Pourquoi Creme Egg, le produit emblématique de Pâques, conserve-t-il des adeptes fidèles au Moyen-Orient?

C’est Creme Egg, le produit emblématique de la société chocolatière britannique Cadbury (Photo, fournie).
C’est Creme Egg, le produit emblématique de la société chocolatière britannique Cadbury (Photo, fournie).
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Publié le Dimanche 09 avril 2023

Pourquoi Creme Egg, le produit emblématique de Pâques, conserve-t-il des adeptes fidèles au Moyen-Orient?

  • Creme Egg a fait ses débuts en 1971, mais tout a commencé en 1824 lorsque John Cadbury a ouvert un magasin à Birmingham
  • Creme Egg est disponible dans des supermarchés tels que Tamimi Markets et Carrefour en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis

LONDRES: Il a la taille d'un modeste œuf de poule, mais pèse 40 g et fournit 177 kilocalories – plus qu’un œuf véritable – composées presque exclusivement de graisses et de sucres…

C’est Creme Egg, le produit emblématique de la société chocolatière britannique Cadbury, rachetée en 2010 par le géant américain de l'alimentation et des boissons Mondelez International pour quelque 19,5 milliards de dollars (1 dollar = 0,92 euro).

Avec son épaisse coquille de chocolat au lait fourrée d'un fondant blanc gluant et d'un «jaune», l'œuf emballé dans du papier d'aluminium est un produit «Marmite». Avec l'équivalent de six cuillères à café de sucre dans chaque œuf, soit vous le trouvez trop sucré pour le digérer, soit vous êtes accro à l'énorme apport calorique qu'il procure.

Quoi qu'il en soit, dans les pays chrétiens, le Creme Egg prend tout son sens à Pâques, mais il compte également de nombreux adeptes dans le monde entier, y compris au Moyen-Orient.

Il est disponible dans des supermarchés tels que Tamimi Markets et Carrefour en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, où il est particulièrement apprécié comme friandise pendant le ramadan, qui coïncide cette année avec Pâques.

Au Royaume-Uni, Pâques est la saison des bêtises pour des médias obsédés par tout ce qui est «eggcellent», et le fait que le Creme Egg au fondant soit souvent la vedette de nombreux articles à cette époque de l'année témoigne de l'engouement qu'il suscite. Voici quelques exemples de titres qui datent de la semaine dernière: «La police a résolu l'affaire des 200 000 Creme Eggs volés»; «J'ai cuisiné un Cadbury's Creme Egg dans une friteuse et c'est la meilleure recette de Pâques que j'ai essayée»; «Un bar à cocktails de l'est de Londres trempe des frites dans un Cadbury Creme Egg»; «Un homme ingère accidentellement un œuf Cadbury Creme Egg d'une valeur de 10 000 livres sterling».

Au Royaume-Uni, Pâques est la saison des bêtises pour des médias obsédés par tout ce qui est «eggcellent»
Au Royaume-Uni, Pâques est la saison des bêtises pour des médias obsédés par tout ce qui est «eggcellent» (Photo, fournie).

Ce dernier mérite un «eggsplication».

Dans le cadre d'une promotion de Pâques qui se poursuivra jusqu'au 9 avril, Cadbury a disséminé 280 œufs en chocolat mi-blanc, mi-lait, en édition limitée, dans les magasins du Royaume-Uni, avec le slogan «Cadbury Creme Egg, How Do You Not Eat Yours?» («Cadbury Creme Egg: comment n’avez-vous pas mangé le vôtre?» Les œufs gagnants doivent rester intacts pour que l'acheteur remporte le prix.

Malheureusement, le YouTubeur Adam Davis, sur sa chaîne Adz Ventures, a involontairement englouti un œuf en direct devant la caméra avant que les téléspectateurs ne lui fassent remarquer sa coûteuse erreur.

On pourrait soupçonner que l'une ou l'autre de ces histoires – ou toutes, en réalité, et bien d'autres encore, à cette époque de l'année – provienne du service des relations publiques de Cadbury.

