Moscou annonce la fin «de facto» de l'accord céréalier, Kiev frappe le pont de Crimée

Ci-dessus, le cargo Despina V, transportant des céréales ukrainiennes, dans la mer Noire au large de Kilyos près d'Istanbul, en Turquie, le 2 novembre 2022. (Reuters)
Ci-dessus, le cargo Despina V, transportant des céréales ukrainiennes, dans la mer Noire au large de Kilyos près d'Istanbul, en Turquie, le 2 novembre 2022. (Reuters)
Short Url
Publié le Lundi 17 juillet 2023

Moscou annonce la fin «de facto» de l'accord céréalier, Kiev frappe le pont de Crimée

  • «L'accord de la mer Noire s'est de facto terminé aujourd'hui», a déclaré aux journalistes le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov
  • Le président russe Vladimir Poutine a dénoncé à plusieurs reprises les obstacles à l'exportation des produits alimentaires et engrais russes, qui devait accompagner celle des produits ukrainiens

KIEV: Moscou a annoncé lundi la fin "de facto" de l'accord sur l'exportation des céréales ukrainiennes, jugé crucial pour l'alimentation mondiale, quelques heures après une attaque nocturne de l'armée ukrainienne avec des drones navals contre le stratégique pont de Crimée.

"L'accord de la mer Noire s'est de facto terminé aujourd'hui", a déclaré aux journalistes le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, ajoutant que "dès que la partie (des accords) concernant la Russie sera satisfaite, la Russie reviendra immédiatement à l'accord sur les céréales".

Le président russe Vladimir Poutine a dénoncé à plusieurs reprises les obstacles à l'exportation des produits alimentaires et engrais russes, qui devait accompagner celle des produits ukrainiens.

Il a aussi jugé samedi que "le principal objectif de l'accord, la livraison de céréales aux pays dans le besoin, notamment sur le continent africain" n'était "pas réalisé".

Cette annonce intervient quelques heures avant l'expiration de l'accord à minuit (21H00 GMT) à Istanbul.

Signé en juillet 2022 sur les rives du Bosphore et déjà reconduit à deux reprises, l'accord permettant à l'Ukraine d'exporter ses céréales par la mer Noire a permis, sur l'année écoulée, de sortir près de 33 millions de tonnes de céréales des ports ukrainiens, en dépit du conflit.

La Turquie, l'Ukraine et l'ONU ont été notifiés de la décision du Kremlin, a indiqué la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova.

Malgré l'annonce du Kremlin, le président turc Recep Tayyip Erdogan s'est dit convaincu que son "ami M. Poutine veut poursuivre l'accord" permettant l'exportation des céréales d'Ukraine en mer Noire.

Dans un tweet, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a "fermement" condamné la décision "cynique" de Moscou "malgré les efforts des Nations unies et de la Turquie", soulignant que "l'UE s'efforce de garantir la sécurité alimentaire des populations vulnérables de la planète".

Berlin, de son côté, a appelé "la Russie à rendre possible la prolongation de l'accord" et "ne pas faire supporter les conséquences de ce conflit (ukrainien) aux plus pauvres de la planète".

Jugeant "très décevante" l'annonce du Kremlin, Londres a estimé que "si la Russie ne renouvelle pas l'accord, elle privera des millions de personnes d'un accès vital aux céréales" tout en indiquant que "les discussions" vont se poursuivre.

Et le ministre néerlandais des Affaires étrangères Wopke Hoekstra a qualifié le retrait de Moscou d'"absolument immoral".

L'annonce du Kremlin intervient quelques heures après une attaque ukrainienne par drone naval qui a touché le pont de Crimée, reliant la Russie à la péninsule annexée de Crimée en 2014, et tué deux civils.

Le porte-parole du Kremlin a toutefois assuré que la décision de non-reconduction de l'accord et l'attaque n'étaient pas "liés", expliquant qu'"avant même cette attaque, c'était la position du président Poutine".

Drones navals

L'attaque contre le pont de Crimée a causé d'importants dégâts sur la section routière de l'ouvrage, qui sert notamment à acheminer du matériel militaire à l'armée russe combattant en Ukraine.

Elle a été menée par les services spéciaux et les forces navales ukrainiens à l'aide de "drones navals", a indiqué lundi à l'AFP une source au sein des services ukrainiens de sécurité (SBU).

Le Comité antiterroriste russe (NAK) a précisé dans un communiqué qu'elle a eu lieu à 03H05 (00H05 GMT) et confirmé qu'elle a été menée par des "drones de surface navals".

