Primes et déprime: à l'hôpital, une année à bout de souffle

Les agents de santé manifestent le 15 décembre 2020 devant l'hôpital de Nantes pour demander de meilleures conditions salariales et des allocations de retraite dues à l'insuffisance du personnel dans les hôpitaux français (Photo, AFP).
Les agents de santé manifestent le 15 décembre 2020 devant l'hôpital de Nantes pour demander de meilleures conditions salariales et des allocations de retraite dues à l'insuffisance du personnel dans les hôpitaux français (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 28 décembre 2020

Primes et déprime: à l'hôpital, une année à bout de souffle

  • La colère des soignants se réveille : des rassemblements fleurissent en plein état d'urgence, où l'on réclame «du fric pour l'hôpital public»
  • L'absence de prise en charge des autres maladies fait planer la menace d'une bombe sanitaire à retardement, tandis que les réformes de fond se font attendre

PARIS: De manifestations en vagues épidémiques, l'hôpital a été mis à rude épreuve en 2020 et, malgré les applaudissements et les hausses de salaires, ses «héros en blouses blanches» finissent l'année lessivés et désabusés.

Avant la Covid, il y avait la rage. Une révolte des soignants, que deux plans gouvernementaux n'avaient pas pu endiguer. Quelque temps éclipsée par la bataille des retraites, cette crise sans fin est revenue dans la lumière au début de l'année 2020 à la faveur d'un coup d'éclat : la démission, comme un seul homme, d'un millier de médecins chefs de service.

Onze mois après le début de la grève des urgences, la mobilisation est toujours là : le 14 février, pour la Saint-Valentin, ils sont plusieurs milliers à défiler partout en France, «le cœur brisé». Deux jours plus tard, Agnès Buzyn plaque le ministère de la Santé. La rupture était de toute façon consommée.

Son successeur, Olivier Véran, promet une «enquête nationale» sur «les raisons de (ce) mal-être». Maigre gage de la part de celui qui prophétisait quelques mois plus tôt : «Quand l'hôpital sort de son lit, c'est difficile de l'y remettre».

Mais soudain, tout s'arrête. Le coronavirus monopolise les forces. «Armement» de lits de réanimation supplémentaires, déprogrammation d'opérations, annulation de congés, appel aux volontaires... Le 8 avril, les services de réanimation comptent près de 7 200 patients atteints de la Covid-19.

Le pire et le meilleur

La «vague» révèle le pire : vols de masques, pénuries de blouses (parfois remplacées par des sacs poubelle), manque de respirateurs, d'anesthésiants et, surtout, de bras et de lits (100 000 ont été fermés en 20 ans).

Paradoxalement, cette première vague laisse aussi entrevoir le meilleur : l'argent ne semble plus une contrainte et l'administration hospitalière se met au service de la médecine.

«En période Covid, on est main dans la main avec la direction de l'hôpital. On voit arriver du personnel, on est tous efficace pour faire du soin de qualité», témoigne la diabétologue Agnès Hartemann, figure du Collectif Inter-Hôpitaux (CIH).

Une parenthèse à la fois douloureuse et enchantée, rythmée chaque soir par les applaudissements d'un peuple confiné. Ce soutien de la rue se transforme rapidement en promesse : celle d'un «plan massif d'investissement et de revalorisation», annoncé fin mars par le président Emmanuel Macron.

Après des années de restrictions budgétaires et des semaines sous l'essoreuse Covid, les attentes sont stratosphériques, le moindre faux pas ravive les plaies. Comme la «prime Covid» dont le montant varie du simple au triple. Ou la «médaille de l'engagement» que l'Elysée a vite renoncé à rétablir.

Forcé de faire mieux, le ministre Véran lance un «Ségur de la santé» censé aboutir «vite et fort». La colère des soignants se réveille : des rassemblements fleurissent en plein état d'urgence, où l'on réclame «du fric pour l'hôpital public».

Bombe à retardement

A la mi-juin, la pression monte encore d'un cran : des manifestations, les premières dans le pays depuis plus de trois mois, rassemblent des dizaines de milliers de soignants.

