Le Nagorny Karabakh se vide de ses habitants arméniens

Des réfugiés arméniens attendent sur une place du centre ville de Goris le 29 septembre 2023 avant d'être évacués dans plusieurs villes arméniennes, alors que l'exode de l'enclave arménienne du Haut-Karabakh après sa chute aux mains des forces azerbaïdjanaises se poursuit sans relâche. (Photo Alain Jocard AFP)
Des réfugiés arméniens attendent sur une place du centre ville de Goris le 29 septembre 2023 avant d'être évacués dans plusieurs villes arméniennes, alors que l'exode de l'enclave arménienne du Haut-Karabakh après sa chute aux mains des forces azerbaïdjanaises se poursuit sans relâche. (Photo Alain Jocard AFP)
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Publié le Samedi 30 septembre 2023

Le Nagorny Karabakh se vide de ses habitants arméniens

  • L'ONU a annoncé l'envoi ce week-end d'une mission au Nagorny Karabakh pour évaluer principalement les besoins humanitaires, alors que l'organisation n'avait pas eu accès à cette région «depuis environ 30 ans»
  • Dans leur fuite sur l'unique route montagneuse reliant le territoire à l'Arménie, au moins 170 personnes ont par ailleurs péri dans l'explosion lundi d'un dépôt de carburant

EREVAN, Arménie : L'enclave du Nagorny Karabakh s'était quasiment vidée de ses habitants arméniens vendredi soir, au lendemain de l'annonce de la spectaculaire dissolution de la république séparatiste autoproclamée et malgré les appels de l'Azerbaïdjan à rester.

L'ONU a annoncé l'envoi ce week-end d'une mission au Nagorny Karabakh pour évaluer principalement les besoins humanitaires, alors que l'organisation n'avait pas eu accès à cette région «depuis environ 30 ans».

«Le gouvernement d'Azerbaïdjan et l'ONU se sont mis d'accord sur une mission dans la région. La mission aura lieu ce week-end», a déclaré le porte-parole de l'ONU Stéphane Dujarric.

Dans leur fuite sur l'unique route montagneuse reliant le territoire à l'Arménie, au moins 170 personnes ont par ailleurs péri dans l'explosion lundi d'un dépôt de carburant, selon un nouveau bilan communiqué par la police des forces séparatistes.

«Les restes des corps de 170 personnes ont été retrouvés à ce jour», a-t-elle indiqué. Ils seront envoyés en Arménie pour identification.

De nombreux automobilistes avaient fait une halte dans cette station située en périphérie de la «capitale» Stepanakert, l'une des rares encore en service.

L'accident a aussi fait 349 blessés, la plupart souffrant de graves brûlures.

Samvel Hambardsioumian est l'un d'entre eux: pris en charge dans la ville arménienne frontalière de Goris, il se repose sous une tente de la Croix-Rouge. Son visage est partiellement brûlé et ses deux mains sont entourées d'épais bandages.

Il était parti à pied chercher de l'essence quand le souffle de l'explosion l'a jeté à terre.

«Il y avait neuf personnes devant moi dans la queue. Si elles n'avaient pas été là, j'aurais été carbonisé», confie à l'AFP l'homme de 61 ans, père de neuf enfants. «Personne ne sait exactement ce qui s'est passé, certains disent que quelqu'un a allumé un feu, d'autres qu'une grenade a été jetée».

Au total, près de 600 morts sont à déplorer dans le sillage de l'offensive militaire victorieuse de Bakou, qui a conduit les séparatistes à capituler le 20 septembre.

Les combats eux-mêmes ont tué environ 200 soldats dans chaque camp.

- Souvenirs et livres brûlés -

L'enclave a décrété jeudi la dissolution «de toutes les institutions gouvernementales (...) au 1er janvier 2024», signant la fin de l'existence de «la République du Nagorny Karabakh» autoproclamée il y a plus de 30 ans.

En quelques jours, environ 99.000 personnes, soit plus de 80% des 120.000 habitants officiels du territoire, ont quitté leur foyer, selon le dernier décompte d'Erevan cité par l'agence russe Interfax.

La population redoute en effet des représailles: cette région à majorité chrétienne, qui avait fait sécession de l'Azerbaïdjan à majorité musulmane à la désintégration de l'URSS, s'est opposée pendant plus de trois décennies à Bakou, notamment lors de deux guerres entre 1988 et 1994 et à l'automne 2020.

