Comment le durcissement de la position britannique sur l'immigration pourrait finir par stimuler l'extrême droite européenne

Pour la droite, la crise migratoire du Sud vers le Nord, qui a fait près de 2 000 morts rien que cette année, n'est pas une tragédie, mais une opportunité. (Photo fournie)
Pour la droite, la crise migratoire du Sud vers le Nord, qui a fait près de 2 000 morts rien que cette année, n'est pas une tragédie, mais une opportunité. (Photo fournie)
Pour la droite, la crise migratoire du Sud vers le Nord, qui a fait près de 2 000 morts rien que cette année, n'est pas une tragédie, mais une opportunité. (Photo fournie)
Pour la droite, la crise migratoire du Sud vers le Nord, qui a fait près de 2 000 morts rien que cette année, n'est pas une tragédie, mais une opportunité. (Photo fournie)
Pour la droite, la crise migratoire du Sud vers le Nord, qui a fait près de 2 000 morts rien que cette année, n'est pas une tragédie, mais une opportunité. (Photo fournie)
Pour la droite, la crise migratoire du Sud vers le Nord, qui a fait près de 2 000 morts rien que cette année, n'est pas une tragédie, mais une opportunité. (Photo fournie)
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Publié le Samedi 22 juillet 2023

Comment le durcissement de la position britannique sur l'immigration pourrait finir par stimuler l'extrême droite européenne

  • Au cours des 15 dernières années, le nombre de premières demandes d'asile en Europe n'a cessé d'augmenter, passant de 121 600 en 2008 à près de 900 000 en 2022
  • Bien que la Cour d'appel ait jugé illégal le projet du gouvernement britannique d'envoyer des demandeurs d'asile au Rwanda, le gouvernement prévoit toujours de poursuivre cette politique qui fait la une des journaux

LONDRES : En avril, le ministre britannique de l'Immigration a donné un ordre particulier au personnel d'un centre situé dans le Kent, au sud-est de l'Angleterre, destiné aux enfants non accompagnés qui demandent l'asile après être arrivés en Grande-Bretagne à bord de petites embarcations.

Les peintures murales représentant Mickey Mouse et d'autres personnages de dessins animés doivent être repeintes, a-t-il déclaré, car elles sont « trop accueillantes » et envoient un « message erroné » aux demandeurs d'asile, dont certains n'ont pas plus de neuf ans.

Le geste de Robert Jenrick a été largement qualifié d’acte « dépourvu de cœur » d'une « cruauté abjecte » et de tentative cynique de plaire à « la droite enragée » avant des élections partielles qui, selon de nombreux commentateurs, devraient déboucher sur l'éviction de députés conservateurs, augurant d'une défaite catastrophique pour le parti lors des prochaines élections générales.

En fait, vendredi, les conservateurs ont perdu deux des trois sièges qu'ils défendaient.

Mais le « Mousegate » n'est que le symptôme d'un problème plus vaste : la résurgence d'un type de politique de droite dans toute l'Europe, où les partis populistes accusent de plus en plus, et à tort, les réfugiés, les migrants et les demandeurs d'asile d'être responsables de tous les problèmes, qu'il s'agisse des services de santé surchargés, de la pénurie de logements ou de l'augmentation de la criminalité et du chômage.

Dans toute l'Europe, ces partis gagnent du terrain. Les recherches menées par le projet ParlGov montrent que les partis de droite détiennent désormais la majorité des sièges dans les parlements de onze pays, dont ceux qui sont en première ligne de la crise des bateaux de migrants : France, Italie, Grèce et Royaume-Uni.

Pour la droite, la crise migratoire du Sud vers le Nord, qui a fait près de 2 000 morts rien que cette année, n'est pas une tragédie, mais une opportunité.

Mais en plus de désacraliser les êtres humains qui se cachent derrière les statistiques et du nombre croissant de morts parmi les personnes suffisamment désespérées pour risquer leur vie en traversant la Méditerranée et la Manche à bord d'embarcations de fortune, l'amalgame de tous ceux qui cherchent un sanctuaire occulte des faits importants concernant leur provenance, leur destination et les raisons de leur départ.

