Les journées aux mains des oppositions, terrains minés à l'Assemblée

Sophia Chikirou, députée française de La France Insoumise (LFI) et de la coalition de gauche NUPES (Nouvelle Union populaire écologique et sociale), lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris le 30 mai 2023. (Photo Alain JOCARD/AFP)
Sophia Chikirou, députée française de La France Insoumise (LFI) et de la coalition de gauche NUPES (Nouvelle Union populaire écologique et sociale), lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris le 30 mai 2023. (Photo Alain JOCARD/AFP)
Short Url
Publié le Lundi 05 juin 2023

Les journées aux mains des oppositions, terrains minés à l'Assemblée

  • Depuis juin 2022 et la majorité relative des macronistes, ces journées réservées aux textes des groupes d'opposition ou des groupes minoritaires sont devenues épiques
  • Chaque groupe met en général en avant ses sujets fétiches - l'immigration pour LR, la hausse du Smic pour LFI...

PARIS: Attention journées de tous les dangers: à l'Assemblée nationale, les "niches" pilotées par les oppositions, comme celle du 8 juin du groupe indépendant Liot qui veut abroger la retraite à 64 ans, sont devenues des pièges pour le camp présidentiel.

Bourbiers à répétition

Depuis juin 2022 et la majorité relative des macronistes, ces journées réservées aux textes des groupes d'opposition ou des groupes minoritaires sont devenues épiques.

Un premier psychodrame s'est joué en novembre dernier à la fin de la "niche" de La France insoumise: la majorité a eu recours à une forme d'obstruction pour empêcher un vote en faveur d'une réintégration des soignants non-vaccinés contre le Covid, provoquant une tension inédite dans l'hémicycle.

En décembre, Aurélien Pradié (LR) est lui parvenu à faire adopter par 41 voix contre 40 le principe d'une juridiction spécialisée dans les violences intrafamiliales, contre l'avis du gouvernement.

Mêmes bras de fer et poussées de fièvre lors des journées socialistes et communistes autour de textes contre le "démembrement" d'EDF - la majorité a quitté la séance - ou pour augmenter la dotation aux collectivités - le gouvernement a été accusé de ralentir délibérément les débats.

"Vous sentez que ce qui se profile pour vous, c’est Waterloo, et vous voulez reculer, comme à Waterloo" devant les votes, avait alors lancé aux macronistes le patron des députés PCF André Chassaigne.

La fenêtre des niches

Ces "niches parlementaires" existent depuis 2008: la Constitution réserve un jour de séance par mois aux textes des groupes d'opposition ou groupes minoritaires (MoDem et Horizons).

Depuis octobre dernier, tous les groupes politiques hors Renaissance ont ainsi eu ou vont avoir leur journée, dont Liot (Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires), le 8 juin.

L'objectif de cette innovation parlementaire est de remédier à la difficulté pour un député d’inscrire une proposition de loi dont il est l'auteur au menu de l'Assemblée, surtout s'il est dans l'opposition.

Car le gouvernement dicte l'ordre du jour deux semaines sur quatre. Une troisième semaine est dédiée au contrôle de l'action gouvernementale, et la dernière est fixée par l'Assemblée elle-même, autrement dit par le groupe majoritaire.

Une tribune

Pour chaque "niche", les députés doivent encore batailler pour que leurs textes soient retenus par leur propre groupe. Les places sont chères du fait du temps contraint - 11h30 d'échanges au total, étalées de 9h00 au couperet de minuit.

Chaque groupe met en général en avant ses sujets fétiches - l'immigration pour LR, la hausse du Smic pour LFI...

Il s'agit aussi de doser entre ces textes étendards, souvent portés par des ténors, et d'autres moins ambitieux mais ayant une chance d'être adoptés, pour ramener quelques victoires.

Pour sa fenêtre parlementaire, le choix de Liot s'est imposé de lui-même: dans la foulée de la promulgation mi-avril de la retraite à 64 ans, son patron Bertrand Pancher a déposé une proposition de loi dont l'article phare prévoit de repasser à 62 ans. Elle est en tête du programme du 8 juin et promet une rude bataille entre ses soutiens - gauche, RN et certains LR - et le camp présidentiel, déterminé à ce qu'il n'y ait pas de vote sur cette mesure clé.

La bascule

Avant 2020, les macronistes, forts de leur majorité absolue, ne se privaient pas de balayer les textes inscrits, parfois avant même tout débat.

Le 30 janvier de cette année-là a changé la donne: l'Assemblée, suivant l'avis du gouvernement, s'est prononcée contre un texte UDI-Agir qui prévoyait de porter de cinq à douze jours le congé d'un salarié venant de perdre un enfant. La ministre du Travail d'alors, Muriel Pénicaud, ne voulait pas d'un congé à la charge des entreprises. Ce vote avait suscité un tollé, jusqu'à Emmanuel Macron qui avait demandé de "faire preuve d'humanité".

Marquée au fer rouge par cette expérience, la majorité décortique depuis chaque texte, passe dans certains cas des compromis et bétonne ses arguments. Il faut parfois convaincre aussi dans ses propres rangs.

