Frankly Speaking: Que faudra-t-il pour que les Houthis aident au déminage du Yémen?

Ousama al-Gosaibi, directeur général de Masam, le projet saoudien de déminage (Capture d'écran).
Ousama al-Gosaibi, directeur général de Masam, le projet saoudien de déminage (Capture d'écran).
Short Url
Publié le Mardi 18 juillet 2023

Frankly Speaking: Que faudra-t-il pour que les Houthis aident au déminage du Yémen?

  • Le directeur général de Masam, le projet saoudien de déminage se dit optimiste quant à l'accord entre l'Arabie saoudite et l'Iran
  • Le Yémen est truffé de mines terrestres en raison du conflit

RIYAD : Jusqu’à présent, la normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran n’a pas réussi à améliorer le comportement de la milice houthiste en ce qui concerne les mines terrestres au Yémen, a déclaré Ousama al-Gosaibi, directeur général de Masam, le projet saoudien de déminage.

''
« Je suis reconnaissant que l'Iran et l'Arabie saoudite soient parvenus à cet accord. Je pense qu'à long terme, cela devrait aider toute la région et remodeler certaines des relations qui existent dans cette région », a déclaré Al-Gosaibi à Katie Jensen lors du dernier épisode de l'émission «  Frankly Speaking » d'Arab News (Capture d'écran).

Il se dit optimiste quant à l'accord entre l'Arabie saoudite et l'Iran, mais jusqu'à présent, cet accord a eu peu d'impact sur le déminage au Yémen.

« Je suis reconnaissant que l'Iran et l'Arabie saoudite soient parvenus à cet accord. Je pense qu'à long terme, cela devrait aider toute la région et remodeler certaines des relations qui existent dans cette région », a déclaré Al-Gosaibi à Katie Jensen lors du dernier épisode de l'émission «  Frankly Speaking » d'Arab News.

« Comment cela affecte-t-il les opérations de déminage au Yémen ? Je ne pense pas que nous ayons constaté d'amélioration concernant la question des mines terrestres au Yémen jusqu'à présent. »

Huit ans se sont écoulés depuis que les Houthis, soutenus par l'Iran, ont renversé le gouvernement internationalement reconnu au Yémen, déclenchant une guerre qui a fait des centaines de milliers de morts et créé l'une des pires crises humanitaires mondiales. Le pays est truffé de mines terrestres en raison du conflit.

Souvent qualifiées de soldats parfaits, n'ayant jamais besoin de manger, de dormir ou de quitter leur position, les mines terrestres peuvent rester enfouies dans le sol pendant des années, même après la fin des hostilités, constituant une menace durable pour les civils, en particulier les enfants, à moins d'être minutieusement déminées.

Lorsque l'Arabie saoudite et l'Iran ont signé leur accord historique de normalisation, facilité par la Chine, le 10 mars de cette année, on espérait que les Houthis, depuis longtemps armés et financés par Téhéran, coopéreraient aux efforts de déminage.

Or, malgré le fait que les Houthis aient signé l'accord de Stockholm les obligeant à fournir des détails sur les explosifs qui ont été posés et des cartes détaillées indiquant leur emplacement, les progrès se font attendre.

« Cela ne s'est pas encore produit à ce jour », a déclaré Al-Gosaibi. « Je n’ai donc constaté aucune amélioration en ce qui concerne notre travail. » 

Pour Masam, la lutte contre les mines terrestres a été un combat difficile. Le déplacement de la ligne de front au cours du conflit signifie que les zones autrefois libérées par le gouvernement yéménite et déminées par les équipes d'Al-Gosaibi ont été reprises et re-minées par les forces houthistes.

« Nous avons éliminé plus de 400 000 éléments. Cela inclut des mines, à la fois antipersonnel et antichar, ainsi qu’un grand nombre d'engins non explosés et un nombre encore plus grand de dispositifs explosifs improvisés », a-t-il déclaré.