La nature de l'exode est en train de changer, comme l'a révélé le bilan des victimes, le 14 juin, du bateau de pêche surchargé Adriana qui a chaviré au large de la Grèce.

Jusqu'à 700 personnes se trouvaient à bord du bateau, qui était parti de Tobrouk, en Libye, à destination de l'Italie. Parmi les 108 survivants, essentiellement des hommes, se trouvaient des personnes originaires de Syrie, du Pakistan, d'Afghanistan et d'Égypte.

Des centaines d'autres personnes ont péri, dont des femmes et une centaine d'enfants, qui auraient été bloqués sous le pont.

Le lendemain du naufrage de l'Adriana, l'Organisation internationale pour les migrations des Nations unies a publié des données montrant que l'année dernière, 2 761 personnes se sont noyées en Méditerranée en tentant de rejoindre l'Europe depuis le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord.

Ce rapport a reçu très peu d'attention de la part des médias, contrairement à la couverture à outrance de la recherche, le même mois, de quatre riches touristes perdus dans un submersible qui a implosé alors qu'ils effectuaient une visite guidée de l'épave du Titanic.

Au cours des 15 dernières années, le nombre de premières demandes d'asile en Europe n'a cessé d'augmenter, passant de 121 600 en 2008 à près de 900 000 en 2022.

Il s'agit du chiffre le plus élevé depuis l'année record de 2015, qui avait été marquée par le conflit en Syrie et avait enregistré 1,28 million de demandes. La tendance étant à la hausse depuis 2020, il est fort probable que ce record alarmant soit bientôt battu.

Les 881 220 demandes en 2022 représentent une augmentation de 64 % par rapport à 2021, année au cours de laquelle 537 355 demandes ont été déposées.

Le suivi de l'évolution de l'origine de ces demandeurs constitue non seulement un baromètre des événements géopolitiques mondiaux, mais aussi un indicateur de la situation dans les pays d'origine.

Par exemple, en 2022, les Syriens, les Afghans, les Vénézuéliens et les Turcs ont déposé le plus grand nombre de demandes d'asile - représentant au total près de 40% de l'ensemble des demandeurs d'asile pour la première fois dans les États de l'UE.

La Syrie est le principal pays dont les citoyens ont demandé l'asile dans l'UE depuis 2013, et les chiffres continuent de grimper, passant de 98 900 en 2021 à 131 970 en 2022.

 

EN BREF

  • 2 761 personnes noyées en Méditerranée alors qu’elles tentaient de rejoindre l'Europe en 2022. 
  • 881 220 Premières demandes d'asile en Europe en 2022 - en hausse de 64 % par rapport aux chiffres de 2021.
  • 80 % Proportion de demandeurs d'asile pour la première fois en Europe en 2022 âgés de moins de 35 ans.

(Source : OIM)

 

La statistique la plus inquiétante est peut-être que parmi les 30 pays dont les citoyens demandent le plus souvent l'asile en Europe, les chiffres ont augmenté dans tous les cas, à une exception près, en 2022.

Les plus fortes augmentations concernent la Syrie, avec 33 070 demandes supplémentaires en 2020, le Venezuela (32 675 de plus), la Turquie (29 405), la Colombie (29 280) et l'Afghanistan (28 940).

Mais la sonnette d'alarme devrait être tirée dans les pays qui ont connu les plus fortes augmentations relatives de demandes en 2022 - notamment l'Inde, avec une augmentation de 605% des demandes d'asile de ses citoyens, le Burundi (536%) et le Pérou (315%).

La seule lueur d'espoir dans les statistiques vient de l'Irak, qui a enregistré 605 demandes de moins en 2022. Avec une baisse de seulement 2,3%, il pourrait s'agir d'une anomalie statistique plutôt que d'une indication de l'amélioration de la situation sociale et économique du pays.

Ce qui est clair, cependant, c'est que de nombreux pays perdent la fleur de leur jeunesse et, avec elle, l'espoir d'un avenir meilleur.

Près de 80% des nouveaux demandeurs d'asile dans l'UE en 2022 avaient moins de 35 ans, la plupart (53,9%) étant âgés de 18 à 34 ans et un quart (25,2%) étant des mineurs de moins de 18 ans. Plus de 18% d'entre eux, dont la moitié sont des filles, ont moins de 14 ans.

