Israéliens et Palestiniens acculés à vivre ensemble ou à tout perdre

Yael Lerer en train de manifester à Paris pour la cause palestinienne. (Photo fournie).
Yael Lerer en train de manifester à Paris pour la cause palestinienne. (Photo fournie).
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Publié le Lundi 29 janvier 2024

Israéliens et Palestiniens acculés à vivre ensemble ou à tout perdre

  • «Tout de suite, je m’installe devant la télévision pour suivre les événements et, dès le premier instant, je comprends qu’une catastrophe se déroule sous mes yeux»
  • Selon Lerer, sans une position ferme de la part des pays arabes et sans pressions internationales, Israël verra que le feu est au vert

PARIS: Ils sont tous les deux israéliens: Yael Lerer, militante de longue date pour l’égalité et la justice, mais aussi chercheuse et éditrice, et Eyal Sivan, cinéaste et enseignant qui se qualifie de «dissident israélien».

Tous deux connaissent très bien la politique et la société israéliennes. Lerer, née à Tel-Aviv,est aujourd’hui installée à Paris; Sivan, né à Haïfa, est «exilé», selon ses propres mots, à Marseille.

L’un et l’autre agissent depuis des décennies en faveur de la Palestine et du peuple palestinien. Ils ont placé cet engagement au cœur de leur parcours personnel et professionnel.

Lerer a vécu toute sa vie entre deux sociétés. Elle est née en Israël, mais elle est arabisante, elle a milité au sein du parti arabo-israélien Ballad et elle a fondé la maison d’édition Andalus, qui publie de la littérature arabe en hébreu.

Sivan est également arabisant. Dans ses documentaires et ses écrits, la cause palestinienne occupe une place centrale. Tous deux traitent des crimes contre l’humanité et de leur traitement politique.

Désormais, il y aura pour toujours dans l’histoire du Proche-Orient un avant et un après 7-Octobre.

Ils suivent tous deux de très près – elle de Paris, lui de Marseille – l’évolution de la guerre israélienne à Gaza, entrée dans son quatrième mois, avec sidération et pessimisme.Désormais, il y aura pour toujours dans l’histoire du Proche-Orient un avant et un après 7-Octobre.

Quel a été leur ressenti après l’attaque perpétrée par le Hamas ce jour-là, comment ont-ils réagi et de quelle manière vivent-ils cette guerre dont l’issue ne semble vraiment pas à l’ordre du jour?

«J’ai immédiatement compris que la réaction israélienne allait être horrible et que nous allions vivre une tragédie.»
Yael Lerer

Répondant aux questions d’Arab News en français, Lerer confie qu’elle a appris la nouvelle par un message qui lui a été envoyé d’Israël: «Il se passe quelque de très inhabituel du côté de Gaza.»

«Tout de suite, je m’installe devant la télévision pour suivre les événements et, dès le premier instant, je comprends qu’une catastrophe se déroule sous mes yeux. J’ai immédiatement compris que la réaction israélienne allait être horrible et que nous allions vivre une tragédie.»

Contrairement à des amis israéliens, de gauche comme elle, qui se sont tout de suite exprimés sur les réseaux sociaux en affirmant que l’attaque du Hamas était «une victoire» et que «les opprimés vont enfin gagner», elle a compris que «soit tout le monde gagne, soit tout le monde perd».

«Cela a été ma première réaction, et c’est toujours ma position», affirme-t-elle. Et c’est ce même constat qu’elle exprimera devant ses amis à Paris au sein du mouvement de solidarité avec la Palestine. Certains parmi eux ont versé dans un excès d’optimisme, estimant que l’attaque était «le début de la libération palestinienne totale».

«Le plus important pour le moment est le cessez-le-feu, car aucun scénario n’est envisageable avant.»

Yael Lerer

Cette position tranchait avec celle de ses amis vivant à Gaza et en Cisjordanie avec qui elle a pris contact. Ils ne voyaient pas l’attaque comme un prélude à une victoire totale contre Israël.«Pour eux comme pour moi, la situation est celle d’un désespoir total.»

Ce que l’on constate aujourd’hui, assure Lerer, «c’est qu’Israël est en train de se suicider, mais, en se suicidant, il va aussi tuer la Palestine, et peut être le Moyen-Orient».

Elle estime que «le plus important pour le moment est le cessez-le-feu, car aucun scénario n’est envisageable avant». La priorité absolue du moment «est l’arrêt des massacres et des destructions à Gaza». Comme il n’y a pas d’espoir de changement à l’intérieur d’Israël, «la communauté internationale, l'Europe et le monde arabe doivent changer d’attitude».

