Au procès Sarkozy, la parole aux procureurs financiers

Nicolas Sarkozy, ancien président  de la république française. (AFP)
Nicolas Sarkozy, ancien président de la république française. (AFP)
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Publié le Mardi 08 décembre 2020

Au procès Sarkozy, la parole aux procureurs financiers

  • «Ce procès comme tout procès n'est pas davantage une vengeance institutionnelle, ni celle de la magistrature, ni celle et encore moins du PNF», a déclaré M. Bohnert. «Personne ici ne cherche à se venger d'un ancien président de la République»
  • «Comme toute personne dans notre pays, un ancien chef de Etat a des droits qu'il convient de respecter mais il a aussi (...) l'impérieux devoir de respecter lui-même le droit car c'est bien cela l'Etat de droit», a-t-il lancé

PARIS : Au lendemain des fermes dénégations de Nicolas Sarkozy, le chef du parquet financier a affirmé mardi que le procès dit des «écoutes» n'était «pas une vengeance», juste avant que l'accusation ne commence à présenter ses réquisitions.

Après plusieurs jours de débats tendus dans ce procès pour corruption et trafic d'influence contre l'ancien chef de l'Etat, son avocat et un ancien haut magistrat, le chef du parquet national financier (PNF) Jean-François Bohnert a tenu des propos introductifs aux réquisitions.

«Ce procès comme tout procès n'est pas davantage une vengeance institutionnelle, ni celle de la magistrature, ni celle et encore moins du PNF», a déclaré M. Bohnert. «Personne ici ne cherche à se venger d'un ancien président de la République».

«Comme toute personne dans notre pays, un ancien chef de Etat a des droits qu'il convient de respecter mais il a aussi (...) l'impérieux devoir de respecter lui-même le droit car c'est bien cela l'Etat de droit», a-t-il lancé.

M. Bohnert a justifié sa présence par «l'importance de l'affaire», exprimant son «entier soutien» à ses deux collègues à l'audience, «surtout après les débats agités qu'ils ont eu à affronter».

Les deux procureurs financiers ont ensuite débuté leurs réquisitions.

Les trois prévenus encourent 10 ans d'emprisonnement et un million d'euros d'amende.

Les procureurs financiers vont devoir porter le fer au nom d'un parquet qui, en 2017, avait accusé Nicolas Sarkozy d'avoir usé de méthodes de «délinquant chevronné» - une formule qui «n'est pas passée», a lancé ce dernier lundi.

L'ancien locataire de l'Elysée est soupçonné d'avoir conclu un «pacte de corruption» en 2014, en obtenant des informations protégées par le secret, via son avocat Thierry Herzog, auprès du haut magistrat Gilbert Azibert, sur un pourvoi à la Cour de cassation.

Ce dernier est aussi soupçonné d'avoir tenté d'influer sur la procédure, en échange de la promesse d'un «coup de pouce» pour un poste à Monaco qu'il n'a finalement jamais eu.

«Pacte de corruption»

Au coeur des charges: une série de conversations enregistrées sur la ligne «Paul Bismuth» ouverte par Me Herzog pour échanger avec M. Sarkozy, en toute confidentialité croyaient-ils.

Cette ligne avait été découverte début 2014 par les juges qui instruisaient l'affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.

Les deux hommes y discutent notamment du pourvoi en cassation alors engagé par l'ex-président: M. Sarkozy souhaitait voir la haute juridiction judiciaire annuler la saisie de ses agendas présidentiels dans l'affaire Bettencourt.

Dans ces échanges, «Gilbert» apparaît à plusieurs reprises: même s'il ne prenait pas part à cette procédure, il est pourtant cité par Me Herzog qui déclare aussi que le magistrat a eu accès à un avis confidentiel.

«Il a bien bossé hein», lance l'avocat. «Moi, je le fais monter», «je l'aiderai», dit également Nicolas Sarkozy. Puis, alors qu'il se trouve à Monaco, il semble s'engager à faire la «démarche» pour Gilbert Azibert auprès des autorités monégasques avant d'y renoncer.

Ce «pacte de corruption» n'a jamais existé, ont balayé les prévenus au cours du procès.

Ces conversations sont des «bavardages» entre deux «frères», a certifié M. Sarkozy lundi, affirmant que son avocat avait voulu le «rassurer» en rapportant de simples «impressions» sur cette procédure. Et il le clame: jamais il n'a eu «aucune information privilégiée».

«Oui», comme «cent fois dans sa vie», il a envisagé de rendre un «service» à Thierry Herzog qui lui parlait de son «ami» Gilbert Azibert, mais il ne s'agissait pas d'une «contrepartie».

Et au final, a souligné Nicolas Sarkozy, la Cour de cassation ne lui a pas donné gain de cause et Gilbert Azibert n'a pas eu de poste à Monaco.

Selon la loi, il n'est cependant pas nécessaire que la contrepartie ait été obtenue, ni que l'influence soit réelle, pour caractériser une corruption et un trafic d'influence.

