En Ukraine, ces cadeaux d'amour et de chagrin sur les tombes de soldats

Une femme et un enfant sont assis parmi les tombes du cimetière militaire de Lychakiv à Lviv, dans l'ouest de l'Ukraine, le 18 mars 2023. (Photo par Yuriy Dyachyshyn / AFP)
Une femme et un enfant sont assis parmi les tombes du cimetière militaire de Lychakiv à Lviv, dans l'ouest de l'Ukraine, le 18 mars 2023. (Photo par Yuriy Dyachyshyn / AFP)
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Publié le Samedi 25 mars 2023

En Ukraine, ces cadeaux d'amour et de chagrin sur les tombes de soldats

  • Le site surnommé Champ de Mars compte environ 350 tombes récentes et de nouvelles obsèques y sont organisées presque tous les jours
  • Aujourd'hui, la marée de drapeaux nationaux bleu et jaune et ceux nationalistes rouge et noir flottent au-dessus des tombes sur lesquels sont posés des bouquets et bougies

LVIV, Ukraine : Ici, pas de silence solennel, typique des sites d'enterrement civils. Le cimetière militaire de Lviv est animé et très décoré. On y trouve des peluches, cigarettes, gobelets de café... Petits signes d'amour et de chagrin.

Visage ridé, Valeriï Pouchko est assis devant la tombe de son fils Viktor, une cigarette allumée dans chaque main. Une pour lui, l'autre pour son enfant disparu dont le portrait est accroché sur une croix plantée dans le sol.

«Je fume avec mon fils. Avant, on faisait toujours des pauses clopes ensemble», confie cet homme aux cheveux poivre et sel. «C'est une mauvaise habitude mais cela me soulage. Je lui parle, je réfléchis», poursuit-il.

«Beaucoup de gens le font. Des femmes aussi fument avec leurs maris ou leurs fils» enterrés dans ce cimetière réservé aux militaires tués dans la guerre avec la Russie, ajoute M. Pouchko.

Situé dans un quartier au sud-est de Lviv, grande ville de l'ouest de l'Ukraine à quelque 1.000 kilomètres de la ligne de front mais sporadiquement touchée par des frappes russes, le cimetière militaire historique de Lytchakiv abritait des milliers de tombes datant de la Première et la Seconde guerres mondiales.

- «Pertes irréparables» -

Peu après le début de l'invasion russe en février 2022, les autorités municipales ont commencé à y enterrer des soldats tués sur le front. Le site surnommé Champ de Mars compte environ 350 tombes récentes et de nouvelles obsèques y sont organisées presque tous les jours.

L'an dernier, le terrain utilisé initialement pour les enterrements militaires «a été vite saturé», a indiqué Oleg Pidpysetsky, un responsable de la mairie en charge du dossier.

Au début, «certains croyaient que cela allait finir dans un mois ou deux ou six. Mais la guerre malheureusement ne faisait que s'étendre», a-t-il ajouté.

Aujourd'hui, la marée de drapeaux nationaux bleu et jaune et ceux nationalistes rouge et noir flottent au-dessus des tombes sur lesquels sont posés des bouquets et bougies.

On y trouve également des objets plus insolites: dessins d'enfants, une bouteille de bière, un verre de whisky, un peluche en forme d'avion, des vinyles de rock, une balle de golf...

«Ces gens ont donné leurs vies pour nous, ils ne les ont pas vécu jusqu'au bout. Voilà pourquoi leurs proches tentent de leur donner ce qu'ils n'ont pas reçu pleinement de leur vivant», estime Oleg, 55 ans, qui visite un ami portant le même nom, tué à 45 ans.

«Malheureusement, on ne peut rien changer. Des milliers de Russkofs ne remplaceront pas mon unique Oleg. Ce sont des pertes irréparables», dit-il d'une voix cassée.

L'Ukraine ne dévoile pas le nombre de ses soldats tués pendant l'invasion mais les Occidentaux estiment à plus de 100.000 le nombre de militaires morts et blessés.

- «Ce qu'il aimait» -

Pour Olga, assise devant le tombe de son beau-frère, ces petits cadeaux sont «tout ce qui reste aux proches, la seule liaison» avec les disparus.

«C'est le seul endroit où ils peuvent être ensemble avec leurs héros. L'unique moyen de sentir leur présence», ajoute-elle, larmes aux yeux.

Veste noire et petite barbe, Viatcheslav Sabelnikov, ex-soldat d'infanterie devenu invalide après une grave blessure, a plusieurs camarades qui reposent sur ce site.

Il pose une bougie sur devant le portrait d'un ami dont c'est l'anniversaire «pour qu'on voit que nous nous souvenons de ces gens et de leurs exploit» alors qu'une nouvelle cérémonie funèbre se déroule à proximité.

