Retraites: Les 64 ans validés par le Conseil constitutionnel, déconfiture et colère dans les rues

Des manifestants se rassemblent devant l'hôtel de ville de Paris avant les résultats d'une décision du Conseil constitutionnel français sur une réforme contestée des retraites poussée par le gouvernement français à Paris le 14 avril 2023. (Photo, AFP)
Des manifestants se rassemblent devant l'hôtel de ville de Paris avant les résultats d'une décision du Conseil constitutionnel français sur une réforme contestée des retraites poussée par le gouvernement français à Paris le 14 avril 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 15 avril 2023

Retraites: Les 64 ans validés par le Conseil constitutionnel, déconfiture et colère dans les rues

  • Entendant continuer le combat, syndicats et opposants politiques ont appelé Emmanuel Macron à renoncer à la promulgation de la réforme
  • L'intersyndicale n'acceptera pas non plus l'invitation lancée par Emmanuel Macron et ne souhaite pas d'échange avec l'exécutif avant le 1er mai

PARIS: Un tournant du quinquennat Macron après trois mois de crise? Le Conseil constitutionnel a validé vendredi l'essentiel de la réforme des retraites, dont le report de l'âge légal à 64 ans, et bloqué une première demande de référendum d'initiative partagée (RIP) de la gauche.

Entendant continuer le combat, syndicats et opposants politiques ont appelé Emmanuel Macron à renoncer à la promulgation de la réforme, dont la mesure emblématique, le report progressif de l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans, aura force de loi dès que le président aura apposé son paraphe au bas du texte.

La décision des Sages a été accueillie par des huées devant l'Hôtel de Ville de Paris, où se sont réuni près de 4 000 manifestants. "Certains disent que la mobilisation faiblit, moi je crois qu'elle se radicalise", a estimé Raji Aletcheredji, 24 ans, syndiqué Solidaires.

Un soulagement évident pour l'exécutif. "Il n'y a ni vainqueur ni vaincu", a assuré Elisabeth Borne, évoquant "la fin du cheminement institutionnel et démocratique" du texte adopté à l'Assemblée après un 49.3.

"Ce n'est pas fini", a promis en réponse l'intersyndicale, convaincue que ne pas promulguer la loi est le "seul moyen de calmer la colère (...)". Le président "ne peut pas gouverner le pays tant qu'il ne retire pas cette réforme", a insisté la numéro un de la CGT Sophie Binet.

L'intersyndicale n'acceptera pas non plus l'invitation lancée par Emmanuel Macron et ne souhaite pas d'échange avec l'exécutif avant le 1er mai, pour lequel le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger appelle à de "grandes manifestations populaires".

L'institution de la rue de Montpensier a, sans grande surprise, censuré plusieurs "cavaliers sociaux" qui "n'avaient pas leur place" dans une loi de nature financière. Parmi ceux-ci: l'index sur l'emploi des seniors qui devait être obligatoire dès cette année pour les entreprises de plus de 1.000 salariés.

Également censuré, le CDI seniors, un ajout des sénateurs de droite, qui devait faciliter l'embauche des demandeurs d'emploi de longue durée, de plus de 60 ans.

Présidé par l'ex-Premier ministre socialiste Laurent Fabius, le Conseil n'a pas suivi les parlementaires de gauche ou du RN qui avaient invoqué un détournement de procédure parlementaire au profit de l'exécutif.

Le Conseil reconnaît toutefois le "caractère inhabituel" de l'accumulation de procédures visant à restreindre les débats au Parlement.

"Il renforce les pouvoirs déjà exorbitants (...) en faveur de l'exécutif au détriment du Parlement", a déploré sur BFMTV le député Liot (indépendants) Charles de Courson.

"Le Conseil constitutionnel a aggravé la crise, il nous met tous au pied du mur", a lancé le chef de file de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon.

Le Conseil a également rejeté un projet de référendum d'initiative partagée (RIP) porté par la gauche, qui espérait entamer la collecte de 4,8 millions de signatures en vue d'une inédite consultation des Français. Ils ont déposé une deuxième demande reformulée, sur laquelle le Conseil statuera le 3 mai.

Promulgation rapide?

La décision était particulièrement attendue par Emmanuel Macron et son gouvernement qui espèrent relancer un quinquennat sérieusement entravé.

"Le sort politique de la réforme des retraites n'est pas scellé", a estimé Marine Le Pen, présidente du groupe RN à l'Assemblée, pour qui la réforme "marquera la rupture définitive entre le peuple français et Emmanuel Macron".

A droite, le patron de LR Eric Ciotti a au contraire appelé "toutes les forces politiques" à "accepter" les décisions du Conseil.

Les députés MoDem ont salué une décision "juste" mais insisté sur la nécessité de "renouer le dialogue".

Les quatre chefs de files de la Nupes à l'Assemblée ont écrit au chef de l'Etat pour demander, en "geste d'apaisement", de faire revenir le texte au Parlement, comme le lui permet la Constitution. Un appel également lancé par le groupe Liot.

Mais le chef de l'Etat devrait promulguer la loi dans les prochains jours, selon l'Elysée.

Des manifestations se sont déroulées vendredi en fin de journée dans plusieurs villes de France, dont le rassemblement parisien de l'Hôtel de Ville. 112 personnes ont été arrêtées à Paris selon la préfecture de police.

A Lille, quelques centaines de manifestants avec à leur tête des jeunes antifas, se sont rassemblés près de la préfecture. Des rassemblements ont eu lieu à Lyon, Toulouse ou encore Grenoble.

A la gare de Saint-Charles de Marseille, des manifestants sur les voies ont entraîné la suspension du trafic depuis 20H00 environ.

A Rennes, la porte d'un poste de police du centre-ville a été incendiée avant d'être éteint, lors d'un rassemblement réunissant des centaines de personnes.

A Strasbourg, quelques centaines de personnes sont parties après la fin du rassemblement en "manif sauvage" dans les quartiers bordant l'hypercentre. Les forces de l'ordre ont fait usage à quelques reprises de gaz lacrymogènes.

Jeudi, la 12e journée de mobilisation avait livré le deuxième plus faible score de mobilisation depuis le début du mouvement (380 000 manifestants selon le ministère de l'Intérieur, 1,5 million selon la CGT).

Emmanuel Macron réunira lundi les cadres de sa majorité et devrait rapidement s'adresser aux Français.

Elisabeth Borne, de son côté, prendra la parole samedi après-midi à Paris, lors du Conseil national du parti présidentiel Renaissance.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.