Mais, même si c'était le cas, l'empressement des médias grand public à les reproduire telles quelles donne la mesure de l'intérêt pour une confiserie qui est un best-seller au Royaume-Uni depuis plus d'un demi-siècle.

Le Creme Egg Cadbury a fait ses débuts en 1971, mais son histoire a commencé en 1824, lorsque John Cadbury, fils d'une riche famille de quakers, a ouvert une épicerie à Birmingham et a commencé à vendre du cacao et du chocolat chaud.

Le Creme Egg Cadbury a fait ses débuts en 1971, mais son histoire a commencé en 1824 (Photo, fournie).
Le Creme Egg Cadbury a fait ses débuts en 1971, mais son histoire a commencé en 1824 (Photo, fournie).

Dès le départ, les valeurs de l'entreprise reflètent les convictions de Cadbury comme membre des quakers, une secte chrétienne fondée sur la croyance que «chaque individu peut faire l'expérience de la lumière intérieure, ou de la voix de Dieu, sans avoir besoin d'un prêtre ou de la Bible».

Les quakers désapprouvaient l'usage du tabac et de l'alcool – comme ils le font encore aujourd'hui – et la société Cadbury affirme que les produits de son fondateur «n'étaient pas seulement inspirés par ses goûts», mais qu’«ils étaient guidés par ses croyances». Le thé, le café, le cacao et le chocolat chaud étaient considérés comme des alternatives saines et délicieuses à l'alcool, que les quakers jugeaient mauvais pour la société.

Il y a ici deux paradoxes.

Le premier est que le sucre et les produits à base de sucre, comme le chocolat, sont désormais également considérés comme déplorables pour la santé. Afin de réduire la consommation de sucre des enfants dans le cadre de la lutte contre le problème croissant de l'obésité en Grande-Bretagne, le gouvernement britannique devrait introduire cette année des initiatives destinées à restreindre la publicité pour les aliments riches en sucre, tandis que la présence des bonbons et des chocolats aux caisses a déjà été proscrite.

(Getty/Cadbury)
(Getty/Cadbury)

Le deuxième réside dans le fait que, alors que des quakers comme John Cadbury prêchaient qu'il n'y avait «pas besoin d'églises, de rituels, de jours saints ou de sacrements pour pratiquer la religion», l'œuf en chocolat créé par son entreprise est aujourd'hui inextricablement lié à Pâques, l'une des principales fêtes de l'Église chrétienne.

Que ceux qui sont déroutés par l'association des œufs en chocolat et des poussins et lapins de Pâques sachent qu’il ne s'agit pas seulement d'une exploitation commerciale cynique d'une fête chrétienne qui marque la renaissance du Christ.

En réalité, l'association des œufs, des poussins et des lapins avec l'ancêtre païen de Pâques est antérieure à l'ère chrétienne.

En réalité, l'association des œufs, des poussins et des lapins avec l'ancêtre païen de Pâques est antérieure à l'ère chrétienne (Getty/Cadbury).
En réalité, l'association des œufs, des poussins et des lapins avec l'ancêtre païen de Pâques est antérieure à l'ère chrétienne (Getty/Cadbury).

Pour l'Église chrétienne, le jour de Pâques, qui tombe cette année le dimanche 9 avril, marque le début de cinquante jours de célébration de la résurrection de Jésus-Christ. Mais le mot même de «Pâques» reflète l'influence des croyances et pratiques paganistes préchrétiennes sur le calendrier religieux chrétien.

Les universitaires et les théologiens continuent à débattre de l'origine précise du mot. Mais beaucoup affirment qu'il est dérivé d'«Eostre», le nom d'une déesse de la fertilité vénérée en Grande-Bretagne par les Anglo-Saxons préchrétiens et, sous divers noms similaires, par les païens germaniques du nord de l'Europe.

