A Amiens, un diplôme de sociologie pour retisser le lien police-population

Des gendarmes mobiles montent la garde à côté d'un graffiti indiquant "la police tue" lors de la "Marche pour Adama Traore" - sept ans après sa mort - à la Gare de l'Est à Paris le 8 juillet 2023. (Photo par Bertrand Guay  AFP)
Des gendarmes mobiles montent la garde à côté d'un graffiti indiquant "la police tue" lors de la "Marche pour Adama Traore" - sept ans après sa mort - à la Gare de l'Est à Paris le 8 juillet 2023. (Photo par Bertrand Guay AFP)
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Publié le Samedi 23 septembre 2023

A Amiens, un diplôme de sociologie pour retisser le lien police-population

  • Gardiens de la paix ou commissaires divisionnaires, ces candidats volontaires vont plancher sur les rapports police-population sous la direction de 23 sociologues, au long d'un cursus de 120 heures réparties sur l'année
  • Au programme, introduction à la méthodologie, «polices comparées» avec des études de cas sur l'Allemagne, l'Angleterre et les Etats-Unis, sociologie de la déviance, construction de l'identité de policier, «poids du genre dans les sociabilités policières»

AMIENS, France : «Trouver des pistes» pour sortir de «l'entre-soi» et combler le fossé qui se creuse avec la population: 50 policiers de tous grades ont investi l'université d'Amiens pour suivre un cursus inédit en France de sociologie.

Gardiens de la paix ou commissaires divisionnaires, ces candidats volontaires vont plancher sur les rapports police-population sous la direction de 23 sociologues, au long d'un cursus de 120 heures réparties sur l'année.

Une petite révolution, témoignant d'une volonté de contrer un «entre-soi policier très fort», selon Philippe Lutz, le directeur de l'Académie de police, co-conceptrice du projet avec l'université Jules Verne.

Les étudiants, âgés de 25 à 62 ans, ont été sélectionnés sur lettre de motivation, parmi 200 candidats. Sans aucun prérequis universitaire, l'idée étant d'ouvrir à tous le champ d'étude sociologique.

Pour décrocher leur diplôme universitaire, n'ouvrant à aucune promotion, ils devront rédiger un mini-mémoire sur un sujet de leur choix.

Au programme, introduction à la méthodologie, «polices comparées» avec des études de cas sur l'Allemagne, l'Angleterre et les Etats-Unis, sociologie de la déviance, construction de l'identité de policier, «poids du genre dans les sociabilités policières» ou encore rapports police-médias.

«On fait un métier qui est au service de la population donc c'est important qu'on arrive à se comprendre», explique Isabelle, brigadier-chef de 46 ans, à l'issue de sa première journée de cours.

- «Assistante sociale» -

La formation a débuté deux jours avant des manifestations, prévues samedi dans toute la France, contre les violences policières, dans la foulée de la mort du jeune Nahel, tué par un policier en juin lors d'un contrôle routier.

Au delà de ce dernier épisode, les rapports police-population constituent une question centrale à l'«actualité constante», estime M. Lutz, rappelant d'autres émeutes, dont celles dans les banlieues lyonnaises des années 1980.

Dans leurs candidatures, que l'AFP a pu consulter, certains policiers affirment vouloir combattre les «préjugés» sur la police, dont ils regrettent qu'elle soit un «bouc-émissaire» des tensions traversées par le pays.

D'autres font plus dans l'auto-critique, pointant un «corporatisme» de l'institution ou un aveuglement sur les causes de la criminalité. Un sous-brigadier souhaite plancher sur l'enregistrement vidéo des interventions policières.

Une commandante raconte aussi à l'AFP être «taxée d'assistante sociale» par des collègues, pour sa conviction «qu'un délinquant, quel qu'il soit, n'a pas cela dans les gênes», et qu'il faut «toujours essayer de voir ce qu'on peut en tirer».

- «Ministère de l'urgence» -

Mais elle affirme aussi avoir été «saisie d'effroi» quand un collègue CRS a reçu un cocktail Molotov au visage pendant une manifestation contre la réforme des retraites. «On n'est pas censé se battre dans ce contexte-là», il faut «trouver des pistes pour comprendre comment on en est arrivé là».

Plusieurs collègues font eux part d'une perte de sens dans l'accomplissement de leurs missions.

Si la réflexion offerte par la formation peut constituer une réponse au mal-être de certains policiers, «la sociologie n'est pas faite pour soigner» prévient Mathieu Fiolet, sociologue et chef de la section Recherche, Etudes et Innovation de l'Académie de police.

Il ne s'agit pas «de trouver de réponse immédiate, de solution toute faite», de dicter des consignes, abonde Elodie Lemaire, sociologue et maîtresse de conférence à Amiens, co-pilote du cursus avec M. Fiolet. «L'enjeu est d'engager une démarche réflexive et apprendre à poser différemment les questions».

Chaque policier doit notamment passer au crible ses pratiques, pour évaluer si elles sont «cohérentes avec les valeurs qu'il est censé défendre», développe M. Lutz.