Anna Mikheïeva, une travailleuse sociale de 44 ans, est à la tombe de son fils Mykhaïlo. Il servait dans la 80e brigade parachutiste et a été tué à l'an dernier à l'âge de 25 ans.

Elle raconte lui apporter souvent des choses «qu'il aimait»: coca-cola, friandises sucrés, cigarettes.... «Si je viens le matin, j'achète du café pour moi et pour lui», ajoute cette brune rondelette.

Pour Mme Mikheïeva, ce cimetière est «différent» des sites d'enterrements civils où la plupart des tombes appartiennes à des personnes âgées «qu'ils ne faut pas déranger».

«Ici, je suis parmi les miens. Il n'y a que des jeunes, ils sont tous pour moi mes fils ou mes frères. Je les reconnais déjà par leur photos ou par leur noms», raconte-elle. «Quand j'arrive je les salue toujours: +bonjour, les gars+. Et je les remercie toujours, toujours.»


Gaza: les Etats-Unis font pression pour l'adoption de leur résolution à l'ONU lundi

Une Palestinienne marche sous une pluie battante devant des bâtiments détruits par les frappes israéliennes dans le quartier de Sheikh Radwan, à Gaza. (AP)
Une Palestinienne marche sous une pluie battante devant des bâtiments détruits par les frappes israéliennes dans le quartier de Sheikh Radwan, à Gaza. (AP)
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  • Les États-Unis poussent pour l’adoption par le Conseil de sécurité de leur résolution soutenant le plan de paix de Donald Trump pour Gaza
  • Malgré des réticences de certains membres et un texte concurrent présenté par la Russie, Washington met en avant un large soutien arabe et occidental et avertit qu’un rejet ouvrirait la voie à la poursuite du conflit

NATIONS UNIES: Les Etats-Unis ont mis la pression vendredi pour convaincre de la nécessité d'adopter leur projet de résolution endossant le plan de paix de Donald Trump pour Gaza, qui sera mis au vote du Conseil de sécurité de l'ONU lundi.

La semaine dernière, les Américains ont officiellement entamé des négociations au sein du Conseil sur un projet de texte qui "endosse" le plan du président américain ayant permis la mise en place, le 10 octobre, d'un cessez-le-feu fragile dans le territoire palestinien ravagé par deux années de guerre provoquée par une attaque sanglante du mouvement islamiste Hamas. Le texte autorise notamment le déploiement d'une "force de stabilisation internationale" (ISF).

Face aux réserves de certains membres et à la proposition d'un texte concurrent de la Russie, ils ont mis en garde vendredi contre les risques d'un rejet de leur texte et affiché le soutien de plusieurs pays arabes et musulmans.

"Les Etats-Unis, le Qatar, l'Egypte, les Emirats arabes unis, le royaume d'Arabie saoudite, l'Indonésie, le Pakistan, la Jordanie et la Turquie expriment leur soutien conjoint" au projet de résolution américaine autorisant notamment une force internationale dans le territoire palestinien, et espèrent son adoption "rapide", disent-ils dans une déclaration commune.

Ce plan offre "un chemin viable vers la paix et la stabilité, non seulement pour les Israéliens et les Palestiniens, mais pour toute la région", ont-ils insisté.

Le Royaume-Uni a également apporté vendredi son soutien public au texte américain.

Et le Conseil se prononcera lundi à 17H00 (22H00 GMT) sur le texte, ont indiqué vendredi soir plusieurs sources diplomatiques à l'AFP.

Le projet de résolution américain, plusieurs fois modifié, prévoit de donner un mandat jusqu'à fin décembre 2027 à un "comité de la paix" censé être présidé par Donald Trump, organe de "gouvernance de transition" pour administrer Gaza.

Il "autorise" également le déploiement de l'ISF qui pourra utiliser "toutes les mesures nécessaires pour mener son mandat dans le respect du droit international": appui à la sécurisation des frontières en coopération notamment avec Israël et l'Egypte, démilitarisation de Gaza, désarmement "des groupes armés non étatiques", protection des civils, formation d'une police palestinienne...

- Conflit perpétuel" -

La décision de programmer le vote intervient alors que la Russie a fait circuler aux membres du Conseil un projet de résolution concurrente qui n'autorise ni la création d'un "comité de la paix", ni le déploiement immédiat d'une force internationale à Gaza, selon le texte vu vendredi par l'AFP.

Ce texte demande simplement au secrétaire général de l'ONU "d'identifier des options pour appliquer les dispositions" du plan de paix et présenter "rapidement" des "options de déploiement d'une force" à Gaza.

"Nous voulons souligner que notre document ne contredit pas l'initiative américaine", a assuré vendredi dans un communiqué la mission russe à l'ONU.

