Un camp insalubre au Soudan ou le Tigré en guerre, le cruel dilemme des réfugiés

Une réfugiée éthiopienne porte son enfant sur le dos alors qu'elle marche au camp d'Um Raquba, dans la province de Gedaref, à l'est du Soudan. (ASHRAF SHAZLY / AFP)
Une réfugiée éthiopienne porte son enfant sur le dos alors qu'elle marche au camp d'Um Raquba, dans la province de Gedaref, à l'est du Soudan. (ASHRAF SHAZLY / AFP)
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Publié le Lundi 30 novembre 2020

Un camp insalubre au Soudan ou le Tigré en guerre, le cruel dilemme des réfugiés

  • Les Ethiopiens ayant fui le conflit au Tigré sont confrontés à un cruel dilemme: endurer des conditions difficiles dans un camp de réfugiés ou prendre le risque de rentrer dans leur région en guerre
  • Des agriculteurs ont été contraints d'abandonner précipitamment leurs champs alors que le sésame et le sorgho n'étaient pas encore récoltés

GEDAREF : Les Ethiopiens ayant fui le conflit au Tigré sont confrontés à un cruel dilemme: endurer des conditions difficiles dans un camp de réfugiés ou prendre le risque de rentrer dans leur région en guerre.

Plus de 45 000 personnes ont fui du Tigré vers le Soudan depuis l'offensive lancée le 4 novembre par le Premier ministre Abiy Ahmed contre le gouvernement dissident de cette région du nord de l'Ethiopie, pour y placer des institutions «légitimes». M. Ahmed s'est engagé à protéger les civils et a maintes fois appelé au retour des réfugiés. 

En fuyant, des familles ont été séparées. Des agriculteurs ont été contraints d'abandonner précipitamment leurs champs alors que le sésame et le sorgho n'étaient pas encore récoltés.

Ils ont trouvé refuge au Soudan voisin dans des camps insalubres ayant un accès difficile à l'eau et à la nourriture, et des installations sanitaires insuffisantes.

Beaucoup espèrent un retour à la normale bientôt au Tigré, pour reprendre leur vie d'avant.

«J'adore l'Ethiopie. J'y ai laissé ma mère âgée et ma ferme. Si la guerre cesse, je reviendrai immédiatement», déclare à l'AFP Bergha Mongosto, au centre de transit «Village 8», près de la frontière.

Drajo Germaya, hébergé par une famille soudanaise dans la ville frontalière de Hamdayit, est déterminé à rentrer quelle que soit l'issue des combats: «J'ai une ferme à Mai-Kadra (au Tigré, NDLR) et je ne veux pas vivre dans un camp de réfugiés», déclare-t-il. «Quand je rentrerai en Ethiopie, (...) ce sera la vie ou la mort là-bas».

Mais certains, se disant marginalisés en Ethiopie, affirment n'avoir d'autre choix qu'une vie ailleurs.

«C'est très difficile ici mais je ne retournerai jamais au Tigré. Rentrer n'est pas une option», confie Dagaf Abraha, de l'ethnie tigréenne, après son transfert au camp de réfugiés d'Oum Raquba, à environ 80 kilomètres de la frontière.

«Le gouvernement d'Abiy Ahmed ne veut pas de l'ethnie tigréenne en Ethiopie», dit-il.

Espoir de revenir 

M. Ahmed, prix Nobel de la paix en 2019, a déclaré samedi que les opérations militaires étaient «terminées» après la prise de la capitale régionale Mekele. Il a insisté sur la priorité d'un «retour à la normale» pour les habitants du Tigré, notamment «faire revenir ceux qui ont fui».

Difficile de savoir ce qu'il se passe sur le terrain car les communications avec la région rebelle sont coupées depuis le début de l'offensive.

Selon des responsables de l'ONU, de très nombreuses personnes préfèrent rester près de la frontière avec l'espoir de rentrer rapidement chez elles.

