L’IMA, partenaire infaillible de l’expansion culturelle contemporaine de l’Arabie saoudite

Capture d'écran du film en réalité virtuelle "Reframe Saudi" (fournie)
Capture d'écran du film en réalité virtuelle "Reframe Saudi" (fournie)
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Publié le Mardi 20 juin 2023

L’IMA, partenaire infaillible de l’expansion culturelle contemporaine de l’Arabie saoudite

  • En 2018, une première exposition d’artistes saoudiens est donnée à l’Institut du Monde arabe, commissionnée en collaboration avec le Misk Art Institute
  • L’exposition « AlUla, merveille d’Arabie » est lancée du 14 décembre 2019 au 12 janvier 2020

PARIS: La coopération culturelle entre l’Arabie saoudite et la France est désormais une tradition, notamment portée par l’Institut du Monde arabe et son dynamique président Jack Lang. Dans un échange avec Arab News, ce soutien indéfectible de l’art arabe commente le rôle de l’IMA dans la promotion de la scène artistique et du patrimoine culturel saoudiens.  

En 2018, une première exposition d’artistes saoudiens est donnée à l’Institut du Monde arabe, commissionnée en collaboration avec le Misk Art Institute.

L’exposition « AlUla, merveille d’Arabie « est lancée du 14 décembre 2019 au 12 janvier 2020

Dès son lancement en 2016, la Vision 2030 du prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed Ben Salmane s’est traduite par un intérêt spécial pour les arts et les artistes du royaume. Cette dynamique s’est faite dès le début en collaboration avec l’Institut du Monde arabe à Paris.

«L’IMA a à cœur de faire connaître le riche patrimoine historique culturel et artistique du pays» commente le président de l’Institut du Monde arabe, Jack Lang, dans une interview à Arab News en français. «Une véritable révolution culturelle a été engagée dans tout le pays sous l’égide de Sa majesté le Roi Salman, du prince héritier SAR Mohamed ben Salmane et de SA le prince Badr, ministre de la Culture», poursuit-il. «L’institut, qui promeut et protège l’excellence artistique, a permis aux créateurs saoudiens de se développer et de se révéler au monde, en lien étroit avec le ministère saoudien de la Culture (coopération muséale, en matière de cinéma et de littérature, organisation d’événements culturels, itinérance d’expositions, etc.), mais aussi avec d’autres institutions saoudiennes, notamment avec la Fondation MiSK (Fondation philanthropique Mohammed ben Salmane), depuis l’accord de 2018 signé à l’occasion de la visite du Prince héritier à Paris.

L’IMA a ainsi contribué à augmenter la visibilité de ces artistes saoudiens, leur permettant de transcender les frontières et d’inscrire leur empreinte dans le paysage artistique mondial», explique le président de l'IMA.

En janvier 2016, c’est un professeur d’université saoudien, le Dr Mojeb al-Zahrani, spécialiste de littérature comparée, alors directeur des Arts libéraux à l’université saoudienne Al Yamama qui a été désigné pour diriger l’IMA dès le mois de mai suivant. En 2017, l’Arabie saoudite contribuait à la rénovation de l’iconique bâtiment dessiné par Jean Nouvel à hauteur de cinq millions de dollars. Une plaque commémorative, dévoilée en présence du chef de la diplomatie saoudienne de l'époque, Adel Al Jubeir, témoigne du souci du Royaume de promouvoir la culture arabe à l’international. Dès lors, l’Arabie saoudite n’a eu de cesse de participer à de nombreux projets dans tous les domaines de l’art, avec l’Institut du Monde arabe pour partenaire privilégié.

La nouvelle garde d’artistes du royaume

En 2018, plusieurs initiatives sont engagées entre l’Arabie saoudite et la France, notamment concernant la participation de l’Arabie saoudite au Festival de Cannes et la création d’un orchestre national saoudien en collaboration avec l’Opéra de Paris. Une première exposition d’artistes saoudiens est donnée à l’Institut du Monde arabe, commissionnée en collaboration avec le Misk Art Institute, un incubateur de la fondation éponyme créée un an plus tôt à l’initiative du prince Mohammed Ben Salmane pour promouvoir l’art saoudien. Cette exposition, qui contribuait à faire connaître la nouvelle garde d’artistes du royaume à partir de Paris, s'ajoutait à une  tournée qui avait conduit l'art saoudien de Dubaï à Washington et New York, avant de faire escale en 2019 à la Biennale de Venise. L'installation sensorielle de la Saoudienne Zahrah Al-Ghamdi lors de cette édition de la Biennale de Venise est considérée comme la première oeuvre véritablement révélatrice de la scène artistique du royaume. Lors des éditions précédentes, et malgré une participation continue depuis 2011, le pavillon saoudien était réputé davantage promotionnel, voire touristique, que réellement participatif de l'art international.