Selon cet argument, la fête chrétienne de Pâques était à l'origine une célébration païenne du retour du printemps, reprise à titre de compromis par une église chrétienne primitive désireuse de gagner des convertis aux anciennes coutumes.

Cette association a été faite pour la première fois au VIIIe siècle par le moine anglais connu sous le nom de «Bède le Vénérable». Dans son traité The Reckoning of Time, il décrit certains des calendriers de l'Ancien Monde, dont celui des Anglo-Saxons, pour qui le mois d'«Eosturmonath», qui correspond au mois d'avril, portait le nom de la déesse païenne.

Quant à l'Église d'Angleterre d'aujourd'hui, elle reconnaît que «les œufs que nous donnons et recevons à Pâques ont de nombreux symboles différents qui leur sont attachés». En tout cas, ajoute-t-elle, «ils représentent une nouvelle vie».

John Cadbury prend sa retraite en 1861 et confie la direction de l'entreprise à ses deux fils, Richard et George. En 1878, inspirés par les principes quakers et la conscience sociale de leur famille, ils entreprennent la construction d'une nouvelle usine, à la campagne et loin de l'environnement sordide de l’établissement d'origine, situé au centre de Birmingham.

Ils l'ont baptisée «Bournville», un modèle d'«usine dans un jardin», avec des logements pour les ouvriers. «Aucun homme ne devrait être condamné à vivre dans un endroit où une rose ne peut pas pousser», disait George Cadbury.

Aujourd'hui, l'usine de Bournville est toujours en activité et produit en moyenne 1,5 million de Creme Eggs par jour.

Le Cadbury Creme Egg a été commercialisé pour la première fois en 1963 sous l’appellation «Fry's Creme Egg», du nom d'une autre entreprise britannique, J.S. Fry & Sons of Bristol, qui a fusionné avec Cadbury en 1919. En 1971, il a été rebaptisé «Cadbury Creme Egg».

Un autre article, Fry's Turkish Delight, lancé en 1914, a conservé son nom d'origine, mais, heureusement, Cadbury a abandonné depuis longtemps la publicité offensante qu’elle diffusait au sujet de ce produit.

En effet, dans une publicité diffusée à la télévision britannique dans les années 1960, un «cheikh» enturbanné, assisté dans sa tente par des esclaves noirs, recevait en cadeau une esclave enveloppée dans un tapis. Il la libérait de ses chaînes lorsqu'elle lui offrait une barre de Fry's Turkish Delight, «exotique, délicieuse, pleine de promesses orientales».

La société est célèbre pour d'autres produits qui sont encore très vendus aujourd'hui: Bournville Chocolate (lancé en 1908), Milk Tray (1915) ou Cadbury's Flake (1920).

Mais c'est le Creme Egg, enveloppé dans son papier d'aluminium bleu, rouge et jaune, qui a conquis le cœur des amateurs de chocolat britanniques – et qui est sans doute responsable de plus d’un diabète.

Le Service national de santé britannique recommande aux adultes de ne pas consommer plus de 30 g de sucres libres par jour, ce qui équivaut à environ sept cuillères à café de sucre, soit à peu près la quantité contenue dans chaque Creme Egg.

Et, au cas où cela ne serait pas suffisamment toxique à votre goût, selon le Guinness World Records, il existe même un record du plus grand nombre de Creme Eggs mangés en une minute.

Ce record, qui reflète l'engouement international pour le produit, est détenu par le Canadien Pete Czerwinski, alias «Furious Pete», un «mangeur compétitif» qui, le 11 avril 2014, a englouti six de ces œufs en soixante secondes.

Et ce n'est pas tout.

RecordSetter est un site américain dont l'objectif est de «relever le niveau des réalisations humaines» dans divers domaines, mais il n'est pas question ici de percées médicales ou de science spatiale.

