Sahel : la lutte contre les djihadistes bouleversée par les coups d'Etat

Des partisans des forces de défense et de sécurité nigériennes se rassemblent lors d'une manifestation devant l'Assemblée nationale à Niamey le 27 juillet 2023. (AFP)
Des partisans des forces de défense et de sécurité nigériennes se rassemblent lors d'une manifestation devant l'Assemblée nationale à Niamey le 27 juillet 2023. (AFP)
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Publié le Samedi 29 juillet 2023

Sahel : la lutte contre les djihadistes bouleversée par les coups d'Etat

  • Les militaires qui ont pris, de fait, le pouvoir au Niger, ont d'ores et déjà annoncé une nouvelle orientation stratégique
  • La junte malienne s'est tournée vers les mercenaires de la société militaire privée russe Wagner pour lutter contre les groupes djihadistes, provoquant le départ des troupes françaises en 2022

PARIS: Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger est en passe de tomber sous la coupe d'un régime militaire qui pourrait bouleverser la lutte contre les groupes armés djihadistes au Sahel.

Le président Mohamed Bazoum est toujours séquestré par les troupes du général Abdourahamane Tiani, chef de la garde présidentielle du Niger, apparu vendredi à la télévision nationale comme le nouvel homme fort du pays.

Face à l'avancée des djihadistes, les juntes ont pris le pas sur des démocraties jugées inefficaces et corrompues par une partie des populations sahéliennes. Les militaires qui ont pris, de fait, le pouvoir au Niger, ont d'ores et déjà annoncé une nouvelle orientation stratégique.

"L'approche sécuritaire actuelle n'a pas permis de sécuriser le pays en dépit de lourds sacrifices consentis par les Nigériens", a déclaré le général Tiani dans son premier discours, lu jeudi à la télévision nationale.

Le Niger et son président issu des urnes, principal allié des pays occidentaux au Sahel, faisaient jusqu'alors figure d'exception dans une bande sahélienne balayée par les violences des groupes armés et par une vague d'autoritarisme teinté de souverainisme russophile.

La junte malienne s'est tournée vers les mercenaires de la société militaire privée russe Wagner pour lutter contre les groupes djihadistes, provoquant le départ des troupes françaises en 2022. Les autorités de Ouagadougou ont opté pour la mobilisation de citoyens armés, et demandé le retrait des forces spéciales françaises dans le pays.

Mohamed Bazoum, lui, avait fait le choix de maintenir la présence de 1.500 soldats français sur son territoire, au risque de se trouver mêlé au divorce entre Paris et les juntes sahéliennes.

«Divorce»

Ces juntes "ont naturellement tendance à faire porter la responsabilité de dégradation sécuritaire aux alliés des régimes qu'elles ont renversés. Ces coups d'Etat sont soutenus par une frange de la population qui a déjà manifesté une attitude hostile à l'égard de la présence française ou occidentale au Sahel", explique Ibrahim Yahaya Ibrahim, chercheur pour International Crisis Group.

Dès son premier discours, le général Tiani a préféré tendre la main à ses homologues sahéliens, questionnant "le sens et la portée d'une approche sécuritaire de lutte contre le terrorisme qui exclut toute véritable collaboration avec le Burkina Faso et le Mali" dans la zone dite des trois frontières.

En raison des tensions diplomatiques, les militaires nigériens et français ne peuvent opérer librement contre les bases de l'Etat islamique (EIS) de l'autre côté de la frontière malienne, où l'organisation mène des attaques sur le territoire nigérien.

"Cette crise ne pouvait pas se résoudre sans la coopération avec le Mali, d'une manière ou d’une autre", assure Tatiana Smirnova, chercheuse au Centre Franco Paix en résolution des conflits.

"On peut anticiper une relation améliorée et une coopération accrue entre les pays voisins", estime Ibrahim Yahaya Ibrahim.

Du côté des partenaires occidentaux, les perspectives sont plus sombres.

L'Union européenne a annoncé la suspension de tout aide budgétaire et des actions de coopération dans le domaine sécuritaire.