L'affiche de l'exposition MisKultur expo à l'IMA, les 9 et 10 avril 2018 (fournie)
L'affiche de l'exposition MisKultur expo à l'IMA, les 9 et 10 avril 2018 (fournie)

Ahaad Al Amoudi, Amr Alngmah, Halah Alfadl, Sara Al-Abdalli, Ahmed Angawi, Eiman Elgibreen, Halah Alfadl, Lulwah AL Hamoud, Rawan Almqbas, Sarah Shaiban, Ayman Zedani… autant de regards d’une incroyable modernité, autant de médiums, de techniques et de concepts fascinants, se laissent découvrir à travers un film en réalité virtuelle, Reframe Saudi, présenté par Misk Art Institute. Tandis que le monde se sensibilise aux œuvres de ces talents à la fois enracinés dans leurs traditions et extraordinairement ouverts à la modernité, sensibles à tous les faits de culture, l’Arabie saoudite dévoile son trésor : le site encore confidentiel d’AlUla.

A ce propos, Jack Lang, commente :  "L’Institut du monde arabe a créé un véritable temple de l’expression artistique, dévoilant les talents saoudiens dans toutes leurs disciplines, tels des étoiles au firmament de la créativité.

La réaction du public à la découverte de ces artistes a été un émerveillement vibrant qui a traversé les cœurs et les esprits. L’audace et l’authenticité se sont mêlées à ces créations inspirées de l’âme saoudienne, suscitant une curiosité bienveillante et une grande appréciation pour ces esprits artistiques. Le public, désireux de nouvelles découvertes, a pris le temps d’explorer ces univers uniques, acquérant ainsi de nouvelles perspectives sur la création saoudienne.

Les médias ont été cruciaux pour propager cette créativité au-delà de l’IMA. Ils ont accueilli avec ferveur les expositions et les évènements, admirant les œuvres des artistes saoudiens. Ils leur ont donné une voix et ont mis l’accent sur l’importance de promouvoir la diversité culturelle en reconnaissant l’IMA comme un symbole de l’art saoudien."

Une oeuvre de l'artiste saoudienne Sara Alabdalli (fournie)
Une oeuvre de l'artiste saoudienne Sara Alabdalli (fournie)

La mémoire de douze siècles d’histoire

L’exposition « AlUla, merveille d’Arabie » est lancée du 14 décembre 2019 au 12 janvier 2020. La forte affluence pousse l’IMA à une prolongation jusqu’au 8 mars 2020, et des nocturnes sont organisées à cette occasion. « C’est à un voyage au pays des palmeraies, des écritures, des sanctuaires, des tombeaux rupestres et des pistes caravanières que nous invite l’Institut du monde arabe en partenariat avec la Commission royale pour AlUla, dans une région extraordinaire, habitée depuis des millénaires. Un jardin aux senteurs de datte, d’orange, de citron et de menthe, la sépulture d’une femme nabatéenne, les stations des pèlerins en route vers les lieux saints de l’islam et les gares ottomanes du chemin de fer du Hijâz immortalisées par Lawrence d’Arabie y sont autant de haltes pour le visiteur, avant qu’il ne se perde dans les ruelles de la vieille ville d’AlUla. Habitée jusqu’au milieu du XXe siècle, celle-ci porte la mémoire de douze siècles d’histoire racontée par ses habitants », détaille le manifeste.

S’ensuivit, au mois d’octobre, un colloque en trois tables rondes, AlUla, la grande histoire d’une vallée d’Arabie, animé par des experts et universitaires de très haut niveau. Le célèbre photographe Yann Arthus-Bertrand avait également été appelé pour immortaliser AlUla vue du ciel.

