Accord Iran-Arabie saoudite: la Chine émerge comme un «faiseur de paix» mondial, estime un analyste saoudien

L’analyste saoudien Salman al-Ansari a déclaré que le Moyen-Orient assistait à un «tsunami de paix». (Photo, AN)
L’analyste saoudien Salman al-Ansari a déclaré que le Moyen-Orient assistait à un «tsunami de paix». (Photo, AN)
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Publié le Vendredi 07 avril 2023

Accord Iran-Arabie saoudite: la Chine émerge comme un «faiseur de paix» mondial, estime un analyste saoudien

  • Pékin donne l'exemple de ce à quoi devrait ressembler une superpuissance mondiale, a affirmé le chercheur Salman al-Ansari à Arab News
  • La région assiste à un «tsunami de paix» dirigé par l'Arabie saoudite, le Royaume se considérant comme un «acteur mondial de stabilité», a-t-il ajouté

RIYAD: L’analyste saoudien Salman al-Ansari a déclaré que le Moyen-Orient assistait à un «tsunami de paix» et que le Royaume «menait actuellement une guerre contre la guerre» en rétablissant ses relations diplomatiques avec l'Iran et la Turquie.

Lors d'une interview avec Arab News vendredi, Al-Ansari a cité la phrase du théoricien politique irakien, le Dr Omar Abdelsattar, qui avait affirmé que «l'Arabie saoudite mène une guerre contre la guerre».

Al-Ansari a également répondu à des questions concernant le nouveau rôle de la Chine dans le Golfe et la manière dont le vide traditionnellement rempli par la présence américaine était exploité par d'autres puissances mondiales.

Ces observations font suite aux discussions qui ont eu lieu sous le patronage du président chinois, Xi Jinping, à Pékin, l'Iran et l'Arabie saoudite ayant annoncé le succès des pourparlers le 10 mars. Ce dialogue a abouti à un accord visant à rétablir les relations diplomatiques et rouvrir les ambassades dans les deux mois à venir.

«La Chine est la seule et unique nation à avoir une influence importante sur l'Iran, notamment car les Chinois ont été la seule source d’oxygène pour le régime iranien sanctionné à l'échelle mondiale», a indiqué Al-Ansari.

Le régime iranien n'a qu'un seul choix, a déclaré le chercheur: «changer de cap et agir comme un voisin normal et non comme un pays révolutionnaire, ou être critiqué et abandonné par ses amis chinois.»

Historiquement, les relations de la Chine avec le Moyen-Orient ont été centrées sur le commerce, l'économie et les investissements.

Ces dernières années, la Chine a montré son intérêt croissant pour l'expansion de ses relations politiques dans la région, et le renforcement de son programme diplomatique pour devenir à terme un «artisan de la paix mondiale», comme l'a expliqué Al-Ansari.

«Il est clair que la Chine cherche à se présenter comme un artisan de la paix mondiale et donner l'exemple de ce à quoi devrait ressembler une superpuissance rationnelle. Dans l'ensemble, je pense que c'est une triple victoire… pour les trois parties: l'Arabie saoudite, l'Iran et la Chine», a-t-il assuré. 

La Chine s’est largement investie dans les relations au Moyen-Orient, tandis que les États-Unis se sont concentrés sur la Chine et sont restés passifs dans leur approche pour faciliter les accords de paix au Moyen-Orient.

«Je ne pense pas que les États-Unis se sont désengagés du Moyen-Orient. Mais peut-être qu'ils ne se sont pas engagés avec habileté et pragmatisme», a affirmé Al-Ansari. «Il ne fait aucun doute que l'administration américaine a commis nombre d’erreurs notables sur sa politique au Moyen-Orient depuis 2003», a-t-il ajouté, faisant référence à l'invasion de l'Irak, à la doctrine Obama et aux récents incidents de l'administration Biden.

«Mais si l’on met tout cela de côté, les États-Unis étaient, sont et resteront toujours le plus grand partenaire stratégique du Royaume. Nous ne pouvons tout simplement pas ignorer ces relations historiques, simplement à cause d’erreurs de calcul de certains responsables américains.»

Lors du sommet de Djeddah sur la sécurité et le développement, organisé par l'Arabie saoudite le 16 juillet 2022, Joe Biden a réitéré que les États-Unis allaient rester un partenaire actif et engagé au Moyen-Orient. «Nous n'allons pas nous retirer et laisser un vide que la Chine, la Russie ou l'Iran combleront. Nous chercherons à tirer parti de ce moment avec des dirigeants américain actifs», avait-il déclaré. 

Depuis le discours du président américain lors de ce sommet, la Chine a négocié la reprise des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et l'Iran et a organisé plusieurs réunions avec le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, et son homologue iranien, Hossein Amir-Abdollahian. Celles-ci ont conduit à un accord tripartite entre le Royaume, la Chine et l'Iran, visant à rétablir les relations diplomatiques.