«80% des réfugiés sont des agriculteurs qui n'ont pas achevé leurs récoltes. Ils veulent y retourner pour le faire», explique à l'AFP Po Mayro du Haut commissariat aux Réfugiés (HCR) au centre de transit de Hamdayit.

Non seulement «ils ont abandonné leurs champs avant qu'ils ne soient moissonnés» mais ils ont aussi «laissé une partie de leurs familles et de leurs biens», a relevé samedi Filippo Grandi, Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés.

Le Soudan, l'un des pays les plus pauvres au monde, peine déjà face à cet afflux soudain.

Cette crise est «au-dessus des capacités de l'Etat» frontalier de Gedaref, indiquait la semaine dernière à l'AFP Soliman Ali, son gouverneur.

«Le gouvernement doit changer» 

M. Grandi a profité de sa visite à Oum Raquba pour lancer un appel aux donateurs: le Soudan a besoin de 150 millions de dollars pour faire face au flot de réfugiés.

Les conditions de vie et sanitaires sont difficiles. De nombreux cas de dysenterie, de tuberculose, de paludisme et de VIH ont été signalés, rapportent des médecins de l'ONG Mercy Corps, craignant que le surpeuplement n'aggrave la situation.

Aucun cas de coronavirus n'a été signalé à ce stade parmi les réfugiés, mais le risque d'une propagation rapide aux villages voisins préoccupe les esprits.

Malgré ces conditions difficiles, certains préfèrent la vie de réfugié à celle de citoyen sous le gouvernement d'Abiy Ahmed.

«Je n'y retournerai pas même si la situation se stabilisait. Je veux commencer à travailler ici», insiste Tekhlay Manout, au centre de transit «Village 8».

A Oum Raquba, Gabrahi Wadgeday rejette aussi tout retour: «Pourquoi y retournerais-je? Pour mourir? Je ne veux pas mourir», dit-il.

Burhan Youssef conditionne le sien à un changement de régime à Addis Abeba. «Il faut changer le gouvernement d'Abiy Ahmed et, dans ce cas, je rentrerai. Sinon je reste ici», dit cet homme de 77 ans.


Israël reprend ses attaques contre les bastions du Hezbollah au sud et au nord du fleuve Litani

L'armée israélienne a demandé aux habitants de plusieurs régions du Sud-Liban d'évacuer les lieux avant des frappes aériennes imminentes sur des cibles du Hezbollah. (Dossier)
L'armée israélienne a demandé aux habitants de plusieurs régions du Sud-Liban d'évacuer les lieux avant des frappes aériennes imminentes sur des cibles du Hezbollah. (Dossier)
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  • Nawaf Salam : « Comment est-il possible qu’Israël continue à pratiquer l’intimidation et les attaques ? »
  • Le Commandement de l’armée libanaise affirme avoir enregistré « plus de 4 500 violations de la souveraineté libanaise par voie terrestre, aérienne et maritime depuis l’entrée en vigueur de l’accord de cessation des hostilités »

BEYROUTH : L’armée israélienne a lancé jeudi soir une série de frappes aériennes visant des zones situées au sud et au nord du fleuve Litani, après avoir émis des avertissements urgents demandant aux habitants de s’éloigner de six sites désignés.

Cette tactique rappelle celle employée lors de la guerre israélienne contre le Hezbollah commencée en octobre 2023, et qui s’est conclue par un accord de cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre 2024.

Les frappes ont ciblé les environs de la ville de Dibbin ainsi que trois localités à Mays Al-Jabal. Des rapports initiaux indiquent qu’un ressortissant syrien aurait été blessé. Une maison à Kfar Tibnit a également été visée.

Une seconde vague de frappes a touché la région du district de Tyr, notamment Burj Qalāya et Al-Shahabīya.