Pour Jack Lang "Il est difficile de choisir parmi les créations les plus remarquables qui ont émergé de cette effervescence artistique, tant la variété et la grandeur étaient au rendez-vous. Chaque œuvre a laissé une empreinte unique dans le cœur des spectateurs, des photographies capturant des instants fugaces de vie aux créations digitales explorant les limites de l’imagination, des mélodies envoûtantes et des mots qui touchent l’âme. Les sens ont vibré, les émotions ont été profondes et elles ont démontré la richesse artistique et l’originalité des talents saoudiens.

Si l’on devait en nommer une, l’IMA a noué de riches relations avec la Commission royale pour Alula, qui a permis à l’exposition « AlUla, merveille d’Arabie » en 2019 de dévoiler les riches trésors antiques et patrimoniaux de cette région".

Vue d'AlUla par Yann Arthus-Bertrand (fournie)
Vue d'AlUla par Yann Arthus-Bertrand (fournie)

Le cinéma aussi

Fervent soutien des initiatives liées à la promotion de l’art et du cinéma arabe en général, et saoudien en particulier, Jack Lang, qui avait lui-même mis en place, en 2021 et 2022, la Nuit du cinéma saoudien à l’IMA, était présent le 14 mars dernier au cinéma Pathé Beaugrenelle, à Paris, pour soutenir Les soirées du cinéma saoudien, organisées à l’initiative de la Commission du film d’Arabie saoudite. Lors de cet événement qui a connu une forte affluence, cinq films principaux étaient à l’affiche : A Swing, de Dana et Raneem Almohandes; Othman, de Khalid Zidan; Dunya’s Day, de Raed Alsamari; Matchstick, de Salma Murad; et Starting Point (animation), réalisé par Kamel Altamimi.

Le président de l'IMA souligne à ce propos que «Les créations de ces artistes ont servi de miroir pour refléter les divers aspects d’un pays en constante transformation. Les stéréotypes ont été brisés et une curiosité insatiable pour cette terre de traditions et d’innovations a été éveillée. L’Arabie saoudite s’est révélée sous une lumière nouvelle, remplie de créativité et inspirant une énergie émouvante et audacieuse. Tous les yeux se sont dirigés vers cette nation pleine de talents, permettant ainsi une conversation interculturelle fructueuse».

Ces initiatives successives, infailliblement soutenues par l’IMA, ont contribué à révéler la jeune et vibrante scène artistique et le grand potentiel culturel d'un royaume perçu comme énigmatique il y a seulement une poignée d’années.


A Paris, le Centre Pompidou s'offre une dernière fête avant cinq ans de fermeture

un feu d'artifice intitulé "Le Dernier Carnaval" au Centre Pompidou (Beaubourg) à l'occasion de sa fermeture pour un projet de rénovation de cinq ans, à Paris, le 22 octobre 2025. (AFP)
un feu d'artifice intitulé "Le Dernier Carnaval" au Centre Pompidou (Beaubourg) à l'occasion de sa fermeture pour un projet de rénovation de cinq ans, à Paris, le 22 octobre 2025. (AFP)
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  • Le Centre Pompidou organise un dernier week-end festif baptisé « Because Beaubourg » avant cinq ans de travaux, transformant ses huit étages en un immense terrain de jeu mêlant concerts, performances et expériences immersives
  • L’événement, réunissant 80 artistes et plusieurs grandes marques partenaires, célèbre la culture et l’esprit d’ouverture du lieu avant sa fermeture pour rénovation complète

PARIS: Dans un tourbillon de musique, d'images et de patins à roulettes, le Centre Pompidou à Paris s'offre un dernier week-end festif avant cinq ans de travaux, avec "Because Beaubourg", événement qui transforme l'intégralité du bâtiment en un immense terrain de jeu.

"Je suis venu parce que j'ai entendu dire que c'était la fermeture. Et j'avais envie de participer à ça une dernière fois, pour en profiter un petit peu", explique à l'AFP Eliot Ibert, 23 ans, en coloriant une fresque participative.

Fermé au public depuis le 22 septembre, le bâtiment aux emblématiques tuyaux colorés rouvre ses portes ce week-end avec un parcours inédit. De vendredi à dimanche, quelque 80 artistes se produisent à travers concerts, DJ sets, performances, masterclasses, projections et expériences immersives sur les huit étages.

"C'est le plus grand événement que le Centre Pompidou ait fait depuis son ouverture", assure Paul Mourey, codirecteur artistique de l'événement, imaginé avec le label Because Music.