Parmi les réfugiés rencontrés par l'AFP à Goris, tous racontent la terreur face à l'arrivée des soldats ennemis.

Et la plupart, dans cette région ultra-militarisée où tous les hommes ont l'expérience de l'armée et du combat, disent avoir brûlé leurs uniformes, documents militaires, et parfois beaucoup plus.

«Les photos de famille, nos souvenirs, les livres d'histoire de nos héros. Il est hors de question que les Azerbaïdjanais les souillent», dit une jeune fille, Larissa.

- Impossible cohabitation -

«Personne ne croit en la possibilité de cohabitation des deux communautés. Ni les Arméniens, ni les Azéris ne sont préparés à cette option», estime Bayram Balci, chercheur à Sciences Po en France.

Si ce flux ininterrompu a ravivé les craintes d'un «nettoyage ethnique», il souligne que les Arméniens du Nagorny Karabakh «sont partis d'eux-mêmes». «Je trouve cela beaucoup plus inquiétant» que si on les avait chassés, ajoute-t-il, estimant que seuls «5 à 10.000 habitants vont peut-être demeurer» sur place.

La peur des habitants est nourrie selon Erevan par une série d'«arrestations illégales» au sein des colonnes de civils, bien que les autorités azerbaïdjanaises se soient engagées à permettre aux rebelles qui rendraient leurs armes de partir.

Les services de sécurité de l'Azerbaïdjan ont annoncé vendredi le placement en détention d'un général arménien, Davit Manoukian, accusé de «terrorisme» au Nagorny Karabakh.

«Quand le gouvernement dit qu'il va bien traiter les Arméniens, c'est totalement faux», lâche l'avocate Zhala Bayramova, fille d'une figure de l'opposition emprisonnée, alors que le président azerbaïdjanais Ilham Aliev s'est encore engagé vendredi à garantir leurs droits.

Dans une Arménie débordée par les exilés, gronde désormais la colère. Les opposants au Premier ministre Nikol Pachinian, accusé de passivité face à la victoire éclair de Bakou, ont prévu d'organiser un rassemblement samedi après avoir mis en sourdine ces derniers jours leurs critiques.

Erevan rejette la faute sur la Russie, une alliée traditionnelle censé garantir depuis 2020 le plein respect du cessez-le-feu et qui n'est pas intervenue.

Moscou doit maintenant discuter avec l'Azerbaïdjan de l'avenir de sa mission de maintien de la paix, devenue obsolète.


HRW exhorte le Royaume-Uni à abandonner son recours contre le mandat d'arrêt de la CPI visant Netanyahu

Rishi Sunak, ex-Premier ministre britannique, avait contesté cette année les mandats d'arrêt émis par la Cour contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le ministre de la Défense Yoav Gallant. (AP)
Rishi Sunak, ex-Premier ministre britannique, avait contesté cette année les mandats d'arrêt émis par la Cour contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le ministre de la Défense Yoav Gallant. (AP)
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  • La directrice britannique de l'organisation juge "absolument crucial" que le nouveau gouvernement "honore ses engagements"
  • La CPI cherche à arrêter le Premier ministre et le ministre de la Défense israéliens

LONDRES: Human Rights Watch (HRW) appelle le nouveau gouvernement britannique à renoncer au recours juridique du pays contre les mandats d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) visant des dirigeants israéliens.

L'ancien Premier ministre Rishi Sunak avait contesté plus tôt cette année l'émission par la Cour de mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le ministre de la Défense Yoav Gallant.

Selon The Guardian, Karim Khan, procureur en chef de la CPI, a déclaré qu'il existait des motifs crédibles pour tenir les deux dirigeants responsables de crimes contre l'humanité.

Yasmine Ahmed, directrice de HRW au Royaume-Uni, insiste sur l'importance "cruciale" pour le nouveau Premier ministre Keir Starmer de retirer le recours contre la CPI.

Il y a deux semaines, The Guardian annonçait que le nouveau gouvernement envisageait d'abandonner l'affaire. 

Des diplomates britanniques ont ensuite démenti ces rumeurs, affirmant que la décision était "toujours à l'étude".