Au Royaume-Uni, pendant ce temps, le gouvernement conservateur, ayant décidé que la question représentait sa meilleure chance d'éviter une défaite électorale, est en train de préparer l'exploitation politique de la crise de « l’immigration illégale ».

Bien que la Cour d'appel ait jugé illégal le projet du gouvernement d'envoyer des demandeurs d'asile au Rwanda, le gouvernement prévoit toujours de poursuivre cette politique qui fait la une des journaux.

Entre-temps, trois péniches sur lesquelles le gouvernement prévoit d'héberger des centaines de demandeurs d'asile ont été louées. Il s'agit d'une tentative de détourner l'attention pour répondre aux allégations de la droite selon lesquelles le gouvernement gaspille de l'argent en logeant des migrants dans des hôtels prétendument « luxueux ».

Malgré les protestations de la Chambre des Lords, le gouvernement a également fait passer au Parlement son projet de loi controversé sur les migrations illégales, une mesure qui, selon les Nations unies, « aura de profondes conséquences pour les personnes ayant besoin d'une protection internationale ».

En substance, selon les termes du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, le projet de loi « met fin à l'accès à l'asile au Royaume-Uni pour toute personne qui arrive de manière irrégulière, après avoir traversé un pays - même brièvement - où elle n'a pas subi de persécution ».

Le projet de loi, qui, de manière perverse, n'offre à ces demandeurs d'asile aucune voie sûre et légale, comme le Premier ministre britannique Rishi Sunak s'est engagé à le faire, est « en contradiction avec les obligations du pays en vertu des droits de l'homme internationaux et de la législation sur les réfugiés « ce qui encourage les bateaux au lieu de les arrêter. 

Alf Dubs, ancien député britannique et membre de la Chambre des Lords, a apporté une contribution particulièrement poignante au débat sur le projet de loi. Dubs, qui a quitté la Tchécoslovaquie en 1939 pour rejoindre la Grande-Bretagne en tant que réfugié juif âgé de six ans, sauvé des persécutions nazies, a condamné le projet de loi et l’a qualifié de « sale besogne ».

Dans toute l'Europe, a-t-il ajouté, « les partis de droite cherchent à exploiter les réfugiés à des fins politiques. Ils ont remporté quelques succès en France, en Grèce, en Autriche, en Hongrie et même en Allemagne ».

Les politiciens et militants britanniques de droite tels que Nigel Farage, artisan du désastreux retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne - qui a été largement motivé par la prétendue nécessité de « contrôler les frontières » - se plaisent à suggérer que le Royaume-Uni subit de plein fouet le grand exode Sud-Nord. Mais ce n'est tout simplement pas vrai.

En 2022, 74 751 demandes d'asile ont été déposées au Royaume-Uni (dont, soit dit en passant, 45% seulement sont arrivées par de petites embarcations).

Mais la destination de loin la plus populaire pour les demandeurs en Europe en 2022 était l'Allemagne, qui a reçu 217 735 demandes d'asile (24,7% du total), suivie de la France (137 510), de l'Espagne (116 135), de l'Autriche (106 380) et de l'Italie (77 200).

En d'autres termes, le Royaume-Uni n'était que la sixième destination la plus populaire pour les personnes fuyant la violence ou la persécution, ou simplement à la recherche d'une vie meilleure.

L'analyse des chiffres du ministère de l'Intérieur concernant la « migration irrégulière » révèle une vérité surprenante qui met à mal l'argument du gouvernement concernant le statut « illégal » des personnes arrivant au Royaume-Uni sur de petites embarcations.

La vérité, que le gouvernement choisit de ne pas rendre publique, est que la majorité des demandes d'asile déposées par des personnes arrivant au Royaume-Uni sur de petites embarcations qui ont été examinées, ont été approuvées.

En d'autres termes, même le ministère de l'Intérieur reconnaît que, loin d'être des migrants « illégaux », la plupart des personnes cherchant refuge au Royaume-Uni ont de solides raisons de le faire en vertu du droit international.

Sur les 88 221 personnes arrivées au Royaume-Uni par petit bateau entre 2018 et mars 2023, 80 989 ont demandé l'asile.