Mais «dans la police, c'est compliqué de se poser» pour une telle analyse, car «il y a toujours quelque chose à faire, le ministère de l'Intérieur c'est le ministère de l'urgence», ajoute-t-il.

Selon lui, ce premier pas pourrait ouvrir la voie à une évolution de la formation initiale des policiers, aujourd'hui surtout technique. Pour Mathieu Fiolet et Elodie Lemaire, les sciences sociales devraient en intégrer le socle, comme cela peut être le cas en Finlande ou en Allemagne.


Un homme tué par balle à Marseille, le 3e en plein jour depuis début octobre

Un homme a été tué mardi par balle dans les quartiers Nord de Marseille, a-t-on appris de sources concordantes, troisième homicide en plein jour dans la deuxième ville de France depuis début octobre. (AFP)
Un homme a été tué mardi par balle dans les quartiers Nord de Marseille, a-t-on appris de sources concordantes, troisième homicide en plein jour dans la deuxième ville de France depuis début octobre. (AFP)
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  • La deuxième ville de France a enterré mardi Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic, abattu jeudi en début d'après-midi devant une pharmacie
  • Les marins pompiers de Marseille sont intervenus vers 14H15 au quartier des Olives pour un homme "blessé par arme à feu"

MARSEILLE: Un homme a été tué mardi par balle dans les quartiers Nord de Marseille, a-t-on appris de sources concordantes, troisième homicide en plein jour dans la deuxième ville de France depuis début octobre.

Interrogé par l'AFP, le parquet a fait état d'un mort, âgé entre 45 et 50 ans, et d'un blessé dans le quartier des Olives (13e arrondissement), sans pouvoir établir à ce stade de l'enquête un lien éventuel avec le trafic de drogue.

Marseille est régulièrement secouée par des "narchomicides" sur fond de trafic de stupéfiants et de guerre des gangs pour le contrôle des points de vente de drogue.

Les marins pompiers de Marseille sont intervenus vers 14H15 au quartier des Olives pour un homme "blessé par arme à feu". Une source policière indiquant ensuite à l'AFP qu'elle avait été "tuée par balle dans le 13e arrondissement".

La deuxième ville de France a enterré mardi Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic, abattu jeudi en début d'après-midi devant une pharmacie. Le 9 octobre, un homme avait été tué par balle en fin de matinée dans un quartier populaire du centre.

Selon un décompte de l'AFP, une quinzaine de personnes ont perdu la vie dans des narchomicides depuis le début de l'année dans les Bouches-du-Rhône.

Une criminalité qui ne cesse de franchir des paliers: si avant 2020/2021 les victimes étaient bien ancrées dans le narcobanditisme, depuis, les cibles sont devenues les petites mains du trafic, parfois mineures et touchées à l'aveugle sur des points de deal, faisant parfois des victimes collatérales.

Avec Mehdi Kessaci, un nouveau cap a été franchi selon les observateurs, ce jeune de 20 ans totalement étranger du trafic de drogue ayant été visé volontairement, peut-être pour intimider son frère Amine engagé dans la lutte contre le narcobanditisme, selon les premiers éléments de l'enquête.


Fleurs blanches et hommages de Marseillais à Mehdi Kessaci pour ses obsèques

Cette capture d'écran réalisée le 14 novembre 2025 à partir d'une vidéo de l'AFP datée du 7 juillet 2024 montre Mehdi Kessaci, frère d'Amine Kessaci, fondateur de l'association Conscience et ancien candidat dans la 3e circonscription des Bouches-du-Rhône pour la coalition de gauche Nouveau Front Populaire (NFP).
Cette capture d'écran réalisée le 14 novembre 2025 à partir d'une vidéo de l'AFP datée du 7 juillet 2024 montre Mehdi Kessaci, frère d'Amine Kessaci, fondateur de l'association Conscience et ancien candidat dans la 3e circonscription des Bouches-du-Rhône pour la coalition de gauche Nouveau Front Populaire (NFP).
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  • Au milieu des gerbes trônent celle des Ecologistes, le parti d'Amine Kessaci, frère de Mehdi, qui selon les premières investigations, pourrait avoir été tué pour toucher et avertir Amine
  • Il y a également celle de Guy Benarroche, sénateur écologiste des Bouches-du-Rhône mais aussi de simples citoyens comme cette retraitée, présente avec un bouquet de roses blanches

MARSEILLE: Les fleurs blanches commençaient à s'accumuler mardi au rond-point où a été abattu jeudi Mehdi Kessaci, en marge de ses obsèques attendues dans l'après-midi à Marseille, dans une ville traumatisée par ce nouveau cap franchi dans les violences liées au narcobanditisme.

Au milieu des gerbes trônent celle des Ecologistes, le parti d'Amine Kessaci, frère de Mehdi, qui selon les premières investigations, pourrait avoir été tué pour toucher et avertir Amine, militant engagé dans la lutte contre le narcobanditisme depuis l'assassinat d'un premier frère, Brahim.

Il y a également celle de Guy Benarroche, sénateur écologiste des Bouches-du-Rhône mais aussi de simples citoyens comme cette retraitée, présente avec un bouquet de roses blanches.

