L'administration Biden souhaite renforcer son engagement au Moyen-Orient selon des experts

Les États-Unis ont estimé qu'ils devaient changer de politique après avoir constaté que la Chine avait noué des liens plus étroits avec les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite (AFP)
Les États-Unis ont estimé qu'ils devaient changer de politique après avoir constaté que la Chine avait noué des liens plus étroits avec les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite (AFP)
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Publié le Jeudi 28 septembre 2023

L'administration Biden souhaite renforcer son engagement au Moyen-Orient selon des experts

  • La montée en puissance de la Chine et la guerre entre la Russie et l'Ukraine ont forcé les États-Unis à changer de politique, selon les participants d’un forum à Washington
  • L'Arabie saoudite est considérée comme un partenaire clé dans la nouvelle stratégie américaine en matière de politique étrangère

WASHINGTON: L'administration du président américain, Joe Biden, cherche à s'engager davantage avec l'Arabie saoudite et d'autres pays du Moyen-Orient – un changement marqué par rapport à sa position politique antérieure – en raison de l'influence croissante de la Chine et de la Russie dans la région, et de leurs ambitions militaires et économiques expansionnistes. 

Tel est le consensus auquel sont parvenus les experts chargés d'évaluer la politique étrangère des États-Unis lors d'un forum organisé lundi par le Middle East Institute à Washington. 

Lors de cet événement intitulé «Assessing Biden's Middle East Policy Approach, 2021-2023», les experts ont analysé les raisons pour lesquelles l'administration, qui a pris ses fonctions en 2021, ne souhaitait pas s'engager dans ce que les États-Unis considéraient comme le déclin de l'importance géopolitique des pays du Moyen-Orient. 

Selon les experts, deux raisons principales expliquent le changement de position de la Maison Blanche: d'une part, la guerre déclenchée par la Russie en Ukraine en février 2021 et, d'autre part, l'influence croissante de la Chine dans la région, qui a permis à Pékin de réaliser une sorte de coup d'éclat en négociant un accord de rapprochement entre l'Arabie saoudite et l'Iran au début de l'année. 

Brian Katulis, chercheur principal et vice-président de la politique de l'Institut du Moyen-Orient, a déclaré que l'administration Biden était entrée en fonction avec le slogan des «trois C»: Covid-19, Chine et changement climatique. 

Selon Katulis, la guerre de la Russie en Ukraine et la présence accrue de la Chine au Moyen-Orient ont déclenché la sonnette d'alarme à la Maison Blanche. 

«Au printemps dernier, Washington s'est progressivement rendu compte que des alliés traditionnels comme l'Arabie saoudite pourraient se tourner vers la Chine», a-t-il déclaré.  

«L'accord négocié par la Chine entre l'Iran et l'Arabie saoudite au début de l'année a été une véritable onde de choc et un signal d'alarme pour de nombreuses personnes à la Maison-Blanche», a-t-il ajouté. 

Dennis Ross, ancien conseiller sur le Moyen-Orient de plusieurs administrations démocrates et républicaines et actuellement chercheur à l'Institut pro-israélien de Washington pour la politique du Proche-Orient, a déclaré que l'administration Biden ne se souciait pas du Moyen-Orient lorsqu'elle a pris ses fonctions en 2021. 

Ross a expliqué que le conflit en Ukraine avait changé la donne et que ce n'était pas seulement le pétrole et l'énergie – les revenus dont la Russie a besoin pour financer sa guerre – qui avaient poussé l'administration à se réengager au Moyen-Orient.  

Selon Ross, la vision du monde de Biden a également joué un rôle, à savoir qu'il existe une lutte idéologique mondiale entre la démocratie et le totalitarisme.     

Selon lui, l'administration voulait établir un ordre international libéral, fondé sur des règles, pour contrer les menaces que représentaient la Chine et la Russie. Mais elle s'est vite rendu compte qu'elle avait besoin de ce qu'elle considérait comme des «nations non démocratiques» pour faire partie de la coalition. 

«En fait, vous avez besoin de pays non démocratiques qui ont des atouts pour faire partie de votre coalition ou au moins pour vous assurer qu'ils ne font pas partie de l'autre coalition», a-t-il dit. 

«Biden a déclaré ne pas vouloir se retirer du Moyen-Orient et laisser un vide que les Russes et les Chinois vont combler», a-t-il ajouté. 

Ross a affirmé que la politique de Biden à l'égard du Moyen-Orient concernait davantage la Chine que la Russie, estimant que cette dernière était susceptible d'être beaucoup plus faible en raison de la guerre en Ukraine. 

Les États-Unis cherchent également à être l'architecte d'un accord visant à établir des liens formels entre Israël et l'Arabie saoudite, dans le cadre de leur vision visant à empêcher de puissants concurrents de s'implanter dans cette région riche en pétrole.  

Ross a indiqué que les récentes visites en Arabie saoudite de Jake Sullivan, conseiller de Biden en matière de sécurité nationale, et du secrétaire d'État Antony Blinken, s'inscrivaient dans le cadre des efforts déployés pour renouer le dialogue avec les dirigeants du Royaume. 

