Au Kurdistan d'Irak aussi, on scrute la présidentielle en Turquie

Sur cette photo prise le 30 avril 2023, des personnes assises dans un café près de la citadelle d'Arbil, la capitale de la région autonome kurde du nord de l'Irak. (Photo Safin HAMID / AFP)
Sur cette photo prise le 30 avril 2023, des personnes assises dans un café près de la citadelle d'Arbil, la capitale de la région autonome kurde du nord de l'Irak. (Photo Safin HAMID / AFP)
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Publié le Jeudi 11 mai 2023

Au Kurdistan d'Irak aussi, on scrute la présidentielle en Turquie

  • Officiellement, les responsables du Kurdistan autonome, dans le nord de l'Irak, ne se prononcent pas sur la joute du 14 mai entre le président Erdogan et son rival Kemal Kiliçdaroglu, porté par une alliance de six partis
  • «Nous espérons que le prochain gouvernement turc va s'asseoir à la table du dialogue avec les Kurdes», confie Nizar Soltan, employé d'une université à Erbil

ERBIL: Au Kurdistan d'Irak aussi, la présidentielle en Turquie est scrutée de près. Si la région autonome, victime collatérale du conflit opposant l'armée turque aux combattants kurdes du PKK, espère une détente, elle veut préserver un partenariat stratégique construit avec Recep Tayyip Erdogan.

Officiellement, les responsables du Kurdistan autonome, dans le nord de l'Irak, ne se prononcent pas sur la joute du 14 mai entre le président Erdogan et son rival Kemal Kiliçdaroglu, porté par une alliance de six partis.

Mais "les médias, le champ politique, tout le monde est hautement préoccupé par ces élections turques", affirme le politologue kurde Adel Bakawan, rappelant le rôle géopolitique "fondamental" d'Ankara.

Sur un plan sécuritaire d'abord, puisque le conflit entre l'armée turque et les combattants kurdes du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) a depuis longtemps débordé dans le nord de l'Irak.

Avec des dizaines de positions militaires au Kurdistan autonome, les forces turques mènent frappes aériennes et opérations terrestres contre le PKK, classé organisation "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux.

"Le résultat de l'élection impactera directement les orientations de cette guerre", ajoute M. Bakawan, directeur du Centre Français de Recherche sur l'Irak.

En cas de victoire de l'opposition, il n'exclut pas la voie de "l'apaisement", M. Kiliçdaroglu ayant multiplié les mains tendues vers la communauté kurde.

Saut dans l'inconnu?

Le politologue Botan Tahseen estime que même si M. Ergodan l'emportait, il faut "une initiative pour normaliser les rapports de la Turquie avec ses voisins, en particulier le Kurdistan".

Evoquant une soif "de stabilité politique, sécuritaire et économique" au Moyen-Orient, lui aussi considère que l'opposition turque "mise sur la détente, et veut inaugurer une nouvelle page".

En deux décennies, le président Erdogan a fait de son pays une puissance régionale incontournable, négociant avec Moscou sur la guerre en Syrie, ou capable de défier Washington et les Européens.

Se contentant de communiqués condamnant les bombardements turcs comme une violation de la souveraineté irakienne et leurs répercussions pour les civils, le gouvernement régional d'Erbil n'a jamais véritablement durci le ton contre son voisin.

Car Ankara reste un partenaire économique stratégique.

Des années durant, le Kurdistan d'Irak dépendait de la Turquie pour exporter tout son pétrole - quelque 450.000 barils par jour - sans l'aval du pouvoir fédéral irakien.

Cette coopération, interrompue en raison d'un litige juridique entre Ankara et Bagdad, devrait in fine reprendre, une fois réglées des questions techniques et financières.

"Celui qui gouverne à Ankara aura des influences bien évidemment sur cette question", indique M. Bakawan.

Le scrutin constitue d'autant plus un tournant que les dirigeants à Erbil ont construit une relation très personnelle avec M. Erdogan, avertit le chercheur.