Les "niches" sont devenues des affaires épineuses au sein même de la majorité.

Les députés Horizons, et derrière eux Edouard Philippe, ont défendu vainement en mars des peines minimales contre les récidivistes, rejetées par leurs alliés macronistes. Le groupe défait a dénoncé des "manoeuvres" et un "gâchis"..., un air de déjà vu.


Droit du travail: le gouvernement se donne jusqu'en septembre pour cadrer la négociation

Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
Short Url
  • Le gouvernement lance des négociations larges sur le droit du travail et l’assurance chômage, avec une lettre de cadrage attendue la semaine prochaine
  • Parmi les mesures envisagées : monétisation de la cinquième semaine de congés, suppression de deux jours fériés, lutte contre les temps partiels subis et assouplissement des CDD et intérim

PARIS: Le ministère du Travail a indiqué vendredi que la feuille de route de la négociation sur le droit du travail, avec notamment la possible monétisation de la cinquième semaine de congés payés, serait envoyée en septembre pour poursuivre "la concertation préalable".

Plaidant qu'"il faut travailler plus", le Premier ministre François Bayrou avait souhaité le 15 juillet que les partenaires sociaux ouvrent des négociations sur une nouvelle réforme de l'assurance chômage et sur le droit du travail pour participer à l'effort budgétaire.

Le ministère doit adresser "dans le courant de la semaine prochaine" la "lettre de cadrage" fixant le cadre de la négociation d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage avec des discussions prévues "jusqu’à la mi-novembre", ainsi que le document d'orientation concernant la suppression de deux jours fériés pour une négociation qui doit durer "jusqu’à la fin du mois de septembre".

Mais les autres mesures ayant trait à "la modernisation du marché du travail et la qualité du travail" feront l'objet d'un document d'orientation à la rentrée. Outre la monétisation de la cinquième semaine de congés payés, il s'agit notamment de lutter contre les temps partiels subis, de "fluidifier" le marché du travail avec des assouplissements sur les CDD et les contrats d'intérim ou encore de dispositions sur l’indemnisation des arrêts maladie.

"Un envoi en septembre plutôt que début août répond à une demande de certains des partenaires sociaux de pouvoir poursuivre la concertation préalable à l’envoi de ce document d’orientation", a expliqué le ministère, ajoutant que cela "permettra de continuer à recueillir leurs avis, leurs idées et leurs priorités pour enrichir ce document".

Le calendrier de cette négociation doit s'étendre "sur plusieurs mois, au minimum jusqu’à la fin de l’année 2025", selon la même source.


Paris salue la conférence de New York et poursuit l’initiative avec Riyad

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Short Url
  • Paris et Riyad poussent pour une reconnaissance collective de l’État palestinien
  • La France appelle à un cessez-le-feu, la levée du blocus et le désarmement du Hamas

PARIS: Sur fond de crise humanitaire d’une cruauté inqualifiable dans la bande de Gaza, le président Emmanuel Macron a annoncé une opération de largage de vivres conduite par la France, avec le soutien de la Jordanie, des Émirats arabes unis et de l’Allemagne.

« Face à l’urgence absolue, nous venons de conduire une opération de largage de vivres à Gaza », a déclaré le chef de l’État sur X, en remerciant les partenaires impliqués et saluant l’engagement des forces armées françaises.

Mais, de son point de vue, ces largages restent insuffisants : « Il faut qu’Israël ouvre un plein accès humanitaire », a-t-il insisté, réitérant l’exigence française d’une levée immédiate du blocus des aides.

Au-delà de la réponse d’urgence, Paris entend porter une initiative diplomatique structurante : la conférence internationale co-présidée à New York par la France et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en posant un cadre politique ambitieux.

Cette conférence, tenue en l’absence des États-Unis et d’Israël, a réuni plus de 40 ministres et 120 participants, aboutissant à l’adoption d’un plan d’action en 42 points.

Malgré les réticences et le scepticisme ambiants, elle a permis l’émergence d’une dynamique inédite vers la reconnaissance de l’État palestinien et un processus de paix régional.

Le plan d’action validé à New York constitue désormais un socle politique partagé entre acteurs européens, puissances arabes, Union européenne et Ligue arabe.

Ce texte appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, à l’acheminement massif de l’aide humanitaire, mais surtout à la mise en œuvre concrète de la solution à deux États.

Il prévoit notamment un processus progressif de désarmement du Hamas, condition indispensable à la stabilisation durable de la région.

Pour la France, ce texte marque une rupture avec l’impasse diplomatique des dernières décennies et propose pour la première fois un mécanisme concerté de démilitarisation et de réintégration de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne.

Le document évoque même la possibilité de confier les armes du Hamas à une tierce partie sous supervision internationale, afin de garantir qu’elles ne soient plus utilisées.

Ce volet, essentiel pour Israël, est aussi le fruit d’un consensus entre les États arabes partenaires, y compris ceux perçus comme proches du Hamas.