Parmi les centaines de records douteux répertoriés, il y a «la personne restée le plus longtemps assise sur un mur en tenant un poids de 10 livres à hauteur d'épaule» (trois minutes, seize secondes), «le plus grand nombre de rebonds de ballons sur les deux côtés d'une raquette de ping-pong en une minute en tenant un livre en équilibre sur la tête» (170) et le «plus grand nombre de cure-dents plantés dans un grain de raisin en trente secondes» (38).

Le site comporte également une section entière consacrée aux tentatives de record qui concernent les Creme Eggs.

Dans une vidéo particulièrement troublante filmée à Las Vegas en mars 2013 et publiée sur le site, on voit l'Américaine Miki Sudo (qui détient également le record féminin de hot-dogs, avec 40 hot-dogs mangés lors du Nathan's Famous International Hot Dog Eating Contest, à Coney Island, en 2022) consommer 50 Cadbury Creme Eggs en six minutes et quinze secondes.

Ce record particulier s'accompagne d'un avertissement sanitaire de la part de RecordSetter : «Le speed eating peut être extrêmement dangereux. Ne tentez pas ce record si vous n'avez pas plus de 18 ans et si vous n'êtes pas un mangeur professionnel.»

N'essayez surtout pas de le faire chez vous: vous risqueriez d'être «extrêmement» malade.

 


Washington cible l'Autorité palestinienne, en plein débat sur la reconnaissance d'un Etat de Palestine

Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
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  • Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine.

L'annonce des sanctions américaines survient en effet au moment où de nombreux Etats, dont la France et le Canada, ont promis de reconnaître un Etat de Palestine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre, provoquant la colère d'Israël et des Etats-Unis qui parlent d'une "récompense" faite au Hamas dans la bande de Gaza.

La France et l'Arabie saoudite ont co-présidé lundi et mardi à l'ONU une conférence internationale, plaidant ainsi pour la solution à deux Etats, israélien et palestinien, seul chemin pour parvenir à la paix au Proche-Orient.

Washington, qui rejette toute reconnaissance unilatérale d'un Etat palestinien, a décrit la conférence comme étant une "insulte" faite aux victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Dans un communiqué jeudi, le département d'Etat américain a fait part de sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'OLP, sans les identifier, accusés notamment d'"internationaliser le conflit avec Israël".

Washington reproche aux deux institutions de "soutenir des actions au sein d'organisations internationales qui sapent et contredisent les engagements antérieurs" notamment à travers la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Washington avait sanctionné en juin quatre magistrates de la CPI, estimant que leurs procédures visant l'exécutif israélien étaient "illégitimes" et "politisées".

Washington, principal allié d'Israël, accuse aussi l'OLP et l'Autorité palestinienne de "continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l'incitation et la glorification de la violence" dans les livres scolaires, une accusation de longue date.

Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres des deux institutions.

- "Distorsion morale" -

"Il est dans l'intérêt de notre sécurité nationale d'imposer des sanctions et de tenir l'OLP et l'Autorité palestinienne responsables du non-respect de leurs engagements et de la remise en cause des perspectives de paix", a indiqué le département d'Etat.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, s'est aussitôt félicité de cette décision, jugeant que "l'Autorité palestinienne doit payer le prix de sa politique actuelle consistant à verser des indemnités aux terroristes et à leurs familles pour les attentats commis et pour l'incitation à la haine contre Israël dans les écoles, les manuels scolaires, les mosquées et les médias palestiniens".

Il a également relevé, sur X, que cette mesure "met en évidence la distorsion morale de certains pays qui se sont empressés de reconnaître un Etat palestinien virtuel tout en fermant les yeux sur le soutien de l'Autorité palestinienne au terrorisme et à l'incitation à la haine".

L'Autorité palestinienne, dont le président est Mahmoud Abbas, administre la Cisjordanie occupée, tandis que l'OLP, créée en 1964, est le mouvement fondateur représentant les Palestiniens, longtemps dirigée par leur leader historique Yasser Arafat.

L'OLP rassemble la majorité des mouvements politiques palestiniens mais pas le mouvement islamiste Hamas, qui s'est emparé du pouvoir à Gaza en 2007.

