En Turquie, infox à plein régime avant les élections

Des gens marchent à côté des panneaux d'affichage des candidats présidentiels Recep Tayyip Erdogan, à droite, et Kemal Kiliçdaroglu, à Istanbul, le 11 mai 2023 (AP).
Des gens marchent à côté des panneaux d'affichage des candidats présidentiels Recep Tayyip Erdogan, à droite, et Kemal Kiliçdaroglu, à Istanbul, le 11 mai 2023 (AP).
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Publié le Vendredi 12 mai 2023

En Turquie, infox à plein régime avant les élections

  • Il y a une semaine, le président Erdogan avait affirmé, sans lui non plus en apporter la preuve, «qu'une armée de trolls travaille pour Monsieur Kemal» sur les réseaux sociaux
  • Le candidat, en bonne posture dans les sondages, avait déjà affirmé que des «pirates étrangers» recrutés par le camp Erdogan préparaient des "deepfakes", vidéos ou sons manipulés grâce à l'intelligence artificielle, afin de le discréditer

ISTANBUL: Le clip dure quatorze secondes, présentées par le président turc Recep Tayyip Erdogan comme la preuve que son principal rival, Kemal Kiliçdaroglu, "avance main dans la main avec le [groupe armé] PKK".

Sur les images, le candidat de l'opposition turque appelle en musique à aller "ensemble aux urnes" le 14 mai, aussitôt imité par un cadre du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), organisation qualifiée de terroriste par Ankara et ses alliés occidentaux.

Mais la vidéo projetée dimanche à Istanbul devant une marée de partisans du chef de l'Etat, à sept jours des élections présidentielle et législatives, est un montage - l'une des dernières infox à être venues polluer la campagne électorale turque.

"Comment une personne assise dans le fauteuil de la présidence peut-elle s'abaisser à cela ?", a fulminé mardi M. Kiliçdaroglu, chef du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), à la tête d'une coalition réunissant six partis de l'opposition.

Le candidat, en bonne posture dans les sondages, avait déjà affirmé que des "pirates étrangers" recrutés par le camp Erdogan préparaient des "deepfakes", vidéos ou sons manipulés grâce à l'intelligence artificielle, afin de le discréditer.

Jeudi soir, il a directement accusé un groupe "russe" d'avoir manipulé des images et des enregistrements pour nuire à Muharrem Ince, un candidat de l'opposition qui s'est retiré jeudi de la course à la présidentielle et avait été la cible d'une campagne de dénigrement en ligne.

«Armée de trolls»

Il y a une semaine, le président Erdogan avait affirmé, sans lui non plus en apporter la preuve, "qu'une armée de trolls travaille pour Monsieur Kemal" sur les réseaux sociaux.

"Vous utilisez le mensonge et la désinformation. Vous songez à des méthodes auxquelles même le Diable n'aurait pas pensé", a-t-il lancé à la télévision.

Mi-octobre, le parlement acquis au président Erdogan a adopté une loi punissant de prison ferme la diffusion de "fausses nouvelles".

Kemal Kiliçdaroglu était devenu le premier à être poursuivi au titre de la nouvelle loi, après avoir accusé le gouvernement islamo-conservateur d'être responsable d'une "épidémie" dans le pays.

La commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatovic, s'est inquiétée début mai que "les dispositions pénales incriminant la diffusion d'informations +fausses ou trompeuses+ so[ient] de plus en plus largement appliquées" en Turquie.

Dans cette campagne, "tout le monde essaie de définir ce qu'est la désinformation. Cela devient une arme pour criminaliser le candidat ou le parti adverse. C'est quelque chose de nouveau", relève Suncem Koçer, spécialiste de la désinformation à l'université Koç d'Istanbul.

En Turquie, les Kurdes tournent le dos à Erdogan

Épuisé par la répression menée dans la région à majorité kurde de Turquie, Ali votera dimanche pour le principal opposant au président Recep Tayyip Erdogan.