Depuis le début du procès, les procureurs Jean-Luc Blachon et Céline Guillet sont restés en retrait, semblant embarrassés par une enquête préliminaire menée parallèlement à ce dossier.

Ouverte début 2014, elle visait à débusquer la «taupe» qui aurait informé M. Sarkozy et Me Herzog que leur ligne «Bismuth» était «branchée», en sus des lignes officielles de l'ex-président. Cette enquête a finalement été classée sans suite fin 2019.

Un enquête «dissimulée», pilonnée par la défense. «Le mensonge, il n'est pas de mon côté, il est du côté de l'accusation», a renchéri Nicolas Sarkozy.

 


Macron met en garde contre la mort de l'Europe

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Le président français a évoqué une Europe «dans une situation d'encerclement» face aux grandes puissances régionales
  • Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a appelé l'UE à renforcer encore sa défense au sein de l'Otan

PARIS: "Notre Europe est mortelle, elle peut mourir". Emmanuel Macron a dressé jeudi un portrait alarmiste à un mois et demi d'élections européennes compliquées pour son camp, en exhortant à un sursaut des Vingt-Sept pour bâtir une "Europe puissance" et une défense "crédible".

"Cela dépend uniquement de nos choix mais ces choix sont à faire maintenant" car "à l'horizon de la prochaine décennie, (...) le risque est immense d'être fragilisé, voire relégué", a-t-il asséné devant 500 invités, dont les ambassadeurs des 26 autres Etats membres de l'UE, des étudiants, des chercheurs et le gouvernement au complet.

Le président français a évoqué dans un discours-fleuve une Europe "dans une situation d'encerclement" face aux grandes puissances régionales et a jugé que les valeurs de la "démocratie libérale" étaient "de plus en plus critiquées" et "contestées".

"Le risque, c'est que l'Europe connaisse le décrochage et cela, nous commençons déjà à le voir malgré tous nos efforts", a averti le chef de l'Etat, en plaidant pour une "Europe puissante", qui "se fait respecter", "assure sa sécurité" et reprend "son autonomie stratégique".

Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a annoncé qu'il inviterait les Européens à se doter d'un "concept stratégique" de "défense européenne crédible", en évoquant la possibilité pour elle de se doter d'un bouclier antimissiles.

Il a aussi appelé l'Europe à renforcer son industrie de défense et plaidé pour un "emprunt européen", sujet tabou notamment en Allemagne, pour investir dans l'armement en appliquant le principe de "préférence européenne".

Entrée en campagne

Face aux débats sur l'immigration portés par la droite et l'extrême droite, il a affirmé que l'UE devait "retrouver la maîtrise" de ses "frontières" et "l'assumer", proposant "une structure politique" continentale pour prendre des décisions sur les sujets de migration, de criminalité et de terrorisme.

Sur le plan économique, pour aboutir à une "Europe de prospérité", Emmanuel Macron a défendu un "choc d'investissements commun", en doublant la capacité financière de l'UE pour faire face aux défis de défense, climatique, numérique et industriel.

Devant les pratiques commerciales chinoises et américaines, le président français a également demandé une "révision" de la politique européenne "en défendant nos intérêts".

"Ca ne peut pas marcher si on est les seuls au monde à respecter les règles du commerce telles qu'elles avaient été écrites il y a 15 ans, si les Chinois, les Américains, ne les respectent plus en subventionnant les secteurs critiques", a-t-il déclaré.

Réagissant peu après, le chancelier allemand Olaf Scholz, pas toujours sur la même longueur d'ondes que son homologue, a salué les "bonnes impulsions" du discours pour que "l'Europe reste forte" et promis de continuer à la "faire avancer ensemble".

Le discours d'Emmanuel Macron est largement considéré comme une entrée en campagne du chef de l'Etat français, alors que son camp patine à six semaines des élections européennes du 9 juin, pour lesquelles le Rassemblement national (RN, extrême droite) fait largement course en tête.

Selon un récent sondage Opinionway, la liste de la majorité présidentielle, à 19%, se situait toujours loin derrière celle du RN (29%), mais gardait une nette avance sur celle des socialistes (12%).

"Sur la scène européenne, cela fait sept ans qu'Emmanuel Macron confond ses incantations et ses gesticulations avec des réalisations", a ironisé Marine Le Pen, cheffe de file des députés du RN, sur X, accusant le chef de l'Etat de "brader des pans entiers de souveraineté" nationale.

Le palais présidentiel de l'Elysée a réfuté toute tactique électoraliste et affirmé que M. Macron ambitionnait d'"influer sur l'agenda" de la prochaine Commission européenne à l'issue des élections de juin.

Une légitimité qui sera mesurée à l'aune des réactions européennes. Et aux retours des Français, qui estiment à 57% que le président n'a pas eu "d'influence réelle" sur l'UE depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi.

