Musique en ligne: l'UE inflige 1,8 milliard d'euros d'amende à Apple

Selon Bruxelles, le groupe à la pomme a appliqué des restrictions pour empêcher les développeurs d'applications de promouvoir auprès des usagers sur iPhone et iPad «des offres alternatives et moins chères en dehors de l'écosystème Apple» (Photo, AFP).
Selon Bruxelles, le groupe à la pomme a appliqué des restrictions pour empêcher les développeurs d'applications de promouvoir auprès des usagers sur iPhone et iPad «des offres alternatives et moins chères en dehors de l'écosystème Apple» (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 04 mars 2024

Musique en ligne: l'UE inflige 1,8 milliard d'euros d'amende à Apple

  • Spotify, populaire plateforme de streaming musical, avait saisi Bruxelles contre les pratiques du géant californien, jugées contraires aux règles européennes de «concurrence loyale»
  • Au terme d'une vaste enquête commencée en juin 2020, l'exécutif européen a donné raison à la plateforme suédoise

BRUXELLES: La Commission européenne a infligé lundi à Apple une amende de 1,84 milliard d'euros pour non-respect des règles de concurrence de l'UE sur le marché de la musique en ligne, une sanction inédite contre laquelle le géant américain a décidé de faire appel.

Spotify, populaire plateforme de streaming musical, avait saisi Bruxelles contre les pratiques du géant californien, jugées contraires aux règles européennes de "concurrence loyale" et ne permettant pas selon lui de "garantir la liberté de choix aux consommateurs et un environnement équitable aux développeurs"

Au terme d'une vaste enquête commencée en juin 2020, l'exécutif européen a donné raison à la plateforme suédoise.

"Pendant une décennie, Apple a abusé de sa position dominante sur le marché de la distribution d'applications d'écoute de musique en streaming" via sa boutique App Store, "ce qui est illégal", a fustigé la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager.

Selon Bruxelles, le groupe à la pomme a appliqué des restrictions pour empêcher les développeurs d'applications de promouvoir auprès des usagers sur iPhone et iPad "des offres alternatives et moins chères en dehors de l'écosystème Apple", de façon à privilégier son propre service AppleMusic.

Ces pratiques ont "conduit de nombreux utilisateurs à payer des prix nettement plus élevés pour leurs abonnements en raison de commissions élevées imposées par Apple aux développeurs et répercutées sur les consommateurs", estime l'exécutif européen.

Bruxelles a cependant abandonné lors de l'enquête ses griefs concernant l'obligation imposée par Apple aux développeurs de recourir à son système de paiement pour leurs usagers souscrivant un abonnement. Le groupe américain s'octroie des commissions allant jusqu'à 30% des transactions.

«Message puissant»

Spotify a salué l'annonce de la Commission. "Les règles d'Apple ont empêché de partager directement dans notre application divers avantages avec nos utilisateurs (...) Cette sanction envoie un message puissant", a réagi la firme suédoise.

Le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) y a vu "une très bonne nouvelle confirmant le droit de consulter des informations sur les offres moins chères de streaming musical sans qu'Apple ne les entrave".

C'est la première fois que l'UE sanctionne Apple pour infraction aux règles de la concurrence.

L'amende massive est d'un montant "forfaitaire" jugé "proportionné aux revenus mondiaux" du groupe et "nécessaire pour être dissuasif" afin qu'Apple ne répète pas l'infraction, a précisé l'exécutif européen.

Elle reste limitée au regard des profits du groupe: au quatrième trimestre 2023, Apple a engrangé un bénéfice net de 33,9 milliards de dollars (31,3 milliards d'euros).

De son côté, Google a été sanctionné par des amendes totalisant 8 milliards d'euros dans trois dossiers antitrust.

«Marché florissant»

Apple a aussitôt annoncé lundi qu'il ferait appel, accusant la Commission d'avoir été "incapable de découvrir la moindre preuve crédible d'un préjudice causé aux consommateurs". L'amende "ignore les réalités d'un marché florissant, compétitif et en croissance rapide", critique le groupe.

"Spotify ne paie rien à Apple" alors qu'il doit à l'App Store et aux technologies du groupe "une grande partie de son succès", accuse aussi la marque à la pomme.

Le service suédois domine largement l'offre de streaming musical en Europe, avec plus de 50% de parts de marché, contre 8% pour AppleMusic. Spotify revendique dans le monde quelque 600 millions d'utilisateurs annuels, dont un tiers d'abonnés payants.

Outre l'amende, la Commission impose à Apple de cesser les pratiques épinglées et de s'abstenir à l'avenir d'adopter des dispositifs équivalents.

Il sera de toute façon tenu de le faire par les nouvelles règles de concurrence renforcées dans le numérique (DMA) qui s'appliqueront à partir de jeudi aux géants du secteur, dont Apple, Google et Meta.

Cela ne rassure pas pour autant Spotify, qui fait partie des 34 entreprises ou associations professionnelles ayant dénoncé samedi dans une lettre à la Commission les mesures annoncées par Apple pour se conformer aux nouvelles règles.

Le géant américain affirme qu'il autorisera des magasins d'applications concurrents de son App Store et qu'il s'ouvrira à d'autres services de paiement sans contact que sa solution Apple Pay, comme il y est contraint.

"Ces nouvelles conditions non seulement ignorent l'esprit et la lettre de la loi, mais si elles restent inchangées, elles tournent en dérision le DMA", estiment pourtant les signataires.


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.