Deux civils, un homme et une femme qui circulaient en voiture, y ont été tués, et leur fille blessée, a affirmé lundi le Comité d'enquête russe.

Sur Telegram, la chaîne de télévision publique Crimée-24 a publié une vidéo du pont montrant une portion de sa section routière partiellement effondrée.

Le pont en béton, long de 18 kilomètres, construit à grands frais sur ordre de Vladimir Poutine et inauguré en 2018, consiste en deux ouvrages parallèles, l'un réservé à la circulation routière et l'autre au trafic ferroviaire.

La section ferroviaire du pont n'a pas été endommagée et la circulation y a repris dans la matinée, ont indiqué les autorités de Crimée. Les services de ferry permettant de traverser ce bras de mer ont également repris, les automobilistes voulant traverser le détroit étant appelés à les emprunter.

Le viaduc, qui enjambe le détroit de Kertch, avait déjà été endommagé le 8 octobre dernier par une puissante explosion attribuée par les autorités russes à un camion piégé par les services secrets ukrainiens. Il avait ensuite été remis en service.

Manoeuvres de la dernière chance

Le président du Sénat russe, Sergueï Mironov, a affirmé que Moscou devait en représailles attaquer les infrastructures ukrainiennes et arrêter les négociations sur l'accord céréalier.

"C'est ce que nous devons faire, et non discuter d'un accord sur les céréales qui aide les dirigeants de Kiev et leurs maîtres occidentaux à se remplir les poches", a-t-il affirmé.

Le silence et la discrétion ont entouré tout le week-end les manoeuvres de la dernière chance, conduites par la Turquie et l'ONU pour convaincre Moscou de prolonger l'accord céréalier.

Selon les données officielles du Centre de coordination conjointe (JCC) qui supervise l'accord à Istanbul, la Chine et la Turquie sont les premiers bénéficiaires des cargaisons, ainsi que les économies développées.

Mais grâce à l'accord, le Programme alimentaire mondial (PAM) a pu soulager une dizaine de pays en situation critique comme l'Afghanistan, le Soudan ou le Yémen.


L'Inde cherche à porter la voix du « Sud global » entre le G7 et le Brics

Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
Short Url
  • L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.
  • « Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

PARIS : Invitée du G7 qui débute dimanche, mais aussi membre fondateur des Brics, l'Inde souhaite porter la voix du « Sud global », se posant en « passerelle » entre les différents acteurs de la scène internationale, affirme son ministre des Affaires étrangères dans un entretien à l'AFP.

L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.

« Nous avons été un pays invité depuis plusieurs années et je pense que ça a été bénéfique pour le G7 », déclare à l'AFP Subrahmanyam Jaishankar depuis Paris, où il a clos samedi une visite en France, se félicitant d'avoir « la capacité de travailler avec différents pays sans qu'aucune relation ne soit exclusive ». 

Avec une population en passe de devenir la quatrième économie mondiale, l'Inde est l'un des pays les plus peuplés du globe. Elle siège à la table de nombreuses organisations, avec les Occidentaux au G7 ou au sein du « Quad » (Dialogue quadrilatéral pour la sécurité, avec les États-Unis, le Japon, l'Australie), mais aussi avec la Chine, la Russie et l'Iran au sein des Brics et du Groupe de Coopération de Shangaï.

« Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

Ancienne colonie britannique, indépendante depuis 1947, l'Inde se pose, avec le Brésil, en héraut du « Sud global », qui réunit « des pays qui ont été victimes de l'ordre mondial ces dernières années, ces derniers siècles ». 

« Dans les pays du Sud, il existe un fort ressentiment face aux inégalités de l'ordre international, une volonté de le changer, et nous en faisons pleinement partie », explique le ministre en poste depuis 2019.

« Aujourd'hui, pour des pays comme les nôtres, il est important de nous exprimer, de mener, de faire sentir notre présence. »

Cette voix passe aussi par les BRICS, devenue « l'une des principales plateformes de rassemblement pour les pays non occidentaux », dont les chefs d'État se réuniront en juillet.

Partisan de « négociations directes » pour résoudre la guerre entre l'Ukraine et la Russie, qui a frappé durement les pays du Sud, M. Jaishankar affiche son scepticisme face aux politiques de sanctions occidentales : « Ça n'a pas vraiment marché jusqu'à présent, non ? » 

Partenaire commercial et allié politique de la Russie, l'Inde pourrait se retrouver exposée en cas de sanctions contre Moscou.