"Il est temps de changer", déclare à l'AFP cet habitant de Diyarbakir (sud-est), la "capitale" officieuse des Kurdes de Turquie.

"Pour quiconque regarde la télévision, les Kurdes sont des terroristes", déplore le quinquagénaire, qui refuse de décliner son nom complet par crainte de représailles.

Sans le nommer, Ali explique qu'il votera pour Kemal Kiliçdaroglu, le chef du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), à la tête d'une coalition de six partis.

"Mais je mentirais si je disais que je (lui) fais entièrement confiance", confie-t-il.

Les Kurdes - environ un cinquième des 85 millions d'habitants - ont été persécutés dans la Turquie post-ottomane créée par Mustafa Kemal Atatürk, le fondateur du CHP.

La république moderne a nié l'existence même de la communauté, privant les Kurdes de leurs droits à la culture et à leur langue.

Lors de son arrivée au pouvoir en 2002, le parti AKP (islamo-conservateur) du président Erdogan a été populaire parmi les Kurdes, en recherchant un accord pour mettre fin à la lutte sanglante des Kurdes pour leur autonomie.

Mais l'échec de ces pourparlers en 2015 a conduit à la reprise du conflit armé opposant l'État turc au PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan, groupe armé qualifié de terroriste par Ankara et ses alliés occidentaux.

«Véritable danger»

Pour Gülin Çavus, co-fondatrice et directrice de la stratégie du site de fact-checking turc Teyit, les méthodes de désinformation restent "de manière générale similaires à celles des précédentes élections", en particulier la diffusion "sur les réseaux sociaux mais aussi lors de meetings" d'images tronquées ou sorties de leur contexte.

Devant une foule de partisans mardi à Aydin (sud-ouest), le président turc a ainsi projeté une courte vidéo montrant des extraits d'une coupure de presse tronquée de 1996 laissant penser que Kemal Kiliçdaroglu s'était rendu coupable d'une fraude à l'aide sociale.

Dans l'article original, rapidement exhumé par des journalistes de Teyit, M. Kiliçdaroglu dénonçait en réalité la fraude contre la Sécurité sociale turque, institution qu'il dirigeait alors.

"Ces vidéos peuvent avoir un impact réel sur les personnes peu formées aux médias et aux outils numériques", affirme Gülin Çavus.

De faux tracts de campagne de Kemal Kiliçdaroglu, contenant de fausses promesses telles que le retrait des troupes turques du nord de la Syrie ou l'arrêt des opérations militaires contre le PKK, ont également été distribués cette semaine dans la ville conservatrice de Kayseri, en Anatolie centrale.

Pour Suncem Koçer, ces infox, même répétées, n'auront qu'une influence marginale sur le vote des 64 millions d'électeurs turcs.

"Je ne crois pas qu'une campagne de désinformation puisse vraiment déterminer les résultats des élections, car ils dépendent d'une multitude de facteurs complexes et variés", juge Suncem Koçer.

"Mais la désinformation contribue à accroître la polarisation, ce qui est le véritable danger".


L'UE promet 88 millions d'euros en faveur de l'Autorité palestinienne

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  • "Nous avons signé plus de 82 millions d'euros", qui viennent s'ajouter aux six millions d'euros déjà annoncés, s'est félicitée devant la presse la commissaire européenne chargée de la Méditerranée, Dubravka Suica
  • Quelque soixante délégations rassemblant les 27 de l'UE, les pays arabes et plusieurs organisations internationales se sont retrouvées jeudi à Bruxelles, sans la présence d'Israël

BRUXELLES: Les pays de l'Union européenne vont verser quelque 88 millions d'euros pour aider l'Autorité palestinienne, pressée de se réformer par les Européens, soucieux de son rôle futur dans le cadre du plan Trump pour la région.

"Nous avons signé plus de 82 millions d'euros", qui viennent s'ajouter aux six millions d'euros déjà annoncés, s'est félicitée devant la presse la commissaire européenne chargée de la Méditerranée, Dubravka Suica, à l'issue d'une conférence des donateurs à Bruxelles.

