La Chine lance des exercices militaires dans le détroit de Taïwan

Un remorqueur de la marine de l'APL navigue dans le détroit de Taïwan, devant des touristes sur l'île de Pingtan, le point le plus proche de Taïwan, dans la province chinoise du Fujian (sud-est), le 7 avril 2023. (Photo de GREG BAKER / AFP)
Un remorqueur de la marine de l'APL navigue dans le détroit de Taïwan, devant des touristes sur l'île de Pingtan, le point le plus proche de Taïwan, dans la province chinoise du Fujian (sud-est), le 7 avril 2023. (Photo de GREG BAKER / AFP)
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Publié le Samedi 08 avril 2023

La Chine lance des exercices militaires dans le détroit de Taïwan

  • Ces manoeuvres font suite à la visite cette semaine de Mme Tsai aux Etats-Unis, où elle a rencontré mercredi Kevin McCarthy, le président de la Chambre des représentants
  • Le ministère de la Défense taïwanais a affirmé samedi à la mi-journée avoir détecté huit navires de guerre et 42 avions de chasse chinois autour de l'île

PÉKIN : La Chine a lancé samedi trois jours d'exercices militaires dans le détroit de Taïwan, sur fond de tensions avec l'île, sa présidente Tsai Ing-wen fustigeant «l'expansionnisme autoritaire» de Pékin après sa rencontre avec le troisième personnage de l'Etat américain.

Ces manoeuvres «servent de sérieux avertissement contre la collusion entre les forces séparatistes recherchant +l'indépendance de Taïwan+ et les forces extérieures, ainsi que leurs activités provocatrices», a averti dans un communiqué un porte-parole de l'armée chinoise, Shi Yi.

Ces opérations, qui comprennent également des «patrouilles», sont «nécessaires pour sauvegarder la souveraineté et l'intégralité territoriale de la Chine», a justifié ce porte-parole.

Des exercices à tirs réels se tiendront lundi dans le détroit de Taïwan à proximité des côtes du Fujian (est), la province qui fait face à l'île, ont par ailleurs indiqué les autorités maritimes locales.

Ces exercices, qui revêtent une dimension «opérationnelle», sont destinés à démontrer que l'armée chinoise sera prête, «si les provocations s'intensifient», à «régler une fois pour toutes la question de Taïwan», a indiqué à l'AFP l'analyste militaire Song Zhongping.

Exercices «d'encerclement total», selon CCTV

Les exercices militaires lancés samedi par la Chine dans le détroit de Taïwan visent un «encerclement total» de l'île, selon la télévision d'Etat chinoise.

«L'exercice d'aujourd'hui se concentre sur la capacité à prendre le contrôle de la mer, de l'espace aérien et de l'information [...] afin de créer une dissuasion et un encerclement total» de Taïwan, a précisé CCTV.

La localisation exacte de ces opérations n'est pas connue.

La partie la plus étroite du détroit de Taïwan entre les côtes chinoises et l'île fait environ 130 kilomètres.

Selon CCTV, des destroyers, des vedettes rapides lance-missiles, des avions de chasse, des ravitailleurs et des brouilleurs sont notamment mobilisés pour ces exercices.

Taipei a estimé que ces manoeuvres menacent la «stabilité et la sécurité» dans la région Asie-Pacifique.

Sa présidente, Tsai Ing-wen, a dénoncé samedi un «expansionnisme autoritaire» de la part de la Chine et assuré que le territoire «continuerait à travailler avec les Etats-Unis et d'autres pays (...) pour défendre les valeurs de liberté et de démocratie».

Le ministère taïwanais de la Défense a de son côté indiqué «suivre la situation» et avoir chargé l'armée de «répondre» aux activités militaires chinoises.

«Mesures fermes et énergiques»

Samedi matin à Pingtan, le point le plus proche de Taïwan au sud-est de la Chine, des touristes observaient les eaux agitées de la mer mais aucune activité militaire notable n'était visible.

Ces manoeuvres font suite à la visite cette semaine de Mme Tsai aux Etats-Unis, où elle a rencontré mercredi Kevin McCarthy, le président de la Chambre des représentants. Pékin avait dans la foulée promis des «mesures fermes et énergiques» en représailles.

La Chine voit avec mécontentement le rapprochement à l'oeuvre ces dernières années entre les autorités taïwanaises et les Etats-Unis, qui malgré l'absence de relations officielles fournissent à l'île un soutien militaire substantiel.

La Chine considère Taïwan (23 millions d'habitants) comme l'une de ses provinces, qu'elle n'a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949.