Vendredi, le président prendra aussi la température lors d'un échange avec des étudiants à Strasbourg (Est), où il signera un nouveau contrat triennal pour conforter la stature européenne de la capitale alsacienne qui accueille le parlement européen.

 

 


UE: une majorité de Français doute de l'influence réelle de Macron, selon un sondage

Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas «s'impliquer davantage dans la campagne» car «ce n'est pas son rôle en tant que président de la République»
  • Pour autant 61% des Français jugent qu'une «défaite nette» de la liste Renaissance serait un «échec personnel» pour le président

PARIS: Une majorité de Français (57%) doute de l'influence réelle d'Emmanuel Macron sur le fonctionnement et les décisions prises par l'Union européenne depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi pour BFMTV.

Alors qu'Emmanuel Macron va mettre en avant son bilan européen lors d'un discours jeudi matin à la Sorbonne, seuls 42% des Français estiment que le chef de l'État a eu "une influence réelle sur le fonctionnement et les décisions prises par l’Union européenne" depuis 2017.

L'électorat d’Emmanuel Macron porte un regard très positif sur son rôle (70%), alors que la majorité des électeurs de gauche (56%) et d'extrême droite (68%) sont plutôt négatifs.

A un mois et demi des européennes, 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas "s'impliquer davantage dans la campagne" car "ce n'est pas son rôle en tant que président de la République".

Pour autant 61% des Français jugent qu'une "défaite nette" de la liste Renaissance serait un "échec personnel" pour le président.

En cas de large défaite du camp présidentiel, une majorité (61%) souhaite qu'Emmanuel Macron "change significativement d'orientation politique", une opinion partagée par 43% des électeurs du président au premier tour de l'élection présidentielle en 2022.

Pour autant, seule une minorité de Français (46% contre 54%) réclame une dissolution de l’Assemblée nationale et l'organisation d'élections législatives anticipées. Encore moins (39% contre 61%) souhaitent un changement de Premier ministre.

Si 58% des sondés déclarent tenir compte avant tout d'enjeux de politique européenne dans leur décision de vote, 41% concèdent qu'ils feront leur choix avant tout sur des enjeux nationaux, surtout parmi les électeurs RN (61%).

Ce sondage a été réalisé par internet du 23 au 24 avril à partir d'un échantillon de 1.001 personnes, représentatif des résidents de France métropolitaine âgés de 18 ans et plus. Selon les résultats, la marge d'erreur est comprise entre +/- 1,4 point et +/-3,1 points.


Evénements climatiques extrêmes: la Croix-Rouge souhaite un sac d'urgence par Français

Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
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  • Le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge
  • «75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule», selon un sondage OpinionWay

PARIS: Un "sac d’urgence" pour chaque Français en cas d’évacuation face aux événements climatiques extrêmes: c’est l’une des préconisations de la Croix-Rouge française dans un rapport sur la résilience de la société française, qui fait état d'un manque de préparation.

Canicule, sécheresse, incendies de forêt, inondations: le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge, en collaboration avec le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), publiée jeudi.

"75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule", selon un sondage OpinionWay pour la Croix-Rouge française.

"La préparation face aux crises est l'affaire de tous. Elle concerne bien entendu les pouvoirs publics, mais aussi les acteurs associatifs et privés, ainsi que les citoyens", déclare à l'AFP Philippe Da Costa, président de la Croix-Rouge française.

Pour affronter "l’inévitable", l’association a dix recommandations. Dont la constitution du "Catakit", un sac d'urgence par personne, prêt en cas d'évacuation et comprenant par exemple de la nourriture non périssable, de l'eau, une trousse de secours, des vêtements et une lampe torche, pour attendre l'arrivée de l'aide.

"Seuls 11% des Français disposent d’un sac d’urgence prêt, et moins de la moitié connaît les objets indispensables qu’il faut y glisser", détaille le sondage OpinionWay.

Autre recommandation: la formation aux gestes et aux comportements qui sauvent. "On estime aujourd’hui à seulement 40% le nombre de Français ayant récemment suivi une formation aux gestes qui sauvent, contre 95% Norvège ou 80% en Allemagne", note le rapport.

Or, rappelle la Croix-Rouge, "si les individus sont informés et formés, l’impact des événements climatiques extrêmes sur les populations sera moindre et les dégâts matériels réduits".

L'association suggère que chaque Français ait a minima connaissance des réflexes vitaux: "savoir identifier les alertes sonores, avoir les bons comportements en cas de catastrophes" en plus de la maîtrise des gestes qui sauvent.

"Les événements climatiques extrêmes se manifestent de manière plus fréquente, plus intense, plus longue, et plus étendue géographiquement, rappelle Philippe Da Costa. "Tous les territoires de l'Hexagone et d’Outre-mer sont concernés".

Pour la Croix-Rouge, "il n’y a pas de fatalité". "Se préparer pour savoir comment agir avant les crises et comment réagir pendant les crises" pourra limiter l'impact des évènements climatiques extrêmes sur les populations.