Les négociations s'accélèrent, le gouvernement met 6, 7 puis 8 milliards d'euros sur la table. Un accord est conclu à l'arraché avec une majorité de syndicats la veille du 14 juillet. Fraîchement nommé à Matignon, Jean Castex salue ce «moment historique».

Mais septembre voit poindre l'impatience de ceux qui attendent leur augmentation et la grogne de ceux qui n'y ont pas droit. Entre deux journées d'action pour ces «oubliés du Ségur», le Premier ministre décide mi-octobre de hâter le calendrier des hausses de salaires.

Sur le terrain, l'heure est à «la déception post-Ségur» car «le choc d'attractivité n'a pas eu lieu», affirme le cardiologue Olivier Milleron, porte-parole du CIH.

A l'automne, la deuxième «vague» frappe un hôpital sur les rotules, où la Covid a tué 40 000 personnes en neuf mois (58 000 en comptant les Ehpad).

L'absence de prise en charge des autres maladies fait planer la menace d'une bombe sanitaire à retardement, tandis que les réformes de fond (financement, gouvernance, organisation territoriale des soins) se font attendre.

«Force est de constater que ces sujets n'ont pas bougé», regrette le président de la Fédération hospitalière de France, Frédéric Valletoux, qui croit néanmoins que «2021 peut encore être une année utile pour poser les bases d'un système de santé totalement repensé».


Rassemblement à Paris en mémoire d'Aboubakar Cissé et contre l'islamophobie

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
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  • "Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deu
  • Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion

PARIS: Au moins un millier de personnes se sont rassemblées à Paris pour rendre hommage à Aboubakar Cissé, un musulman tué la semaine dernière dans une mosquée du Gard, et dénoncer l'"islamophobie", a constaté une journaliste de l'AFP.

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré.

"Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deux poids deux mesures", commente Yasmina, 52 ans, fonctionnaire, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

"On arrive encore à dire que ce n'était pas un musulman qui était visé mais on ne va pas se mentir il n'y a que les musulmans en France qui fréquentent les mosquées. À un moment il faut poser les mots comme on le fait à juste titre contre l'antisémitisme, et appeler ça de l'islamophobie", a souligné Myriam, 30 ans, assistante dentaire, qui n'a pas souhaité non plus donner son nom.

Aboubakar Cissé, un jeune Malien, a été lardé de plusieurs dizaines de coups de couteau dans la mosquée de la petite commune gardoise de La Grand-Combe, où il était venu tôt comme chaque semaine pour faire le ménage, avant la prière du vendredi.

Son assassin, un Français d'origine bosnienne de 21 ans, s'est rendu à la police italienne.

Dans la vidéo qu'il avait lui-même réalisée juste après son meurtre, le suspect a insulté la religion de sa victime.

Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion.

Outre une marche blanche à La Grand-Combe, un rassemblement en mémoire de la victime et contre l'islamophobie a déjà été organisé dimanche à Paris et une manifestation s'est déroulée mardi à Lyon.


Un 1er-Mai syndical qui se veut «festif et combatif», mais sans unité large

Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
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  • A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation
  • Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien

PARIS: Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large.

Pour la journée internationale des travailleurs, la CGT a recensé quelque 260 rassemblements en France. La centrale de Montreuil a appelé avec la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse (Union étudiante, Unef, Fage, USL) à défiler "contre l'extrême droite, pour la paix, les libertés et la justice sociale".

Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien.

A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation.

D'autres cortèges s'élanceront dès le matin, comme Marseille et Lille à 10h30. Ce sera aussi le cas dès 10 heures à Bordeaux, Strasbourg ou Dunkerque, où des responsables de gauche, comme Marine Tondelier (Ecologistes), François Ruffin (ex-LFI) ou Boris Vallaud (PS) sont attendus pour protester contre le plan du sidérurgiste ArcelorMittal prévoyant la suppression d'environ 600 postes.

La numéro un de la CFDT Marylise Léon et son homologue de l'Unsa Laurent Escure se retrouvent, eux, dans la matinée dans le centre de Paris pour un rassemblement et une table ronde sur le travail.