"Une fois que change le président, c'est la totalité des relations entre Erbil et Ankara qui change", souligne-t-il."Il faut reconfigurer, tisser à nouveau un lien avec une personne qu'on ne connaît pas."

Or "le monde diplomatique déteste l'inconnu." - "Dialogue" -

Illustrant cette proximité entre Erbil et Ankara, un député du Parti démocratique des peuples (HDP), une formation turque prokurde, a été refoulé dimanche à son arrivée à l'aéroport d'Erbil, selon des médias locaux.

L'homme était visé par une "interdiction de voyager" de Bagdad, selon un communiqué officiel.

Fin avril, le HDP avait appelé en Turquie à voter pour M. Kiliçdaroglu. Troisième force politique et deuxième groupe d'opposition au Parlement, il est considéré comme le faiseur de rois du scrutin présidentiel.

Si sa coalition n'a fait aucune proposition concrète pour résoudre la question kurde, M. Kiliçdaroglu a accusé son rival de "stigmatiser" la communauté. Il a affirmé qu'il ferait libérer Selahattin Demirtas, chef de file du HDP, emprisonné depuis 2016 pour "propagande terroriste".

Mus par un sentiment de solidarité ethnique, les Kurdes d'Irak rêvent de voir s'arrêter les arrestations et les discriminations en Turquie. Mais si M. Kiliçdaroglu jouit d'un réel appui chez les Kurdes, la prudence reste de mise.

"Nous espérons que le prochain gouvernement turc va s'asseoir à la table du dialogue avec les Kurdes", confie Nizar Soltan, employé d'une université à Erbil.

"Des dizaines de fois (les hommes politiques turcs) ont dupé les Kurdes et les ont
utilisés pour arriver à leurs fins", regrette le sexagénaire attablé dans un café, qui juge que la communauté finit invariablement par être "marginalisée".

"Cette fois-ci, espérons qu'ils tiendront leurs promesses, et que les régions kurdes retrouveront sécurité et stabilité."


L'armée israélienne dit avoir tué trois membres du Hezbollah dans le sud du Liban

Samedi, l'armée israélienne avait indiqué avoir suspendu "temporairement" une frappe prévue sur un bâtiment de la région méridionale de Yanouh, qu'elle avait décrit comme une infrastructure du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne avait indiqué avoir suspendu "temporairement" une frappe prévue sur un bâtiment de la région méridionale de Yanouh, qu'elle avait décrit comme une infrastructure du Hezbollah. (AFP)
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  • "Les terroristes ont participé à des tentatives visant à rétablir les infrastructures" du mouvement libanais, en violation de l'accord de cessez-le-feu de novembre 2024
  • Puis dans un autre communiqué, l'armée a précisé avoir tué "un terroriste" dans la région de Jwaya, qui avait "activé des agents (du Hezbollah) au sein des services de sécurité libanais".

JERUSALEM: L'armée israélienne a déclaré avoir tué dimanche trois membres du Hezbollah dans le sud du Liban, Beyrouth faisant état également de trois morts dans des frappes israéliennes dans la région.

"Depuis ce matin (dimanche), l'armée a frappé trois terroristes du Hezbollah dans plusieurs zones du sud du Liban", a précisé l'armée israélienne dans un communiqué.

"Les terroristes ont participé à des tentatives visant à rétablir les infrastructures" du mouvement libanais, en violation de l'accord de cessez-le-feu de novembre 2024, a-t-elle ajouté.

L'armée a ensuite affirmé avoir "éliminé" deux d'entre eux "en moins d'une heure", dans les régions de Yater et Bint Jbeil (sud du Liban).

Puis dans un autre communiqué, l'armée a précisé avoir tué "un terroriste" dans la région de Jwaya, qui avait "activé des agents (du Hezbollah) au sein des services de sécurité libanais".

Le ministère libanais de la Santé avait auparavant fait état de trois morts dans des frappes israéliennes à Yater, Safad Al-Battikh et Jwaya.