Quelque soixante délégations rassemblant les 27 de l'UE, les pays arabes et plusieurs organisations internationales se sont retrouvées jeudi à Bruxelles, sans la présence d'Israël.

"Aujourd'hui, nous avons présenté les progrès réalisés dans le cadre de notre programme de réforme nationale, qui est mis en œuvre, pas seulement promis, mais mis en œuvre et en avance sur le calendrier, ce qui a été reconnu par nos partenaires", a indiqué de son côté le Premier ministre palestinien Mohammed Mustafa.

Et cela "en dépit d'un environnement défavorable", a-t-il ajouté, accusant Israël de chercher "à affaiblir l'Autorité palestinienne ainsi que sa capacité à fonctionner".

Mme Suica a réitéré sur ce point les appels lancés par l'Union européenne pour qu'Israël accepte de libérer les recettes fiscales dues à l'Autorité palestinienne, indispensables à son fonctionnement.

"Cela a été dit par tous les participants", a-t-elle assuré.

Concernant Gaza, M. Mustafa a assuré que l'Autorité palestinienne avait un plan, soutenu par les pays arabes pour sa reconstruction. "Nous gouvernerons, nous réformerons et nous dirigerons la reconstruction de Gaza", a-t-il assuré.

L'Union européenne est le principal soutien financier de l'Autorité palestinienne. Elle conditionne toutefois le versement futur de cette aide à des réformes, qu'elle juge indispensables pour que cette Autorité soit en mesure de jouer pleinement son rôle dans le cadre de la solution à deux États, israélien et palestinien, que les Européens défendent depuis des années.

"Tout notre soutien à l'Autorité palestinienne est lié aux efforts pour poursuivre l'agenda des réformes", a rappelé Mme Suica.


Zelensky va rencontrer des responsables du Pentagone sur fond d'initiative américaine pour régler le conflit

 Volodymyr Zelensky va rencontrer jeudi à Kiev des haut responsables du Pentagone, a annoncé son administration, au lendemain du dévoilement des éléments d'un plan américain pour mettre fin à la guerre menée par la Russie en Ukraine, à des conditions favorables au Kremlin. (AFP)
Volodymyr Zelensky va rencontrer jeudi à Kiev des haut responsables du Pentagone, a annoncé son administration, au lendemain du dévoilement des éléments d'un plan américain pour mettre fin à la guerre menée par la Russie en Ukraine, à des conditions favorables au Kremlin. (AFP)
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  • Depuis le retour au pouvoir de Donald Trump en janvier, peu de responsables américains se sont rendus en Ukraine
  • Selon un média américain Axios, Washington et Moscou préparent discrètement un plan pour mettre fin à la guerre en Ukraine, lancée en février 2022 avec l'invasion russe du pays voisin

KIEV: Volodymyr Zelensky va rencontrer jeudi à Kiev des haut responsables du Pentagone, a annoncé son administration, au lendemain du dévoilement des éléments d'un plan américain pour mettre fin à la guerre menée par la Russie en Ukraine, à des conditions favorables au Kremlin.

Cette réunion intervient au retour d'une visite infructueuse mercredi en Turquie du président ukrainien, qui espérait que Washington s'investisse à nouveau dans les négociations de paix. Mais l'émissaire de Donald Trump, Steve Witkoff, ne s'est pas déplacé.

Elle intervient également au lendemain d'une frappe russe ayant tué au moins 26 personnes dans une ville de l'ouest de l'Ukraine, l'une des attaques les plus meurtrières de Moscou sur son voisin ukrainien cette année.

La délégation du Pentagone, conduite par le secrétaire à l'Armée américaine, Daniel Driscoll, a rencontré mercredi le commandant en chef des armées ukrainiennes Oleksandre Syrsky et le ministre ukrainien de la Défense Denys Chmygal, selon leurs communiqués respectifs.

Le président Zelensky doit recevoir la délégation jeudi soir, a indiqué la présidence.