« Dans le cadre du projet Masam, nous avons jusqu'à présent éliminé plus de 7 800 dispositifs explosifs improvisés tels que des mines de roche au Yémen. Ce nombre est ahurissant. Cela ne s'est jamais produit ailleurs dans le monde. »

Selon certaines estimations, le Yémen est envahi par le plus grand nombre de mines terrestres qui n’ait jamais été utilisé pendant la Seconde Guerre mondiale. Interrogé sur le nombre de mines terrestres plantées au Yémen, Al-Gosaibi ne pouvait fournir qu'une estimation approximative, tant les données fournies par les Houthis sont rares.

« Je dirais entre un et deux millions de mines. Ce sont des mines nouvellement posées. Je ne tiens pas compte des mines qui existaient au Yémen avant le problème houthiste. »

Le Traité d'Ottawa de 1997, souvent appelé Traité d'interdiction des mines, concerne les mines antipersonnel, mais ne fait pas référence aux mines antichar. Al-Gosaibi affirme que les Houthis ont profité de cette zone grise pour fabriquer des engins explosifs improvisés en utilisant des mines antichar.

« Au lieu d'avoir une mine antichar qui exploserait à un poids d'environ plus de 120 ou plus de 150 kilogrammes, ils l'ont réduit à moins de 10 kilogrammes. Ainsi, si un enfant marche sur ces plaques de pression, il ne restera rien de lui. Vous pouvez imaginer ce qui arriverait à un être humain si une mine antichar explose à côté de lui. »

« Le problème est que jusqu'à présent, ces mines improvisées, ces IED improvisés, ne sont pas considérés dans la terminologie de la communauté internationale. Ils n'ont pas trouvé de terminologie, mais ils n'ont pas non plus élaboré de règles ou de réglementations à leur sujet. »

Al-Gosaibi estime que le nombre de personnes mutilées et tuées par les mines terrestres au Yémen au cours du conflit se compte par milliers. Comme plusieurs groupes d'action contre les mines opèrent dans différentes parties du Yémen, il n'y a pas de base de données unique sur les victimes.

« Il y a une stigmatisation qui est toujours associée aux accidents causés par les mines au Yémen », a déclaré Al-Gosaibi. « Certaines femmes ont divorcé parce qu'elles ont perdu un membre. Des hommes ont perdu la capacité de subvenir aux besoins d'une famille de sept ou huit personnes à cause d'un accident causé par une mine. »

« Les Nations Unies ont annoncé la semaine dernière que plus de la moitié des accidents survenus aux enfants au Yémen sont directement liés aux mines. C'est un nombre énorme. Les mines ont un impact sur le système éducatif, le système médical, l'approvisionnement en eau, les terres agricoles et les pâturages. »

Et les civils ne sont pas les seuls à être en danger. Plusieurs membres du personnel d'Al-Gosaibi ont été blessés, voire tués, lors du déminage et de l'élimination des explosifs.

« En ce qui concerne Masam, nous avons perdu 30 de nos camarades au Yémen, 47 blessés, 30 morts. Certains d'entre eux sont des amis très proches avec qui j'ai travaillé ces 18 dernières années. Donc oui, nous avons payé un prix élevé au Yémen. »

Malgré les efforts de la communauté internationale pour interdire l'utilisation des mines terrestres, elles restent largement utilisées dans les conflits à travers le monde en raison de leur impact psychologique puissant et de leur faible coût de production.

« Planter une mine est bon marché. On parle de dizaines de dollars » a déclaré Al-Gosaibi. (1 dollar = 0,89 euro). « Les Nations Unies estiment que pour le déminage, chaque mine peut coûter entre 500 et 1 000 dollars à retirer. »

« Il n'y a donc aucune comparaison entre le coût de la plantation et le coût de l'élimination. Aujourd'hui, les Houthis utilisent des mines fabriquées localement. Ils n'importent pas de mines. Ils ont reçu une aide pour créer leurs propres usines. »

Les Nations Unies ont tenté d'adopter une approche équilibrée en ce qui concerne le financement des opérations de déminage, non seulement dans les zones contrôlées par le gouvernement internationalement reconnu à Aden, mais également au sein de l'administration houthiste à Sanaa.