Cent jours après l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, la CGT, la FSU et Solidaires veulent aussi faire de cette journée un temps fort "contre la trumpisation du monde et l'internationale réactionnaire qui se développe partout", a expliqué à l'AFP Thomas Vacheron, cadre de la CGT.

Des syndicats internationaux (américain, belge, argentin, notamment) ont été conviés au défilé parisien. "Cette démarche unitaire et internationale est un petit pas" pour lutter contre des politiques qui menacent les travailleurs (hausse des droits de douane ou expulsions massives des travailleurs clandestins), selon Murielle Guilbert (Solidaires).

"Le sang et les larmes"

Cette année encore, de source policière, la présence de militants de l'ultra-gauche est jugée très probable à Paris, Nantes ou Lyon, entre autres.

De même source, dans la capitale où un peu plus de 2.000 membres des forces de l'ordre sont attendus, la décision du gouvernement de dissoudre le groupe antifasciste "La Jeune garde" et le collectif "Urgence Palestine" pourrait tendre le climat.

"On ne tolèrera rien", a averti mercredi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

"Il faut relativiser" cette présence de "black blocs" face aux "centaines de milliers de manifestantes et de manifestants" attendues, a nuancé Sophie Binet mercredi, dénonçant des "stratégies malheureusement classiques (...) pour décrédibiliser la mobilisation sociale".

En 2023, les huit principaux syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) avaient défilé ensemble contre la réforme des retraites, du jamais vu depuis près de 15 ans, avec une très forte mobilisation à la clé (entre 800.000, selon les autorités et 2,3 millions, selon la CGT).

L'an dernier, les chiffres étaient revenus dans des fourchettes plus ordinaires: entre 121.000 personnes, selon les autorités, et 210.000, selon la CGT; et jeudi, la mobilisation devrait attirer sensiblement le même nombre de manifestants (100.000 à 150.000 de source policière).

Ce rendez-vous traditionnel se tient au moment où les syndicats craignent que le gouvernement apporte son soutien à des propositions de loi visant à autoriser certaines professions à faire travailler les salariés le 1er-Mai - seul jour férié et chômé en France -, une journée acquise "dans le sang et dans les larmes des ouvriers", rappelle Sophie Binet.

Le syndicat des "Gilets jaunes" a par ailleurs appelé ses sympathisants à mener une opération secrète sur différents points de rassemblement. "On va montrer aux partenaires du pouvoir ce qu’est un VRAI syndicat", ont-ils écrit dans un appel posté sur le réseau social X.


Macron et von der Leyen inciteront lundi les chercheurs étrangers à choisir l'Europe

Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques »
  • « Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

PARIS : À Paris, le président Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen participeront lundi à une conférence pour vanter les mérites de l'Europe auprès des chercheurs étrangers, notamment américains, confrontés à « un certain nombre de menaces », a annoncé l'Élysée mercredi.

Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques », ont affirmé ses services à la presse.

Le message de cette rencontre sera « très clair » : « Choose Science, Choose Europe ».

Selon son entourage, il s'agit de dire, « dans un moment où les libertés académiques connaissent un certain nombre de reculs ou de menaces, que l'Europe est un continent attractif et que l'innovation, l'attractivité, la science et la recherche sont des éléments essentiels pour la croissance européenne ».

Le chef de l'État aura à cette occasion un entretien avec la présidente de la Commission européenne, qui participera à la conférence. 

Le 18 avril, Emmanuel Macron avait donné rendez-vous le 5 mai aux chercheurs « du monde entier ». Sur le réseau X, il les avait invités à « choisir la France et l'Europe », dans une tentative d'attirer les chercheurs américains menacés par la politique de Donald Trump.

« Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

Parallèlement, le gouvernement a lancé une plateforme baptisée « Choose France for Science », présentée comme « une première étape pour préparer l'accueil des chercheurs internationaux ».

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, chercheurs et universités sont dans le collimateur de son gouvernement et redoutent pour leur avenir, entre libertés académiques et de recherche menacées et financements réduits.

De plus en plus de chercheurs ou d'aspirants chercheurs réfléchissent donc à quitter le pays, considéré jusqu'ici comme le paradis de la recherche dans nombre de domaines.

En France, dès début mars, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a demandé aux universités de réfléchir à des moyens de les accueillir.