La Turquie prolonge la détention du militant Osman Kavala

Les militants des droits de la personne, la communauté internationale, et les partis d'opposition ont tous appelé à la libération de Kavala, arrêté à la suite d'une tentative de coup d'État en 2016. (Photo, AFP/Archives)
Les militants des droits de la personne, la communauté internationale, et les partis d'opposition ont tous appelé à la libération de Kavala, arrêté à la suite d'une tentative de coup d'État en 2016. (Photo, AFP/Archives)
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Publié le Mercredi 16 décembre 2020

La Turquie prolonge la détention du militant Osman Kavala

  • Freedom House a demandé à plusieurs reprises au gouvernement turc de libérer Kavala
  • Cet ajournement donne l’impression que la Cour attend simplement la décision du tribunal local le 18 décembre pour rendre son jugement»

ANKARA : Le plus haut tribunal de Turquie a encore reporté l’audience requise par Osman Kavala pour être libéré de prison. Le philanthrope et militant turc est détenu depuis plus de trois ans, sans jamais avoir été reconnu coupable d’un crime.

Mardi, la première chambre de la Cour constitutionnelle turque a renvoyé la requête de Kavala à la Grande Chambre; c'est la deuxième fois que le tribunal repousse la date de l’appel. Les experts estiment que cette décision est un stratagème pour gagner du temps. Le procès du militant des droits de l’homme doit débuter le 18 décembre devant un tribunal pénal spécial à Istanbul.

Les militants des droits de la personne, la communauté internationale, et les partis d'opposition ont tous appelé à la libération de Kavala, arrêté à la suite d'une tentative de coup d'État en 2016.

Kavala est accusé d'avoir organisé les manifestations antigouvernementales de Gezi en 2013, d’atteinte à l'ordre constitutionnel, ainsi que d’une tentative de renverser le gouvernement. Acquitté lors du procès en février, Kavala a été remis en arrestation le jour même, cette fois ci pour «espionnage politique ou militaire», toutes des accusations «surréalistes» qu'il nie complètement.

Kavala a saisi la plus haute cour turque, et a rappelé «son droit à la liberté et à la sécurité personnelles a été violé car son arrestation est absolument illégale».

«Osman Kavala est détenu depuis plus de trois ans sans la moindre preuve crédible qui l’incrimine», dit Gina S. Lentine, principale agente des programmes de l'Europe et l'Eurasie à Freedom House.

Freedom House a demandé à plusieurs reprises au gouvernement turc de libérer Kavala.

«Son cas est tout à fait caractéristique, et fait écho à ce que subissent des milliers de militants, journalistes, universitaires, écrivains, artistes, personnalités politiques, avocats et autres personnes. Ils ont tous été soumis à des procédures judiciaires politisées en guise de représailles,  alors que liberté d’expression est le droit le plus fondamental», affirme Lentine Arab News.

La Cour européenne des droits de l’homme a annoncé en décembre dernier que la détention provisoire prolongée «politique»  de Kavala est illégale et sert «d’autres fins». État membre de la Cour, la Turquie s’est engagée à respecter ses jugements.

Dans sa décision, le tribunal note qu’«en l'absence d'autres circonstances pertinentes et suffisantes, le simple fait d’avoir des contacts avec un suspect ou avec des ressortissants étrangers ne peut être considéré comme une preuve suffisante pour convaincre un observateur objectif que Kavala aurait pu être impliqué dans une tentative de renversement de l'ordre constitutionnel en Turquie».

Pour Lentine, «La Cour européenne des droits de l'homme est l'un des rares outils dont dispose la société civile en Turquie en vue de tenir son gouvernement responsable des violations des droits. C'est pour cette raison que ses décisions sont si importantes. Il est extrêmement préoccupant de voir le gouvernement turc refuser de répondre à ses jugements». Elle soulève de plus un questionnement de taille: «Ceci nous force à nous demander quelles mesures Conseil Européen pourrait prendre afin exiger que la Turquie rende des comptes pour le non-respect de conventions qu’elle a signées, comme la Convention européenne des droits de l'homme», a-t- elle confirmé.

Bulent Arinc, un confident du président turc Recep Tayyip Erdogan, a démissionné le mois dernier du haut conseil consultatif du gouvernement, après avoir émis des remarques controversées au sujet de la réforme judiciaire en Turquie. Il a d’ailleurs appelé à la libération de Kavala de prison, affirmant que les accusations portées contre le philanthrope sont sans aucun fondement.