En accord avec les principaux arguments de Ross, l'expert et universitaire du Moyen-Orient Vali Nasr a souligné la manière dont l'administration Biden avait tenté de construire une coalition au Moyen-Orient pour s'opposer aux ambitions nucléaires de l'Iran. 

Nasr, professeur d'affaires internationales et d'études sur le Moyen-Orient à l'université Johns-Hopkins, a déclaré que le président américain s'était rendu en Arabie saoudite en juillet 2022, après une visite en Israël, afin de vendre l'idée d'une «Otan arabe», une proposition de coalition militaire au Moyen-Orient parrainée par les États-Unis et destinée à contrer l'Iran. 

«Mais Biden a été éconduit par les Saoudiens, qui lui ont dit qu'ils s'engageaient à nouveau aux côtés de l'Iran», a-t-il déclaré. Nasr a précisé que les États-Unis avaient jugé nécessaire de modifier leur politique après avoir constaté que la Chine avait noué des liens plus étroits avec les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Frappes ukrainiennes sur les raffineries et forte demande: en Russie, l'essence devient chère

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
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  • Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde
  • A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro)

MOSCOU: "Doucement mais sûrement": Oleg fait le plein d'essence à Moscou et vitupère contre la hausse des prix nourrie par une demande accrue et les frappes ukrainiennes contre les infrastructures pétrolières, secteur clé de l'économie russe que les Occidentaux veulent sanctionner.

"Tout le monde l'a remarqué", tonne Oleg, retraité de 62 ans: les prix des carburants vont crescendo à la pompe. Au 1er septembre, l'essence au détail coûtait 6,7% de plus que fin 2024, selon Rosstat, l'agence nationale des statistiques.

Ce renchérissement s'inscrit dans un contexte de hausse générale des prix, avec une inflation annuelle qui a été de 8,14% en août, à l'heure où la Russie intensifie l'offensive qu'elle a lancée en 2022 en Ukraine.

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg.

Et depuis le début de l'été, les réseaux sociaux sont saturés de vidéos montrant des files d'attente devant les stations-service de l'Extrême-Orient russe, en Crimée - région que la Russie a annexée au détriment de Kiev en 2014 -, et dans certaines régions du sud proches de l'Ukraine, pour cause de pénurie.

Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde.

Raffineries frappées 

A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro). Ce prix, qui reste bien inférieur à ceux affichés dans de nombreux pays européens, surprend le consommateur russe, habitué à ne pas payer cher l'essence et au revenu moyen moindre.

Artiom, un Moscovite qui ne souhaite pas donner son nom de famille, observe cette augmentation "depuis le début de l'année". "Pour des personnes ordinaires, 300 ou 400 roubles en plus par plein (3 à 4 euros, ndlr), cela commence à être sensible", dit-il.

Sur le site Gazeta.ru, Igor Iouchkov, analyste au Fonds national de sécurité énergétique, met en avant l'augmentation d'"environ 16%" du droit d'accise (impôt indirect) depuis le 1er janvier et la baisse de subsides versés aux compagnies pétrolières.

Car, comme l'explique à l'AFP Sergueï Teriochkine, expert en questions énergétiques, "plus les subventions sont faibles, plus la rentabilité est faible", ce qui pousse les pétroliers à "répercuter" ces pertes sur les prix au détail.

La demande a, elle, été dopée par les départs en vacances et les engins agricoles.

Restent - surtout - les frappes contre les raffineries et dépôts de pétrole que l'Ukraine a multipliées afin de toucher Moscou au portefeuille et d'entraver sa capacité à financer son offensive.

"Les frappes ont ciblé de grandes raffineries dans la partie européenne de la Russie", notamment dans les régions de Samara, Riazan, Volgograd et Rostov, énumère Alexandre Kots, journaliste russe spécialiste des questions militaires, sur Telegram.

"Ce n'est rien!" 

L'une de ces attaques, à la mi-août, a touché la raffinerie de Syzran, dans la région de Samara, selon l'état-major ukrainien. Le complexe se trouve à plus de 800 km de la frontière ukrainienne. Il est présenté par Kiev comme le "plus important du système Rosneft", géant russe des hydrocarbures.

Moscou n'a pas quantifié l'impact de ces frappes, mais dans le journal Kommersant, l'analyste Maxime Diatchenko parle d'une baisse de la production "de près de 10%" depuis le début de l'année.

"C'est rien!", assure Alexandre, un homme d'affaires moscovite, après avoir rempli le réservoir de sa berline allemande. "Une frappe, deux frappes, trois frappes, ça n'est rien pour le marché en général ou pour les prix".

"Le pays a besoin d'argent. L'augmentation du prix de l'essence, c'est une façon d'augmenter le revenu de l'Etat", estime de son côté Vladimir, un Moscovite de 50 ans.

Pour tenter de stabiliser la situation, Moscou a prolongé une interdiction d'"exporter de l’essence pour les automobiles" jusque fin octobre.

La Russie reste par ailleurs un exportateur majeur de pétrole brut, des exportations que les Occidentaux entendent étouffer pour tarir une des principales sources de financement de l'offensive russe en Ukraine, pays qui compte l'Union européenne comme principale alliée.