« L'économie mondiale est sous tension. Plus on ajoute des facteurs de tensions, plus les difficultés seront grandes. »

Dans l'ordre mondial actuel, l'Inde doit composer avec la « discontinuité » posée par Donald Trump.

Des négociations en cours sur le sujet ont « bien avancé ».L'Inde doit également chercher « un équilibre » avec la Chine. 

Pékin soutient Islamabad, que New Delhi accuse de soutenir les activités de « terroristes » islamistes sur son sol.

Le 22 avril, une attaque au Cachemire indien a déclenché une confrontation militaire de quatre jours entre les deux pays, la plus grave depuis 1999. Narendra Modi a promis une « riposte ferme » à toute nouvelle attaque « terroriste », renforçant le spectre d'une escalade entre les deux puissances nucléaires.

« En 2008, la ville de Mumbai a été attaquée (plusieurs attentats jihadistes ont fait 166 morts) et nous avons commis l'erreur de ne pas réagir avec fermeté. Nous sommes déterminés à ne pas répéter ces erreurs. Si des terroristes pénètrent en Inde depuis et grâce au soutien d'un pays voisin, nous les poursuivrons et nous les châtierons ».

Mais l'Inde n'a jamais envisagé de recourir à l'arme nucléaire, assure-t-il : « Ces inquiétudes émanaient de personnes mal informées ».

 


Israël appelle les Iraniens à évacuer les zones proches de sites militaires

Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
Short Url
  • L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».
  • Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones.

JERUSALEM : Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré dimanche dans un communiqué de son bureau avoir ordonné à l'armée israélienne d'émettre des avis d'évacuation à l'intention des habitants de Téhéran vivant à proximité de sites militaires.

Après cet ordre, l'armée israélienne a appelé les Iraniens à évacuer les zones « à proximité d'installations militaires » dans un communiqué publié sur le réseau social X en persan et en arabe.

L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».

Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones, contrairement aux communiqués de l'armée israélienne adressés aux Palestiniens de la bande de Gaza, où elle est en guerre contre le mouvement islamiste Hamas.

Cette décision fait partie d'un plan « visant à faire pression sur le régime » en créant des déplacements de population, a déclaré à l'AFP une source sécuritaire israélienne.


La Russie s'apprête à construire la première centrale nucléaire du Kazakhstan

Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
Short Url
  • « Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.
  • Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne.

ALMATY, KAZAKHSTAN : Le géant russe du nucléaire Rosatom sera le principal constructeur de la première centrale nucléaire du Kazakhstan, ont annoncé samedi les autorités de ce pays d'Asie centrale, premier producteur mondial d'uranium, un chantier que convoitaient la France, la Chine et la Corée du Sud.

« Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.

Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne, mais souffre d'un manque cruel d'électricité pour sa consommation intérieure.

L'agence kazakhe dit désormais « étudier la question de l'obtention de financements publics à l'exportation aux dépens de la Fédération de Russie, conformément aux propositions de Rosatom ». 

Rosatom a salué la décision kazakhe dans un communiqué et promis « la construction d'une centrale nucléaire selon le projet le plus avancé et le plus efficace au monde, basé sur des technologies russes ».

« Les réacteurs VVER-1200 de troisième génération combinent des solutions techniques éprouvées avec les systèmes de protection active et passive les plus récents. Ces derniers ont été développés en stricte conformité avec les normes internationales de sécurité », a ajouté la société.

Rosatom (Russie), China National Nuclear Corporation (Chine), EDF (France) et Korea Hydro & Nuclear Power (Corée du Sud) faisaient partie des quatre entreprises pressenties.

L'agence ajoute qu'elle « continuera à travailler avec des partenaires étrangers pour former un consortium international efficace », sans donner plus de précisions. 

Ce projet de consortium international, qui n'a jamais été spécifié, s'inscrit dans la volonté du dirigeant kazakh Kassym-Jomart Tokaïev de maintenir de bonnes relations avec les grandes puissances.

Moscou, puissance historique en Asie centrale, a ainsi remporté cet appel d'offres aux dépens de la Chine, désormais incontournable dans la région. Cette annonce intervient quelques jours avant la venue du président chinois Xi Jinping au Kazakhstan pour un sommet « Asie centrale-Chine ».

La centrale, dont la construction a été validée lors d'un référendum sans surprise à l'automne, doit être bâtie près du village abandonné d'Ulken, dans le sud du pays, sur les bords du lac Balkhach, le deuxième plus grand d'Asie centrale.

En Ouzbékistan voisin, le géant russe Rosatom va construire une petite centrale nucléaire et a proposé au Kirghizistan un projet similaire.