« Le timing de ces attaques est significatif, car il coïncide avec les préparatifs du Hezbollah pour commémorer le premier anniversaire des assassinats de ses deux secrétaires généraux, Hassan Nasrallah et Hashem Safieddine », a déclaré une source sécuritaire libanaise au Arab News. « C’est une manière pour Israël de rappeler au parti qu’il reste une cible. »

La source s’attend à une intensification des attaques israéliennes à l’approche du 27 septembre, date marquant un an depuis la mort de Nasrallah.

Le Premier ministre Nawaf Salam a été informé des menaces israéliennes, puis des attaques, lors d’une session du Cabinet. Il a déclaré : « La position du gouvernement libanais reste l’engagement envers la cessation des hostilités et la participation aux réunions du mécanisme. »

Il a poursuivi : « La question légitime aujourd’hui est : Où est l’engagement d’Israël envers ces mécanismes ?
Comment est-il possible de continuer à pratiquer l’intimidation et les attaques alors que ces réunions sont censées garantir la mise en œuvre complète de la Résolution 1701 et la cessation des hostilités ? »

Le Cabinet a appelé la communauté internationale — en particulier les signataires de l’accord de cessation des hostilités — à exercer une pression maximale sur Israël pour qu’il cesse immédiatement ses attaques et reprenne les négociations diplomatiques. En vertu des termes de l’accord et du mécanisme de surveillance, Israël s’était engagé à plusieurs obligations, dont le retrait des territoires libanais occupés, la fin des attaques, et la libération des prisonniers.

L’armée israélienne a confirmé les frappes au Liban dans un communiqué, affirmant avoir visé « des cibles militaires appartenant au Hezbollah ».

Le porte-parole de l’armée israélienne, Avichay Adraee, a publié une vidéo sur les réseaux sociaux affirmant que ces frappes étaient « en réponse aux tentatives interdites du Hezbollah de reconstruire ses activités dans la région ».

Avant les frappes, Adraee s’est adressé aux habitants des zones ciblées : « Vous vous trouvez dans des bâtiments utilisés par le groupe terroriste Hezbollah. Pour votre propre sécurité, vous devez quitter immédiatement ces bâtiments ainsi que ceux qui les entourent et vous éloigner d’au moins 500 mètres. Rester sur place vous expose à un danger mortel. »

La route de Kfar Tibnit-Nabatiyeh Al-Fawqa a été fortement embouteillée en direction de Nabatiyeh et des villes voisines, en raison du déplacement de résidents menacés. L’accès à Kfar Tibnit a été fermé pour des raisons de sécurité publique.

L’armée israélienne a également ciblé la région de Baalbek dans la nuit de mercredi, tuant Hussein Saifo Sharif et blessant plusieurs autres personnes. L’armée israélienne affirme que Sharif était « un important trafiquant d’armes opérant depuis le Liban et fournissant des cellules en Syrie planifiant des attaques contre Israël ». Elle ajoute : « Ses activités constituent une violation des accords entre Israël et le Liban. »

Le Commandement de l’armée libanaise affirme avoir enregistré « plus de 4 500 violations de la souveraineté libanaise par voie terrestre, aérienne et maritime depuis l’entrée en vigueur de l’accord… y compris des lancers de cocktails Molotov et le bombardement de maisons. »

Il a précisé que les attaques de jeudi « sur les villages du sud et les civils dans des zones peuplées ont fait des morts et des blessés », et a mis en garde : « Ces attaques et violations entravent le déploiement de l’armée dans le sud, et leur poursuite compromettra la mise en œuvre de son plan, à partir de la zone située au sud du Litani. »

Il a ajouté que « le Commandement de l’armée surveille ces violations en coordination avec le Comité de surveillance de la cessation des hostilités et les forces de la FINUL ».