Des sanctions internationales pourraient frapper le régime comme au Mali voisin. Un éventuel départ des forces françaises et américaines laisserait un vide dans une région particulièrement troublée, selon les analystes.

«Terroristes»

Le Niger "est bordé par le chaos libyen, le Nigeria avec Boko Haram et ISWAP, le nord du Bénin très fortement touché par le djihadisme et évidemment le Mali et le Burkina Faso. C'était un pôle de stabilité malgré des problèmes sécuritaires sur le territoire", rappelle Alain Antil, directeur du centre Afrique subsaharienne à l'Institut français des relations internationales (IFRI).

Le Niger subit ainsi un afflux de réfugiés venus du Mali et du Nigeria en proie aux violences, estimés à 255.000 en 2022 par Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Mohamed Bazoum incarnait un modèle de coopération sécuritaire pour les démocraties occidentales et leurs bailleurs.

"Stabilisation" des communautés ciblées par les recrutements djihadistes, réintégration de leurs combattants… le gouvernement de M. Bazoum mettait en œuvre de programmes largement financés par les partenaires internationaux, dont l'avenir se trouve désormais en suspens.

A rebours du pouvoir civil qui acceptait de dialoguer avec certains leaders de groupes armés, le général Tiani a dénoncé dans son allocution de jeudi la "libération extrajudiciaire" de "chefs terroristes" par le régime de Mohamed Bazoum.

Au Mali et au Burkina Faso, les militaires au pouvoir ont opté pour une stratégie ultra offensive contre les groupes djihadistes, entachée d'accusations d'exactions récurrentes contre les populations.

"Ce sont les civils qui paient le prix le plus lourd d'une telle stratégie, ce qui contribue à la déstabilisation, et peut alimenter les tensions inter et intra communautaires", prévient Tatiana Smirnova.


Le Soudan du Sud annonce un accord avec les belligérants soudanais sur un champ pétrolier frontalier

Les autorités du Soudan du Sud ont annoncé mercredi avoir conclu un accord avec les belligérants du conflit au Soudan voisin, chargeant l'armée sud-soudanaise de sécuriser un champ pétrolier-clé situé sur une zone frontalière, dont les paramilitaires soudanais se sont emparés lundi. (AFP)
Les autorités du Soudan du Sud ont annoncé mercredi avoir conclu un accord avec les belligérants du conflit au Soudan voisin, chargeant l'armée sud-soudanaise de sécuriser un champ pétrolier-clé situé sur une zone frontalière, dont les paramilitaires soudanais se sont emparés lundi. (AFP)
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  • Le Kordofan est devenue l'épicentre actuel des combats, après la prise de contrôle en octobre de la totalité de celle du Darfour, dans l'ouest du pays, par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) qui affrontent les Forces armées soudanaises
  • "Un accord tripartite a été conclu entre les SSPDF (Forces armées sud-soudanaises), les SAF et les FSR, accordant aux SSPDF la responsabilité principale de la sécurité du champ pétrolier de Heglig (...) dans un contexte de tensions croissantes"

JUBA: Les autorités du Soudan du Sud ont annoncé mercredi avoir conclu un accord avec les belligérants du conflit au Soudan voisin, chargeant l'armée sud-soudanaise de sécuriser un champ pétrolier-clé situé sur une zone frontalière, dont les paramilitaires soudanais se sont emparés lundi.

Le site de Heglig, qui abrite la principale installation de traitement du pétrole sud-soudanais destiné à l'exportation via Port-Soudan, est situé à l'extrême sud de la région soudanaise méridionale du Kordofan, frontalière du Soudan du Sud.

Le Kordofan est devenue l'épicentre actuel des combats, après la prise de contrôle en octobre de la totalité de celle du Darfour, dans l'ouest du pays, par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) qui affrontent les Forces armées soudanaises (SAF) depuis 2023.

"Un accord tripartite a été conclu entre les SSPDF (Forces armées sud-soudanaises), les SAF et les FSR, accordant aux SSPDF la responsabilité principale de la sécurité du champ pétrolier de Heglig (...) dans un contexte de tensions croissantes", a déclaré le porte-parole du gouvernement du Soudan du Sud, Ateny Wek Ateny.