Les Etats-Unis ont reconnu la République populaire de Chine en 1979 et ne doivent en théorie avoir aucun contact officiel avec la République de Chine (Taïwan), en vertu du «principe d'une seule Chine» défendu par Pékin.

Depuis jeudi, la Chine accentue la pression militaire sur Taïwan avec l'envoi de navires de guerre et d'aéronefs dans le détroit.

Elle a aussi renforcé la présence de ses garde-côtes pour des patrouilles exceptionnelles.

La localisation exacte des nouvelles manoeuvres n'est pas précisée, hormis les exercices à tirs réels de lundi, qui auront lieu autour de Pingtan.

La partie la plus étroite du détroit entre les côtes chinoises et l'île fait environ 130 kilomètres de large.

«Se bercer d'illusions»

En août, Pékin avait lancé des manoeuvres militaires sans précédent autour de Taïwan lorsque la démocrate Nancy Pelosi, qui a précédé M. McCarthy au perchoir, s'était rendue sur l'île.

La réponse à ce stade à la rencontre avec le numéro trois américain n'a rien de comparable avec l'été 2022.

Le ministère de la Défense taïwanais a affirmé samedi à la mi-journée avoir détecté huit navires de guerre et 42 avions de chasse chinois autour de l'île. Vingt-neuf avions ont dépassé la ligne médiane qui sépare la Chine de Taïwan, a-t-on précisé de même source.

Ces manoeuvres militaires interviennent au lendemain d'une visite d'Etat en Chine d'Emmanuel Macron, au cours de laquelle la question de Taïwan a été évoquée avec le président chinois Xi Jinping.

«La conversation a été dense et franche» à ce sujet, a indiqué vendredi l'Elysée.

«Quiconque pense que la Chine va faire des compromis sur Taïwan se berce d'illusions», a de son côté assuré jeudi Xi Jinping à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, lors d'une rencontre à Pékin, selon des propos rapportés par la diplomatie chinoise.

Un navire de guerre et 29 avions de chasse

Samedi, le ministère de la Défense de Taïwan a annoncé avoir détecté un navire de guerre chinois et 29 avions de chasse supplémentaires autour de l'île samedi, au premier jour d'exercices militaires de Pékin dans le détroit de Taïwan.

Le parti communiste chinois "a délibérément créé une tension dans le détroit de Taïwan (...) ce qui a un impact négatif sur la sécurité et le développement économique de la communauté internationale", a indiqué le ministère, en précisant que le nombre de navires de guerre détectés autour de l'île à 16H00 locales (08H00 GMT) se montait désormais à neuf, et celui des avions de chasse à 71.

Entre Taipei et Pékin, sept décennies de liens tumultueux

La Chine a lancé samedi trois jours d'exercices militaires autour de Taïwan. L'AFP revient sur les moments clés de l'Histoire entre l'île et Pékin.

1949, la séparation

Les communistes de Mao Tsé-toung prennent le pouvoir à Pékin en 1949 et font fuir les nationalistes du Kuomintang (KMT) de Tchang Kaï-chek à Taïwan, marquant la fin de la guerre civile chinoise.

Le KMT forme un gouvernement à Taipei en décembre, et rompt toute relation avec la Chine continentale.

En 1950, Taïwan devient l'allié des Etats-Unis, qui mène une guerre contre la Chine en Corée. Washington déploie une flotte dans le détroit de Taïwan pour protéger son nouvel allié d'une possible attaque.

1971, l'ONU et les Etats-Unis reconnaissent le régime de Pékin

En octobre 1971, Pékin reprend le siège de la Chine à l'ONU, précédemment tenu par Taipei.

En 1979, les Etats-Unis rompent formellement leurs relations diplomatiques avec Taïwan et en établissent avec Pékin, reconnaissant ainsi officiellement la République populaire de Chine.

Washington entretient cependant une "ambiguïté stratégique" sur la question taïwanaise, et reste l'allié le plus puissant de l'île, notamment en lui fournissant un soutien militaire substantiel.

1987-2004, les relations s'améliorent

Fin 1987, les résidents de Taïwan sont autorisés à se rendre en Chine continentale pour la première fois depuis la séparation, permettant aux familles de se réunir.

Taïwan met fin en 1991 à l'état de guerre avec la Chine. Les premiers pourparlers entre les deux parties sont organisés deux ans plus tard à Singapour.

Mais en 1995, à la suite d'une visite du président taïwanais de l'époque, Lee Teng-hui, aux Etats-Unis, Pékin lance une série de tirs de missiles autour de l'île.

