Uniforme à l'école: la gauche n'endosse pas l'habit

Deux élèves en uniforme scolaire posent encadrés par deux de leurs professeurs vêtus de toges de maîtres, le 24 août 2004 dans l'enceinte du Collège international catholique de Chavagnes-en-Paillers. (Photo Frank Perry AFP)
Deux élèves en uniforme scolaire posent encadrés par deux de leurs professeurs vêtus de toges de maîtres, le 24 août 2004 dans l'enceinte du Collège international catholique de Chavagnes-en-Paillers. (Photo Frank Perry AFP)
Short Url
Publié le Samedi 16 décembre 2023

Uniforme à l'école: la gauche n'endosse pas l'habit

  • La réticence de la gauche cache davantage la dénonciation d'un gouvernement impuissant à lutter contre les inégalités qu'une position purement idéologique
  • Emmanuel Macron est «un néolibéral dont la seule réponse ne peut être qu'autoritariste parce que le modèle ne fonctionne pas, le modèle ne réduit pas les inégalités », s'agace le maire Écologistes de Grenoble, Éric Piolle

PARIS  : La gauche boude l'uniforme ? Objet d'une expérimentation, la tenue vestimentaire unique n'a attiré qu'une minorité des collectivités de ce bord politique. Une réticence qui cache davantage la dénonciation d'un gouvernement impuissant à lutter contre les inégalités qu'une position purement idéologique.

Thème rebattu, l'uniforme à l'école «est un sujet sur lequel tout le monde va se mettre sur la gueule à Noël», s'enorgueillit un conseiller ministériel au moment du lancement de l'expérimentation.

En l'annonçant, le ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal s'est dit «intéressé de voir ce qu'une expérimentation de grande ampleur donnerait comme résultats en matière de climat scolaire, en matière d'élévation du niveau de nos élèves» ou d'impact «sur l'autorité à l'école, le harcèlement scolaire, les questions de laïcité».

L'idée de l'uniforme à l'école a séduit pour l'instant des collectivités de droite (Metz, Puteaux, Alpes-Maritimes, Auvergne-Rhône-Alpes), Horizons (Nice, Reims) et du Rassemblement national (Perpignan).

Municipalité socialiste, la ville de Denain fait figure d'exception: les conseils de deux écoles y ont voté en faveur de l'adoption d'une tenue commune à tous les élèves.

«Si certaines communautés éducatives étaient convaincues que ça peut créer de la cohésion dans la communauté scolaire, pourquoi pas?», assure à l'AFP le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (PS). «Je n'ai pas d'hostilité idéologique», mais «en quoi l'uniforme va faire qu'à la rentrée j'aurai plus d'enseignants qui passent le concours dans l'académie de Créteil?».

Un argument repris par la présidente socialiste de la région Occitanie, Carole Delga, pour qui «la première inégalité sociale est celle de l'accès à la connaissance». «La différence de marque sur un tee-shirt n'est qu'un faible reflet extérieur», remarque-t-elle auprès de l'AFP, convaincue que fournir gratuitement un ordinateur à chaque élève, ça, «ça lutte en actes contre le déterminisme social».

«C'est l'uniforme qui cache la forêt», abonde son collègue francilien, furieux de la «communication en grande pompe» du gouvernement autour de cette mesure «cosmétique».

- Laïcité, décence -

Emmanuel Macron est «un néolibéral dont la seule réponse ne peut être qu'autoritariste parce que le modèle ne fonctionne pas, le modèle ne réduit pas les inégalités (...)», s'agace le maire Écologistes de Grenoble, Éric Piolle. «Ca ne supprime rien en terme de tension».

«Masquer les inégalités, en pratique, est-ce que ça annule les inégalités? Non», tranche l'élu.

Mesure «démagogique» pour Manuel Bompard (LFI) qui avait critiqué «la police du vêtement» selon lui exercée par le gouvernement quand il a interdit le port de l'abaya dans les établissements scolaires.

C'est pourtant un aspect assumé par le chef de l'État Emmanuel Macron lorsqu'il a annoncé à la rentrée l'expérimentation: une tenue unique «règle beaucoup de sujets (...) 1/ la laïcité et 2/ un peu l'idée qu'on se fait de la décence, c'est-à-dire on ne veut pas des tenues trop excentriques».

En défendant une proposition de loi rendant l'uniforme obligatoire, Marine Le Pen n'avait pas dit autre chose: cela réglerait «la compétition des marques et la pression des islamistes sur les enfants qui vont à l'école».

Éric Piolle et Stéphane Troussel rappellent que les conflits autour des vêtements religieux sont extrêmement minoritaires. «Mettre un uniforme à 12 millions d'élèves pour quelques centaines de problèmes, cela serait un bien aberrant usage de l'argent public», cingle le maire de Grenoble.

L'Assemblée a rejeté le 12 janvier le texte du RN qui avait néanmoins obtenu le soutien de LR.