Le Soudan du Sud, préoccupé par l'insécurité croissante le long du champ pétrolier, a "toujours plaidé en faveur d'une solution pacifique et diplomatique", a souligné M. Ateny lors d'une conférence de presse, sans donner de détails supplémentaires sur le contenu de l'accord.

Importantes réserves pétrolières 

"La production pétrolière se poursuit", a assuré le porte-parole, assurant ne pas avoir d'informations sur des "dégâts importants ayant pu faire cesser la production".

L'AFP n'a pas pu vérifier ces informations.

Contactés par l'AFP, le RSF et l'armée soudanaise n'ont pas réagi dans l'immédiat sur l'accord.

Les FSR ont annoncé en début de semaine avoir pris le contrôle de Heglig "après la fuite de l'armée" soudanaise.

Selon Juba, quelque 1.650 sous-officiers et 60 officiers ayant abandonné leurs positions sur le site pétrolier et déposé leurs armes au Soudan du Sud devraient être rapatriés vers le Soudan.

Les FSR ont cette semaine accusé l'armée soudanaise d'avoir mené une attaque de drone contre le champ pétrolier, qui aurait tué "des dizaines" de personnes, dont des ouvriers et des ingénieurs.

Lors de son indépendance du Soudan en 2011, le Soudan du Sud a hérité de 75% des réserves pétrolières du Soudan pré-sécession, mais, enclavé, continue de dépendre des infrastructures soudanaises pour l'exporter.

Malgré l'exploitation de ce pétrole, le plus jeune pays du monde connaît depuis des années une grande instabilité et un très fort taux de pauvreté.

Au Soudan, la guerre entre l'armée et les paramilitaires a tué depuis deux ans et demi des dizaines de milliers de personnes et provoqué le déplacement de douze millions d'habitants, mais aussi dévasté les infrastructures du pays.


Le Premier ministre espagnol appelle à «élever la voix» pour ne pas «oublier» les Palestiniens

Le Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez a appelé mercredi à "élever la voix" pour que "la situation dramatique" des Palestiniens ne soit pas oubliée, au cours d'une rencontre à Madrid avec le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. (AFP)
Le Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez a appelé mercredi à "élever la voix" pour que "la situation dramatique" des Palestiniens ne soit pas oubliée, au cours d'une rencontre à Madrid avec le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. (AFP)
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  • Pedro Sánchez a également assuré de son "soutien" l'Autorité palestinienne, celle-ci devant "jouer un rôle central et fondamental dans la conception des mécanismes de gouvernance qui définiront l’avenir du peuple palestinien"
  • "Cette année 2025, qui touche à sa fin, a été terrible pour le peuple palestinien", a-t-il encore déclaré.

MADRID: Le Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez a appelé mercredi à "élever la voix" pour que "la situation dramatique" des Palestiniens ne soit pas oubliée, au cours d'une rencontre à Madrid avec le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.

Se prononçant une nouvelle fois à la mise en oeuvre d'une solution à deux Etats, "la seule solution possible" pour mettre fin au conflit opposant Israéliens et Palestiniens, le chef du gouvernement espagnol s'est engagé à la promouvoir en "élevant la voix pour que la situation dramatique dans laquelle se trouve le peuple palestinien ne tombe pas dans l'oubli".

"Oui, il y a eu un accord de cessez-le-feu mais cet accord doit être réel ; il ne peut pas être factice. C’est pourquoi nous ne nous reposerons pas tant que les attaques contre la population n'auront pas cessé et qu'il n'y aura, par conséquent, plus aucune victime", a-t-il poursuivi,

Pedro Sánchez a également assuré de son "soutien" l'Autorité palestinienne, celle-ci devant "jouer un rôle central et fondamental dans la conception des mécanismes de gouvernance qui définiront l’avenir du peuple palestinien".

"Cette année 2025, qui touche à sa fin, a été terrible pour le peuple palestinien", a-t-il encore déclaré.