D'autres manoeuvres au large de Taïwan sont menées par les communistes en 1996, afin de dissuader les électeurs de participer à la première élection présidentielle démocratique du territoire.

Lors des élections de 2000, le KMT perd pour la première fois le pouvoir à Taïwan. Les liens commerciaux entre les deux parties s'améliorent les années suivantes.

2005-2015, des menaces et des discussions

Pékin adopte en mars 2005 une loi autorisant l'usage de la force si Taïwan déclare son indépendance.

En avril cette même année, le président du Kuomintang Lien Chan se rend en Chine pour y rencontrer le dirigeant chinois d'alors Hu Jintao, une visite historique.

En 2008, les relations se réchauffent: Ma Ying-jeou du KMT est élu président, sur un programme favorable à Pékin.

Les deux rives signent un accord-cadre de coopération économique en 2010 et organisent en 2014 les premières discussions de gouvernement à gouvernement depuis la séparation.

2016, la lune de miel se termine

Tsai Ing-wen, du Parti démocratique progressiste (PDP), traditionnellement pro-indépendantiste, remporte l'élection présidentielle de janvier 2016.

En juin cette même année, la Chine suspend toute communication avec Taïwan: Mme Tsai refuse de reconnaître le Principe de la Chine unique par lequel l'île et le Continent feraient partie d'un seul pays.

En décembre, Donald Trump, alors président des Etats-Unis, rompt avec des décennies de politique diplomatique américaine et échange directement au téléphone avec Tsai Ing-wen.

Xi Jinping déclare en janvier 2019 que la réunification entre la Chine et Taïwan est "inévitable".

2021, tensions sino-américaines

En 2021, des avions militaires chinois font des centaines d'incursions dans la zone de défense de Taïwan.

En octobre, le président américain Joe Biden affirme que les Etats-Unis défendront Taïwan si la Chine l'attaque, des propos partiellement démentis dans la foulée par la Maison Blanche.

2022, la visite de Nancy Pelosi et l'ire de Pékin

Le 2 août 2022, Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre des représentants des Etats-Unis, atterrit à Taïwan, dans le cadre d'une tournée asiatique.

Furieux, Pékin déclenche en représailles des manoeuvres militaires de grande ampleur autour de l'île autoadministrée. Taïwan est encerclé le 4 août, et des tirs de missiles sont effectués pendant une semaine.

Dans le cadre de ces exercices, des avions de chasse et des navires de guerre ont été déployés.

Taipei répond par ses propres exercices et, dans les semaines qui suivent, les Etats-Unis envoient des navires de guerre dans le détroit et annoncent de nouveaux programmes d'aide militaire à l'île.

La Chine impose des sanctions à Mme Pelosi, mais sa visite incite d'autres délégations américaines et européennes à se rendre à Taïwan.

2023, rencontre entre Tsai et McCarthy

Tsai Ing-wen s'arrête à deux reprises aux Etats-Unis, avant et après une visite chez ses alliés d'Amérique latine, de moins en moins nombreux. Elle rencontre le président de la Chambre des Représentants Kevin McCarthy à Los Angeles le 5 avril.

Pékin menace de représailles pour "défendre" sa souveraineté, insistant sur le fait que Taïwan fait partie de son territoire.

Le 8 avril, au lendemain du retour de Mme Tsai à Taipei, Pékin annonce trois jours d'exercices militaires.

Ce jour-là, le ministère de la Défense taïwanais détecte au moins huit navires de guerre et 42 avions de chasse autour de Taïwan.

Vingt-neuf avions entrent au sud-ouest de la zone d'identification de défense aérienne (ADIZ) de Taïwan, et Pékin parle pour le premier jour d'entraînement à "l'encerclement" de Taïwan.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.


Affaires de corruption en Espagne: Pedro Sánchez devant une commission d'enquête

Le Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez comparaît jeudi devant une commission d'enquête sénatoriale afin de s'expliquer sur un scandale de corruption dont les principaux protagonistes ont longtemps été ses hommes de confiance. (AFP)
Le Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez comparaît jeudi devant une commission d'enquête sénatoriale afin de s'expliquer sur un scandale de corruption dont les principaux protagonistes ont longtemps été ses hommes de confiance. (AFP)
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  • L'objectif du PP est de montrer que le Premier ministre était au courant des malversations révélées par l'enquête sur l'affaire Koldo et qu'il y était même impliqué
  • Face à ce séisme, Pedro Sánchez a demandé pardon à plusieurs reprises aux Espagnols, assurant qu'il ignorait tout de l'affaire et que le Parti socialiste, dont il est secrétaire général depuis 2017, n'avait jamais bénéficié de financements illégaux

MADRID: Le Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez comparaît jeudi devant une commission d'enquête sénatoriale afin de s'expliquer sur un scandale de corruption dont les principaux protagonistes ont longtemps été ses hommes de confiance.