- "Spleen" -

Chaque étage propose une expérience différente. Au niveau -1, des pianistes amateurs se succèdent devant une fresque des étudiants des Beaux-Arts, tandis que le Forum, au rez-de-chaussée, devient le théâtre de performances en journée et un club illuminé la nuit.

Le Village des enfants prend place au 3e étage, tandis que plusieurs artistes et sociétés ont investi le 4e niveau. Shygirl, Shay ou Pedro Winter, fondateur du label Ed Banger, ainsi que les entreprises Spotify, Samsung et Snapchat, qui proposent de tester ses lunettes de réalité augmentée, participent à des installations et expériences interactives.

Autant de partenaires qui contribuent à financer l'événement.

Le premier et le sixième étage accueillent, de jour comme de nuit, des artistes tels que Catherine Ringer, Christine and the Queens, Selah Sue, Keziah Jones ou Sébastien Tellier.

Le musicien français, qui profite de l'événement pour promouvoir son nouvel album prévu en janvier, souligne l'importance de participer à cette célébration : "La culture, aujourd'hui, elle est rare. Quand il y a des petits îlots de culture, c'est important d'y être. Je n'avais pas envie de manquer ça."

Brigitte Baleo, 78 ans, retraitée ayant travaillé dix ans à la bibliothèque du Centre Pompidou, confie que la fermeture lui laisse "un peu de spleen".

"Ça tend l'estomac, il y a trop de souvenirs", ajoute-t-elle, émue. "Mais il faut que la fermeture ait lieu, pour réhabiliter ce monument".

Conçu en 1977 comme un lieu "ouvert à tous" par les architectes Renzo Piano et Richard Rogers, le bâtiment souffre aujourd'hui de vétusté.

Désamiantage, accessibilité du lieu, sécurité et complet réaménagement intérieur sont au menu de ses importants travaux de rénovation.

- Rollers et vue panoramique -

Cette fermeture, "c'est quelque chose qui me touche", abonde Florence, qui n'a pas souhaité donner son nom.

Férue d'électro, la Bordelaise de 57 ans vient d'assister au deuxième étage à "Space Opera", un film musical du duo français Justice projeté comme une expérience de clubbing, à quelques pas de l'installation inédite Camera/Man de Thomas Bangalter, un des deux membres de Daft Punk.

Pour encore plus de mouvements, elle compte bien expérimenter le Roller Disco qui fait vibrer l'ancienne galerie 1, au dernier étage.

Entre DJ sets, patins à roulettes et vues panoramiques sur Paris, l'ambiance mêle nostalgie et effervescence festive.

Gulliver Hubard, un étudiant britannique de 20 ans, savoure lui sa première visite. "C'est une chance de le voir avant sa fermeture", assure-t-il.

En journée, le programme est entièrement gratuit, et les organisateurs espèrent accueillir entre 10.000 et 15.000 visiteurs par jour.

Le programme nocturne, payant, a lui été pris d'assaut : les 12.000 billets se sont arrachés en à peine une journée.


AlUla ou comment le désert devient atelier d’art

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  • AlUla se transforme en laboratoire artistique où design, architecture et patrimoine dialoguent avec le désert
  • Entre traditions locales et innovation contemporaine, le désert devient un espace d’expérimentation, d’apprentissage et de création, où culture et paysage s’influencent mutuellement

PARIS: De la résidence de design à la construction du futur musée d’art contemporain confié à Lina Ghotmeh, AlUla se façonne dans le respect de sa mémoire et de son paysage.

À Paris, une table ronde organisée par la RCU et AFALULA a révélé les coulisses de cette transformation, celle d’un territoire millénaire devenu laboratoire d’expérimentation et vitrine du dialogue culturel franco-saoudien.

Dans le parc de l’hôtel des maisons (un hôtel particulier parisien construit au XVIII), la conversation s’est ouverte sur une question presque philosophique : comment bâtir dans le désert sans le dominer ? Comment concevoir à AlUla, ce paysage d’infini, une architecture qui parle à l’échelle humaine ?

La table ronde, intitulée “From the Land Up: Designing AlUla from Desert to Human Scale”, a réuni les acteurs clés du projet et plusieurs anciens résidents du programme AlUla Design Residency, créé il y a deux ans.

Ils ont tous en commun d’avoir approché cette terre d’exception, non comme un territoire vierge, mais comme un organisme vivant, porteur d’histoires et de voix anciennes.