Près des trois quarts de ces demandes (57 371, soit 70%), sont toujours en attente d'une décision, et 3 845 demandes ont été rejetées.

Mais sur les 11 902 demandes qui ont fait l'objet d'une décision jusqu'à présent, le statut de réfugié ou d'autres formes d'autorisation de séjour ont été accordés dans 7 643 cas.

Cela signifie que, selon la propre évaluation du gouvernement, 65% des demandes d'asile déposées par des personnes arrivant sur de petits bateaux et ayant fait jusqu'à présent l'objet d'une décision sont authentiques et ont été avalisées - un chiffre qui serait certainement plus élevé si le gouvernement britannique n'avait pas introduit sa règle controversée des « pays tiers » en 2020.

Sur les 4 259 demandes rejetées, seules 1 266 l'ont été parce qu'elles ne répondaient pas aux critères d'octroi du statut de réfugié. Mais deux fois plus de demandes - 2 993 - n'ont pas été examinées « pour des raisons liées à un pays tiers ».

Cette modification des règles stipule que les personnes doivent demander l'asile dans le premier pays sûr qu'elles atteignent, une exigence qui, selon l'Agence des Nations unies pour les réfugiés, va à l'encontre de la Convention relative au statut des réfugiés et du droit international.

On craint maintenant que l'approche sélective du gouvernement britannique à l'égard du droit international ne se propage en Europe parmi d'autres partis de droite désireux d'exploiter les demandeurs d'asile à leurs propres fins politiques.

Volker Turk, haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, a exhorté le gouvernement britannique à revenir sur cette loi.

« Le projet de loi crée un précédent inquiétant de désengagement vis-à-vis des obligations liées à l'asile que d'autres pays, y compris en Europe, pourraient être tentés de suivre, ce qui pourrait avoir un effet néfaste sur le système international de protection des réfugiés et des droits de l'homme dans son ensemble. »

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Cyberattaques : Berlin a rappelé «pour consultations» son ambassadeur en Russie

L'ambassadeur allemand en Russie, Alexander Graf Lambsdorff  (Photo, AFP).
L'ambassadeur allemand en Russie, Alexander Graf Lambsdorff (Photo, AFP).
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  • Une cyberattaque a notamment ciblé des adresses email de responsables du SPD, le parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz
  • Les pays occidentaux sont depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, en février 2022, en alerte maximum contre le risque d'attaques informatiques massives

BERLIN: Berlin a indiqué lundi avoir rappelé pour consultations son ambassadeur en Russie, Alexander Graf Lambsdorff, après avoir accusé vendredi un groupe de hackeurs russes contrôlé par Moscou d'une récente campagne de cyberattaques.

L'ambassadeur "restera une semaine à Berlin puis retournera à Moscou", a indiqué lors d'un point presse régulier la porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères, Kathrin Deschauer, ajoutant que le gouvernement prenait "très au sérieux" cet "acte contre (notre) démocratie".

Les gouvernements allemand et tchèque ont accusé vendredi le groupe APT28, dirigé par les services de renseignement de la Russie, d'une récente campagne de cyberattaques dans leur pays respectif. Des accusations jugées "infondées" par la Russie.

Attaques ciblées 

Une cyberattaque a notamment ciblé des adresses email de responsables du SPD, le parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz, selon le gouvernement.

Berlin a annoncé vendredi la convocation du chargé d'affaires de l'ambassade de Russie, "pour faire comprendre au gouvernement russe que nous n'acceptons pas ces actions".

Les pays occidentaux sont depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, en février 2022, en alerte maximum contre le risque d'attaques informatiques massives et d'opérations de désinformation orchestrées par la Russie.


Exercice américano-philippin contre une «invasion» en mer de Chine

Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale (Photo, Fournie).
Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale (Photo, Fournie).
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  • Ces incidents font craindre un conflit plus large qui pourrait impliquer les Etats-Unis, allié des Philippines
  • La semaine dernière, les forces américaines participant à Balikatan avaient tiré des roquettes de précision Himars depuis l'île occidentale de Palawan

LAOAG: Les troupes américaines et philippines ont tiré lundi des obus et des missiles sur une force d'"invasion" imaginaire pendant des exercices en mer de Chine méridionale, dans le nord des Philippines où les deux pays ont récemment accusé la Chine de "conduite dangereuse et déstabilisante".