Al-Gosaibi estime que cette approche est une perte de temps et d'argent, car les travaux de déminage dans les zones contrôlées par les Houthis manquent de transparence et de responsabilité.

« Je ne crois pas qu'il soit judicieux de tenir le bâton par le milieu », a-t-il déclaré. « Je ne vois pas l'intérêt de soutenir un programme d'action contre les mines basé à Sanaa alors que nous savons que les Houthis sont responsables de la pose et de la fabrication de toutes ces mines et de ces IED au Yémen. »

« Les Nations Unies ont cette politique : “Nous devons tenir le bâton par le milieu. Nous devons soutenir Sanaa. Nous devons soutenir Aden et Marib.“ Je pense que c'est une perte de temps et d'argent. »

« Si vous voulez aider les Yéménites, peu importe qui ils sont, à qui ils appartiennent, du nord, du sud, houthistes, non houthistes. Je parle de si vous voulez aider la population locale, il y a des façons appropriées de le faire. »

« Vous pouvez superviser correctement les opérations de déminage et les équipes de déminage dans les zones contrôlées par les Houthis, sous votre supervision. Comme nous le faisons dans nos zones. Nous avons une relation de travail très étroite avec le programme yéménite d'action contre les mines. Et cela fonctionne. »

« Vous devriez voir là-bas. Vous savez, c’est seulement si vous voulez réellement déminer, pas seulement payer et dire : “Oh, nous avons financé ceci et nous avons financé cela.“»

« Où va l'argent ? Je ne sais pas. Masam est le seul projet ou entité au Yémen qui annonce ses chiffres tous les dimanches matin. Et ces chiffres ont été examinés, rectifiés, notariés, vous pouvez dire ce que vous voulez, par le Centre yéménite d'action contre les mines, par notre propre équipe opérationnelle avant d'être publiés chaque dimanche matin. »

Tant que l'approvisionnement en composants aux Houthis n'est pas interrompu, Al-Gosaibi estime que les mines terrestres continueront de proliférer au Yémen. Cela signifie que l'Iran et ses mandataires dans la région doivent cesser le trafic d'armes.

« Nous savons que la chaîne vient, financée par l'Iran, même si elle vient d'autres pays », a affirmé Al-Gosaibi.

« Les drones au Yémen avaient des moteurs fabriqués en Allemagne. Qui pourrait faire entrer en contrebande des moteurs allemands au Yémen ? Ce ne peut pas être une petite organisation. Il doit s'agir d'un véritable gouvernement qui a de nombreuses ramifications dans les zones qui peuvent faire entrer cela en contrebande au Yémen. »

Six ans après le début du Projet saoudien de déminage au Yémen, et malgré des progrès remarquables, Al-Gosaibi estime qu'il reste encore de nombreuses années de travail avant que son équipe puisse déclarer « mission accomplie ».

Il a ajouté : « Je peux uniquement dire que s'il y a un cessez-le-feu absolu au Yémen et que tous les fronts sont ouverts et que nous y travaillons, on pourrait alors donner une estimation (de la durée). Personne ne sait ce qui se passe sur ces fronts pour le moment, car nous ne travaillons pas sur un front actif. »

Il espère que les Houthis fourniront des cartes détaillées de leurs champs de mines afin d’aider les efforts de déminage, car ne pas le faire prolongerait la menace qui pèse sur les civils yéménites et les démineurs.

« Cela ne fera que retarder le problème, augmenter le nombre de victimes, augmenter le nombre de personnes impliquées dans les opérations de déminage (blessées) au cours des années à venir.

« Même si vous disposez d'un financement adéquat, d'un nombre adéquat d'équipes et d'informations adéquates... J’estime que cela prendrait encore 10 ans. »


L'Arabie saoudite et le Pakistan signent un pacte de défense mutuelle

Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Short Url
  • Le pacte marque une étape majeure dans le renforcement des liens sécuritaires et économiques entre deux alliés de longue date
  • L'accord de Riyad transforme des décennies de coopération militaire en un engagement sécuritaire contraignant

​​​​​ISLAMABAD : Le Pakistan et l’Arabie saoudite ont signé mercredi un « Accord stratégique de défense mutuelle », s’engageant à considérer toute agression contre l’un des deux pays comme une attaque contre les deux, renforçant ainsi la dissuasion conjointe et solidifiant des décennies de coopération militaire et sécuritaire.