Le gouvernement a jusqu'au 26 juillet pour décider de la poursuite ou non du recours, selon les règles de la CPI.

Ahmed a déclaré que le gouvernement travailliste devait adopter un "réalisme progressiste", concept proposé par le nouveau ministre des Affaires étrangères David Lammy.

Elle s'interroge: "Le gouvernement britannique sera-t-il assez mûr pour respecter ses propres déclarations sur le droit international et l'ordre mondial en retirant sa demande d'intervention dans l'affaire de la CPI? Nous verrons si les actes suivront les paroles."
"Le monde auquel ils font face est d'une complexité inouïe. Nous assistons à des crises d'une ampleur sans précédent depuis des décennies", ajoute-t-elle.

Ahmed salue la décision du Labour de reprendre le financement britannique de l'UNRWA, l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens.

Cette décision laisse les États-Unis seuls à ne pas avoir repris le financement de l'UNRWA après le boycott controversé de l'agence plus tôt cette année.

"Nous ne pouvons pas promouvoir un ordre international fondé sur des règles si nous ne l'appliquons pas nous-mêmes", conclut Ahmed. "Nous devons donner au (gouvernement) l'opportunité d'être à la hauteur de sa rhétorique."


Gaza: Kamala Harris promet de ne pas «  rester silencieuse  » après sa rencontre avec Netanyahu

Loin des habitudes du président sortant Joe Biden, qui privilégie avec Israël les pressions en coulisses, la vice-présidente a déclaré, après avoir rencontré M. Netanyahu, qu'il était temps de mettre un terme à la guerre "dévastatrice". (AFP)
Loin des habitudes du président sortant Joe Biden, qui privilégie avec Israël les pressions en coulisses, la vice-présidente a déclaré, après avoir rencontré M. Netanyahu, qu'il était temps de mettre un terme à la guerre "dévastatrice". (AFP)
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  • "Ce qui s'est passé à Gaza au cours des neuf derniers mois est dévastateur"
  • L'ex-sénatrice, âgée de 59 ans et engagée dans la course à la Maison Blanche après le retrait de Joe Biden le week-end dernier, a expliqué avoir insisté auprès de M. Netanyahu sur la situation désastreuse lors de cette rencontre "franche"

WASHINGTON: Kamala Harris a donné jeudi le signal d'un possible changement majeur dans la politique américaine à l'égard de Gaza, promettant de ne pas rester "silencieuse" face aux souffrances des civils et insistant sur la nécessité de conclure un accord de paix sans tarder.

Loin des habitudes du président sortant Joe Biden, qui privilégie avec Israël les pressions en coulisses, la vice-présidente a déclaré, après avoir rencontré M. Netanyahu, qu'il était temps de mettre un terme à la guerre "dévastatrice".

"Ce qui s'est passé à Gaza au cours des neuf derniers mois est dévastateur", a-t-elle déclaré, évoquant les "enfants morts" et les "personnes désespérées et affamées fuyant pour se mettre à l'abri".

"Nous ne pouvons pas détourner le regard de ces tragédies. Nous ne pouvons pas nous permettre de devenir insensibles à la souffrance et je ne resterai pas silencieuse", a-t-elle ajouté devant la presse.

L'ex-sénatrice, âgée de 59 ans et engagée dans la course à la Maison Blanche après le retrait de Joe Biden le week-end dernier, a expliqué avoir insisté auprès de M. Netanyahu sur la situation désastreuse lors de cette rencontre "franche".

Elle lui a demandé de conclure un accord de cessez-le-feu et de libération des otages avec le Hamas afin de mettre fin à la guerre déclenchée par l'attaque du mouvement palestinien contre Israël le 7 octobre.

"Comme je viens de le dire au Premier ministre Netanyahu, il est temps de conclure cet accord", a-t-elle déclaré.

Mme Harris a également appelé à la création d'un Etat palestinien, à laquelle s'oppose le Premier ministre israélien.

Un discours qui tranche avec l'image de grande cordialité affichée par Joe Biden et Benjamin Netanyahu plus tôt dans la journée, même si les deux hommes entretiennent des relations notoirement compliquées.