Reste que selon une étude de 2020, les Français sont majoritairement (63%) favorables à l'uniforme à l'école, rappelle Christelle Craplet, directrice opinion chez BVA, mais ils «ne pensent pas forcément à l'aspect religieux».

Sachant que même les 18-25 ans y sont favorables (64% dans une étude BVA pour la fondation Jean-Jaurès en 2023), elle suggère «que l'uniforme pourrait apparaître comme une forme de répit pour eux dans cette injonction de la société, des réseaux, à être tendance».

Une «pression» sur les élèves qui a selon elle «considérablement augmenté» ces dernières années, et qui «ne passe pas forcément par la marque» mais par quelque chose «d'un peu moins défini». Et elle cite également le problème des chaussures, non comprises dans le trousseau proposé aux collectivités, mais «un marqueur fort» chez les adolescents, surtout les garçons.


Présidentielle: Le Pen «annoncera sa décision» après son procès en appel, sans attendre la cassation

Short Url
  • Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été
  • Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi

PARIS: Candidate déclarée à la prochaine présidentielle malgré son inéligibilité, Marine Le Pen affirme qu'elle ne se présentera "évidemment pas" si sa peine est confirmée en appel et qu'elle "annoncera donc (sa) décision" dans la foulée, sans attendre une éventuelle cassation.

Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été. Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi.

Condamnée en première instance - dans l'affaire des assistants parlementaires européens - à une peine d'inéligibilité de cinq ans avec application immédiate, la triple candidate à l'élection présidentielle admet qu'elle ne pourra "évidemment pas" se représenter une quatrième fois si cette peine devait être confirmée en appel.

"Je prendrai ma décision de me présenter ou non lors du rendu de l'arrêt de la cour d'appel", ajoute-t-elle, évacuant l'hypothèse d'un suspense prolongé en cas de pourvoi en cassation. "On ne sait pas quand une telle décision serait rendue et on ne peut pas se lancer dans une campagne présidentielle au dernier moment", explique-t-elle.

Son second procès étant programmé du 13 janvier au 12 février 2026, avec un délibéré attendu quatre mois plus tard, "j'annoncerai donc ma décision cet été", précise celle qui s'était hissée au second tour en 2017 et en 2022 face à Emmanuel Macron.

Un calendrier choisi aussi "pour ne pas hypothéquer la candidature de Jordan Bardella dans le cas où il devrait y aller", souligne-t-elle, confirmant ainsi le statut de dauphin du jeune président du parti à la flamme.


Macron au Brésil, pour évoquer une "relation transatlantique réimaginée"

Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Emmanuel Macron est arrivé à Salvador de Bahia pour promouvoir une « relation transatlantique réimaginée » entre l’Amérique du Sud, l’Afrique et la France, à travers la culture, la mémoire et la jeunesse
  • Cette visite s’inscrit dans une refondation des liens franco-africains, marquée par la reconnaissance de l’esclavage, la restitution d’objets coloniaux et la préparation du sommet Afrique–France à Nairobi en 2026

SALVADOR: Emmanuel Macron est arrivé mercredi à Salvador de Bahia, au Brésil, pour plaider en faveur d'une "relation transatlantique réimaginée" associant Amérique du Sud et Afrique, avant de participer à un sommet climat à Belem, a indiqué l'Elysée.

Le président français doit participer à l'ouverture du festival "Notre futur – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique", qui réunit "les jeunesses et les nouvelles voix des sociétés civiles brésiliennes, africaines et françaises", a expliqué la présidence.

Il s'agit d'un "temps fort de la saison culturelle France-Brésil" qui a scandé l'année 2025.

La capitale de l'Etat de Bahia, dans le nord-est du pays, fut l'un des points d'arrivée majeurs des esclaves africains déportés. Elle est aujourd'hui le foyer vibrant de la culture afro-brésilienne.

Cette étape vise donc "à célébrer et à travailler avec Brasilia à une relation transatlantique réimaginée", associant les "partenaires africains", selon la présidence française.

Emmanuel Macron doit aussi visiter une galerie dédiée au photographe et anthropologue français Pierre Fatumbi Verger (1902-1996), et la Maison du Bénin, où il découvrira l'exposition "Je suis un fleuve noir".

Pour Paris, "cette visite à Bahia s'inscrit dans la politique de refondation et de renouvellement de notre relation avec l'Afrique", au moment où les relations entre la France et ses anciennes colonies africaines sont souvent distendues, voire glaciales comme au Sahel.

La culture est un point fort de cette "refondation", fait-on valoir dans l'entourage du président français, qui a enclenché une démarche de restitution des "objets volés pendant l'époque coloniale".

Autre volet: "la reconnaissance de l'esclavage", qui sera aussi mise en avant à Salvador, point de débarquement "d'un très grand nombre d'esclaves, qui venaient notamment de tout le golfe du Bénin et notamment du port de Cotonou", a fait valoir une conseillère présidentielle.