Le commandement a également révélé qu’au cours des « opérations de surveillance technique dans les régions du sud, une unité militaire spécialisée a découvert et démantelé un dispositif d’espionnage camouflé installé par l’ennemi israélien dans la zone de Labbouné-Tyr ».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Liban: deux morts dans une frappe israélienne à Baalbeck 

Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien. (AFP)
Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien. (AFP)
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  • L'agence nationale d'information ANI a rapporté que la frappe avait été menée par un "drone israélien" dans la ville millénaire qui abrite un ensemble de temples romains classés au patrimoine mondial de l'Unesco
  • Ni ANI ni le ministère n'ont fourni d'autres précisions sur ce raid ou sur l'identité des victimes

BEYROUTH: Au moins deux personnes ont été tuées mercredi dans une frappe israélienne contre une voiture dans la ville de Baalbeck, dans l'est du Liban, a indiqué le ministère libanais de la Santé.

L'agence nationale d'information ANI a rapporté que la frappe avait été menée par un "drone israélien" dans la ville millénaire qui abrite un ensemble de temples romains classés au patrimoine mondial de l'Unesco.

Ni ANI ni le ministère n'ont fourni d'autres précisions sur ce raid ou sur l'identité des victimes.

Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien.

Sous pression américaine et craignant une intensification des frappes israéliennes, le gouvernement libanais a ordonné le mois dernier à l'armée d'élaborer un plan visant à désarmer le Hezbollah, sorti très affaibli par la guerre.

Selon Beyrouth, l'armée libanaise doit achever ce désarmement d'ici trois mois en ce qui concerne le sud du pays, proche de la frontière avec Israël.

 


Attaques israéliennes à Doha: le Qatar s'entretient avec la présidente de la CPI

L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
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  • Le Qatar explore des recours légaux contre Israël après une frappe à Doha ayant tué plusieurs membres du Hamas et un agent de sécurité qatari
  • Bien que simple observateur à la CPI, Doha intensifie ses démarches diplomatiques et judiciaires pour demander des comptes à Israël

DOHA: Un haut représentant du Qatar a rencontré mercredi la présidente de la Cour pénale internationale (CPI) alors que Doha cherche à engager des poursuites contre Israël après des frappes sans précédent sur son territoire, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères qatari.

Mohammed Al-Khulaifi, qui a été chargé d'entreprendre d'éventuelles démarches légales après l'attaque israélienne, s'est entretenu avec la juge Tomoko Akane à La Haye, a indiqué le ministère.

Le pays du Golfe explore "toutes les voies juridiques et diplomatiques disponibles pour s'assurer que les responsables de l'attaque israélienne contre le Qatar rendent des comptes", a précisé jeudi auprès de l'AFP un responsable qatari, s'exprimant sous couvert d'anonymat en raison de la sensibilité des discussions.

Le Qatar, en tant qu'État observateur à la CPI, ne peut pas saisir directement la cour.

La frappe meurtrière menée la semaine dernière à Doha, visant des dirigeants du mouvement islamiste palestinien Hamas, a déclenché une vague de critiques à l'international, les Nations unies condamnant une "violation choquante du droit international". Elle a aussi valu à Israël une rare réprobation du président américain Donald Trump.

Israël et le Qatar, pays médiateur dans les négociations en vue d'une trêve à Gaza, sont tous deux alliés des États-Unis.

Le Hamas a affirmé que ses principaux dirigeants politiques, installés au Qatar avec l'aval de Washington depuis 2012, avaient survécu à l'attaque qui a tué cinq de ses membres, ainsi qu'un membre des forces de sécurité qataries.

À l'issue d'un sommet extraordinaire lundi à Doha, la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique ont appelé "tous les Etats (...) à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël et à engager des poursuites à son encontre".

En 2024, la CPI a émis des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, pour crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Gaza.

L'offensive israélienne, qui a fait plus de 65.000 morts dans le territoire palestinien selon les chiffres du Hamas, fiables selon l'ONU, a été déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste le 7 octobre 2023 sur le sol israélien.

La CPI a également émis des mandats d'arrêt contre l'ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant et le commandant militaire du Hamas Mohammed Deif, tué depuis par Israël.