La Turquie était censée donner la priorité à la réforme judiciaire au début de 2021. Tout espoir de voir s’améliorer la situation de Kavala s’est cependant dissipé après que le président Erdogan ait récemment juré qu’il «ne soutiendrait jamais Kavala», car il le considère comme le vrai commanditaire des manifestations de 2013.

Le principal député de l'opposition du Parti républicain du peuple (CHP), Utku Cakirozer, a déclaré à Arab News que la décision de mardi est une autre violation des droits de Kavala. «Ils ne font que se renvoyer la balle dans le but de prolonger sa détention, malgré toutes les décisions rendues par la plus haute cour européenne. Il est insupportable de garder une personne derrière les barreaux sans motif pendant 1 148 jours», tonne-t-il.

Pour Cakirozer, l'affaire Kavala est devenue emblématique de «l'État de droit» en Turquie. «C’est une affaire qui mine les revendications internationales de la Turquie en termes de démocratisation», a-t-il ajouté.

Lentine de Freedom House partage entièrement cet avis.

«Il est inquiétant de voir la Cour constitutionnelle turque, l’un des rares autres outils locaux que la société civile peut encore utiliser pour demander des comptes et faire respecter l’État de droit, reporter l’application d’une décision de la Cour européenne concernant Kavala», dit-elle. «Cet ajournement donne l’impression que la Cour attend simplement la décision du tribunal local le 18 décembre pour rendre son jugement».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.


Gaza 2025: 15 journalistes tués, selon le Syndicat des journalistes palestiniens

 Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
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  • Le dernier rapport du syndicat fait état d'une augmentation des arrestations, des menaces et du harcèlement des journalistes par les Israéliens
  • Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes

LONDRES: Au moins 15 professionnels des médias ont été tués à Gaza depuis le début de l'année 2025, selon un nouveau rapport publié par le Syndicat des journalistes palestiniens.

Le rapport, publié ce week-end par le comité des libertés du syndicat chargé de surveiller les violations commises par Israël à l’encontre des journalistes, souligne la persistance du ciblage direct des professionnels des médias.

Sept journalistes ont été tués en janvier et huit en mars, selon le rapport.

Par ailleurs, les familles de 17 journalistes ont été endeuillées, tandis que les habitations de 12 autres ont été détruites par des tirs de roquettes et d’obus. De plus, 11 personnes ont été blessées au cours de ces attaques.

Le rapport note que la violence à l'encontre des équipes de journalistes ne se limite pas aux attaques mortelles. Il fait état de l'arrestation de 15 journalistes, à leur domicile ou alors qu'ils étaient en mission. Certains ont été libérés quelques heures ou quelques jours plus tard, tandis que d'autres sont toujours en détention.

Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes, dont beaucoup ont été avertis d'évacuer les zones qu'ils couvraient.

Le rapport relève également une intensification du harcèlement judiciaire, avec plus d’une dizaine de cas où des journalistes – en majorité issus du quotidien Al-Quds, basé en Cisjordanie – ont été convoqués pour interrogatoire et se sont vu interdire de couvrir des événements aux abords de la mosquée Al-Aqsa et dans la vieille ville de Jérusalem.

En Cisjordanie occupée, environ 117 journalistes ont été victimes d'agressions physiques, de répression ou d'interdictions de reportage, en particulier à Jénine et à Jérusalem. La commission a également recensé 16 cas de confiscation ou de destruction de matériel de travail.

Les violences à l'encontre des journalistes surviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Les forces israéliennes ont intensifié leur offensive, coupant les approvisionnements vitaux des 2,3 millions d'habitants de Gaza, laissant l'enclave au bord de la famine.

Les actions d'Israël font désormais l'objet d'audiences à la Cour internationale de justice de La Haye, où Tel-Aviv est accusé de violer le droit international en restreignant l'aide humanitaire à Gaza.

Le bilan humanitaire est catastrophique.

Selon le ministère de la santé de Gaza, plus de 61 700 personnes ont été tuées à Gaza depuis qu'Israël a lancé son offensive le 7 octobre 2023. Plus de 14 000 autres sont portées disparues et présumées mortes, les civils constituant la grande majorité des victimes.

Le Comité pour la protection des journalistes, organisme de surveillance de la liberté de la presse basé à Washington, a également lancé un signal d’alarme face au nombre élevé de journalistes tués, indiquant qu’au moins 176 d’entre eux – en grande majorité des Palestiniens – ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne sur les territoires occupés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com