Cet accord intervient moins de deux semaines après les frappes aériennes israéliennes à Doha visant des dirigeants du Hamas, un événement ayant intensifié les tensions régionales et souligné l’urgence pour les États du Golfe de renforcer leurs partenariats sécuritaires.

L'accord de Riyad marque également une volonté des deux gouvernements de formaliser leurs liens militaires de longue date en un engagement contraignant.

Le pacte a été signé lors de la visite officielle du Premier ministre Shehbaz Sharif à Riyad, où il a rencontré le prince héritier et Premier ministre Mohammed ben Salmane au palais Al-Yamamah. Accompagnés de ministres et responsables militaires de haut niveau, les deux dirigeants ont passé en revue ce que le bureau de Sharif a qualifié de relation « historique et stratégique » entre les deux nations, en discutant également des développements régionaux.

« L’accord stipule que toute agression contre l’un des deux pays sera considérée comme une agression contre les deux », a déclaré le communiqué conjoint.

Il décrit le pacte comme un reflet de l’engagement commun des deux gouvernements à renforcer la coopération en matière de défense et à œuvrer pour la sécurité et la paix dans la région et dans le monde.

Depuis des décennies, l’Arabie saoudite et le Pakistan entretiennent des liens étroits sur les plans politique, militaire et économique. Le Royaume accueille plus de 2,5 millions de ressortissants pakistanais — la plus grande communauté d’expatriés pakistanais — et a souvent soutenu financièrement Islamabad lors de crises économiques. La coopération en matière de défense a inclus des formations, des achats d’armes et des exercices militaires conjoints.

Le nouvel accord formalise cette coopération sous la forme d’un engagement de défense mutuelle, une étape qui, selon de nombreux analystes, place cette relation au même niveau que d’autres partenariats stratégiques dans la région.

Bien que le communiqué n’ait pas précisé les mécanismes de mise en œuvre, il a souligné que l’accord visait à développer les aspects de la coopération en matière de défense et à renforcer la dissuasion conjointe face à toute agression.

Cette visite intervient également alors que le Pakistan cherche à renforcer ses liens avec les États du Golfe, dans un contexte de défis économiques persistants.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.pk


La reconnaissance de la Palestine, message à Israël sur «les illusions de l'occupation» 

La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
Short Url
  • "La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours"
  • Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus"

RAMALLAH: La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.

"La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours", a déclaré Mme Aghabekian, en référence à l'occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza par Israël.

Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus", a-t-elle ajouté.


Les groupes de défense des droits exhortent le Liban à protéger la liberté d'expression dans la nouvelle loi sur les médias

Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme. (AFP)
Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme. (AFP)
Short Url
  • Les amendements proposés risquent de saper les efforts de réforme, selon les critiques
  • Les ONG demandent au Parlement d'abolir la diffamation criminelle et de mettre fin à la détention préventive

BEYROUTH: Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme.

Il s'agit notamment de décriminaliser la diffamation, le blasphème, l'insulte et la critique des fonctionnaires, d'interdire la détention provisoire en cas d'infractions liées à la liberté d'expression et de supprimer les restrictions onéreuses imposées à la création de médias.

Ces appels interviennent alors que la commission parlementaire de l'administration et de la justice doit reprendre mardi l'examen du projet de loi.

Le 31 août, les membres du Parlement ont reçu des propositions d'amendements au texte du projet de loi qui, selon les organisations, comprenaient la réintroduction de la détention préventive et des dispositions qui criminalisent l'insulte et la diffamation.

Les groupes de défense des droits, dont Amnesty International, le Comité pour la protection des journalistes, Human Rights Watch et Reporters sans frontières, ont prévenu que les amendements proposés limiteraient davantage le travail des organisations de médias qui font l'objet d'une plainte en leur interdisant de publier des documents sur le plaignant tant que la procédure judiciaire est en cours.

