Autodafé du Coran en Suède: Face à l’intolérance, pas de tolérance qui tienne

Des policiers suédois interviennent tardivement après qu'un groupe d'islamophobes a brûlé un exemplaire du Coran, le livre saint des musulmans, devant la mosquée centrale de Stockholm, le 28 juin 2023. (Photo, TT News Agency/Caisa Rasmussen/via Reuters).
Des policiers suédois interviennent tardivement après qu'un groupe d'islamophobes a brûlé un exemplaire du Coran, le livre saint des musulmans, devant la mosquée centrale de Stockholm, le 28 juin 2023. (Photo, TT News Agency/Caisa Rasmussen/via Reuters).
Le 30 juin 2023, des partisans du religieux chiite irakien Moqtada al-Sadr protestent près de l'ambassade de Suède à Bagdad contre un homme qui a déchiré et brûlé un exemplaire du Coran à l'extérieur d'une mosquée dans la capitale suédoise, Stockholm (Photo, Reuters/Saba Kareem).
Le 30 juin 2023, des partisans du religieux chiite irakien Moqtada al-Sadr protestent près de l'ambassade de Suède à Bagdad contre un homme qui a déchiré et brûlé un exemplaire du Coran à l'extérieur d'une mosquée dans la capitale suédoise, Stockholm (Photo, Reuters/Saba Kareem).
Des Iraniens brûlent un drapeau suédois lors d'une manifestation, le 30 juin 2023, devant l'ambassade de Suède à Téhéran, pour protester contre l'incendie d'un Coran en Suède (Photo, AP/Vahid Salemi).
Des Iraniens brûlent un drapeau suédois lors d'une manifestation, le 30 juin 2023, devant l'ambassade de Suède à Téhéran, pour protester contre l'incendie d'un Coran en Suède (Photo, AP/Vahid Salemi).
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Publié le Dimanche 02 juillet 2023

Autodafé du Coran en Suède: Face à l’intolérance, pas de tolérance qui tienne

  • Les autorités suédoises sont condamnées pour avoir autorisé la profanation du livre saint de l'islam par un immigrant irakien à Stockholm
  • L'incident soulève des questions sur les limites de la liberté d'expression et sur l'inégalité de traitement des différents textes, religieux ou laïques

DJEDDAH: La Suède, pays connu pour ses valeurs progressistes et son engagement en faveur des droits de l'homme, se trouve au centre d'une violente tempête diplomatique après qu'un membre d'un parti suédois d'extrême droite a brûlé un exemplaire du Coran, le livre saint de l'islam.

Cet incendie, que les autorités suédoises ont autorisé le 28 juin à Stockholm, a suscité la colère et l'indignation des musulmans du monde entier.

L'Organisation de la coopération islamique, un groupe de 57 pays, a déclaré qu'elle tiendrait une «réunion d'urgence» pour discuter de la situation, les discussions devant avoir lieu dimanche.

Selon un porte-parole, le comité exécutif de l'OCI se réunira dans la ville saoudienne de Djeddah pour «discuter des mesures à prendre contre cet acte odieux et adopter une position collective sur la marche à suivre».

L'incident s'est produit à l'extérieur de la mosquée centrale de Stockholm pendant l'Aïd Al-Adha, une fête islamique majeure et la fin du pèlerinage annuel du Hajj à La Mecque, en Arabie Saoudite.

Salwan Momika, qui a fui l'Irak pour s'installer en Suède il y a plusieurs années, proteste devant une mosquée de Stockholm le 28 juin 2023, pendant la fête de l'Aïd Al-Adha. Il a ensuite déchiré et brûlé un exemplaire du livre saint des musulmans (Photo, Jonathan Nackstrand /AFP).

L'acte a été commis par Salwan Momika, un immigré irakien de 37 ans vivant en Suède, qui prétendait exprimer son opinion sur le Saint Coran.

La police de Stockholm avait accordé une autorisation pour la manifestation après qu'un tribunal suédois a jugé que son interdiction porterait atteinte au droit à la liberté d'expression et que les forces de l'ordre ne disposaient pas de preuves suffisantes pour interdire de telles manifestations.

