Concilier pêche et écologie, un défi atteignable et «indispensable»

Des membres de l'équipage de l'organisation de conservation marine Sea Shepherd Conservation Society (SSCS) soulèvent, à l'aide d'une grue, une vedette, à bord du navire Sam Simon après une opération nocturne lors d'une campagne visant à filmer et photographier les pêcheurs qui participent à un chalut-bœuf en pleine mer pour voir s'ils pêchent des dauphins, le 7 janvier 2020, dans le golfe de Gascogne, au large des côtes de la France. (Photo, AFP)
Des membres de l'équipage de l'organisation de conservation marine Sea Shepherd Conservation Society (SSCS) soulèvent, à l'aide d'une grue, une vedette, à bord du navire Sam Simon après une opération nocturne lors d'une campagne visant à filmer et photographier les pêcheurs qui participent à un chalut-bœuf en pleine mer pour voir s'ils pêchent des dauphins, le 7 janvier 2020, dans le golfe de Gascogne, au large des côtes de la France. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 22 avril 2023

Concilier pêche et écologie, un défi atteignable et «indispensable»

  • Le dernier mouvement des pêcheurs a donné l'impression de positions irréconciliables entre pêcheurs et défenseurs de l'environnement, qu'ils soient militants ou agents de l’État
  • «Un kilo de poissons pêché au chalut consomme un à deux litres de gazole et émet jusqu'à 6 ou 8 kilos d'équivalent CO2, soit quatre à dix fois plus que les pêches au filet et au casier», développe Didier Gascuel

BREST: La pêche est-elle compatible avec les impératifs écologiques? La récente crise, qui a vu pêcheurs et associations environnementales s'opposer frontalement, peut permettre d'en douter... Pourtant, une pêche durable et moins dépendante du gazole est possible et même indispensable, selon des acteurs du secteur.

Manifestations devant le domicile de la présidente de Sea Shepherd, tirs de fusée sur l'Office français de la Biodiversité (OFB) à Brest, incendié le lendemain... Le dernier mouvement des pêcheurs a donné l'impression de positions irréconciliables entre pêcheurs et défenseurs de l'environnement, qu'ils soient militants ou agents de l’État.

"Au quotidien, ça se passe généralement bien", souligne cependant Sylvain Michel, représentant du personnel CGT au pôle marin de l'OFB à Brest.

Selon lui, "il n'y a aucun doute sur le fait qu'on peut concilier la préservation des écosystèmes et la pêche: c'est même indispensable". "C'est pas toujours des discussions faciles, c'est même parfois des négociations assez tendues mais on arrive à dialoguer et à construire des actions ensemble", développe-t-il.

"Si on veut qu'il y ait des pêcheurs, il faut un écosystème protégé. C'est la protection des océans qui fera qu'il y aura encore de la pêche. Et les pêcheurs y ont toute leur place", approuve Charles Braine, président de Pleine Mer.

Cette association, créée pour tisser des "passerelles" entre pêcheurs et organisations de défense de l'environnement, publie notamment une carte des circuits courts pour promouvoir la pêche locale.

En pleine crise de la pêche, Pleine Mer a critiqué le projet d'interdire, en 2030, le chalut et autres "engins traînants" dans les aires marines protégées (AMP), ce qui serait "un drame pour la pêche artisanale et une aubaine pour les lobbys de la pêche industrielle".

"Il ne faut pas tout fermer d'un coup mais identifier les zones les plus importantes à protéger", souligne M. Braine, regrettant des AMP sans réelle protection, créées "pour faire du chiffre".

«Abandonner massivement le chalut»

A terme, ces critiques n'empêchent pas de questionner l'avenir du chalut, une technique de pêche dévastatrice pour les fonds marins et très gourmande en carburant.

"Un kilo de poissons pêché au chalut consomme un à deux litres de gazole et émet jusqu'à 6 ou 8 kilos d'équivalent CO2, soit quatre à dix fois plus que les pêches au filet et au casier", développe Didier Gascuel, professeur en écologie marine à l'Institut Agro dans "La pêchécologie" (Editions Quae, janvier 2023).

"Il n'y a pas d'autre solution pour décarboner la flotte que d'abandonner le chalut massivement", explique-t-il à l'AFP, car les technologies de substitution au moteur diesel (électricité, hydrogène, etc.) "ne sont pas au point" et ne le seront pas à moyen terme.

Le chercheur suggère d'expérimenter la pêche en plongée pour la coquille Saint-Jacques dans la baie de Saint-Brieuc ou de pêcher la langoustine avec des casiers, "comme en Islande", dans certaines zones de la grande vasière, au sud de la Bretagne.

"La crise énergétique est une très bonne opportunité pour inciter à la transition", appuie M. Braine. D'autant que "les méthodes de pêche douces font des poissons de meilleure qualité. Le poisson est moins abîmé, il est mieux valorisé".

Avec la hausse des prix du gazole, "la déchalutisation est un processus déjà engagé", remarque M. Gascuel. "Il est urgent de l'organiser plutôt que de le subir".

Augmenter les maillages des filets permettrait aussi d'accroître la taille et donc la biomasse de poissons en gardant des niveaux de captures élevées, propose M. Gascuel, qui plaide pour accorder plus de quotas aux pêcheurs qui joueraient le jeu. "Ce n'est pas gagné d'avance", reconnaît-il.

Pourtant, certains professionnels pratiquent déjà cette "petite pêche réellement durable", comme Breandán O'Geallabhain, 35 ans, qui vit "très convenablement" en pêchant à la ligne de traîne, au large de Lanildut (Finistère).

Avec son "tout petit" bateau de 7 mètres, il consomme trois fois moins de gazole par kilo de poissons pêchés. "Ce qui fait que je peux gagner ma vie avec peu de volumes", sourit-il.


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
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  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".