L’événement, organisé par la Commission royale pour AlUla (RCU) et l’agence Française pour le développement d’Alula (AFALULA), a célébré l’ADN rare de cette région, qui est un mélange entre fouilles historiques, architecture, design et diplomatie culturelle notamment avec la villa Hegra. 

AlUla, déjà célèbre pour son patrimoine nabatéen et ses falaises sculptées par le vent, devient aujourd’hui un territoire d’expérimentation artistique mondiale, où le passé inspire le futur, et lui donne forme.

Au centre du projet, la vision de Lina Ghotmeh, architecte franco-libanaise à la tête du futur musée d’art contemporain d’AlUla, « Le musée ne doit pas être une icône posée dans le désert » explique-t-elle, « mais un générateur de liens, un espace de rencontre et d’hospitalité ».

Implanté près d’une ancienne oasis agricole, le musée s’enracinera dans le paysage tout en redonnant vie à des savoir-faire ancestraux, « nous travaillons avec la terre locale, avec des techniques de construction traditionnelles : torchis, terre comprimée, architecture bioclimatique, l’objectif est de renouer avec les ressources naturelles et la mémoire des lieux », souligne l’architecte.

Ghotmeh évoque aussi le dialogue qu’elle a tissé avec la communauté locale, « j’ai passé du temps à rencontrer les habitants, à partager un thé sous un oranger, à écouter les femmes qui ravivent l’artisanat, à visiter les écoles ».

Un jour, une fillette m’a dit, « le musée, c’est le lieu de l’extraordinaire, cette phrase m’accompagne toujours, car au fond, c’est bien de cela qu’il s’agit, créer un lieu qui relie la connaissance, l’émotion et la beauté ».

Dans son approche sensible, le musée devient un prolongement du paysage, un lieu où les visiteurs respireront la même lumière que les habitants, où la culture se fera conversation et échange.

« Il ne s’agit pas d’importer la culture, mais de la créer à partir du territoire », souligne Arnaud Morand, responsable des arts et industries créatives à AFALULA, c’est cette conviction qui guide toute la programmation culturelle d’AlUla.

L’une des premières grandes expositions préfigurant le musée verra le jour en janvier prochain, consiste en une collaboration entre AlUla et le Centre Pompidou, présentée d’abord dans une architecture temporaire conçue sur place avant de voyager dans le monde.

« C’est une coopération basée sur l’échange de savoirs et la lenteur, dit-il. À AlUla, on apprend à prendre le temps, l'art naît du sol, pas de la vitesse ».

Cette philosophie irrigue aussi les résidences de design et d’artistes qu’AFALULA co-dirige sur place, des programmes où jeunes talents et créateurs confirmés expérimentent à ciel ouvert, dans une relation directe avec le territoire, « Là-bas, chaque projet s’élabore dans l’écoute et l’humilité » affirme Morand.

« Lorsque nous arrivons à AlUla, nous devons laisser nos certitudes à la porte du désert » observe Ali Al Gazzaoui responsable du programme de résidences d’artistes, « il faut apprendre à écouter les habitants, à comprendre leur rapport au paysage, à la lumière, à la convivialité ».

C’est cette humilité partagée qui transforme le désert en école, les fondateurs du Studio Raw Material, Dushyant Bansal et Priyanka Sharma, anciens résidents du programme, racontent leur découverte émerveillée d’un lieu où « le matériau est partout de la roche, au sable, à la chaleur, et la lumière, tout devient matière à création ».

Leur expérience les a conduits à réfléchir à une forme de design « hors des centres urbains » à la faveur d’une pratique ancrée dans la vie quotidienne et les gestes ordinaires, « à AlUla, on apprend à se salir les mains, à construire, à inventer avec ce que la nature nous offre ».

Cette approche artisanale et poétique rejoint la vision d’Ali Alghazzawi, pour lui, « notre mission est de créer un écosystème où les créatifs peuvent dialoguer librement avec le paysage et expérimenter, car la durabilité ne se décrète pas, elle se vit ».

Tout ceci confère à AlUla qui est un site touristique d’exception, une autre dimension qui est celle de pépinière d’idées, de territoire d’apprentissage et de création contemporaine.


