Inquiétudes concernant l’économie turque à l’approche du second tour de la présidentielle

Des Turcs jouent à l’okey dans un café après les élections présidentielles et législatives turques du 14 mai, à Ankara, en Turquie, le 15 mai 2023. (Reuters)
Des Turcs jouent à l’okey dans un café après les élections présidentielles et législatives turques du 14 mai, à Ankara, en Turquie, le 15 mai 2023. (Reuters)
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Publié le Mardi 16 mai 2023

Inquiétudes concernant l’économie turque à l’approche du second tour de la présidentielle

  • En cas de victoire de Kilicdaroglu, ancien fonctionnaire et économiste, l’économie devrait être stimulée par des flux d’investissements étrangers
  • Le programme de politique économique d’Erdogan sera basé sur la poursuite du statu quo avec des politiques peu orthodoxes qui utilisent plusieurs outils pour maintenir l’économie à flot

ANKARA: Alors que les élections présidentielles turques se dirigent vers un second tour opposant le président sortant, Recep Tayyip Erdogan, à son adversaire de l’opposition, Kemal Kilicdaroglu, le 28 mai, la faiblesse de l’économie du pays demeure la principale préoccupation aux niveaux national et international.

L’inflation galopante de ces deux dernières années, qui s’élevait à environ 44% en avril, et la flambée des prix des denrées alimentaires ont considérablement exacerbé la crise du coût de la vie en Turquie.

Les obligations souveraines libellées en dollars et les actions de la Turquie ont également chuté, et les principaux acteurs économiques du pays et de l’étranger sont inquiets et incertains de ce qui les attend.

Sur l’ensemble des dépôts bancaires, environ 40% sont détenus sur des comptes en devises et en or, tandis que le déficit du commerce extérieur sur un an culmine à un niveau record de 120 milliards de dollars (1 dollar = 0,92 euro).

Certains experts estiment que le programme de politique économique d’Erdogan sera basé sur la poursuite du statu quo avec des politiques peu orthodoxes qui utilisent plusieurs outils pour maintenir l’économie à flot.

Cependant, ils avertissent que la situation économique de la Turquie ne peut pas durer et qu’une remise en question est nécessaire.

Une victoire probable d’Erdogan au second tour signifie que ses politiques économiques actuelles seront maintenues et que seules des mesures d’ajustement partielles, telles que la nomination de nouveaux responsables à des postes économiques clés pour regagner la confiance des marchés, sont attendues en cas d’instabilité financière accrue.

La présence de l’ancien tsar de l’économie, Mehmet Simsek, lors de la campagne électorale d’Erdogan, a suscité des interrogations quant à un éventuel retour à des politiques orthodoxes en cas de victoire.

Les gouverneurs de la Banque centrale de Turquie ont été remplacés à plusieurs reprises ces dernières années dans le cadre d’une stratégie visant à ne pas augmenter les taux d’intérêt.

En cas de victoire de Kilicdaroglu, ancien fonctionnaire et économiste, l’économie devrait être stimulée par des flux d’investissements étrangers.

Pour ce faire, le candidat, âgé de 74 ans, doit élargir son cercle d’alliés dans les deux semaines à venir, afin d’attirer plus d’électeurs et d’encourager sa base à se rendre aux urnes.

Selon Timothy Ash, économiste et stratège chez BlueBay Asset Management, la Banque centrale turque (CBRT) maintiendrait la livre stable jusqu’aux élections, probablement en dessous de 20 livres pour un dollar.

«Les marchés du crédit seront faibles et vulnérables en raison des ventes étrangères. Après les élections, je pense que la livre va s’affaiblir de manière considérable et nous verrons si la CBRT réagira en augmentant les taux directeurs ou pas», indique-t-il à Arab News

Si Erdogan l’emporte et poursuit ses politiques économiques actuelles, la demande de devises fortes devrait monter en flèche et provoquer un véritable choc monétaire, ce qui exigerait d’autres sources de financement extérieur.

Emre Peker, directeur pour l’Europe du cabinet de conseil Eurasia Group, estime que l’équipe d’Erdogan est susceptible de soutenir la stabilité des marchés turcs à l’approche du second tour, où il est probable qu’il soit réélu.

«Si Erdogan est élu pour un troisième mandat, il devra s’en tenir à sa politique actuelle de faibles taux d’intérêt. Ankara devrait toutefois relâcher sa défense de la livre, qui dure depuis des années, afin de permettre une certaine faiblesse de la devise», explique-t-il à Arab News

Comme le Parti de la justice et du développement d’Erdogan, actuellement au pouvoir, et son Alliance populaire ont obtenu une majorité absolue lors des élections législatives de dimanche, on s’attend à ce qu’ils poursuivent les politiques économiques actuelles.

Selon Peker, cela risque d’attiser les pressions inflationnistes et d’exacerber les déséquilibres économiques, car Erdogan cherche à instaurer un modèle de croissance axé sur les exportations.

«Toutefois, un retour à une politique orthodoxe est peu probable, à moins que le risque d’un choc massif ne se matérialise. Le Parlement n’aura pas son mot à dire sur la politique économique, qui sera entièrement contrôlée par la présidence», souligne-t-il. 

Les experts avertissent que l’insistance sur des taux d’intérêt faibles pourrait faire baisser davantage le taux de la livre face au dollar, mais d’autre part, toute augmentation significative des taux d’intérêt pour freiner l’inflation entraînerait également une récession.

Quant à Timothy Ash, il pense que les investisseurs étrangers continueront à réduire leur exposition à la Turquie jusqu’à ce que la CBRT annonce clairement comment elle réagira concernant les taux.

«Il est peu probable qu’Erdogan autorise une hausse des taux directeurs après l’élection, à moins qu’il n’y soit contraint par un effondrement brutal des marchés. Il a clairement exprimé son point de vue sur les taux d’intérêt par le passé. Il ne croit pas que la hausse des taux réduise l’inflation et essaiera de maintenir les taux directeurs à un niveau très bas», ajoute-t-il. 

Enver Erkan, économiste en chef chez Dinamik Yatirim à Istanbul, précise que le fait d’attendre deux semaines supplémentaires dans l’incertitude jusqu’au second tour pourrait exercer une pression sur la livre.

«Jusqu’à présent, les résultats de ces politiques se sont traduits par une inflation qui pèse de plus en plus lourd sur les budgets des ménages. Contrôler l’inflation et le taux de change avec des taux d’intérêt faibles est très coûteux pour l’économie, et la croissance n’est assurée que par un mécanisme de soutien/d’incitation économique et une chaîne de dettes qui engendre encore plus d’inflation», explique-t-il à Arab News

D’après les données budgétaires du mois d’avril annoncées par le ministère du Trésor et des Finances, le budget du gouvernement central a enregistré un déficit de 132,5 milliards de livres, contre 50,2 milliards de livres il y a un an.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com