Sur le front politique, Paris se réjouit de l’effet de levier de la conférence : peu après, plusieurs pays — Portugal, Royaume‑Uni, Canada — ont annoncé leur volonté de reconnaître l’État palestinien, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Une coalition de volontaires est en train de se constituer : quinze États, aux côtés de la Ligue arabe et de l’Union européenne, ont d’ores et déjà signé une déclaration commune en ce sens.

La France espère ensuite entraîner d’autres partenaires européens, notamment l’Allemagne. « Nous continuons à travailler en E3 avec nos partenaires allemands et britanniques », indique une source haut placée.

Si Berlin reste prudent, des signes d’évolution apparaissent dans les récentes déclarations de sa ministre des Affaires étrangères. Paris entend maintenir ces échanges diplomatiques jusqu’à septembre.

Contrairement aux critiques israéliennes et américaines, la France affirme que cette dynamique de reconnaissance ne constitue pas un obstacle à la paix, mais un levier pour la relancer.

Le président Macron estime que cette reconnaissance, inscrite dans un cadre politique exigeant — avec une gouvernance palestinienne réformée et un désarmement du Hamas — peut rebâtir les conditions d’une solution durable.

Les ruptures des négociations avec le Hamas sont antérieures aux annonces de Paris, souligne-t-on à l’Élysée, et ne peuvent donc pas lui être imputées.

La reconnaissance collective envisagée en septembre serait également un signal fort en direction des modérés palestiniens, en particulier l’Autorité palestinienne, qui s’est engagée début juin à respecter une série d’exigences posées par la communauté internationale en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Un des apports majeurs de la conférence de New York est l’introduction formelle de la question du désarmement du Hamas dans un cadre diplomatique multilatéral.

Jusqu’ici marginalisée ou qualifiée d’irréaliste, cette exigence est clairement codifiée dans le plan d’action. Des discussions sont en cours, y compris sur l’exil éventuel de certains cadres du mouvement auprès d’États tiers.

Le Hamas n’a pas accepté ces conditions, mais le message politique est clair : son isolement au sein du monde arabe s’accentue et sa marge de manœuvre se rétrécit.

Face à cette dynamique, Israël et l’administration américaine ont haussé le ton, estimant qu’une reconnaissance unilatérale de la Palestine constituerait une « insulte » aux victimes israéliennes du 7 octobre.

Le président américain Donald Trump a même imposé des sanctions ciblées contre certains membres de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, en contradiction avec les efforts en cours pour renforcer cette autorité.

La position américaine révèle un décalage croissant avec une partie de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels, en raison de son soutien inconditionnel à Israël, malgré l’ampleur des pertes civiles à Gaza et la persistance de la colonisation en Cisjordanie.

Cet état de fait suscite déjà des interrogations en Europe, où des pays comme la Suède exigent, par exemple, le gel de la partie commerciale de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

La France, de son côté, entend poursuivre cette dynamique au-delà de la conférence de New York. Un sommet est prévu les 21 et 22 septembre, juste avant l’Assemblée générale de l’ONU, pour réunir les États prêts à reconnaître collectivement la Palestine et à faire vivre ce nouveau cadre politique.

« Il s’agit d’une coalition inédite, qui repose sur un équilibre entre exigences sécuritaires et reconnaissance des droits politiques du peuple palestinien », souligne-t-on à Paris.

En réaffirmant l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat, la levée du blocus humanitaire, la libération des otages, mais aussi le désarmement du Hamas et la mise en place d’un État palestinien souverain, la France, de concert avec l’Arabie saoudite, tente de reconstruire une architecture de paix.


La défiance à l'égard de Macron et de Bayrou au plus haut, selon un sondage Paris, France

Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Short Url
  • La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat
  • Le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi

PARIS: La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat, tandis que le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi.

Près des trois quarts des Français interrogés (73%) affirment ne pas faire confiance au chef de l'Etat et la moitié (49%) va jusqu'à "ne pas lui faire du tout confiance", le niveau le plus élevé atteint de son second mandat, qu'il n'a dépassé qu'une seule fois depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 au plus fort de la crise des gilets jaunes en décembre 2018.

Selon le sondage, seuls 21% des Français font confiance à Emmanuel Macron, soit un point de moins qu'en juin et 6 de perdus par rapport à mars.

Pour François Bayrou, qui a présenté à la mi-juillet les mesures d'économie prévues par le gouvernement dans son projet de budget pour l'année prochaine, la chute se poursuit avec seulement 12% des Français qui disent lui faire confiance, soit un nouveau record d'impopularité (-2 points).

La défiance à l'égard du chef du gouvernement a progressé, avec 80% des Français (+5 points en un mois) qui disent ne pas lui faire confiance et 56% qui affirment ne pas lui faire "du tout" confiance, soit un bond de 9 points depuis juin.

Au classement des personnalités, le RN Jordan Bardella conserve la première place avec 39% des Français (+3 points) qui ont une image positive de lui, devant l'ancien Premier ministre Edouard Philippe (37%) et Marine Le Pen (35%).

A gauche, le mieux classé est l'ancien président François Hollande qui s'installe en huitième position grâce à un bond de 6 points en un mois.

Sondage réalisé par internet les 29 et 30 juillet auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Marge d'erreur entre 1,4 et 3,1 points.