Le Gray fait son grand retour à Beyrouth : symbole d’espoir et de renouveau

Le chef étoilé Alan Geaam au Le Gray à Beyrouth, le 14 octobre 2025. De retour dans son pays natal après son succès à Paris, il dirige les cuisines de l’hôtel. (AFP)
Le chef étoilé Alan Geaam au Le Gray à Beyrouth, le 14 octobre 2025. De retour dans son pays natal après son succès à Paris, il dirige les cuisines de l’hôtel. (AFP)
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  • Cinq ans après l’explosion du port, Le Gray rouvre ses portes en novembre 2025, devenant un symbole fort de relance pour le centre-ville de Beyrouth et l’hospitalité libanaise
  • Sous la direction de Charles Akl et du chef étoilé Alan Geaam, l’hôtel incarne l’alliance du luxe, de la mémoire et du renouveau culturel, gastronomique et économique de la capitale

BEYROUTH: Cinq ans après l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth et la fermeture qui s’en est suivie, l’hôtel Le Gray s’apprête à rouvrir ses portes en novembre 2025, marquant un tournant symbolique pour la capitale libanaise. Situé sur la place des Martyrs, au cœur du centre-ville, cet établissement iconique, membre du réseau Leading Hotels of the World (LHW) retrouve son éclat d’antan et incarne l’espoir d’un renouveau pour l’hospitalité et la culture libanaises.

Un nouveau souffle pour Beyrouth

La réouverture de Le Gray intervient dans un contexte d’effort de relance économique. Depuis l’arrivée d’un nouveau gouvernement en janvier 2025, le Liban semble s’engager dans une phase de stabilisation et de redressement. L’ouverture des Beirut Souks plus tôt en octobre a déjà insufflé un vent d’optimisme dans une ville meurtrie, encore marquée par les séquelles de la guerre de 2024.

« C’est un retour à la vie et une réaffirmation de notre engagement envers Beyrouth, » déclare Charles Akl, directeur général de Le Gray.

« Le Gray a toujours été plus qu’un hôtel : c’est un symbole, un lieu de rencontre, une part de l’âme de la ville. Aujourd’hui, il revient pour redonner espoir et dynamisme au centre-ville. »

La gastronomie au cœur du renouveau

Symbole fort de ce retour : la cuisine. Le chef franco-libanais Alan Geaam, seul chef libanais étoilé au Guide Michelin, prend les commandes des restaurants de l'hôtel. Après vingt-sept ans en France, il signe ici un retour aux sources empreint d’émotion et d’ambition.

« Mon objectif est de porter encore plus haut le nom du Liban sur la scène gastronomique internationale, » confie le chef. « C’est un honneur de revenir à Beyrouth, de former de jeunes talents et de faire rayonner notre cuisine. »

Alan Geaam introduit à cette occasion Qasti Beyrouth, déclinaison locale de son restaurant emblématique présent à Paris et dans d’autres grandes villes, ainsi que Padam, une adresse signature au sein de l’hôtel.

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Qasti Beyrouth : la cuisine d’Alan Geaam au cœur de Le Gray. (Photo: ANFR)

Une redécouverte d’un joyau urbain

À l’occasion du pre-opening de l’hôtel, un groupe de journalistes a été invité à redécouvrir les lieux. L’expérience a été décrite comme un moment d’émotion et de redécouverte, dans un cadre où se mêlent raffinement, art et mémoire.

Avec plus de 100 chambres et suites repensées sous la direction artistique de l’architecte Galal Mahmoud, l’hôtel allie élégance contemporaine et références subtiles à l’histoire et à la culture libanaises. Plus de 600 œuvres d’art ornent les espaces communs et les chambres, transformant l’hôtel en véritable galerie.

Le Gray propose également des espaces événementiels et de conférence modulables, capables d’accueillir aussi bien des événements professionnels que des célébrations privées.

Un lieu au carrefour du passé et de l’avenir

À quelques pas des Beirut Souks, du front de mer et de Zaitouna Bay, Le Gray se trouve à la croisée de l’histoire, de la culture et du renouveau économique. Il se veut désormais moteur du redéploiement touristique du centre-ville.

Pour Charles Akl, cette réouverture dépasse le simple acte économique : « C’est une responsabilité collective : celle de redonner de l’élan à la ville, de raviver les talents, et de réaffirmer la place de Beyrouth sur la carte mondiale de l’hospitalité et de la culture. »

Avec cette réouverture très attendue, Le Gray ne se contente pas de retrouver sa place dans le paysage hôtelier. Il incarne la résilience d’un peuple et la volonté d’un pays de se reconstruire, avec élégance et conviction.