Plus de 16.700 soldats américains et philippins participent à ces manoeuvres annuelles navales, terrestres et aériennes organisées jusqu'au 10 mai dans une zone où les incidents à répétition entre embarcations chinoises et philippines font craindre un conflit plus large.

Les soldats américains massés sur les dunes de la côte nord-ouest des Philippines, près de la ville de Laoag, à 400 kilomètres au sud de Taïwan, ont tiré plus de 50 obus de 155 millimètres sur des cibles flottantes à environ cinq kilomètres de la côte, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Les troupes philippines ont enchaîné avec des tirs de roquettes vers les attaquants factices, avant que les deux forces ne finissent l'exercice avec des mitrailleuses, des missiles Javelin et d'autres salves d'artillerie.

Cet exercice à munitions réelles, baptisé "Balikatan" ("Epaule contre épaule" en tagalog, la langue philippine), vise à "se préparer au pire", a déclaré aux journalistes le commandant de la Première force expéditionnaire des Marines des Etats-Unis, Michael Cederholm.

"Il est conçu pour repousser une invasion", a-t-il ajouté sur le site de l'exercice, débuté le 22 avril dans plusieurs endroits des Philippines. "Notre flan nord-ouest est plus exposé", a détaillé à l'AFP le général philippin Marvin Licudine, dirigeant l'exercice pour la partie philippine. "A cause des problèmes régionaux, nous devons dès maintenant nous entraîner sur notre propre sol".

Pékin revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, une importante route commerciale. Elle ignore un arbitrage international qui lui a donné tort en 2016, et y fait patrouiller des centaines de navires des garde-côtes et de la marine.

La semaine dernière, Manille a accusé les garde-côtes chinois d'avoir endommagé un bateau des garde-côtes philippins et un autre du bureau des pêches en tirant dessus au canon à eau près du récif de Scarborough, contrôlé par la Chine mais revendiqué par les Philippines.

Des exercices en forme de dissuasion 

Ces incidents font craindre un conflit plus large qui pourrait impliquer les Etats-Unis, allié des Philippines, et d'autres pays de la région, dans une période où la Chine renforce sa pression diplomatique et militaire autour de Taïwan.

La semaine dernière, les ministres de la Défense des Philippines, des Etats-Unis, du Japon et de l'Australie ont, à l'issue d'une réunion dans l'archipel américain d'Hawaï, publié un communiqué conjoint dénonçant la "conduite dangereuse et déstabilisante" de Pékin en mer de Chine méridionale.

"Les actions de la Chine dans les mers de Chine orientale et méridionale sont légitimes, légales et irréprochables", avait auparavant affirmé le 12 avril le ministère chinois des Affaires étrangères.

La semaine dernière, les forces américaines participant à Balikatan avaient tiré des roquettes de précision Himars depuis l'île occidentale de Palawan, face aux îles Spratleys également disputées.

Selon l'armée américaine, il s'agissait d'une répétition du déploiement rapide du système Himars sur les côtes philippines bordées par la mer de Chine méridionale afin de "sécuriser et de protéger le territoire, les eaux territoriales et les intérêts de la zone économique exclusive des Philippines".

"Les exercices militaires sont une forme de dissuasion", a déclaré le ministre philippin des Affaires étrangères, Enrique Manalo, dans un discours prononcé en son nom par un assistant lors d'un atelier public vendredi. "Plus nous simulons, moins nous agissons."

Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale.

"Nous ne suivrons pas les garde-côtes chinois et les navires chinois dans cette voie", a-t-il dit. "Nous n'avons pas l'intention d'attaquer qui que ce soit avec des canons à eau ou tout autre équipement offensif", a-t-il poursuivi, ajoutant que Manille continuera à utiliser exclusivement la voie diplomatique pour régler les différends avec Pékin.