Selon Lerer, sans une position ferme de la part des pays arabes et sans pressions internationales, Israël verra que le feu est au vert et que son offensive meurtrière peut se poursuivre, voire s’étendre.

En France, la question palestinienne «n’existait plus» 

Pour Sivan, la journée du 7 octobre dernier a commencé selon «la routine» de sa «vie en exil». Lorsqu’il se réveille, sa première occupation est de «lire la presse israélienne sur Internet, toujours avec la même interrogation: quand la catastrophe va-t-elle arriver?»

«C’est mon état d’esprit depuis de longues années», souligne-t-il. «Dès que j’apprends qu’il y a eu une attaque contre la barrière de Gaza, mon premier sentiment est de me dire voilà, quelque chose change, enfin, ça se révolte!»

Le 7 octobre dernier, «c’est l’État chargé de protéger ses citoyens juifs qui s’est effondré »

Eyal Sivan

Mais, très vite, il «prend conscience que cela a été trop facile pour le Hamas et que, en réalité, l’État d’Israël s’est effondré», alors que cet État est «la raison d’être des Israéliens». Sivan explique: «C’est l’État chargé de protéger ses citoyens juifs qui s’est effondré». Selon lui, c’est une «catastrophe».

Pour lui, c’est comme la réalisation d’une prémonition. «J’ai passé ma vie, par mon travail comme cinéaste et comme auteur, à parler de cette catastrophe à venir, à expliquer, à avertir. Et, tout d’un coup, elle est là. D’une certaine manière, j’étais déçu d’avoir eu raison.»

Bien sûr, son premier réflexe est d’appeler pour prendre des nouvelles des uns et des autres, la famille, mais aussi les amis dans la région visée par l’attaque (au sud d’Israël).

À la teneur des conversations, il comprend très vite que «c'est une situation dans laquelle on ne peut pas ni parler ni raisonner». 

«Je me suis donc contenté d'écouter sans rien dire», car la situation «est tellement irrationnelle que ce n'est pas la peine même d'essayer de raisonner».

L’unanimité politique et médiatique française autour du narratif israélien de l’attaque du Hamas ne l’a ni choqué ni surpris, «parce que depuis des années en France, en Occident en général, mais aussi dans certains pays du Moyen-Orient, la question palestinienne n’existait plus».

Il poursuit avec amertume: «C’est comme si, avant le 7-Octobre, il n’y avait rien, ni des morts au quotidien, ni le maintien de l’occupation, ni le fait que Gaza soit la plus grande prison à ciel ouvert», et «tant que les morts sont palestiniens, on n’en parle pas du tout, et tout a basculé parce que cette fois les morts sont des Israéliens.»

«Il ne faut pas se réjouir de la destruction d'Israël pour la simple raison qu’il ne se détruira pas tout seul et qu’il emportera avec lui toute la région.»

Eyal Sivan

Cette unanimité, tout comme le soutien européen et occidental inconditionnel à Israël,constitue pour lui «une incitation au suicide, surtout qu’il s’agit d’un peuple dont la mythologie considère le suicide collectif comme voie de salut».

«Je dis aux amis arabes qu’il ne faut pas se réjouir de la destruction d'Israël pour la simple raison qu’il ne se détruira pas tout seul et qu’il emportera avec lui toute la région», ajoute Sivan.

Les Palestiniens et les Israéliens n’ont jamais eu que deux options, indique Sivan: «Soit vivre ensemble, soit mourir ensemble; et, à partir du moment où on choisit le vivre-ensemble, la seule question sera de quelle manière, car toute idée de séparation, d'anéantissement, de quel côté qu’elle vienne, est fausse et irréelle.»


Israël: l'armée annonce que les quatre dépouilles d'otages rendues lundi ont été identifiées

Les quatre dépouilles d'otages rendues lundi par le Hamas ont été identifiées, parmi lesquelles celle de l'étudiant népalais Bipin Joshi et de trois Israliens, a annoncé mardi l'armée israélienne. (AFP)
Les quatre dépouilles d'otages rendues lundi par le Hamas ont été identifiées, parmi lesquelles celle de l'étudiant népalais Bipin Joshi et de trois Israliens, a annoncé mardi l'armée israélienne. (AFP)
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  • "A l'issue du processus d'identification [des quatre dépouilles] par l'Institut national de médecine légale, les représentants de l'armée ont informé les familles de Guy Illouz, Bipin Joshi, et de deux autres otages décédés"
  • L'armée souligne que "les conclusions finales [sur les causes des décès] seront déterminées après l'achèvement de l'examen des circonstances" par le centre de médecine médico-légale

JERUSALEM: Les quatre dépouilles d'otages rendues lundi par le Hamas ont été identifiées, parmi lesquelles celle de l'étudiant népalais Bipin Joshi et de trois Israliens, a annoncé mardi l'armée israélienne.