Des pays arabes et occidentaux voudraient voir l'Autorité palestinienne, très affaiblie, jouer un rôle dans la gouvernance de la bande de Gaza après la guerre qui y fait rage depuis octobre 2023.

Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump, qui a accueilli le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu par trois fois à la Maison Blanche, plus qu'aucun autre dirigeant étranger, a apporté un soutien inconditionnel à Israël, tout en oeuvrant sans succès pour un cessez-le-feu à Gaza.

Mais il s'est montré peu disert sur l'Autorité palestinienne, décriée pour le manque de réformes et la corruption.

Parmi ses premiers décrets, le président Trump avait levé des sanctions imposées sous son prédécesseur Joe Biden visant des colons israéliens extrémistes en Cisjordanie, en proie à une recrudescence des violences.


L'envoyé de Trump rencontre Netanyahu, Israël face à des critiques accrues

L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
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  • L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël
  • Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël

Jérusalem, Non défini: L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël.

Après 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023, la bande de Gaza est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire distribuée par camions ou larguée depuis les airs.

Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël, selon la Défense civile locale qui a fait état de 38 Palestiniens tués jeudi.

Plusieurs dizaines de corps gisaient empilés à la morgue de l'hôpital al-Chifa dans le nord de Gaza, dans l'attente d'être collectés par leurs proches, a constaté un correspondant de l'AFP.

"Le moyen le plus rapide de mettre fin à la crise humanitaire à Gaza est que le Hamas CAPITULE ET LIBÈRE LES OTAGES !!!", a déclaré le président américain Donald Trump sur X.

Rien n'a filtré de la rencontre entre MM. Witkoff et Netanyahu mais en début de semaine, M. Trump a semblé se distancer de son allié israélien en évoquant une "vraie famine" à Gaza.

Avant l'arrivée jeudi de l'émissaire de M. Trump, des dizaines de mères et proches d'otages encore aux mains du Hamas ont manifesté devant le bureau du Premier ministre à Jérusalem, exigeant un "accord global" qui garantirait la libération des 49 otages encore détenus à Gaza, dont 27 ont été déclarés morts par l'armée.

- "Position minoritaire" -

L'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné du côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

En riposte, Israël a juré de détruire le Hamas et lancé une offensive dévastatrice à Gaza qui a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza jugées fiables par l'ONU. La campagne aérienne et terrestre a dévasté le territoire et provoqué un désastre humanitaire.

Le chef de la diplomatie allemande Johann Wadephul a lui rencontré à Jérusalem son homologue israélien Gideon Saar, avant de rencontrer M. Netanyahu.

Avant de décoller pour Israël, M. Wadephul a estimé qu'Israël était "de plus en plus en position minoritaire", alors qu'un "nombre croissant de pays, y compris européens, sont prêts à reconnaître un Etat palestinien sans processus de négociation préalable".

Ces visites interviennent après la multiplication des alertes d'organisations internationales sur une famine à Gaza et l'échec de négociations indirectes, sous médiation américaine, qatarie et égyptienne, entre Israël et le Hamas en vue d'un cessez-le-feu.

Le gouvernement israélien a annoncé dimanche une pause limitée dans l'offensive afin de permettre l'acheminement de l'aide dans le petit territoire pauvre où s'entassent plus de deux millions de Palestiniens.

Mais ces aides sont jugées insuffisantes par les organisations internationales face aux besoins immenses de la population.

- "Pression déformée"

Le Portugal a indiqué jeudi envisager de reconnaître l'Etat de Palestine, après que plusieurs pays dont le Canada, la France et le Royaume-Uni ont annoncé leur intention de faire de même en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre.

Une telle reconnaissance reste néanmoins largement symbolique en raison du refus d'Israël de la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Dans ce contexte, Israël a dénoncé une "campagne de pression internationale déformée" venant "récompenser le Hamas et nuire aux efforts visant à obtenir un cessez-le-feu à Gaza".