La mésaventure d'un proviseur américain, cas d'école des dangers de l'IA

Les mots « Intelligence artificielle IA », miniature d’un robot et d’une main jouet sont représentés sur cette illustration prise le 14 décembre 2023 (Photo, Reuters).
Les mots « Intelligence artificielle IA », miniature d’un robot et d’une main jouet sont représentés sur cette illustration prise le 14 décembre 2023 (Photo, Reuters).
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  • Eric Eiswert, proviseur à Pikesville dans le Maryland, près de Washington, s'est retrouvé au coeur d'une violente polémique avec un enregistrement vocal
  • L'affaire, qui survient en pleine année électorale aux Etats-Unis, met en lumière la facilité avec laquelle les outils d'IA générative peuvent être employés pour nuire à tout un chacun

WASHINGTON: Après l'indignation provoquée dans un lycée américain par la diffusion de propos racistes attribués au proviseur, le vertige de découvrir que la bande sonore a été montée de toutes pièces. Cet épisode illustre les dangers d'une intelligence artificielle devenue accessible à tous.

Eric Eiswert, proviseur à Pikesville dans le Maryland, près de Washington, s'est retrouvé au coeur d'une violente polémique avec un enregistrement vocal -- qui se révélera un faux -- lui faisant prononcer des commentaires choquants contre des élèves juifs et des "enfants noirs ingrats".

L'affaire, qui survient en pleine année électorale aux Etats-Unis, met en lumière la facilité avec laquelle les outils d'IA générative peuvent être employés pour nuire à tout un chacun, et les difficultés auxquelles font face les autorités pour lutter contre de telles pratiques.

"Désormais, tout le monde est vulnérable", et non plus seulement les célébrités, alerte Hany Farid, professeur à l'Université de Californie à Berkeley (ouest).

"Il suffit d'une image pour ajouter une personne dans une vidéo, et 30 secondes d'audio pour cloner la voix de quelqu'un", poursuit le spécialiste en détection d'images et d'enregistrements manipulés numériquement, consulté par la police dans cette affaire.

Quand l'enregistrement fuite sur les réseaux sociaux en janvier, il devient rapidement viral. Une publication recueille des milliers de commentaires sur Instagram, et propulse l'école au coeur d'une polémique nationale.

Le militant des droits civiques DeRay McKesson réclame la démission du proviseur sur son compte X, suivi par près d'un million d'internautes. Il admettra s'être fait abuser.

Les messages haineux pleuvent sur les réseaux sociaux et les coups de fil menaçants se multiplient dans l'établissement. Le "monde serait meilleur si vous étiez sous terre", écrit ainsi un internaute au proviseur.

Ce dernier est placé en congés, son domicile mis sous protection. Contacté par l'AFP, il n'a pas répondu.

Vengeance 

"Je continue de m'inquiéter des dégâts provoqués par cette affaire", confie Billy Burke, directeur du syndicat représentant le proviseur.

Fin avril, Dazhon Darien, 31 ans, responsable sportif du lycée, a été arrêté par les autorités, accusé d'être à l'origine du faux. Les enquêteurs sont remontés jusqu'à lui grâce à l'adresse électronique qui a initialement partagé le fichier.

Il aurait agi pour se venger d'une enquête ouverte à son encontre par le proviseur sur des paiements suspects.

Le prévenu a mené des recherches sur des outils d'IA depuis le réseau informatique du lycée, selon l'acte d'accusation.

La bande sonore, selon l'analyse d'un expert consulté par la police, "contient des traces de contenu généré par l'IA, avec un montage humain a posteriori".

Cette affaire démontre la nécessité "d'adapter la loi aux avancées technologiques", a estimé le procureur local, Scott Shellenberger.

Les montages audio sont particulièrement difficiles à déceler. En janvier, un message diffusé par appels téléphoniques automatisés usurpant la voix du président Joe Biden incitait les électeurs démocrates de l'Etat du New Hampshire (nord-est) à s'abstenir lors des primaires pour du parti.

A Pikeville, l'affaire a secoué les habitants, "très proches les uns des autres", raconte Parker Bratton, l'entraîneur de golf du lycée.

"Il y a un seul président, mais il y a un million de proviseurs!", s'inquiète-t-il, "les gens se demandent +Que va-t-il m'arriver si quelqu'un décide tout simplement de détruire ma carrière?+".