Le tourisme au Maroc agonise, l’État pointé du doigt

Pour stimuler la demande, l’Office nationale marocain du tourisme (ONMT) a initié un programme de promotion du tourisme interne, mais il n’a pas atteint les résultats escomptés (Photo, AFP).
Pour stimuler la demande, l’Office nationale marocain du tourisme (ONMT) a initié un programme de promotion du tourisme interne, mais il n’a pas atteint les résultats escomptés (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 19 décembre 2020

Le tourisme au Maroc agonise, l’État pointé du doigt

  • Au Maroc, les professionnels du tourisme agonisent. La crise sanitaire qui a frappé le Royaume cette année a très durement affecté un secteur hautement stratégique pour l’économie du pays
  • Des pôles touristiques comme Marrakech et Agadir, qui concentrent plus de 60% des nuitées du pays, sont quasiment déserts depuis la mi-mars 2020

CASABLANCA: Au Maroc, les professionnels du tourisme agonisent. La crise sanitaire qui a frappé le Royaume cette année a très durement affecté un secteur hautement stratégique pour l’économie du pays: il représente 750 000 emplois directs, pèse 7% du PIB national et a généré, en 2019, près de 79 milliards de dirhams, soit environ 7,3 milliards d’euros.

Des pôles touristiques comme Marrakech et Agadir, qui concentrent plus de 60% des nuitées du pays, sont quasiment déserts depuis la mi-mars 2020. Plusieurs établissements d’hébergement touristique et plusieurs restaurants ont mis la clé sous la porte, entraînant le licenciement de dizaines de milliers d’employés et aggravant le taux de chômage du pays, qui devrait culminer à près de 14% cette année. Toutefois, les licenciements n’ont pas atteint un niveau si catastrophique que cela, car l’État marocain a conditionné ses mesures de soutien au secteur à la préservation d’au moins 80% des emplois.  

Des mesures de soutien jugées inefficaces 

Ces mesures ont cependant été jugées insuffisantes par les professionnels. Contacté par nos soins, Fouzi Zemrani, vice-président de la Confédération nationale du tourisme (CNT), ne cache pas son amertume. Il lance un appel à l’État marocain et aux parties prenantes afin de mettre en place, de manière urgente, des mesures plus réalistes et plus efficaces. «Tous les professionnels souffrent énormément au niveau de leur trésorerie à cause de l’arrêt de leurs activités pendant neuf mois. La majorité d’entre eux n’ont pas réalisé de chiffre d’affaires au cours de cette période. Les plus chanceux ont eu un manque à gagner de 80% par rapport à l’année 2019. L’État a lancé des mesures de soutien, qui consistent principalement en des indemnités pour les employés du secteur, en plus des crédits garantis par l’État», souligne Zemrani.


Mais ces crédits n’ont pas été salvateurs, si l’on en croit notre source, puisque «les banques ont rechigné à octroyer des crédits aux opérateurs». En effet, la démarche est jugée trop risquée, le taux des créances en souffrance ayant atteint des niveaux alarmants au Maroc. Outre les banques, les assurances n’ont pas non plus joué le jeu, déplore Zemrani: «Elles ont exigé le paiement de leurs polices d’assurances, notamment auprès des agences de location de voiture, malgré le fait que leurs véhicules étaient immobilisés pendant cette période.» D’ailleurs, le transport touristique a été l’un des segments les plus touchés. Les loueurs de véhicules touristiques ont à maintes reprises donné l’alarme auprès des autorités marocaines, en vain. On dénombre plusieurs cas de suicide, nous confie une source proche de la corporation.

Un contrat-programme qui tarde à être concrétisé

Pour essayer de limiter la casse, l’État a signé, le 6 août 2020, le «contrat-programme 2020-2022» avec les professionnels du secteur, qui s’articule autour de trois objectifs: le maintien des emplois et la préservation du tissu économique, la stimulation de la demande, et la transformation structurelle du secteur. Malgré sa signature, la concrétisation de ce contrat-programme tarde encore. Sur les vingt et une mesures prévues, seules deux ont été lancées pour le moment: les crédits garantis par l’État et les indemnités pour les employés du secteur.

Pour stimuler la demande, l’Office nationale marocain du tourisme (ONMT) a initié un programme de promotion du tourisme interne, mais il n’a pas atteint les résultats escomptés. «Le tourisme interne n’a pas été au rendez-vous. À cause de la crise sanitaire, le pouvoir d’achat des Marocains a été considérablement affecté. De plus, le maintien de l’État d’urgence et les mesures restrictives, relatives aux déplacements interurbains notamment, ont découragé les Marocains de voyager», précise Fouzi Zemrani. 

L’ONMT et la RAM prennent les devants

Ces derniers jours, l’ONMT a en tout cas multiplié les communiqués destinés à relancer rapidement le secteur. Il a ainsi annoncé l’ouverture de nouvelles lignes aériennes et la reprise des vols de plusieurs compagnies aériennes, comme Air France et sa filiale low cost, Transavia.

Le 8 décembre 2020, afin d’amorcer la relance touristique, l’ONMT et Royal Air Maroc ont annoncé la mise en place, à compter du 15 décembre, de quinze nouvelles routes aériennes en direction de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne, de l’Italie, de la Belgique et du Royaume-Uni, pays qui représentent les principaux marchés touristiques du Royaume. En tout, ce sont dix métropoles européennes qui seront reliées à Marrakech, à Agadir et à Dakhla. Cette initiative devrait permettre l’ajout de 150 255 sièges lors des cinq prochains mois.

La reprise dépend du début de la campagne de vaccination

Pour le moment, toutefois, les touristes n’affluent pas. L’incertitude et le manque de visibilité sont toujours de mise, notamment en ce qui concerne les restrictions des déplacements. Pour Zemrani, les prémices d’une relance touristique dépendent du début de la campagne de vaccination, prévue en principe pendant la dernière semaine du mois courant. «Nous espérons une ouverture totale des frontières au mois d’avril 2021, mais seulement si la campagne de vaccination démarre réellement à la fin du mois de décembre ou au début du mois de janvier. Toutefois, cette ouverture des frontières doit être annoncée maintenant, ou au plus tard le 10 janvier, pour que nous puissions la communiquer à nos partenaires, tour-opérateurs, compagnies aériennes et hôtels», prévient Fouzi Zemrani.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.