Soudan: après les pillages, au marché dit «Daglo», on trouve de tout pour rien

Des femmes qui ont fui la guerre au Soudan attendent la distribution de rations d'aide internationale dans le camp de réfugiés d'Ourang, près de la ville d'Adre, dans l'est du Tchad, le 15 août 2023. (AFP)
Des femmes qui ont fui la guerre au Soudan attendent la distribution de rations d'aide internationale dans le camp de réfugiés d'Ourang, près de la ville d'Adre, dans l'est du Tchad, le 15 août 2023. (AFP)
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Publié le Mardi 22 août 2023

Soudan: après les pillages, au marché dit «Daglo», on trouve de tout pour rien

  • Ce grand marché s'étend au bord de l'autoroute reliant Khartoum à Wad Madani, à 200 km au sud, naguère la plus embouteillée du pays
  • L'achalandage de cet immense bazar à ciel ouvert correspond bien à la liste de ce que les habitants, commerçants et humanitaires disent avoir perdu en quatre mois de combats au coeur des quartiers résidentiels de Khartoum

EL MASSIED: Une télévision à 80 dollars, un réfrigérateur à 250... Au marché "Daglo", du nom du patron des paramilitaires qui pillent les maisons au Soudan en guerre, tout se vend à prix cassés. Mais à une condition: ne jamais demander au vendeur d'où vient sa marchandise.

Ce grand marché s'étend au bord de l'autoroute reliant Khartoum à Wad Madani, à 200 km au sud, naguère la plus embouteillée du pays. Aujourd'hui, de rares véhicules s'aventurent sur cette route parsemée de nombreux postes de contrôles tenus par des hommes en treillis ou des civils, mais toujours armés.

Ce bazar a été rapidement surnommé "Daglo" par tout le monde avec ironie car on y trouve tout ce qui a récemment disparu des maisons au gré des pillages avant tout des paramilitaires, mais aussi de civils poussés par la pauvreté.

Il y a ici de l'électroménager, des médicaments, de la nourriture, des matériaux de construction et même des pièces détachées de voiture.

"La télé, c'est 50.000 livres" soudanaises, soit environ 80 dollars, explique une vendeuse. Ses dimensions? "Regarde toi-même, elle est devant toi", réplique-t-elle du tac au tac. En magasin, le même téléviseur se vend 230.000 livres soudanaises.

Un homme qui propose des réfrigérateurs de différentes marques fait sa réclame: "150.000 livres la pièce contre 450.000 en magasin", soit près de deux fois le salaire moyen au Soudan, l'un des pays les plus pauvres au monde déjà avant la guerre.

 

Un bazar à ciel ouvert 

L'achalandage de cet immense bazar à ciel ouvert correspond bien à la liste de ce que les habitants, commerçants et humanitaires disent avoir perdu en quatre mois de combats au coeur des quartiers résidentiels de Khartoum et jusque dans ses hôpitaux --qui ont fait au moins 5.000 morts.

Il y a eu les pillages des silos d'aide alimentaire, les attaques sur les camions transportant des médicaments et l'occupation et le pillage systématique des maisons des plus de trois millions d'habitants partis de Khartoum.

Des scènes de rapine générale, où des civils se mêlaient aux combattants pour prélever leur part du butin.

Pour les experts, tout ceci participe à la "désindustrialisation" du Soudan, déjà l'un des pays les plus pauvres du monde avant la guerre.

Le concessionnaire Toyota de Khartoum annonçait encore début août qu'on lui avait volé "1.192 voitures neuves et des caisses de pièces détachées".

Aujourd'hui, les stocks de médicaments, et de matières premières d'usines et autres vêtements, meubles, électroménager jusqu'aux souvenirs de familles volés dans les maisons, sont entre les mains des seigneurs de la guerre.

Sur le marché "Daglo", du nom du général Mohamed Hamdane Daglo, commandant des très redoutées Forces de soutien rapide (FSR) entrées en guerre contre l'armée le 15 avril au Soudan, les vendeuses -- ce sont surtout des femmes qui proposent tout à la vente -- ne veulent rien dire.

Quand on demande à l'une d'elles la provenance de sa marchandise, elle se braque: "tu viens pour acheter ou pour discuter?".

 

Prix cassés 

Et tout le monde ferme les yeux: le marché Daglo d'el-Massied se trouve dans une zone contrôlée par l'armée, à une dizaine de kilomètres du dernier checkpoint des FSR au sud de Khartoum. Les habitants des villages alentour racontent entendre les combats, qui chaque jour gagnent un peu plus de terrain vers le sud.

Quant aux acheteurs, pour beaucoup, eux-mêmes des déplacés dont les maisons ont été pillées, il leur faut désormais réinstaller leur famille ailleurs. Sans salaires depuis quatre mois, ils ont dû recommencer de zéro. Acheter au plus bas est désormais l'unique option pour ces déplacés dans un pays où plus d'un habitant sur deux a besoin d'aide humanitaire pour survivre.

Les habitants de Khartoum et de ses banlieues qui sont restés dans la capitale ont eux aussi leur "marché Daglo", rapportent-ils à l'AFP. Là aussi, à même le sol, ils peuvent tout acheter à des prix défiant toute concurrence.

Mohammed Hassan Khalifa, par exemple, a tout perdu dans sa maison de Khartoum-Nord. "Ils ont pillé tous les équipements que nous avions", raconte-t-il à l'AFP. Mohammed Abdelal, lui, a vu son magasin d’électroménager entièrement vidé par des voleurs qu'il n'a pas pu identifier.

Un jour, peut-être, ils verront leurs objets personnels réapparaître... Probablement sur les étals des marchés Daglo.


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.