Connue sous le nom d'"affaire Koldo", du nom de Koldo García Izaguirre, l'assistant d'un ancien ministre des Transports et ex-bras droit de M. Sánchez, José Luis Ábalos, cette affaire est l'un des scandales qui éclaboussent depuis plus d'un an l'entourage du Premier ministre.

Sa comparution devant cette commission sénatoriale se produira dans un climat de polarisation politique extrême, le Parti populaire (PP, opposition de droite), majoritaire à la chambre haute, ayant fait de la corruption l'axe principal de son offensive contre le gouvernement de gauche dirigé par M. Sánchez.

"Pensez-vous dire la vérité demain (jeudi) devant la commission?", lui a ainsi demandé le leader du PP, Alberto Núñez Feijóo, mercredi matin au Congrès des députés.

"Vous mentirez de nouveau" 

M. Feijóo a ajouté que sa question était "rhétorique", dans la mesure où il est, selon lui, exclu que Pedro Sánchez puisse dire la vérité sur cette affaire, de peur de s'incriminer.

"Vous mentirez de nouveau, parce que vous savez que la vérité entraînerait votre chute" a lancé le chef du premier parti d'opposition, accusant M. Sánchez d'avoir menti "à tous" et sur tous les sujets.

L'objectif du PP est de montrer que le Premier ministre était au courant des malversations révélées par l'enquête sur l'affaire Koldo et qu'il y était même impliqué.

Ce scandale a éclaté au grand jour en février 2024 avec l'arrestation de Koldo García Izaguirre, soupçonné d'être au cœur d'une énorme escroquerie ayant permis à une petite société d'obtenir entre mars et juin 2020 - au plus fort de la pandémie de Covid-19 - des contrats d'un montant de 53 millions d'euros pour fournir des masques à diverses administrations. Ces contrats avaient dégagé des commissions illégales de plusieurs millions d'euros.

La justice est vite remontée jusqu'à José Luis Ábalos, le juge chargé de l'enquête considérant qu'il avait joué un rôle d'"intermédiaire" dans la combine.

Outre son poste de ministre, M. Ábalos était surtout secrétaire à l'Organisation du Parti socialiste, poste clé qui en faisait l'homme de confiance de M. Sánchez.

Il a été expulsé du Parti socialiste, mais l'affaire n'a fait ensuite que s'aggraver pour le Premier ministre.

Car le successeur de M. Ábalos comme secrétaire à l'Organisation du Parti socialiste, Santos Cerdán, a à son tour été mis en cause en juin dernier, après la publication d'un rapport de police selon lequel il était au cœur du réseau de corruption et avait touché des pots-de-vin en échange de contrats publics.

Il a été placé en détention provisoire en juillet.

Englué 

Face à ce séisme, Pedro Sánchez a demandé pardon à plusieurs reprises aux Espagnols, assurant qu'il ignorait tout de l'affaire et que le Parti socialiste, dont il est secrétaire général depuis 2017, n'avait jamais bénéficié de financements illégaux.

Il a redit en septembre qu'il ne disposait d'"aucune information" sur les délits reprochés à José Luis Ábalos, Santos Cerdán et Koldo García Izaguirre, et a rejeté toute "corruption systémique" au sein de son parti.

Il reprendra cette ligne de défense jeudi devant la commission sénatoriale, mais il est certain qu'il ne convaincra pas la droite, qui se dit assurée qu'il était au courant et l'accuse d'avoir tenté d'étouffer le scandale.

Outre cette tentaculaire affaire Koldo, M. Sánchez est englué dans d'autres affaires judiciaires qui le touchent de près: son épouse, Begoña Gómez, devrait être jugée pour une affaire de corruption et trafic d'influence, son frère David le sera également pour trafic d'influence et le procureur général de l’État, Álvaro García Ortiz, qu'il a nommé, sera jugé à partir de lundi pour violation du secret judiciaire.

L'audition de Pedro Sánchez, qui doit débuter à 09H00 (08H00 GMT), devrait durer plusieurs heures.