Un cessez-le-feu est en vigueur depuis novembre 2024 après plus d'un an d'hostilités entre Israël et le mouvement islamiste libanais, en marge de la guerre à Gaza.

Malgré cette trêve, Israël mène régulièrement des frappes au Liban, notamment dans le sud, bastion du Hezbollah, affirmant viser des membres et des infrastructures du mouvement libanais pour l'empêcher de se réarmer.

Samedi, l'armée israélienne avait indiqué avoir suspendu "temporairement" une frappe prévue sur un bâtiment de la région méridionale de Yanouh, qu'elle avait décrit comme une infrastructure du Hezbollah.

L'armée libanaise est censée achever d'ici la fin de l'année le démantèlement, prévu par l'accord de cessez-le-feu, des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe pro-iranien, et tarir les sources de financement de la formation islamiste.

Israël maintient cinq positions dans la zone, malgré son retrait du territoire libanais prévu par l'accord de cessez-le-feu.

Dans un discours samedi, le chef du Hezbollah, Naim Qassem, qui a rejeté à plusieurs reprises la perspective d'un désarmement du mouvement, a déclaré que celui-ci "ne permettra pas à Israël d'atteindre son objectif" de mettre fin à la résistance, "même si le monde entier s'unit contre le Liban".

 


Un an après la chute d’Assad, les Syriens affichent un fort soutien à al-Chareh

Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
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  • Un sondage révèle un optimisme croissant et un large soutien aux progrès du gouvernement après la chute d’Assad
  • L’Arabie saoudite apparaît comme le pays étranger le plus populaire, Trump reçoit également un soutien marqué

LONDRES : Alors que les Syriens ont célébré cette semaine le premier anniversaire de la chute de Bachar Al-Assad, une enquête menée dans le pays révèle un soutien massif au nouveau président et place l’Arabie saoudite comme principal partenaire international apprécié.

L’ancien président avait fui le pays le 8 décembre 2024, après une offensive éclair de l’opposition jusqu’à Damas, mettant fin à 14 ans de guerre civile.

La campagne était menée par Ahmad al-Chareh, aujourd’hui président du pays, qui s’efforce de stabiliser la Syrie et de rétablir des relations avec ses partenaires internationaux.

Ces efforts ont été salués dans un sondage récemment publié, montrant que 81 % des personnes interrogées ont confiance dans le président et 71 % dans le gouvernement national.

Les institutions clés bénéficient également d’un fort soutien : plus de 70 % pour l’armée et 62 % pour les tribunaux et le système judiciaire.

L’enquête a été menée en octobre et novembre par Arab Barometer, un réseau de recherche américain à but non lucratif.

Plus de 1 200 adultes sélectionnés aléatoirement ont été interrogés en personne à travers le pays sur une large gamme de sujets, notamment la performance du gouvernement, l’économie et la sécurité.

Le large soutien exprimé envers al-Chareh atteint un niveau enviable pour de nombreux gouvernements occidentaux, alors même que la Syrie fait face à de profondes difficultés.

Le coût de la reconstruction dépasse les 200 milliards de dollars selon la Banque mondiale, l’économie est dévastée et le pays connaît encore des épisodes de violence sectaire.

Al-Chareh s’efforce de mettre fin à l’isolement international de la Syrie, cherchant l’appui de pays de la région et obtenant un allègement des sanctions américaines.

Un soutien clé est venu d’Arabie saoudite, qui a offert une aide politique et économique. Le sondage place le Royaume comme le pays étranger le plus populaire, avec 90 % d’opinions favorables.

Le Qatar recueille lui aussi une forte popularité (plus de 80 %), suivi de la Turquie (73 %).

La majorité des personnes interrogées — 66 % — expriment également une opinion favorable envers les États-Unis, saluant la décision du président Donald Trump d’assouplir les sanctions et l’impact attendu sur leur vie quotidienne.

Après sa rencontre avec al-Chareh à Washington le mois dernier, Trump a annoncé une suspension partielle des sanctions, après en avoir déjà assoupli plusieurs volets.

