentaire d'investigations" afin de déterminer les causes de la fragilité identifiée.

La galerie Campana est située sur la même aile sud du Louvre où un commando de malfaiteurs a réussi à s'introduire le 19 octobre, dérobant huit joyaux de la Couronne d'une valeur estimée à 88 millions d'euros. Les bijoux restent aujourd'hui introuvables.

En janvier 2025, la présidente du Louvre Laurence des Cars, sous pression depuis ce casse spectaculaire, avait alerté le ministère de la Culture de l'état de grande vétusté du musée parisien, évoquant notamment "la multiplication d'avaries dans des espaces parfois très dégradés".

Peu après cette alerte, le président Emmanuel Macron avait annoncé le lancement d'un vaste chantier de rénovation et de modernisation du Louvre, centré notamment sur le quadrilatère Sully. Des travaux initialement estimés à quelque 800 millions d'euros, et revus à la hausse dans un récent rapport de la Cour des comptes qui a évoqué au moins 1,15 milliard d'euros.