Depuis le retour au pouvoir de Donald Trump en janvier, peu de responsables américains se sont rendus en Ukraine.

Selon un média américain Axios, Washington et Moscou préparent discrètement un plan pour mettre fin à la guerre en Ukraine, lancée en février 2022 avec l'invasion russe du pays voisin.

Un haut responsable ukrainien a indiqué à l'AFP que ce plan requiert notamment que l'Ukraine cède à la Russie des territoires qu'elle occupe et réduise son armée de moitié.

Le Kremlin s'est refusé à tout commentaire et Washington et Kiev n'ont pas commenté publiquement les propositions de ce plan.

 


Grèce: découverte d'une toile géante avec 111.000 araignées dans une grotte

Appelée la "Sulfur cave", exceptionnellement riche en soufre, la grotte est située dans les gorges de Vromoner, une zone géologique à la frontière entre l'Albanie et la Grèce (nord-ouest), à 450km d'Athènes. (AFP)
Appelée la "Sulfur cave", exceptionnellement riche en soufre, la grotte est située dans les gorges de Vromoner, une zone géologique à la frontière entre l'Albanie et la Grèce (nord-ouest), à 450km d'Athènes. (AFP)
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  • La toile d'araignée découverte couvre quelque 106 m2 et comprend "69.000 individus de tégénaires domestiques (Tegenaria domestica) et plus de 42.000 de Prinerigone vagans (Linyphiidae)"
  • Des images, reçues mercredi par l'AFP, montrent des pans de cette immense toile, pendant sur la paroi comme un lourd rideau de velours noir, dans les profondeurs de cette grotte sous le regard fasciné d'un scientifique équipé comme un spéléologue

ATHENES: Des scientifiques ont récemment découvert une toile d'araignée géante de plus de 100 m2 avec quelque 111.000 araignées dans une grotte à la frontière entre la Grèce et l'Albanie, selon une étude publiée dans la revue Subterranean Biology.

Appelée la "Sulfur cave", exceptionnellement riche en soufre, la grotte est située dans les gorges de Vromoner, une zone géologique à la frontière entre l'Albanie et la Grèce (nord-ouest), à 450km d'Athènes.

La toile d'araignée découverte couvre quelque 106 m2 et comprend "69.000 individus de tégénaires domestiques (Tegenaria domestica) et plus de 42.000 de Prinerigone vagans (Linyphiidae)".

Des images, reçues mercredi par l'AFP, montrent des pans de cette immense toile, pendant sur la paroi comme un lourd rideau de velours noir, dans les profondeurs de cette grotte sous le regard fasciné d'un scientifique équipé comme un spéléologue.

"Mon dieu, incroyable! Quelle texture!", s'exclame en anglais ce scientifique touchant la toile avec ses doigts.

Selon lui, dans chacun de ces trous il y a une arachnide à l'origine de ces "mégapoles" d'araignées. On voit ensuite un membre de l'équipe réussir à attraper une araignée et la poser dans une tube à essai.

Dans la revue, les chercheurs évoquent "la découverte (...) d’un assemblage extraordinaire d’araignées coloniales" alors que ces deux espèces sont normalement solitaires.

Il s'agit du "premier cas documenté de formation de toile coloniale chez ces espèces", notent d'ailleurs les experts qui précisent que cette immense toile est formée "de nombreuses toiles individuelles, (...) chacune étant stratégiquement placée à un endroit où les ressources trophiques (la nourriture disponible, ndlr) sont abondantes".

"Certaines sections de la toile peuvent se détacher de la paroi sous leur propre poids", expliquent-ils.

Des sources d'eau situées dans les recoins profonds de la grotte alimentent un ruisseau sulfuré qui traverse toute la longueur du passage principal de la grotte, selon l'étude.

Les araignées partagent la grotte avec de nombreux autres insectes, notamment des mille-pattes, des scorpions et des coléoptères.

La découverte de cette immense toile a été rapportée pour la première fois par des membres de la Société spéléologique tchèque, selon l'étude.