Al-Ansari a affirmé qu'alors que le Royaume se positionnait comme un «acteur mondial de stabilité», le rôle qu'il a adopté «pourrait ne pas trouver un écho auprès des États-Unis pour le moment. Je pense que seul le temps aidera à normaliser cette nouvelle réalité.»

Toujours grâce à un accord négocié par la Chine, les derniers mois ont été marqués par une tendance à la reprise des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et la Syrie. Comme l'a rapporté Ekhbariya TV le 23 mars 2022, l'Arabie saoudite et la Syrie sont en pourparlers pour reprendre les services consulaires entre les deux pays.

Al-Ansari a ajouté que la Chine considérait le Moyen-Orient comme l'une des régions les plus importantes du monde pour plusieurs raisons, notamment parce que «40% des importations énergétiques de la Chine proviennent de la région, soit du Moyen-Orient».

Par ailleurs, l'initiative «la Ceinture et la Route», une stratégie de développement des infrastructures menée par la Chine, passera par l'Arabie saoudite et l'Iran.

Enfin, la troisième raison, a soutenu Al-Ansari, est l'ambition de la Chine d'émerger sur la scène mondiale comme force du bien.

Le rôle actif de la Chine va-t-il s'étendre pour tenter de résoudre d'autres problèmes au Moyen-Orient, comme le conflit israélo-palestinien qui s'est encore aggravé ces dernières semaines?

«La Chine continuera à travailler dur pour promouvoir un règlement rapide et approprié de la question palestinienne», a déclaré vendredi le ministère des Affaires étrangères, citant l'envoyé spécial de la Chine pour les affaires du Moyen-Orient.

«La Chine est profondément préoccupée par le conflit exacerbé d’Israël avec les Palestiniens et le Liban, et appelle à un maximum de calme et de retenue de la part de toutes les parties, en particulier Israël», a affirmé l'envoyé spécial du gouvernement chinois pour le Moyen-Orient, Zhai Jun, lors d'une rencontre avec des diplomates du Moyen-Orient à Pékin.

Interrogé par Arab News sur les risques que la récente escalade retarde un éventuel accord de normalisation saoudo-israélien, Al-Ansari a précisé que la balle était maintenant dans le camp israélien qui devrait résoudre ses problèmes avec les Palestiniens.

«Y aura-t-il bientôt la paix entre l'Arabie saoudite et Israël? Je l'espère personnellement, mais je crois en même temps que la balle est en ce moment dans le camp israélien qui devrait saisir cet élan de paix dans la région. Indéniablement», a conclu Al-Ansari.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Liban: quatre morts dans un raid israélien, riposte du Hezbollah et des factions alliées

Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région
  • En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban

BEYROUTH: «Quatre personnes d'une même famille» ont été tuées dans un «raid de l'armée israélienne» sur le village de Mays al-Jabal, a déclaré l'agence officielle d'information libanaise (ANI), actualisant un précédent bilan faisant état de trois victimes.

Il s'agit d'un homme, d'une femme et de leurs enfants âgés de 12 et 21 ans, d'après l'ANI, qui a précisé que deux autres personnes ont été blessées.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah libanais, un allié du Hamas palestinien, échange quasi-quotidiennement avec l'armée israélienne des tirs à la frontière libano-israélienne. Des factions palestiniennes et autres groupes alliés ont aussi revendiqué des attaques depuis le Liban contre Israël.

Blessés transportés 

Selon ANI, des habitants du village inspectaient leurs maisons et magasins endommagés dans de précédents bombardements au moment du raid.

Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région.

Samedi soir, le Hezbollah a revendiqué des tirs sur des positions militaires dans le nord d'Israël.

Le Hezbollah a déclaré dans un communiqué avoir tiré « des dizaines de roquettes de types Katioucha et Falaq » sur Kiryat Shmona, dans le nord d'Israël, «en réponse au crime horrible que l'ennemi israélien a commis à Mays al-Jabal », qui, selon lui, a tué et blessé des civils.

En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban, selon un décompte de l'AFP. Au moins 11 combattants du Hamas ont été tués selon ce même décompte.

Côté israélien, 11 soldats et neuf civils ont été tués, selon un bilan officiel.


Le forum de Riyad examine le rôle de la traduction dans la promotion de l'identité saoudienne

L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
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  • La conférence vise à contribuer à un objectif clé de la Vision 2030 du Royaume, à savoir la promotion des valeurs islamiques et de l'identité nationale, en encourageant les Saoudiens à traduire ces concepts dans d'autres langues et cultures
  • Le rôle de la traduction dans la promotion d'une image positive du Royaume sera également discuté, ainsi que la promotion de la reconnaissance internationale et la mise en évidence de l'impact culturel du Royaume

RIYAD : Le Collège des langues de l'Université Princesse Noura bent Abdelrahman de Riyad accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ».

L'événement, dont le slogan est « Nous traduisons notre identité », aura lieu au département des conférences et des séminaires et est parrainé par le ministre saoudien de l'Éducation, Yousef Al-Benyan.