Les lois libanaises sur la diffamation criminelle ont été utilisées à maintes reprises pour cibler et réduire au silence les critiques du gouvernement, les activistes et les journalistes au Liban, ces derniers étant régulièrement convoqués devant les agences de sécurité pour leur travail.

"Le Parlement devrait veiller à ce que ces pratiques cessent en adoptant une loi sur les médias qui soit entièrement conforme aux normes internationales en matière de droits de l'homme, notamment en ce qui concerne le droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias", ont déclaré les organisations dans un communiqué.

"Le Parlement libanais devrait adopter une loi sur les médias qui inclue les protections des droits pour lesquelles les groupes de défense des droits et des médias libanais se battent depuis longtemps", ont-elles ajouté.

Les groupes de défense des droits, qui ont examiné les amendements proposés, se sont opposés à la réintroduction de la détention provisoire, y compris "dans des circonstances aggravées, telles que l'atteinte à la dignité ou à la vie privée des individus".

La détention provisoire n'est autorisée au Liban que pour les délits passibles de plus d'un an de prison. Elle est expressément interdite pour les délits liés aux médias dans les lois libanaises existantes sur les médias.

"S'il était adopté, cet amendement constituerait un recul significatif pour la protection du droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias au Liban", ont déclaré les organisations.

Elles notent que l'amendement proposé ne précise pas ce que signifie "porter atteinte à la dignité ou à la vie privée des individus".

"Une loi vague qui laisse les gens dans l'incertitude quant à l'expression qui peut la violer a un effet dissuasif sur la liberté d'expression, car les gens peuvent s'autocensurer de peur de faire l'objet d'une convocation, d'une détention provisoire ou d'éventuelles poursuites judiciaires", ont-elles ajouté.

"Les dispositions vagues laissent également la loi sujette à des abus de la part des autorités, qui peuvent les utiliser pour faire taire les dissidents pacifiques.

Une telle interdiction législative générale constituerait "une atteinte grave au droit à la liberté d'expression".

Les amendements proposés obligeraient les stations de télévision titulaires d'une licence à fournir au ministère de l'information et au Conseil national de l'audiovisuel des rapports réguliers, y compris des informations détaillées sur la programmation des émissions, et impliqueraient que les médias électroniques soient soumis à un régime d'autorisation préalable plutôt qu'à un régime de notification.

"Si elles ne sont pas élaborées avec soin, ces exigences en matière d'autorisation risquent de permettre une prise de décision arbitraire quant à l'établissement et à l'exploitation des médias et pourraient faciliter les violations du droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias", indique la déclaration.

Le Parlement libanais a commencé à discuter d'une nouvelle loi sur les médias en 2010 après qu'un ancien membre du Parlement, Ghassan Moukheiber, et la Fondation Maharat, une organisation non gouvernementale basée à Beyrouth et spécialisée dans les questions relatives aux médias et à la liberté d'expression, ont soumis une proposition visant à modifier la loi sur les publications du Liban, qui est dépassée.

En janvier 2023, le Parlement a créé une sous-commission chargée d'étudier et de modifier le projet de loi sur les médias, dont la version finale a été soumise à la Commission de l'administration et de la justice le 27 mai.

Le projet de loi soumis à la commission en mai comprenait des avancées dans la protection du droit à la liberté d'expression au Liban, notamment l'abolition de la détention provisoire et des peines de prison pour toutes les violations liées à l'expression. Il abroge également les dispositions relatives à la diffamation et à l'insulte du code pénal libanais et de la loi sur le système judiciaire militaire.

La commission de l'administration et de la justice a entamé les discussions sur le dernier projet de loi sur les médias le 29 juillet et a tenu trois réunions sur la question.

Cependant, les amendements proposés, présentés aux membres du Parlement le 31 août, ont été largement contestés par les groupes internationaux de défense des droits pour des dispositions considérées comme restreignant la liberté des médias.

Les groupes de défense des droits ont demandé à la commission de rendre ses discussions publiques afin de garantir la transparence des débats législatifs et de faciliter la participation effective du public.