Le président américain a d'ailleurs lui aussi appelé Benjamin Netanyahu à "finaliser" l'accord de cessez-le-feu pour permettre de "ramener les otages chez eux" et de "mettre durablement un terme à la guerre", selon un compte-rendu de leur rencontre diffusé par la Maison Blanche.

Rencontre avec Trump

Pour la fin de son voyage outre-Atlantique, M. Netanyahu se rendra vendredi en Floride, à l'invitation de Donald Trump qu'il a longuement remercié dans son discours devant les élus à Washington.

Jeudi matin, l'ancien président républicain a exhorté Israël à "terminer" rapidement sa guerre à Gaza, avertissant que son image mondiale était en train de se ternir.

"Il faut en finir rapidement. Cela ne peut plus durer. C'est trop long", a-t-il déclaré à Fox News.

Pendant sa longue adresse devant le Congrès, les républicains ont fortement applaudi M. Netanyahu, alors que plus de 60 élus démocrates, dont l'ancienne "speaker" Nancy Pelosi, ont boycotté son discours.

Ils condamnent sa conduite de la guerre qui s'est traduite par des dizaines de milliers de morts palestiniens et une catastrophe humanitaire.

Devant la Maison Blanche, des manifestants se sont rassemblés jeudi pour protester contre la venue du dirigeant israélien. La veille, des milliers de personnes étaient descendues dans les rues de la capitale américaine.

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien, qui a entraîné la mort de 1.197 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Sur 251 personnes enlevées durant l'attaque, 111 sont toujours retenues à Gaza, dont 39 sont mortes, selon l'armée.

En riposte, Israël a promis de détruire le mouvement islamiste palestinien, au pouvoir à Gaza depuis 2007 et qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne. Son armée a lancé une offensive qui a fait jusqu'à présent 39.175 morts, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza, dirigé par le Hamas, qui ne donne aucune indication sur le nombre de civils et de combattants morts.


Biden dit à Netanyahu qu'un cessez-le-feu est nécessaire «  rapidement  »

C'est en plein tumulte politique que le Premier ministre israélien a posé le pied aux Etats-Unis, seulement quatre jours après l'annonce fracassante du retrait de M. Biden, 81 ans, de la campagne pour l'élection présidentielle de novembre. (AFP).
C'est en plein tumulte politique que le Premier ministre israélien a posé le pied aux Etats-Unis, seulement quatre jours après l'annonce fracassante du retrait de M. Biden, 81 ans, de la campagne pour l'élection présidentielle de novembre. (AFP).
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  • Peu après leur rencontre, la Maison-Blanche a fait savoir que Joe Biden avait appelé jeudi le Premier ministre israélien  à "finaliser" l'accord en vue d'un cessez-le-feu à Gaza
  • Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a dit jeudi se réjouir de travailler avec le président américain Joe Biden "dans les mois qui viennent", pour la fin du mandat de ce dernier

WASHINGTON: Le président américain Joe Biden a prévu de dire jeudi au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu qu'un cessez-le-feu à Gaza est nécessaire "rapidement", a indiqué un porte-parole de la Maison Blanche.

"Le président réaffirmera au Premier ministre Netanyahu qu'il pense que nous devons parvenir (à un accord) et que nous devons y parvenir rapidement", a expliqué John Kirby, porte-parole du Conseil américain de sécurité nationale, lors d'un point de presse. "Il est temps" a-t-il ajouté, au 10e mois de la guerre dans la bande de Gaza.

Peu après leur rencontre, la Maison-Blanche a fait savoir que Joe Biden avait appelé jeudi le Premier ministre israélien  à "finaliser" l'accord en vue d'un cessez-le-feu à Gaza.

"Le président Biden a exprimé la nécessité de combler les lacunes restantes, de finaliser l'accord dès que possible, de ramener les otages chez eux et de mettre durablement un terme à la guerre à Gaza", est-il  précisé dans le compte-rendu de leur rencontre.

Netanyahu affirme se réjouir de travailler avec Biden 

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a dit jeudi se réjouir de travailler avec le président américain Joe Biden "dans les mois qui viennent", pour la fin du mandat de ce dernier.

"Je tiens à vous remercier pour ces 50 années de service public et de soutien à l'Etat d'Israël et je me réjouis de discuter avec vous aujourd'hui et de travailler avec vous dans les mois qui viennent", a déclaré le dirigeant en arrivant à la Maison Blanche.