Dans une interview accordée au journal suédois Expressen jeudi, Momika a nié que son action constituait un «crime de haine» ou une «agitation envers un groupe quelconque». Il a également révélé qu'il a l'intention de brûler un autre exemplaire du livre saint dans les dix jours suivant sa première manifestation.

Selon un communiqué publié sur le site web du ministère suédois des Affaires étrangères, «le gouvernement suédois rejette fermement l'acte islamophobe commis par des individus en Suède. Cet acte ne reflète en aucun cas les opinions du gouvernement suédois».

La police suédoise a permis à Salwan Momika, un Irakien résidant en Suède, de déchirer et de brûler un exemplaire du Coran lors d'une manifestation non provoquée devant une mosquée de Stockholm, le 28 juin 2023, alors que les musulmans du monde entier célèbrent l'Aïd Al-Adha. (Photo, Jonathan Nackstrand/AFP).

Un porte-parole du service diplomatique de l'Union européenne a publié une déclaration à ce sujet: «L'UE se joint au ministère suédois des Affaires étrangères pour rejeter fermement l'incendie d'un Coran par un individu en Suède. Brûler le Coran ou tout autre livre saint est offensant et irrespectueux et constitue un acte de provocation évident. Les manifestations de racisme, de xénophobie et de tolérance qui en découlent n'ont pas leur place en Europe.»

Arab News a posé une série de questions au ministère suédois des Affaires étrangères, mais n'avait pas reçu de réponse au moment de la publication de cet article.

En réaction à l'incident de Stockholm, plusieurs pays à majorité musulmane ont exprimé leurs préoccupations et condamné l'acte comme une provocation délibérée et une attaque contre leur religion.

Le ministère saoudien des Affaires étrangères a publié une déclaration condamnant fermement l'incendie, soulignant que de tels actes incitent à la haine, à l'exclusion et au racisme, ce qui va à l'encontre des efforts visant à promouvoir la tolérance, la modération et le rejet de l'extrémisme.

«Le ministère des Affaires étrangères exprime la ferme condamnation et la dénonciation par le Royaume d'Arabie saoudite de l'incendie d'un exemplaire du Saint Coran par un extrémiste devant la mosquée centrale de Stockholm, en Suède, après la prière de l'Aïd Al-Adha», a déclaré le ministère.

«Ces actes haineux et répétés ne peuvent être acceptés avec aucune justification et incitent clairement à la haine, à l'exclusion et au racisme, et contredisent directement les efforts internationaux visant à diffuser les valeurs de tolérance, de modération et de rejet de l'extrémisme. Ils sapent le respect mutuel nécessaire aux relations entre les peuples et les États», a-t-il ajouté.

EN BREF

• Plus de 140 000 immigrés d'origine irakienne constituent le deuxième groupe d'immigrés en Suède.

• Rasmus Paludan, homme politique danois d'extrême droite, a brûlé un exemplaire du Saint Coran à Stockholm, le 21 janvier dernier.

Pour sa part, le Maroc a convoqué l'ambassadeur de Suède à Rabat et rappelé son propre ambassadeur, tandis que la Jordanie a exprimé son mécontentement à l'envoyé de Suède, qualifiant l'incendie d'acte de haine et de racisme.

Les Émirats arabes unis ont également convoqué l'ambassadeur de Suède et ont exprimé leur profond mécontentement quant à l’autorisation de l'action de Momika. Anwar Gargash, conseiller diplomatique du président des Émirats arabes unis, a déclaré dans un communiqué: «Les attaques flagrantes et répétées contre notre foi islamique sous le prétexte de la liberté d'opinion perpétuent la haine et la rivalité.»

Ce jeudi, une foule de manifestants irakiens, dirigée par le religieux chiite Moqtada al-Sadr, a fait irruption dans l'ambassade de Suède à Bagdad, mais l'a quittée au bout de 15 minutes lorsque les forces de sécurité sont arrivées sur les lieux.

Des partisans du leader musulman chiite Moqtada al-Sadr manifestent dans la cour et à l'extérieur de l'ambassade de Suède à Bagdad, le 29 juin 2023, pour protester contre l'incendie du Coran par un Irakien vivant en Suède (Photo, Ahmad Al-Rubaye /AFP).

Le ministère irakien des Affaires étrangères a condamné la décision de la Suède d'autoriser un «extrémiste» à brûler un exemplaire du Coran, déclarant que de tels actes «enveniment les sentiments des musulmans du monde entier et représentent une dangereuse provocation».

Le ministère a indiqué qu'il avait convoqué l'ambassadeur de Suède à Bagdad pour lui faire part de la «vive protestation» de son pays à l'égard de la décision d'autorisation.

Recep Tayyip Erdogan, le président turc, a critiqué la Suède pour avoir autorisé une telle manifestation, qui pourrait avoir encore affaibli les chances du pays nordique d'adhérer à l'OTAN — une démarche à laquelle la Turquie, membre de l'OTAN, oppose depuis longtemps son veto.

«Nous finirons par apprendre aux Occidentaux arrogants qu'insulter les musulmans ne relève pas de la liberté de pensée», a averti Erdogan lors d'une allocution télévisée. «Nous montrerons notre réaction dans les termes les plus forts possibles, jusqu'à ce qu'une victoire déterminée soit remportée contre les organisations terroristes et l'islamophobie.»

Des commentateurs politiques ont mis en garde contre le fait que l'acte de brûler une copie du Coran ne fait pas qu'attiser les tensions existantes entre les communautés musulmanes et non musulmanes en Suède, mais fait également le jeu d'éléments extrémistes qui exploitent de tels incidents pour alimenter la haine et polariser davantage les sociétés.

Des incidents antérieurs impliquant la profanation de textes sacrés ont également été condamnés. En 2015, un homme politique d'extrême droite a brûlé un exemplaire du Coran à l'extérieur d'une mosquée et, au début de l'année, un Égyptien vivant en Suède a projeté de brûler la Torah devant l'ambassade d'Israël à Stockholm, afin de susciter un débat sur la cause palestinienne.

Cependant, les leaders musulmans de Suède sont intervenus pour empêcher l'action et les religieux musulmans et juifs ont dénoncé la profanation de textes sacrés en guise de protestation.

Ulf Kristersson, le Premier ministre suédois, a déclaré que l'action de Momika était «légale mais pas appropriée».

Le Premier ministre suédois, Ulf Kristersson, s'adresse aux médias au siège de l'UE à Bruxelles, le 29 juin 2023 (Photo, AFP).

Salmane al-Ansari, chercheur politique saoudien, a déclaré à Arab News: «J'ai visité la Suède. C'est un pays magnifique avec des gens formidables qui accordent de l'importance au respect des autres.»

«Toutefois, il est très regrettable que certains extrémistes aient exploité la Suède et ses lois peu contraignantes en matière de liberté d'expression. Le peuple suédois est l'un des plus aimables que j'aie jamais rencontrés», a-t-il ajouté.

«Je suis absolument certain que le peuple suédois n'est pas d'accord avec les discours et les actes de haine. Si brûler le livre sacré de 1,8 milliard de personnes n'est pas de la haine, alors qu'est-ce qui constitue un discours et un acte de haine ?», a-t-il demandé.

Soulignant les préoccupations relatives à une approche sélective de la liberté d'expression, certains analystes politiques affirment que la réaction d'un pays occidental aurait pu être différente si la manifestation avait été dirigée contre une autre religion ou une cause politique populaire.

Ils affirment que la profanation d'un symbole religieux juif, par exemple, aurait probablement donné lieu à des accusations d'antisémitisme. De même, toute manifestation dirigée contre les Noirs aurait certainement été contraire aux lois interdisant le racisme.

Au cours de la dernière semaine d'avril, un groupe de satanistes autoproclamés a applaudi lorsque deux dirigeants ont ouvert la SatanCon 2023 dans la ville américaine de Boston, avec une cérémonie officielle renonçant aux «symboles de l'oppression» en déchirant une Bible et un drapeau «Thin Blue Line» représentant la police.

Commentant sur Twitter une vidéo de Fox News montrant ces actions, Al-Ansari a clairement exprimé son point de vue sur la profanation, en disant: «En tant que musulman, je dis que ces actions satanistes contre le christianisme et la Bible ne sont rien d'autre que déplorables, dégoûtantes et pleines de haine envers les personnes de toutes confessions.»

«En quoi le fait de déchirer une Bible peut-il être utile? Qui sont les complices en coulisses de ce culte de la haine?»

L'incendie d'un exemplaire du Coran n'est pas seulement considéré comme profondément offensant par les musulmans du monde entier, il soulève également des questions importantes sur les limites de la liberté d'expression et sur l'inégalité de traitement des différents textes, religieux ou laïques.

Si la liberté d'expression est un droit humain fondamental et une pierre angulaire des sociétés démocratiques, de nombreux politologues estiment qu'elle ne doit pas être considérée comme un droit absolu permettant l'incitation à la haine ou le dénigrement délibéré des croyances religieuses.

S'adressant à Arab News, Al-Ansari a déclaré: «La Suède est chère à mon cœur et je suis triste de la voir exploitée par des radicaux et des extrémistes d'extrême droite. Il est temps que le Premier ministre, Ulf Kristersson, et le Parlement suédois assèchent le marais de la haine et de l'extrémisme.»

«Le gouvernement suédois devrait rectifier le tir et tracer une ligne claire entre la liberté d'expression et les actes de haine.»

«Sinon, le gouvernement et le peuple suédois seront considérés comme des prêcheurs de haine et des hypocrites, car ils interdisent de nombreux slogans tels que les slogans nazis et autorisent la haine antimusulmane.»

«Il s'agit clairement d’une situation de deux poids deux mesures qui ne peut être justifiée de quelque manière que ce soit. La Suède mérite mieux que cela.»

Des Iraniens manifestent devant l'ambassade de Suède à Téhéran, le 30 juin 2023, pour protester contre l'incendie d'un Coran par des islamophobes dans la capitale suédoise (Photo, AP).

Se référant à Momika, Al-Ansari a déclaré: «L'auteur de cette action serait un membre actif de la milice irakienne qui a travaillé avec des organisations radicales et militantes en Irak.»

«Il a continué à se rendre en Irak alors qu'il prétendait craindre pour sa vie. Si le fait de mentir aux services d'immigration suédois n'est pas suffisant pour révoquer son statut de demandeur d'asile, alors qu'est-ce qui l'est ?»

D'autres ont indiqué que l'incident de cette semaine souligne l'importance d'encourager le dialogue interconfessionnel, d'éduquer le public sur la signification des textes religieux et de combler les fossés par une communication respectueuse.

Pour parvenir à une coexistence harmonieuse dans les sociétés multiculturelles, les chefs religieux estiment que la tolérance et le respect des diverses croyances sont primordiaux.

Si la liberté d'expression reste essentielle, ils estiment qu'elle doit être exercée de manière responsable, en tenant compte des conséquences potentielles et en respectant les sensibilités d'autrui.

Dans une récente interview accordée à la chaîne d'information MBC, le cheikh Dr Mohammed al-Issa, secrétaire général de la Ligue musulmane mondiale, a souligné qu'une «copie du Saint Coran, et non le Coran», était tombée entre «les mains d'un extrémiste haineux et rancunier qui s'est réfugié dans une constitution qui lui permet de s'exprimer librement, «même si l'opinion qu'il exprime est une rancune qui incitera à la haine et à l'inimitié entre toutes les communautés».

Il a ajouté: «C'est la philosophie de la constitution qui le protège, et dans ce cas, il s'agit de la constitution suédoise qui représente en fait la volonté du peuple suédois en promulguant cette constitution.»

«Cependant, la majorité des Suédois font la distinction entre les articles de la constitution et le comportement qui bénéficie de la protection de ces articles de la constitution pour exprimer ces opinions, en particulier la rancune et la haine qui sont exprimées dans cet incident.»

«En général, les Suédois ne sont pas d'accord avec cette rancune et cette haine. Ils les rejettent. Cependant, ils disent ‘C'est son droit d'exprimer son opinion tant qu'il ne commet pas d'acte nuisible concret’.»

Al-Issa, qui considère l'action de Momika comme un crime, a ajouté: «Nous avons des divergences avec la philosophie de cette constitution. Nous dénonçons explicitement cet acte odieux. Nous le condamnons de toutes les manières possibles.»

En mars 2019, Arab News a pris clairement position contre ceux qui encouragent les discours de haine au nom de la religion en lançant un projet Prédicateurs de haine dont le thème portait sur le fait qu'il ne peut y avoir de tolérance à l'intolérance.  

«Chaque semaine, nous nous concentrerons sur un prédicateur particulier, nous expliquerons ses croyances, nous mettrons la lumière sur ses édits remplis de haine et, surtout, nous le tiendrons responsable de ses paroles», a écrit Faisal J. Abbas, rédacteur en chef d'Arab News, dans un article intitulé «Il ne peut y avoir de tolérance à l'intolérance», qui présente la série.

La série a présenté, contextualisé et analysé des prédicateurs extrémistes de toutes religions, origines et nationalités, afin de mettre en lumière l'impact de leurs paroles sur les populations du monde entier.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Ukraine : Zelensky accuse la Russie de violer le cessez-le-feu qu'elle a pourtant annoncé

Un couple passe devant des drapeaux et des portraits de soldats tombés au combat à un mémorial improvisé pour les combattants ukrainiens et étrangers tombés au combat, sur la place de l'Indépendance à Kiev, le 19 avril 2025,Le président russe Vladimir Poutine a annoncé samedi une trêve de Pâques dans le conflit en Ukraine, qui débutera ce soir et durera jusqu'au 20 avril 2025 à minuit. (Photo Sergei SUPINSKY / AFP)
Un couple passe devant des drapeaux et des portraits de soldats tombés au combat à un mémorial improvisé pour les combattants ukrainiens et étrangers tombés au combat, sur la place de l'Indépendance à Kiev, le 19 avril 2025,Le président russe Vladimir Poutine a annoncé samedi une trêve de Pâques dans le conflit en Ukraine, qui débutera ce soir et durera jusqu'au 20 avril 2025 à minuit. (Photo Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • « Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe décrète une trêve de Pâques.
  • En fin de journée, Volodymyr Zelensky a toutefois assuré sur X que « des assauts russes se poursuivaient dans plusieurs secteurs du front », tandis qu'une alerte antiaérienne retentissait à Kiev. 

KIEV : Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé samedi la Russie de violer le cessez-le-feu que Vladimir Poutine venait d'annoncer pour Pâques et que l'Ukraine s'était engagée à respecter, ce qui constituerait la pause la plus significative dans les combats depuis le début du conflit il y a trois ans.

« Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe décrète une trêve de Pâques aujourd'hui, de 18 heures (15 heures GMT) à minuit entre dimanche et lundi (21 heures GMT dimanche). Je donne l'ordre de cesser toutes les hostilités pendant cette période », a déclaré le chef de l'État russe.

« Nous supposons que la partie ukrainienne suivra notre exemple », a-t-il ajouté, tout en demandant aux forces russes de se tenir prêtes à une « réponse immédiate et complète » en cas de « violations de la trêve ».

« Si la Russie est prête à vraiment s'engager, l'Ukraine fera de même », a écrit le président ukrainien sur X, ajoutant qu'il proposait « d'étendre le cessez-le-feu au-delà du 20 avril ».

En fin de journée, Volodymyr Zelensky a toutefois assuré sur X que « des assauts russes se poursuivaient dans plusieurs secteurs du front », tandis qu'une alerte antiaérienne retentissait à Kiev. 

Le gouverneur de la région de Kherson, dans le sud de l'Ukraine, a pour sa part fait état d'attaques de drones russes au même moment.

« Les combats se poursuivent et les attaques russes continuent », a déclaré samedi soir le chef d'état-major de l'armée ukrainienne. « Dans certaines zones de la ligne de front, l'artillerie russe continue d'être entendue, malgré la promesse de silence du dirigeant russe. Des drones russes sont utilisés. »

« Poutine vient de faire des déclarations sur sa prétendue volonté de mettre fin aux hostilités. Nous savons que ses paroles ne sont pas dignes de confiance et nous examinerons les actes, pas les paroles », a mis en garde Andriy Sybiga, le ministre ukrainien des Affaires étrangères. 

Samedi, la Russie a par ailleurs annoncé avoir échangé 246 prisonniers de guerre ukrainiens contre le même nombre de prisonniers russes, ainsi que 31 blessés ukrainiens et 15 blessés russes.

Les Émirats arabes unis, médiateurs dans ce dossier, ont confirmé l'opération dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères publié samedi soir, saluant « le plus grand échange de prisonniers depuis le début de la guerre ».

La Pâques, l'une des plus importantes fêtes du calendrier chrétien qui commémore la résurrection du Christ, est célébrée cette année dimanche, à la même date par les catholiques et les orthodoxes.

Des tentatives d'instaurer un cessez-le-feu à cette occasion en Ukraine ont déjà eu lieu à deux reprises depuis le début du conflit en février 2022.

La trêve ordonnée samedi par M. Poutine intervient alors que les efforts de l'administration de Donald Trump pour trouver une issue au conflit en Ukraine semblent s'enliser ces derniers jours.

Par ailleurs, la Russie a revendiqué samedi avoir « libéré » 99,5 % de la région russe de Koursk, cible en août 2023 d'une offensive surprise des forces ukrainiennes.

Une telle progression replacerait à nouveau la totalité du front sur le sol ukrainien, ce qui renforcerait la confiance de la Russie.

À Moscou, Evgeniy Pavlov, 58 ans, a exprimé son scepticisme à l'égard de la trêve annoncée.

« Il ne faut pas donner de répit à l'Ukraine. Si nous insistons, cela signifie que nous devons aller jusqu'au bout », a-t-il dit à l'AFP.


Canada: participation élevée pour le vote anticipé

Un bénévole installe des panneaux de signalisation pour diriger les gens vers un bureau de vote lors du vote anticipé à Montréal, Québec, Canada, le 19 avril 2025. (Photo par ANDREJ IVANOV / AFP)
Un bénévole installe des panneaux de signalisation pour diriger les gens vers un bureau de vote lors du vote anticipé à Montréal, Québec, Canada, le 19 avril 2025. (Photo par ANDREJ IVANOV / AFP)
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  • Selon les données préliminaires d'Elections Canada envoyées à l'AFP, plus de 2 millions de Canadiens ont voté dès le premier jour du vote par anticipation vendredi, soit une augmentation de 36 % par rapport au même jour lors des élections de 2021.
  • Le pays est confronté à une crise sans précédent avec son voisin américain.

MONTREAL : L'organisme chargé des élections au Canada a noté samedi une participation anticipée élevée, qui témoigne d'un « engouement pour le vote » à une semaine d'un scrutin législatif dominé par les tensions avec le voisin américain.

Selon les données préliminaires d'Elections Canada envoyées à l'AFP, plus de 2 millions de Canadiens ont voté dès le premier jour du vote par anticipation vendredi, soit une augmentation de 36 % par rapport au même jour lors des élections de 2021.

Les électeurs canadiens peuvent voter par anticipation jusqu'à lundi soir, avant le scrutin du 28 avril. Vendredi, de longues files d'attente se sont formées devant des bureaux de vote dans plusieurs grandes villes du pays et l'attente a duré jusqu'à deux heures, ont rapporté des superviseurs à l'AFP.

« C'est une élection particulière à cause de ce qui se passe avec les États-Unis », explique à l'AFP Josée Fournier, rencontrée devant un bureau de vote à Montréal samedi. 

Le pays est confronté à une crise sans précédent avec son voisin américain, et « c'est sérieux ce qui se passe », ajoute l'agent de ressources humaines de 60 ans, qui a hésité jusqu'au bout avant de faire son choix.

Raphaël Collomb, 35 ans, a suivi de très près la campagne en « lisant tout dans les médias et les programmes des candidats ». Son souhait ? « Que l'économie aille mieux et qu'il y ait plus de tranquillité pour tout le monde », dit-il à l'AFP.

Donald Trump multiplie les menaces douanières et les attaques contre la souveraineté du pays, ce qui incite de nombreux électeurs canadiens à voter pour le parti perçu comme le plus apte à faire face au président américain.

Selon les derniers sondages, les Libéraux du Premier ministre sortant Mark Carney recueillent environ 44 % des voix, contre 38 % pour les conservateurs. Viennent ensuite le Nouveau parti démocratique (NPD, gauche) avec 8 % des intentions de vote, puis le Bloc québécois (parti indépendantiste qui ne présente des candidats qu'au Québec) avec 5 %.  


Des milliers d'Américains manifestent contre Trump

Une personne crie à côté d'une image du président Donald Trump alors que des gens participent à une manifestation organisée pour « Protéger les migrants, protéger la planète » le 19 avril 2025 à New York. Les organisateurs de la manifestation nationale ont déclaré que les manifestations visaient à dénoncer la « prise de contrôle hostile du gouvernement » par l'administration Trump. Adam Gray//Getty Images via AFP)
Une personne crie à côté d'une image du président Donald Trump alors que des gens participent à une manifestation organisée pour « Protéger les migrants, protéger la planète » le 19 avril 2025 à New York. Les organisateurs de la manifestation nationale ont déclaré que les manifestations visaient à dénoncer la « prise de contrôle hostile du gouvernement » par l'administration Trump. Adam Gray//Getty Images via AFP)
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  • Des milliers d'Américains sont descendus dans la rue samedi à New York et dans d'autres grandes villes du pays pour une deuxième journée de mobilisation anti-Trump en l'espace de deux semaines.
  • « Les immigrés sont les bienvenus ici », criaient les manifestants réunis devant la bibliothèque de la plus grande ville des États-Unis, à quelques encablures de la célèbre Trump Tower du milliardaire. 

NEW-YORK : Des milliers d'Américains sont descendus dans la rue samedi à New York et dans d'autres grandes villes du pays pour une deuxième journée de mobilisation anti-Trump en l'espace de deux semaines.

« Pas de roi en Amérique » ou « Résistons à la tyrannie » pouvait-on lire sur des pancartes lors de la manifestation new-yorkaise, à côté d'images du président américain affublé d'une moustache à la Hitler.

« La démocratie court un grand danger », a déclaré à l'AFP Kathy Valy, 73 ans, une descendante de survivants de la Shoah, qui affirme que ce que ses parents lui ont raconté à propos de la montée du nazisme dans les années 1930 « est en train de se passer ici ».

« La différence avec les autres fascistes (...) c'est que Trump est trop bête pour être efficace et que son équipe est divisée », se rassurait-elle.

Les manifestants ont particulièrement dénoncé la politique anti-immigration de la Maison Blanche, alors que la Cour suprême a suspendu les expulsions d'immigrés sur la base d'une loi de 1798 sur « les ennemis étrangers ».

« Les immigrés sont les bienvenus ici », criaient les manifestants réunis devant la bibliothèque de la plus grande ville des États-Unis, à quelques encablures de la célèbre Trump Tower du milliardaire. 

Des contestataires se sont aussi rassemblés devant la Maison Blanche à Washington, bien qu'en nombre apparemment inférieur à la précédente mobilisation du samedi 5 avril, qui avait réuni des dizaines de milliers de personnes.

Benjamin Douglas, 41 ans, a dénoncé : « L'administration Trump mène un assaut contre l'État de droit et le fait qu'il faut empêcher l'État d'empiéter sur les droits des gens qui vivent ici, aux États-Unis. »

M. Douglas, un Américain d'origine palestinienne portant un keffieh sur la tête, tenait une pancarte en soutien à Mahmoud Khalil, un étudiant arrêté le mois dernier à New York et menacé d'expulsion pour avoir organisé des manifestations contre la guerre à Gaza.

L'administration républicaine s'en prend à des personnes « afin de faire monter la xénophobie et d'éroder des protections juridiques bien établies », accuse-t-il. 

Des rassemblements ont également été signalés à l'extérieur de concessions Tesla, la marque automobile propriété d'Elon Musk, milliardaire chargé par Donald Trump de réformer en profondeur la fonction publique.

La mobilisation était organisée par un groupement baptisé 50501, en référence aux 50 États du pays et à l'objectif de 50 manifestations. L'ensemble de ces actions doit aboutir à un mouvement d'opposition unique au milliardaire républicain.

Le mouvement constitue « une réponse décentralisée et rapide aux actes anti-démocratiques et illégaux de l'administration Trump et de ses alliés ploutocrates », explique-t-il sur son site internet.

Selon cette organisation, quelque 400 manifestations étaient prévues dans la journée et 50501 a appelé des millions de personnes à descendre dans la rue.

Toutefois, il est difficile d'obtenir des chiffres précis, de nombreux services de police refusant de fournir des estimations.