L'UE présente sa réforme des règles de sauvetage des banques en difficulté

Bruxelles avait lancé une refonte radicale de la supervision du secteur bancaire après la crise financière de 2008 et la crise de la dette de la zone euro, durant laquelle des milliards d'euros d'argent public avaient été dépensés pour renflouer les banques (Photo, AFP).
Bruxelles avait lancé une refonte radicale de la supervision du secteur bancaire après la crise financière de 2008 et la crise de la dette de la zone euro, durant laquelle des milliards d'euros d'argent public avaient été dépensés pour renflouer les banques (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 19 avril 2023

L'UE présente sa réforme des règles de sauvetage des banques en difficulté

  • Le texte proposé, qui devra être négocié par les Etats membres et les eurodéputés, encourage l'utilisation des «filets de sécurité» financés par le secteur bancaire lui-même plutôt que de recourir aux deniers publics
  • Si le texte proposé mardi par Bruxelles reste bien en deçà d'une mutualisation, le conseil de surveillance prudentielle de la BCE a salué une «avancée pragmatique et importante»

STRASBOURG: La Commission européenne a proposé mardi de nouvelles règles pour le sauvetage des banques en difficulté, peu après des turbulences dans le secteur aux États-Unis et en Europe, mais sans instituer de système unifié de garantie des dépôts au niveau de l'UE.

Le texte proposé, qui devra être négocié par les États membres et les eurodéputés, encourage l'utilisation des "filets de sécurité" financés par le secteur bancaire lui-même plutôt que de recourir aux deniers publics pour protéger les déposants en cas de défaillance de banques de petite ou moyenne taille.

"Les institutions financières de l'UE sont bien capitalisées, très liquides et étroitement surveillées", mais en cas de crise, les États tendent à recourir davantage à l'argent des contribuables qu'aux systèmes de garantie des dépôts financés par le secteur, observe la Commission.

Dans le cadre actuel, les banques de taille moyenne peuvent avoir du mal à bénéficier de ces systèmes de garantie : Bruxelles veut leur permettre d'y accéder plus facilement afin de remplir les conditions requises pour protéger les déposants en cas de crise – de quoi réduire le risque de contagion à d'autres banques.

Pour autant, "la première et principale ligne de défense des banques doit rester leur capacité à absorber des pertes en interne" grâce à leurs fonds propres, objet de règles strictes, a insisté Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission.

Plus généralement, le texte vise à "protéger l'économie réelle de l'impact d'une faillite bancaire", encourageant par exemple les États à transférer les comptes d'une banque défaillante à un établissement en bonne santé – procédure de résolution "moins perturbante" pour les clients qu'une liquidation.

Enfin, si la protection des dépôts est maintenue à hauteur de 100 000 euros par déposant et par banque, le texte harmonise les normes à travers l'UE en étendant la protection aux dépôts d'entités publiques (hôpitaux, écoles, municipalités...) et à certains fonds.

Réticences de l'Allemagne

L'effondrement récent aux États-Unis de Silicon Valley Bank (SVB) et de Signature Bank, suivi du rachat en urgence de Credit Suisse par sa compatriote UBS, a récemment fait craindre une crise plus large du secteur bancaire.

"Ces défaillances et les tensions qui en ont résulté nous rappellent pourquoi nous avons besoin d'un système solide et fonctionnel pour s'occuper de toutes les banques, quelle que soit leur taille, lorsqu'elles rencontrent des problèmes", a souligné M. Dombrovskis.

Mais cette réforme n'est pas "une réaction à ces événements", insiste la Commission, dont le texte s'inscrit dans les efforts d'achever l'"union bancaire" élaborée dans la douleur à partir de 2012.

Bruxelles avait lancé une refonte radicale de la supervision du secteur bancaire après la crise financière de 2008 et la crise de la dette de la zone euro, durant laquelle des milliards d'euros d'argent public avaient été dépensés pour renflouer les banques.

La surveillance des plus grandes banques de l'UE a été placée sous la responsabilité de la Banque centrale européenne (BCE).

L'UE s'est également dotée depuis 2016 d'un dispositif de réserves en cas de faillite : un"Fonds de résolution" alimenté par les banques elles-mêmes, qui devrait atteindre 80 milliards d'euros d'ici 2024.

Un système unifié de garantie des dépôts à l'échelle de l'UE (EDIS en anglais) permettrait de parachever l'union bancaire, alors que le marché européen reste encore très fragmenté, et permettrait selon ses partisans de créer de vrais groupes européens transfrontaliers pour mieux financer l'économie.

Mais cette mutualisation des garanties se heurte depuis des années aux farouches réticences de l'Allemagne et d'autres États du Nord, qui craignent de voir leurs épargnants payer pour les défaillances de banques de pays du sud.

Si le texte proposé mardi par Bruxelles reste bien en deçà d'une telle mutualisation, le conseil de surveillance prudentielle de la BCE a salué une "avancée pragmatique et importante", qui "permettra aux autorités de gérer les crises bancaires de manière plus efficace et harmonisée".

À l'inverse, la Fédération française bancaire (FBF) a déploré un texte insuffisant pour restreindre les "pratiques nationales de supervision qui s'ajoutent et qui limitent la liberté de circulation des capitaux".

"Il ne constitue donc aucun progrès vers la constitution d'un véritable 'marché unique' du secteur bancaire", a-t-elle dénoncé, rappelant par ailleurs que le Fonds de résolution – auquel les banques moyennes pourront avoir accès – a été "constitué à plus d'un tiers par les banques françaises".


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
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  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".