"Bahia, c'est un point d'étape. On se donne rendez-vous également à Nairobi en mai, pour le nouveau sommet Afrique-France qu'on organise pour la première fois dans un pays anglophone", a souligné l'Elysée.

Jeudi, Emmanuel Macron se rendra à Belem, en Amazonie brésilienne, pour prononcer un discours au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement réunis par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva avant le début de la COP30, conférence de l'ONU sur le climat.

Il terminera sa tournée vendredi à Mexico où il sera accueilli par la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum, un an après sa prise de fonctions.


Premières heures de semi-liberté pour Kohler et Paris à l'ambassade de France à Téhéran

Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
Short Url
  • Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL
  • Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris

PARIS: Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France.

"Je les ai trouvés très heureux, très soulagés tous les deux par cette libération", a raconté mercredi matin sur la radio France Inter l'ambassadeur de France à Téhéran Pierre Cochard, qui est allé les chercher mardi à la sortie de la prison d'Evine, de sinistre réputation.

Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL.

Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris.

A Soultz (Haut-Rhin, est de la France) où a grandi Cécile Kohler, dont le portrait orne la façade de la mairie, les habitants racontaient leur soulagement. "On est impatients qu'elle revienne, on espère que l'Iran ne va pas la retenir", confiait l'un d'eux, Mathieu Taquard.

Mardi soir, les parents ont pu parler par téléphone à leur fille: "Elle disait qu'elle était en forme, et qu'elle avait hâte de revenir", a résumé à l'AFP le maire de Soultz, Marcello Rotolo.

L'ambassadeur a donné quelques éléments sur le déroulé de leur libération.

"On s'est rendus à la prison d'Evine, qui est au nord de Téhéran. L'ambassade se trouve plutôt au centre, donc il y a un trajet important. On s'est présentés, il y avait plusieurs portes à franchir, une barrière. Cela a pris un peu de temps, en coordination avec les autorités iraniennes", a-t-il expliqué. "Les grands portes de la prison d'Evine se sont ouvertes, et on a pu croiser le regard de Cécile et Jacques", qui "avaient été informés à la dernière minute" de leur sortie.

"C'est évidemment un moment qu'on n'oublie pas", a-t-il dit. "Les premiers mots, c'étaient des larmes, des sourires mêlés de larmes. On est restés quelques instants ensemble et puis ensuite on est montés dans la voiture" pour gagner l'abri de l'ambassade, où ils sont protégés par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, en espérant pouvoir quitter rapidement l'Iran.

Iranienne à l'ambassade 

Les autorités iraniennes, qui les accusent d'espionnage, considèrent qu'ils sont en "libération conditionnelle", "libérés sous caution" et "placés sous surveillance jusqu'à la prochaine étape judiciaire".

"Nous n'allons ménager aucun effort pour obtenir leur retour en France dans les meilleurs délais", a promis le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.

Professeure de lettres de 41 ans, et enseignant retraité de 72 ans, Cécile Kohler et Jacques Paris ont été arrêtés le 7 mai 2022, au dernier jour d'un voyage touristique en Iran.

Considérés comme des "otages d'Etat" par la France, qui à l'instar d'autres pays occidentaux accuse Téhéran de capturer des étrangers sur son sol pour négocier ensuite leur libération, ils étaient les deux derniers Français détenus sur le sol iranien.

Lourdement sanctionné par de nombreux membres de la communauté internationale, notamment pour ses activités nucléaires, l'Iran détiendrait selon des sources diplomatiques au moins une vingtaine d'Occidentaux qu'il pourrait utiliser comme levier pour obtenir la libération de certains de ses ressortissants à l'étranger ou obtenir des gages politiques.

Dans le cas de Cécile Kohler et Jacques Paris, Téhéran avait rendu publique en septembre la possibilité d'un accord de libération en échange de Mahdieh Esfandiari, une Iranienne arrêtée en France en février, accusée d'avoir fait la promotion du terrorisme sur les réseaux sociaux.

Téhéran semble afficher sa volonté de mettre en parallèle les deux dossiers, le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi annonçant mercredi matin que Mme Esfandiari, sous contrôle judiciaire depuis octobre dans l'attente de son procès en janvier, se trouvait désormais à l'ambassade d'Iran et "nous espérons qu'elle rentrera quand son procès sera achevé".

Les autorités françaises n'ont pas commenté cette annonce qui pourrait avoir des conséquences sur la date à laquelle les deux Français pourront quitter l'Iran.

L'élargissement de Cécile Kohler et Jacques Paris pourrait ouvrir la voie à un apaisement des relations entre l'Iran et la France. "Lorsqu'ils seront sur le territoire français, effectivement, cela ouvrira une possibilité de renouer des relations normales avec ce pays", a estimé M. Cochard.