La "logique" du texte russe est de permettre au Conseil "de définir des modalités claires de déploiement d'un contingent de maintien de la paix et d'établir une administration à Gaza tout en s'assurant que ces modalités sont en accord" avec les normes internationales, a-t-elle ajouté.

Alors que des échanges publics de ce type lors de négociations du Conseil sont plutôt rares, l'ambassadeur américain à l'ONU Mike Waltz a également publié un texte vendredi dans le Washington Post.

"Tout refus de soutenir cette résolution (le texte américain, ndlr) est un vote en faveur de la poursuite du règne des terroristes du Hamas ou en faveur de la reprise de la guerre avec Israël, condamnant la région et sa population à un conflit perpétuel", a-t-il déclaré.

La guerre a été déclenchée par l'attaque du 7 octobre 2023 menée par le Hamas en Israël, qui a entraîné côté israélien la mort de 1.221 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l'AFP à partir de chiffres officiels.

Plus de 69.185 Palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza par la campagne militaire israélienne de représailles, essentiellement des civils, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas et dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU.


Trump a écrit au président israélien pour lui demander de gracier Netanyahu

Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
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  • "Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël
  • "Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu

JERUSALEM: Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence.

M. Herzog a reçu "ce matin" une lettre de Donald Trump, "l'invitant à envisager d'accorder une grâce" à M. Netanyahu, détaille un communiqué du bureau présidentiel, qui précise que "toute personne souhaitant obtenir une grâce présidentielle doit présenter une demande officielle".

M. Netanyahu est poursuivi dans son pays pour corruption et est régulièrement entendu dans le cadre d'au moins trois procédures judiciaires, dans lesquels aucun jugement n'a encore été rendu.

"Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël, "sa contribution considérable au retour des otages, à la refonte de la situation au Moyen-Orient et à Gaza en particulier, et à la garantie de la sécurité de l'Etat d'Israël", précise le communiqué.

Aussitôt plusieurs personnalités politiques israéliennes ont réagi.

"Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu.

Une députée également d'extrême-droite mais dans l'opposition, Yulia Malinovsky, du parti Israel Beitenou ("Israël est notre maison" en hébreu), a de son côté suggéré que le président américain faisait cette demande dans le cadre d'un accord avec M. Netanyahu sur des sujets relatifs au cessez-le-feu dans la bande de Gaza.

Quant au dirigeant de l'opposition, Yaïr Lapid, du parti centriste Yesh Atid ("il y a un futur", en hébreu), il a taclé M. Netanyahu en écrivan sur X: "rappel: la loi israélienne stipule que la première condition pour obtenir une grâce est l'aveu de culpabilité et l'expression de remords pour les actes commis".

Lors d'un discours au Parlement israélien le 13 octobre, M. Trump avait déjà suggéré qu'une grâce lui soit accordée.

"J'ai une idée. Monsieur le président (Isaac Herzog), pourquoi ne pas lui accorder une grâce? Ce passage n'était pas prévu dans le discours (...) Mais j'aime bien ce monsieur", avait dit le président américain dans son allocution, mettant en avant qu'il a été "l'un des plus grands" dirigeants "en temps de guerre".

 


Famine: l'ONU alerte sur «16 zones critiques» où la situation s'aggrave

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.  L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".  Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations. L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante". Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
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  • Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue
  • "Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM

ROME: Des millions de personnes supplémentaires dans le monde pourraient être confrontées à la famine ou au risque de famine, ont averti mercredi les deux organes de l'ONU dédiés à l'alimentation et à l'agriculture, dans un contexte tendu par la limitation des financements.

Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue.

"Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM, tous deux basés à Rome, dans un communiqué commun.

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.

L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".

Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh.

"Nous sommes au bord d'une catastrophe alimentaire totalement évitable qui menace de provoquer une famine généralisée dans de nombreux pays", a mis en garde Cindy McCain, directrice générale du PAM, citée dans le communiqué, ajoutant que "ne pas agir maintenant ne fera qu'aggraver l'instabilité".

Le financement de l'aide humanitaire est "dangereusement insuffisant", alerte également le rapport, précisant que sur les 29 milliards de dollars nécessaires pour venir en aide aux populations vulnérables, seuls 10,5 milliards ont été reçus, précipitant notamment l'aide alimentaire aux réfugiés "au bord de la rupture".

Le PAM indique avoir réduit son assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées en raison des coupes budgétaires et suspendu les programmes d'alimentation scolaire dans certains pays.

La FAO prévient de son côté que les efforts pour protéger les moyens de subsistance agricoles sont menacés et alerte sur la nécessité d'un financement urgent pour les semences et les services de santé animale.

"La prévention de la famine n’est pas seulement un devoir moral – c’est un investissement judicieux pour la paix et la stabilité à long terme", a rappelé le directeur général de la FAO, Qu Dongyu.