"A l'issue du processus d'identification [des quatre dépouilles] par l'Institut national de médecine légale, les représentants de l'armée ont informé les familles de Guy Illouz, Bipin Joshi, et de deux autres otages décédés, dont les noms n'ont pas encore été autorisés à être publiés par leurs familles, que leurs proches ont été ramenés pour être enterrés", indique un communiqué militaire.

Guy Illouz avait été enlevé au festival de musique Nova, théâtre du plus grand massacre (plus de 370 morts) perpétré par les commandos du Hamas le 7 octobre 2023. Etudiant en agriculture, Bipin Joshi avait été enlevé au kibboutz Aloumim.

"Guy Illouz, 26 ans au moment de son décès, a été blessé et enlevé vivant par le mouvement islamiste Hamas. Il est décédé des suites de ses blessures après n'avoir pas reçu de soins médicaux appropriés pendant sa captivité par le Hamas", indique le communiqué de l'armée.

Bipin Joshi, 22 ans au moment de son "enlèvement dans un abri du kibboutz Aloumim par le Hamas, a été assassiné pendant sa captivité au cours des premiers mois de la guerre", selon l'armée. Il était le dernier otage non-Israélien captif à Gaza.

L'armée souligne que "les conclusions finales [sur les causes des décès] seront déterminées après l'achèvement de l'examen des circonstances" par le centre de médecine médico-légale.

"Malgré le chagrin [...] le retour de Guy et Bipin [...] ainsi que celui de deux autres otages décédés apporte un certain réconfort aux familles qui ont vécu dans l'incertitude et le doute pendant plus de deux ans", a indiqué dans un communiqué le Forum des familles d'otages, principale organisation israélienne militant pour la libération des otages retenus à Gaza.


Le président égyptien déclare que l'accord sur Gaza «ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité» au Moyen-Orient

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient. (AFP)
Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient. (AFP)
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  • M. al-Sissi, qui a signé lundi une déclaration conjointe avec ses homologues garants de l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas palestinien, a déclaré qu'il s'agissait d'une "journée historique"
  • Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient

CHARM EL-CHEIKH: Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré lundi que l'accord sur Gaza "ouvre une nouvelle ère de paix et de stabilité" au Moyen-Orient.

M. al-Sissi, qui a signé lundi une déclaration conjointe avec ses homologues garants de l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas palestinien, a déclaré qu'il s'agissait d'une "journée historique" pour la paix, jetant les fondations d’une solution à deux États.

 

 


Israël dit que Netanyahu n'ira pas au sommet de Charm el-Cheikh pour cause de fête juive

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ne se rendra pas au sommet sur Gaza organisé lundi par les Etats-Unis et l'Egypte à Charm el-Cheikh, a annoncé son bureau. (AFP)
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ne se rendra pas au sommet sur Gaza organisé lundi par les Etats-Unis et l'Egypte à Charm el-Cheikh, a annoncé son bureau. (AFP)
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  • "Le Premier ministre Netanyahu a été invité par le président américain Donald Trump à participer aujourd'hui à une conférence en Egypte"
  • M. Netanyahu "a remercié M. Trump pour l'invitation mais a déclaré qu'il ne pourrait pas y assister en raison de la coïncidence avec le début de la fête" juive de Simchat Torah ("Joie de la Torah")

JERUSALEM: Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ne se rendra pas au sommet sur Gaza organisé lundi par les Etats-Unis et l'Egypte à Charm el-Cheikh, a annoncé son bureau.

"Le Premier ministre Netanyahu a été invité par le président américain Donald Trump à participer aujourd'hui à une conférence en Egypte", indique le Bureau du Premier ministre dans un communiqué.

M. Netanyahu "a remercié M. Trump pour l'invitation mais a déclaré qu'il ne pourrait pas y assister en raison de la coïncidence avec le début de la fête" juive de Simchat Torah ("Joie de la Torah") commençant lundi à la tombée de la nuit, ajoute le communiqué.