Médias: l'Australie dévoile son projet pour faire payer Google et Facebook

Google a annoncé qu'il allait rémunérer plusieurs médias en Allemagne, au Brésil mais aussi en Australie, pour alimenter une nouvelle plateforme d'information. (Kenzo Tribouillard/AFP)
Google a annoncé qu'il allait rémunérer plusieurs médias en Allemagne, au Brésil mais aussi en Australie, pour alimenter une nouvelle plateforme d'information. (Kenzo Tribouillard/AFP)
Short Url
Publié le Vendredi 31 juillet 2020

Médias: l'Australie dévoile son projet pour faire payer Google et Facebook

  • L'initiative australienne est suivie de près à un moment où les médias souffrent dans une économie numérique où les revenus publicitaires sont de plus en plus captés par les grandes firmes de la tech.
  • « L'intervention musclée du gouvernement menace d'entraver l'économie numérique australienne et d'avoir un impact sur les services que nous fournissons aux Australiens », réagit Google

SYDNEY : L'Australie a dévoilé vendredi son projet de loi visant à contraindre Google et Facebook à rémunérer les médias pour leurs contenus, au risque de devoir s'acquitter de lourdes amendes, une des initiatives les plus agressives contre les deux géants de la tech, qui la combattent. Ce "code de conduite contraignant" censé gouverner les relations entre des médias en grandes difficultés financières et les géants qui dominent l'Internet intervient après 18 mois de négociations qui n'ont pas permis de rapprocher les deux camps.

Outre l'obligation de payer en échange des contenus, le code traite de questions comme l'accès aux données des usagers, la transparence des algorithmes et l'ordre d'apparition des contenus dans les flux d'information des plateformes et les résultats de recherches. "C'est rien de moins que l'avenir du paysage médiatique australien qui est en jeu avec ces changements", a déclaré à la presse le ministre australien des Finances Josh Frydenberg, en précisant que le projet de loi serait présenté au parlement dans les prochaines semaines.

Le code s'appliquera à terme à toute plateforme numérique utilisant des contenus provenant des médias australiens, mais il se concentrera dans un premier temps sur Facebook et Google, deux des compagnies les plus riches et les plus puissantes du monde.

Google "profondément déçu"

Google s'est dit "profondément déçu" par le projet. "L'intervention musclée du gouvernement menace d'entraver l'économie numérique australienne et d'avoir un impact sur les services que nous fournissons aux Australiens", a menacé la directrice générale de Google pour l'Australie et la Nouvelle-Zélande, Mel Silva.

La réaction de Facebook a été plus laconique. "Nous étudions la proposition du gouvernement pour comprendre l'impact qu'elle aura sur notre activité, nos services et nos investissements dans l'écosystème médiatique australien", a déclaré Will Easton, directeur général de Facebook dans la région.

L'initiative australienne est suivie de près à travers le monde à un moment où les médias souffrent dans une économie numérique où les revenus publicitaires sont de plus en plus captés par Facebook, Google et d'autres grandes firmes de la tech. La crise des médias a été aggravée par l'effondrement économique provoqué par le coronavirus. En Australie, des dizaines de journaux ont été fermés et des centaines de journalistes licenciés ces derniers mois.

Facebook et Google sont fortement opposés à toute mesure qui les contraindrait à partager les revenus publicitaires. Ils ont laissé entendre que si des paiements obligatoires étaient introduits, ils pourraient simplement boycotter les médias australiens. Mais M. Frydenberg a prévenu que le futur code interdirait toute "discrimination" envers les médias australiens de la part de ces compagnies. "Le projet de loi présenté aujourd'hui va attirer l'attention de nombreuses agences de régulation et de nombreux gouvernements à travers le monde", a prédit le ministre australien en affirmant que le dispositif australien serait une "référence mondiale". Il a précisé que le but n'était "pas de protéger les médias australiens de la concurrence, ou des chamboulements que connaît ce secteur", mais de "créer un terrain de jeu stable pour assurer l'égalité des chances pour les médias australiens".

Pénalités à la clé

"Nous souhaitons que Google et Facebook continuent de fournir aux Australiens leurs services qui sont très appréciés par les Australiens", a aussi avancé M. Frydenberg. "Mais nous voulons qu'ils le fassent à nos conditions, conformément à nos lois, et que ce soit équitable". Google a annoncé le mois dernier qu'il allait rémunérer plusieurs médias en Allemagne, au Brésil mais aussi en Australie, pour alimenter une nouvelle plateforme d'information. Mais beaucoup y ont vu une façon pour le groupe de dicter ses conditions.

Le code, élaboré par le gendarme australien de la concurrence (ACCC), prévoit que les géants d'Internet négocient "de bonne foi" avec les médias pour se mettre d'accord sur une rémunération. Faute d'accord sous trois mois, le dossier serait confié à un arbitrage qui fixerait de façon contraignante le niveau de ces paiements.

Le code prévoit des pénalités de 10 millions de dollars australiens (6 millions d'euros) ou 10% du chiffre d'affaire local du groupe, que l'ACCC a estimé à quatre milliards AUD par an. Les deux groupes avaient rejeté des versions préliminaires de la proposition de paiements obligatoires aux médias, tout en affirmant qu'ils participeraient à un projet collaboratif pour étudier les plaintes des médias.

Les deux groupes ont soutenu que les revenus publicitaires adossés aux contenus d'information représentaient une fraction minime de leurs revenus. Ils affirment au contraire qu'ils contribuent à valoriser les sites australiens d'information en orientant vers eux les internautes.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Short Url
  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
Short Url
  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Short Url
  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.