Il se concentrera sur le partage du patrimoine culturel, historique, littéraire et intellectuel du Royaume avec un public mondial, a rapporté l'agence de presse saoudienne.


L'interminable attente des proches de jeunes migrants tunisiens perdus en mer

El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
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  • Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants
  • Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans

EL HENCHA: La plupart avaient gardé le secret: une quarantaine de migrants tunisiens, très jeunes, ont embarqué clandestinement en janvier en quête du "paradis européen" et depuis plus de quatre mois, leurs proches désespèrent de recevoir des nouvelles des disparus.

Ils sont partis vraisemblablement de Sfax (centre), épicentre en Tunisie de l'émigration irrégulière vers l'Italie, la nuit du 10 au 11 janvier sur une mer démontée, selon les familles.

Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants à 40 kilomètres au nord de Sfax. Une mère et son bébé de quatre mois étaient aussi du voyage.

Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans, qui gagnait sa vie en conduisant la camionnette familiale de "louage" (taxi collectif).

"Il est sorti vers 22H00 avec son téléphone, sans rien dire à mes parents, sans vêtements de rechange ni sac, comme s'il allait retrouver ses amis", raconte à l'AFP cette ouvrière de 42 ans, qui souffre d'insomnies depuis.

Yousri, 22 ans, est aussi parti en cachette. "La majorité des jeunes n'ont pas informé leur famille, ils se sont débrouillés pour avoir un peu d'argent", confirme M. Henchi, son oncle instituteur.

Meftah Jalloul, poissonnier de 62 ans, savait lui "depuis un certain temps" que son fils Mohamed, 17 ans, "voulait migrer en Europe" et le lui avait déconseillé "mais c'est devenu une idée fixe".

La nuit fatidique, il a tenté d'empêcher son unique garçon de sortir, l'implorant d'attendre une meilleure météo, mais "il m'a embrassé sur la tête et il est parti", relate M. Jalloul.

«Désespérance»

Le commerçant culpabilise: "chaque jour, il créait des problèmes à la maison, il voulait de l'argent pour migrer. C'est moi qui lui ai donné l'argent, donc je suis responsable".

Les Tunisiens ont représenté la deuxième nationalité des migrants illégaux arrivés en Italie (17.304) en 2023, après les Guinéens, selon des statistiques officielles.

"Cette immigration irrégulière ne s'explique pas seulement par des motifs économiques et sociaux", analyse Romdhane Ben Amor, porte-parole de l'ONG FTDES. Il y a aussi "le facteur politique (le coup de force du président Kais Saied à l'été 2021, NDLR) et le sentiment de désespérance des Tunisiens qui ne croient pas dans l'avenir du pays".

Les disparus d'El Hencha, issus de la classe moyenne, pas particulièrement pauvres, partageaient cette "sensation d'horizon bouché".

Le frère d'Inès avait un travail mais "avec 20 dinars par jour (trois euros environ), une fois payé ses cigarettes, il disait qu'il ne pouvait pas faire de projets, ni construire une maison, ni se marier".

Mohamed l'instituteur pointe du doigt "les jeunes déjà en Italie qui publient sur les réseaux sociaux (...) leur quotidien". Les autres "voient ça et veulent changer leur avenir. Ils imaginent l'Europe comme un paradis", souligne-t-il. C'était, pense-t-il, le cas de Yousri qui travaillait dans un café internet pour 10/15 dinars par jour après avoir quitté le lycée avant le bac.

Meftah Jalloul était lui d'accord pour que son fils, également décrocheur scolaire, émigre, mais légalement et seulement après avoir fait une formation. "Il pouvait apprendre un métier: plombier, menuisier, mécanicien", souligne le père de famille.

Aujourd'hui, M. Jalloul lutte pour garder espoir.

«Temps très mauvais»

"Quatre mois se sont écoulés et je pleure mon fils. Ma famille et moi, nous sommes épuisés", dit-il en fondant en larmes.

Lui et d'autres familles se raccrochent à l'idée que l'embarcation aurait pu dériver vers la Libye voisine. Des contacts ont été pris, des recherches menées, en vain.

Inès Lafi et Mohamed Henchi redoutent le pire. Plus de 1.300 migrants sont morts ou ont disparu dans des naufrages l'an passé près des côtes tunisiennes, selon le FTDES.

"Le temps était très mauvais. Même les pêcheurs qui connaissent la mer sont rentrés, lui est sorti", explique Inès, furieuse contre le passeur, connu de tous pour son activité clandestine, qui n'est pas non plus revenu de cette dernière traversée.

Aux autorités, les familles demandent la poursuite des recherches et davantage d'opportunités à El Hencha.

"Il faut enrichir la zone industrielle avec d'autres unités de production, fournir des emplois aux jeunes", estime M. Henchi.

Il faudrait aussi, dit l'instituteur, "construire un état d'esprit différent" avec des programmes éducatifs pour donner envie de bâtir son avenir en Tunisie. Sinon les jeunes "se contentent d'un tour au café, d'un peu de ping-pong ou volley-ball".