Le sondage montre que 61 % des Syriens ont une opinion positive de Trump — un niveau supérieur à celui observé dans une grande partie du Moyen-Orient.

En revanche, l’enthousiasme est bien moindre concernant les efforts américains pour normaliser les relations entre la Syrie et Israël.

Seuls 14 % soutiennent cette démarche, et à peine 4 % disent avoir une opinion favorable d’Israël.

Lors du chaos provoqué par la chute d’Assad, l’armée israélienne a occupé de nouveaux territoires dans le sud de la Syrie et a mené de fréquentes attaques au cours de l’année écoulée.

Plus de 90 % des Syriens considèrent l’occupation israélienne des territoires palestiniens et les frappes contre l’Iran, le Liban et la Syrie comme des menaces critiques pour leur sécurité.

Dans Foreign Policy, Salma Al-Shami et Michael Robbins (Arab Barometer) écrivent que les résultats de l’enquête donnent des raisons d’être optimiste.

« Nous avons constaté que la population est pleine d’espoir, favorable à la démocratie et ouverte à l’aide étrangère », disent-ils. « Elle approuve et fait confiance à son gouvernement actuel. »

Mais ils notent aussi plusieurs sources d’inquiétude, notamment l’état de l’économie et la sécurité interne.

Le soutien au gouvernement chute nettement dans les régions majoritairement alaouites.

La dynastie Assad, au pouvoir pendant plus de 50 ans, était issue de la minorité alaouite, dont les membres occupaient de nombreux postes clés.

L’économie reste la principale préoccupation : seuls 17 % se disent satisfaits de sa performance, et beaucoup s’inquiètent de l’inflation, du chômage et de la pauvreté.

Quelque 86 % déclarent que leurs revenus ne couvrent pas leurs dépenses, et 65 % affirment avoir eu du mal à acheter de la nourriture le mois précédent.

La sécurité préoccupe aussi : 74 % soutiennent les efforts du gouvernement pour collecter les armes des groupes armés et 63 % considèrent l’enlèvement comme une menace critique.

À l’occasion de l’anniversaire de la chute d’Assad, lundi, al-Chareh a affirmé que le gouvernement œuvrait à construire une Syrie forte, à consolider sa stabilité et à préserver sa souveraineté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël mène une série de frappes contre le Hezbollah au Liban

Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
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  • Israël a frappé vendredi plusieurs sites du Hezbollah au sud et à l’est du Liban, ciblant notamment un camp d’entraînement de sa force d’élite al-Radwan, malgré le cessez-le-feu conclu en novembre 2024
  • Ces raids interviennent alors que l’armée libanaise doit achever le démantèlement des infrastructures militaires du Hezbollah le long de la frontière israélienne d’ici le 31 décembre

BEYROUTH: Israël a mené une série de frappes aériennes contre le sud et l'est du Liban vendredi matin, selon les médias officiels, l'armée israélienne affirmant viser des objectifs du Hezbollah pro-iranien dont un camp d'entrainement.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe islamiste libanais, Israël continue de mener des attaques régulières contre le Hezbollah, l'accusant de se réarmer.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani), les raids de vendredi, qualifiés en partie de "violents", ont visé une dizaine de lieux, certains situés à une trentaine de km de la frontière avec Israël.

Dans un communiqué, l'armée israélienne a affirmé avoir "frappé un complexe d'entrainement" de la force d'élite du Hezbollah, al-Radwan, où des membres de la formation chiite apprenaient "l'utilisation de différents types d'armes", devant servir dans "des attentats terroristes".

L'armée israélienne a également "frappé des infrastructures militaires supplémentaires du Hezbollah dans plusieurs régions du sud du Liban", a-t-elle ajouté.

L'aviation israélienne avait déjà visé certains des mêmes sites en début de semaine.

Ces frappes interviennent alors que l'armée libanaise doit achever le démantèlement le 31 décembre des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord, conformément à l'accord de cessez-le-feu.

Les zones visées vendredi se trouvent pour la plupart au nord du fleuve.

Le Hezbollah a été très affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe.