Justice: L'Assemblée approuve le principe des portables «mouchards»

Le ministre français de la Justice, Eric Dupond-Moretti, s'entretient avec le ministre français de la Transformation et des Services publics, Stanislas Guerini, et le ministre délégué aux Relations avec le Parlement, Franck Riester, alors qu'ils quittent le Palais présidentiel de l'Elysée, le 5 juillet 2023 (Photo, AFP).
Le ministre français de la Justice, Eric Dupond-Moretti, s'entretient avec le ministre français de la Transformation et des Services publics, Stanislas Guerini, et le ministre délégué aux Relations avec le Parlement, Franck Riester, alors qu'ils quittent le Palais présidentiel de l'Elysée, le 5 juillet 2023 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 06 juillet 2023

Justice: L'Assemblée approuve le principe des portables «mouchards»

  • Les députés ont donné leur feu vert à une disposition permettant d'activer à distance des téléphones portables pour écouter et filmer à leur insu des personnes
  • Les députés du camp présidentiel, de LR et du RN ont voté pour, ceux de la Nupes ont voté contre, comme le président du groupe Liot, Bertrand Pancher

PARIS: Les députés ont donné leur feu vert à une disposition sensible du projet de loi justice d'Eric Dupond-Moretti : la possibilité d'activer à distance des téléphones portables pour écouter et filmer à leur insu des personnes visées dans certaines enquêtes.

"Pente très dangereuse" ou "adaptation technologique" ? Une majorité de l'Assemblée a en tout cas approuvé l'article qui porte cette mesure, par 80 voix contre 24.

Les députés du camp présidentiel, de LR et du RN ont voté pour. Ceux de la Nupes ont voté contre, comme le président du groupe Liot, Bertrand Pancher.

L'article permet l'activation à distance de téléphones portables, ordinateurs et autres objets connectés dans deux cas distincts.

Le premier dispositif autorise la géolocalisation pour suivre en temps réel les déplacements de personnes visées dans le cadre d'une enquête pour crime ou délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement. Le Sénat voulait circonscrire cette mesure aux crimes et délits passibles de dix ans d'emprisonnement, mais l'Assemblée est revenue à la version du gouvernement.

Le second volet permet de capter à distance son et image de personnes visées cette fois dans des affaires de terrorisme ainsi que de délinquance et criminel organisé. La captation concerne seulement "des dizaines d'affaires par an", insiste Eric Dupond-Moretti.

La gauche est vent debout contre ces dispositions "d'intrusion dans la vie privée", LFI évoquant une "dérive autoritaire" et rappelant les critiques d'avocats ou d'ONG.

Un amendement de la députée du camp présidentiel Naïma Moutchou (Horizons) précise que la captation doit être mise en place "lorsque la nature et la gravité des faits le justifiant" et "pour une durée strictement proportionnée" à l'objectif.

Mais pour le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, "il y a des gens dont on va sauver la vie": "On est loin du totalitarisme de +1984+", le roman de George Orwell.

Téléconsultation en garde à vue
Le camp présidentiel souligne les "garanties" améliorées. La captation serait réservée aux affaires les "plus graves" et autorisée 15 jours renouvelables une fois par le juge des libertés et de la détention, et deux mois renouvelables par un juge d'instruction jusqu'à une durée maximale de six mois.

Eric Dupond-Moretti la compare à la "vieille technique" de micros ou de caméras posées chez des suspects. Autre argument : le déclenchement à distance d'appareils connectés est déjà utilisé par "les services de renseignement", sans l'autorisation du juge, qui sera ici indispensable.

En commission, les députés avaient renforcé des "garde-fous" avec davantage de professions "protégées" de ces techniques d'enquête : médecins et journalistes s'ajoutant aux avocats, magistrats et parlementaires.

Le groupe LFI, opposé à la mesure en tant que telle, a toutefois fait retiré par amendement les huissiers et notaires des professions "protégées", estimant qu'il n'y avait pas de raison valable qu'elles le soient, et pas le reste de la population.

Dans ce vaste article 3 du texte sont également envisagés l'extension du recours aux perquisitions de nuit et la possibilité d'envisager une téléconsultation pour un examen médical lors d'une prolongation de garde à vue.

Des députés de plusieurs groupes d'opposition ont tenté sans succès de faire supprimer la possibilité pour un juge, dans certaines conditions, de placer sous assignation à résidence avec surveillance électronique une personne qui a été libérée de sa détention provisoire en raison d'une erreur de procédure. Disposition qu'ils jugent liberticide.

Aujourd'hui, seul le placement sous contrôle judiciaire est possible. "C'est une modalité supplémentaire", a défendu le ministre.

"Du fait du manque de moyens de la justice, y aurait-il plus d'erreurs (de procédures) qui fait que vous proposez de couvrir des irrégularités en les rendant régulières ?", lui a répondu la députée communiste Elsa Faucillon.

Dans la soirée, les députés ont approuvé une disposition pour renforcer la présence d'assureurs dans les audiences dans les juridictions pénales des mineurs, et améliorer les procédures de réparation.

Ils ont aussi validé la présence obligatoire d'un avocat lors d'un accord passé via une convention juridique d'intérêt public (CJIP), une procédure qui permet à une entreprise de solder un litige et d'éviter des poursuites en payant une amende à l 'État.


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Short Url
  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Short Url
  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.

 


Pour Sébastien Lecornu, un premier déplacement consacré à la santé

Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Déplacement symbolique à Mâcon : Pour son premier déplacement, Sébastien Lecornu met l'accent sur l'accès aux soins et le quotidien des Français
  • Conscient de l'absence de majorité, il consulte partis et syndicats, cherchant des terrains d'entente sur le budget, tout en laissant la porte ouverte à une fiscalité plus juste

PARIS: Sébastien Lecornu se rend samedi en province, à Mâcon, pour son premier déplacement en tant que Premier ministre consacré à la santé et à "la vie quotidienne" des Français, délaissant pendant quelques heures les concertations qu'il mène activement à Paris avant de former un gouvernement.

Quatre jours à peine après sa nomination, le nouveau et jeune (39 ans) locataire de Matignon va à la rencontre des Français, pour qui il reste encore un inconnu. Il échangera notamment avec des salariés d'un centre de santé de Saône-et-Loire dont le but est d'améliorer l'accès aux soins.

Lui-même élu local de l'Eure, où il a été maire, président de département et sénateur, ce fils d'une secrétaire médicale et d'un technicien de l'aéronautique avait assuré dès le soir de sa nomination "mesurer les attentes" de ses concitoyens et "les difficultés" qu'ils rencontraient.

Celles-ci sont souvent "insupportables" pour accéder à un médecin ou à un professionnel de santé, parfois "source d'angoisse", souligne son entourage. Le Premier ministre entend dans ce contexte "témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des personnels soignants" et "réaffirmer la volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux soins".

Il s'agit aussi pour Sébastien Lecornu de convaincre l'opinion, autant que les forces politiques, du bien-fondé de sa méthode: trouver des terrains d'entente, en particulier sur le budget, permettant de gouverner sans majorité.

Sébastien Lecornu est très proche d'Emmanuel Macron, avec qui il a encore longuement déjeuné vendredi à l'Elysée.

- Mouvements sociaux -

Sa nomination coïncide avec plusieurs mouvements sociaux. Le jour de sa prise de fonction, une mobilisation lancée sur les réseaux sociaux pour "bloquer" le pays a réuni 200.000 manifestants, et une autre journée de manifestations à l'appel des syndicats est prévue jeudi.

"Il y a une grande colère" chez les salariés, a rapporté Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, premier syndicat de France, à l'issue d'une entrevue vendredi avec le nouveau Premier ministre, qui lui a dit travailler sur une "contribution des plus hauts revenus" dans le budget 2026.

C'est sur le budget que ses deux prédécesseurs, François Bayrou et Michel Barnier, sont tombés. Et Sébastien Lecornu cherche en priorité une forme d'entente avec les socialistes.

Mais il lui faut dans le même temps réduire les déficits, alors que l'agence de notation Fitch a dégradé vendredi soir la note de la dette française.

Le centre et la droite de la coalition gouvernementale se disent prêts à taxer plus fortement les ultra-riches sans pour autant aller jusqu'à l'instauration de la taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, mesure phare brandie par les socialistes et dont LR ne veut pas.

Une telle mesure marquerait en tout cas une des "ruptures" au fond prônées par Sébastien Lecornu à son arrivée, puisqu'elle briserait le tabou des hausses d'impôts de la macronie.

- Méthode -

Sébastien Lecornu veut aussi des changements de méthode.

Il a d'abord réuni jeudi --pour la première fois depuis longtemps-- les dirigeants des partis du "socle commun", Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains, afin qu'ils s'entendent sur quelques priorités communes.

Un format "présidents de parti" qui "permet de travailler en confiance, de façon plus directe, pour échanger sur les idées politiques, sur les arbitrages", salue un participant.

Avant les oppositions et à quelques jours d'une deuxième journée de manifestations, il a consulté les partenaires sociaux, recevant vendredi la CFDT et Medef, avant la CGT lundi.

En quête d'un compromis pour faire passer le budget, le chef de gouvernement pourrait repartir du plan de son prédécesseur François Bayrou délesté de ses mesures les plus controversées. A l'instar de la suppression de deux jours fériés.

L'hypothèse d'une remise sur les rails du conclave sur les retraites semble aussi abandonnée. Les partenaires sociaux refusent de toute façon de le rouvrir.

Des gestes sont attendus à l'égard des socialistes alors qu'à l'Elysée, on estime que le Rassemblement national, premier groupe à l'Assemblée nationale, se range désormais comme la France insoumise du côté du "dégagisme".

Cultivant une parole sobre voire rare, Sébastien Lecornu ne s'exprimera qu'à l'issue de ces consultations "devant les Français", avant la traditionnelle déclaration de politique générale, devant le Parlement.