"Pour reconstruire l'espoir, nous avons besoin d'une véritable paix et cette véritable paix doit reposer sur la justice. C’est pourquoi je veux être très clair : (...) les responsables de ce génocide devront rendre des comptes, tôt ou tard, afin que les victimes obtiennent justice, réparation et un certain apaisement", a-t-il ajouté.

A ses côtés, Mahmoud Abbas a quant à lui notamment remercié l'Espagne, qui avait reconnu l'Etat de Palestine en mai 2024, "pour son rôle moteur dans la création d’une coalition internationale visant à obtenir une reconnaissance plus large de notre pays", appelant également à "mettre fin à la violence sous toutes ses formes", dans la bande de Gaza mais aussi en Cisjordanie.

L'Espagne, où la cause palestinienne est très populaire, est en Europe l'un des critiques les plus véhéments de l'offensive militaire d'Israël dans la bande de Gaza déclenchée après les attaques du 7 octobre 2023 commises par le Hamas.


Ukraine: une proposition sur les concessions territoriales soumises à Trump (Merz)

Des délégués de pays européens assistent à une commémoration en l'honneur des défenseurs tombés au combat en Ukraine, dans un cimetière militaire à Lviv, en Ukraine. (AFP)
Des délégués de pays européens assistent à une commémoration en l'honneur des défenseurs tombés au combat en Ukraine, dans un cimetière militaire à Lviv, en Ukraine. (AFP)
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  • L’Allemagne a transmis à Washington une proposition portant sur de possibles concessions territoriales ukrainiennes, tout en soulignant que seules les autorités ukrainiennes peuvent en décider
  • Les Européens cherchent à influencer les négociations de paix sans céder aux exigences russes, tandis que Washington presse pour une avancée rapide dans les discussions

BERLIN: Une proposition concernant des concessions territoriales ukrainiennes dans le cadre d'un plan pour mettre fin à la guerre en Ukraine ont été soumises mercredi au président américain Donald Trump, a annoncé jeudi le chancelier allemand Friedrich Merz.

"Il existe une proposition dont (M. Trump) n'avait pas encore connaissance au moment où nous nous sommes entretenus au téléphone (mercredi), car elle n'avait pas encore été transmise aux Américains. Nous l'avons fait hier en fin d'après-midi. Il s'agit avant tout de (savoir) quelles concessions territoriales l'Ukraine est prête à faire", a déclaré M. Merz lors d'une conférence de presse à Berlin avec le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte.

Le chancelier n'a pas apporté de précisions, relevant que c'est "au président ukrainien et au peuple ukrainien" de répondre à cette question.

M. Merz, le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre britannique Keith Starmer se sont entretenus mercredi avec M. Trump.

Les Européens, qui font bloc autour de Kiev, tentent de peser sur les pourparlers visant à mettre fin à la guerre en Ukraine sans céder pour autant aux revendications maximalistes de la Russie.

Le président Trump s'est lui montré impatient, disant avoir eu des "mots assez forts" lors de l'entretien, et prévenant que les États-Unis ne voulaient "pas perdre (leur) temps".

M. Merz a, lui, décrit "un entretien téléphonique très constructif au cours duquel les positions respectives ont été clairement exposées et le respect mutuel exprimé".

Selon de hauts responsables ukrainiens interrogés par l'AFP mercredi, l'Ukraine a envoyé à Washington une nouvelle version du plan de sortie du conflit, sans en divulguer les détails.

La proposition américaine initiale était jugée bien trop favorable à Moscou, celle-ci prévoyant notamment de céder à la Russie des territoires ukrainiens qu'elle n'a pas conquis.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a confirmé mardi que le plan en cours d'élaboration avait été divisée en trois documents: un accord-cadre en 20 points, un document sur la question des garanties de sécurité et un autre sur la reconstruction de l'Ukraine après la guerre.

Le chancelier allemand a, lui, relevé jeudi que le plan devant poursuivre trois objectifs: un cessez-le-feu, des garanties de sécurité "robustes" pour l'Ukraine et une solution négociée préservant les intérêts sécuritaires européens, Moscou étant considéré comme la menace continentale.