"Je suis venue pour Amine que j'ai bien connu car j'étais maîtresse dans la cité où il habitait avec sa famille. Je l'ai côtoyé ensuite lors de campagnes électorales et je trouve son engagement citoyen formidable", confie à l'AFP Christine Didon.

"Aujourd'hui, on ne peut plus s'en sortir grâce à l'école comme avant. Il y a une dégradation très rapide des conditions de vie, une pauvreté telle qu'il ne reste à certains que le trafic de drogue", ajoute-t-elle.

Mohamed Habib Errabia, 77 ans, est tout de suite descendu de chez lui jeudi quand il a entendu les coups de feu et ce matin il tenait à rendre hommage à ce jeune de 20 ans, victime innocente et totalement étrangère au trafic de drogue, selon les autorités. "On a des enfants, forcément on pense à eux. Qu'est-ce qui peut leur arriver ? On est pas à l'abri d'une balle perdue".

Les obsèques de Mehdi Kessaci se dérouleront mardi après-midi à Marseille sous forte surveillance policière. La famille, qui ne souhaite pas la présence de la presse, a annoncé qu'une marche blanche serait organisée ce week-end.

La police avait identifié des menaces sur Amine Kessaci et ce dernier était placé sous surveillance policière depuis plusieurs semaines. A la rentrée, il a publié un livre "Marseille, essuie tes larmes" (Le bruit du monde), sorte de longue lettre adressée à Brahim, tué avec deux autres jeunes hommes en 2020, dont les assassins présumés seront jugés prochainement.

Mardi matin, une réunion d'urgence à l'Elysée est par ailleurs organisée sur la lutte contre le narcobandistime qui a fait l'objet d'une loi en juin.

"Le narcotrafic est une peste, une lèpre, une venin qui court dans les veines du monde et l'empoisonne", écrit Amine Kessaci dans son livre. "On dit cartel, on dit baron, on dit empire. Moi je dis fosse commune, je dis cimetière, je dis clameur étouffée des mères qui pleurent leurs fils fauchés, des pères brisés par la poudre qui court, des enfants assassinés avant d'avoir su vivre".

 


France: une galerie du Louvre fermée au public en raison d'une «fragilité» de l'édifice

La galerie Campana est située sur la même aile sud du Louvre où un commando de malfaiteurs a réussi à s'introduire le 19 octobre, dérobant huit joyaux de la Couronne d'une valeur estimée à 88 millions d'euros. Les bijoux restent aujourd'hui introuvables. (AFP)
La galerie Campana est située sur la même aile sud du Louvre où un commando de malfaiteurs a réussi à s'introduire le 19 octobre, dérobant huit joyaux de la Couronne d'une valeur estimée à 88 millions d'euros. Les bijoux restent aujourd'hui introuvables. (AFP)
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  • Il s'agit "d'évolutions récentes et imprévisibles", assure le musée le plus visité au monde
  • A l'appui de sa décision, le musée invoque les conclusions d'un rapport d'un bureau d'études techniques qui lui a été remis vendredi

PARIS: Une des galeries du musée du Louvre à Paris sera fermée au public "par mesure de précaution" après qu'un audit a révélé la "particulière fragilité" de certaines poutres d'une des ailes du bâtiment, a annoncé lundi le musée dans un communiqué.

Abritant neuf salles dédiées à la céramique grecque antique, la galerie Campana sera fermée le temps que des "investigations" soient menées "sur la particulière fragilité de certaines poutres portant les planchers du deuxième étage de l'aile sud" du quadrilatère Sully, qui enserre la cour carrée du Louvre.

Il s'agit "d'évolutions récentes et imprévisibles", assure le musée le plus visité au monde. Contacté par l'AFP, un porte-parole de l'établissement n'a pas pu préciser quand cette décision prendrait effet ni pour combien de temps.

A l'appui de sa décision, le musée invoque les conclusions d'un rapport d'un bureau d'études techniques qui lui a été remis vendredi. Et assure avoir "immédiatement lancé une campagne complémentaire d'investigations" afin de déterminer les causes de la fragilité identifiée.

La galerie Campana est située sur la même aile sud du Louvre où un commando de malfaiteurs a réussi à s'introduire le 19 octobre, dérobant huit joyaux de la Couronne d'une valeur estimée à 88 millions d'euros. Les bijoux restent aujourd'hui introuvables.

En janvier 2025, la présidente du Louvre Laurence des Cars, sous pression depuis ce casse spectaculaire, avait alerté le ministère de la Culture de l'état de grande vétusté du musée parisien, évoquant notamment "la multiplication d'avaries dans des espaces parfois très dégradés".

Peu après cette alerte, le président Emmanuel Macron avait annoncé le lancement d'un vaste chantier de rénovation et de modernisation du Louvre, centré notamment sur le quadrilatère Sully. Des travaux initialement estimés à quelque 800 millions d'euros, et revus à la hausse dans un récent rapport de la Cour des comptes qui a évoqué au moins 1,15 milliard d'euros.