Les Etats-Unis, qui ont dénoncé les annonces sur la reconnaissance d'un Etat palestinien, ont imposé des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), accusant les deux organismes d'avoir pris des mesures pour "internationaliser leur conflit avec Israël" et de "continuer à soutenir le terrorisme".

Le gouvernement Netanyahu, qui veut chasser le Hamas de Gaza et a annoncé son intention de contrôler le territoire, semble peiner à trancher sur une solution politique d'après-guerre.

Dans ce contexte, la frange la plus radicale de sa coalition gouvernementale plaide pour un retour des colonies à Gaza, évacuées en 2005 avec le retrait unilatéral israélien du territoire après 38 ans d'occupation.

L'armée israélienne a par ailleurs annoncé le retrait du nord de Gaza de sa 98e Division, composée d'unités parachutistes et de commandos d'élite, qui a "se prépare désormais à de nouvelles missions".


Une experte de l’ONU : « La famine imposée à Gaza est une atteinte grave à la dignité humaine »

Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
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  • Alice Jill Edwards dénonce une privation prolongée de nourriture entraînant malnutrition, défaillances d’organes et décès, notamment chez les nourrissons et femmes enceintes
  • « Des règles changeantes, une distribution militarisée et l’incertitude permanente sur l’accès aux besoins de base provoquent désespoir, stress et traumatismes », alerte-t-elle

NEW YORK: La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la torture, Alice Jill Edwards, a exprimé mercredi sa vive inquiétude face à l’augmentation du nombre de décès liés à la famine parmi les Palestiniens de Gaza.

Elle a qualifié la famine infligée aux civils de « meurtrière, inhumaine et dégradante », appelant à une aide humanitaire rapide et sans entrave vers l’enclave dévastée.

« Priver des gens de nourriture, d’eau et de dignité constitue une violation grave et répétée dans ce conflit. Cela doit cesser », a-t-elle déclaré, citant des rapports « choquants » de civils tués en faisant la queue pour se nourrir, et des cas généralisés de faim et de malnutrition.

Elle a alerté sur un risque croissant de famine généralisée à Gaza, soulignant que toutes les parties au conflit ont des obligations juridiques, au regard du droit international, d’assurer un accès à l’eau et à la nourriture pour les civils sous leur contrôle, et de faciliter l’aide humanitaire.

« Ils ne doivent ni voler, ni détourner, ni bloquer délibérément l’acheminement de l’aide », a-t-elle averti.

Elle a décrit les « conséquences physiologiques catastrophiques » de la privation prolongée de calories : malnutrition, défaillance d’organes et décès, touchant particulièrement les groupes vulnérables comme les nourrissons et les femmes enceintes.

« L’impact psychologique d’un tel déni est d’une cruauté intrinsèque », a-t-elle poursuivi.

« Des règles constamment changeantes, des distributions militarisées, et une incertitude quotidienne sur l’accès aux besoins fondamentaux plongent les gens dans un désespoir et une détresse extrêmes. »

Elle a salué l’annonce par Israël de pauses humanitaires permettant au Programme alimentaire mondial d’opérer pendant trois mois, tout en soulignant que « davantage doit être fait » pour mettre fin aux hostilités et établir une paix durable fondée sur la solution à deux États.

« Personne ne devrait subir l’humiliation de devoir mendier pour se nourrir, surtout quand des stocks suffisants sont disponibles », a-t-elle déclaré.

Edwards a également renouvelé son appel à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages, à la libération des Palestiniens détenus arbitrairement, et à la mise en place d’enquêtes indépendantes sur les allégations de torture, de mauvais traitements et d’éventuels crimes de guerre, de la part de toutes les parties.

Elle a indiqué avoir exprimé ses préoccupations à plusieurs reprises aux autorités concernées et continuer de réclamer une pleine reddition de comptes.

Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Ils sont indépendants, ne sont pas membres du personnel des Nations unies et travaillent bénévolement.