Elon Musk lance Grokipedia pour concurrencer Wikipédia qu'il juge orienté à gauche

Le PDG de Tesla, Elon Musk, assiste à la cérémonie de commémoration de l'activiste d'extrême droite Charlie Kirk au State Farm Stadium à Glendale, Arizona. (AFP)
Le PDG de Tesla, Elon Musk, assiste à la cérémonie de commémoration de l'activiste d'extrême droite Charlie Kirk au State Farm Stadium à Glendale, Arizona. (AFP)
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  • Elon Musk et xAI ont lancé Grokipedia, une encyclopédie en ligne concurrente de Wikipédia, générée par intelligence artificielle et présentée comme “plus objective” selon Musk, avec déjà 885.000 définitions
  • Grokipedia est critiquée pour un biais idéologique apparent dans certains articles, notamment ceux sur Musk, Black Lives Matter ou Tucker Carlson, tandis que Wikipédia revendique un point de vue neutre

NEW YORK: Elon Musk et son entreprise xAI ont mis en ligne lundi Grokipedia, présenté comme le concurrent de l'encyclopédie en ligne Wikipédia, accusée de biais idéologique par une partie des républicains aux États-Unis.

La version a été numérotée 0.1 et comptait déjà lundi soir plus de 885.000 définitions, contre plus de 7 millions en anglais pour Wikipédia.

Dans un message posté sur X, Elon Musk a promis l'arrivée prochaine d'une version 1.0, "dix fois meilleure" que la 0.1, qui est déjà "meilleure que Wikipédia à (son) avis".

Il y a une semaine, l'entrepreneur avait décidé de reporter de quelques jours le lancement de Grokipedia, annoncé fin septembre, un délai justifié par la nécessité d'effectuer "un travail supplémentaire pour purger la propagande".

A l'image de responsables républicains, Elon Musk critique régulièrement Wikipédia depuis plusieurs années. En 2024, il avait taxé le site d'être "contrôlé par des activistes d'extrême gauche" et appelé à ne plus faire de don à la plateforme.

"Le but de Grok et de (Grokipedia) est la vérité, toute la vérité, rien que la vérité", a affirmé l'homme le plus riche du monde, qui a précisé que le programme informatique de l'encyclopédie était en accès libre (open source). "Tout le monde peut donc l'utiliser pour n'importe quoi gratuitement."

- "Biais systémiques" -

Le contenu de certains articles de Grokipedia témoigne d'une orientation des résultats, à l'image de la page consacrée à Elon Musk.

Dans les premiers paragraphes de résumé, la plateforme indique que le patron de Tesla et SpaceX a "influencé le débat" sur plusieurs sujets, ce qui lui a valu "des critiques des médias traditionnels qui font preuve de penchants à gauche dans leur couverture".

Concernant le mouvement des droits civiques "Black Lives Matter", Grokipedia écrit qu'il a "mobilisé des millions de personnes".

"Cependant, ces manifestations ont entraîné des émeutes, (...) les plus coûteuses de l'histoire des assurance pour les dommages aux biens", poursuit l'encyclopédie, sans mentionner, comme le fait Wikipédia, que "la grande majorité des manifestations de 2020 se sont déroulées dans le calme".

Autre exemple, la page consacrée à l'éditorialiste conservateur Tucker Carlson, qui souligne son "rôle (...) dans la dénonciation des biais systémiques du journalisme traditionnel". Elle renvoie à un article du site du magazine Newsweek qui ne mentionne ces biais que dans des citations de Tucker Carlson lui-même.

Créé en 2001, Wikipédia est une encyclopédie collaborative gérée par des bénévoles, largement financée par des dons, et dont les pages peuvent être écrites ou modifiées par les internautes.

Elle revendique un "point de vue neutre" dans ses contenus.

Le contenu de Grokipedia est lui généré par intelligence artificielle (IA) et l'assistant d'IA générative Grok mais cite également plusieurs sources sur chaque page.

En avril, le procureur fédéral de Washington, Ed Martin, remplacé depuis, avait adressé une demande de documents à la fondation Wikimédia, qui a autorité sur Wikipédia.

Il disait vouloir déterminer si Wikimédia était bien habilitée à bénéficier de l'exonération d'impôts octroyée aux fondations.

Le procureur désigné par Donald Trump avait dénoncé "la manipulation de l'information" dont Wikipédia se rendait coupable, selon lui, la plateforme cherchant à "masquer la propagande".

Fin août, deux élus républicains de la Chambre des représentants, James Comer et Nancy Mace, ont ouvert une enquête sur des "manoeuvres organisées (...) pour influencer l'opinion américaine (...) en manipulant des articles Wikipédia".

La naissance de Grokipedia a été saluée par plusieurs personnalités de droite, notamment l'idéologue ultranationaliste russe Alexandre Douguine, qualifiant l'article le concernant de "neutre", "objectif" et "juste" alors que celui de Wikipédia est, selon lui, "diffamatoire".