La France tient son budget carbone mais doit accélérer d'urgence

Des ouvriers opèrent sur le site d'une usine d'ArcelorMittal, alors que le site fait l'objet d'un plan visant à réduire son empreinte carbone (CO2) jusqu'à 35 pour cent d'ici 2030, à Fos sur mer le 22 février 2023 (Photo, AFP).
Des ouvriers opèrent sur le site d'une usine d'ArcelorMittal, alors que le site fait l'objet d'un plan visant à réduire son empreinte carbone (CO2) jusqu'à 35 pour cent d'ici 2030, à Fos sur mer le 22 février 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 21 mars 2024

La France tient son budget carbone mais doit accélérer d'urgence

  • Le pays a émis 405 millions de tonnes de CO2 équivalent (MtCO2e) en moyenne sur la période 2019-2023
  • L'estimation des émissions de l'agriculture sera publiée en juin par le Citepa

PARIS: La France, tirée par son électricité décarbonée, parvient à respecter son budget carbone, malgré des difficultés pour réduire les émissions des transports. Mais pas de quoi pavoiser au moment où le pays cherche comment doubler ses efforts pour s'aligner sur les objectifs européens renforcés.

Le pays a émis 405 millions de tonnes de CO2 équivalent (MtCO2e) en moyenne sur la période 2019-2023, selon la pré-estimation du Citepa, l'organisme indépendant chargé de l'inventaire de la pollution carbone française, qui a publié son rapport annuel jeudi.

La France est en dessous de l'objectif de 422 MtCO2e/an sur cette période, fixée par sa feuille de route, appelée la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), après avoir échoué à respecter son 1er budget carbone (2015-2018) et revu ses ambitions à la baisse en 2019.

C'est désormais l'inverse qui attend le gouvernement: la France doit rehausser son ambition pour s'aligner sur l'objectif européen de -55% d'émissions d'ici 2030 par rapport à 1990. La France en est aujourd'hui à -29%.

La 3e version de la SNBC était imminente, mais le Premier ministre a finalement décidé mi-mars de relancer une "grande consultation" publique sur cette stratégie ainsi que sur la loi de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

Ni les détails ni le calendrier ne sont encore connus. Mais la concertation s'annonce déjà musclée, notamment avec les ONG environnementales, dont plusieurs poursuivent une action en justice, "l'Affaire du siècle", pour contraindre l'Etat à rattraper les retards accumulés.

"Cette baisse des émissions est majoritairement due à des effets conjoncturels, malheureusement subis, principalement liés aux hausses des prix de l'énergie, et donc à une sobriété non choisie", a commenté Cyrielle Denhartigh, coordinatrice des programmes du Réseau action climat (RAC), qui fédère 37 associations.

Le RAC réclame des "politiques publiques structurantes" pour rendre "pérennes" ces baisses: "lever les verrous au développement des énergies renouvelables", "encourager le développement des petits véhicules électriques" et "réformer la fiscalité du secteur aérien".

De son côté, l'exécutif se félicite d'avoir atteint 384,5 MtCO2e d'émissions nationales brutes en 2023, soit moins que dans l'année du Covid. Le recul annuel de -4,8%  n'est pas aussi spectaculaire qu'en Allemagne mais est "un record" français (hors Covid), salue le ministre de la Transition écologique.

Vols domestiques en hausse 

Les émissions comptabilisées incluent les activités sur le territoire, mais pas celles liées aux importations.

La baisse générale est alimentée par le secteur de l'énergie (38 MtCO2e), avec "l'augmentation de la production d'électricité décarbonée", avant tout grâce au "retour d'une forte production nucléaire", puis avec la hausse des productions hydroélectrique, éoliennes et solaires, note le Citepa.

Les émissions du secteur résidentiel-tertiaire (60 MtCO2e) sont aussi très inférieures aux objectifs, conjugaison des "comportements de sobriété des ménages et des entreprises", de moindre besoin de chauffage grâce à la météo et de poursuite des rénovations thermiques.

Pour l'industrie (67 MtCO2e), le recul des émissions "s'explique principalement par des baisses de production", outre les efforts de décarbonation en cours.

Le point d'inquiétude reste les transports, premier secteur émetteur avec 128 MtCO2e. Un déclin durable et l'effet de l'électrification ne sont pas encore visibles, malgré une reprise de la baisse d'environ 3% en 2023, alimentée par les hausse des prix des carburants et le recul du diesel.

Côté aérien, les émissions ont explosé sur un an, sur les vols domestiques (+21%), qui dépassent le niveau pré-Covid, comme sur les vols internationaux (+27%, inférieur à 2019).

L'estimation des émissions de l'agriculture sera publiée en juin par le Citepa.

Pour évaluer la trajectoire climatique de la France vis-à-vis de l'accord de Paris, et son objectif de limiter le réchauffement mondial à 1,5°C, il faut encore prendre en compte l'absorption du CO2 par les forêts, les prairies et les tourbières sur le sol français.

En 2022, ces puits de carbone naturels n'ont capté que 16,9 MtCO2e au lieu des 41 millions prévues en moyenne dans la SNBC, selon l'Observatoire climat-énergie, développé par le RAC et l'Agence de la transition écologique (Ademe). Un déficit récurrent depuis 2015 lié aux sécheresses, renforcées par le changement climatique, aux incendies et aux maladies, qui ont accru la mortalité des arbres.


Grève nationale : les syndicats unis contre le budget du futur gouvernement

Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
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  • Journée de grève nationale ce jeudi à l’appel des 8 principaux syndicats français, unis contre les mesures budgétaires jugées « brutales »
  • Les autorités redoutent des débordements à Paris, avec jusqu’à 100 000 manifestants attendus et la présence annoncée de casseurs. 900 000 personnes pourraient se mobiliser dans toute la France

Les syndicats français ont promis une "journée noire" de manifestations et de grèves jeudi pour peser sur les choix budgétaires du prochain gouvernement, en pleine crise politique dans la deuxième économie de l'UE.

A Paris, le préfet de police s'est dit "très inquiet" de la présence de nombreux casseurs venant pour "en découdre" dans la manifestation prévue dans la capitale, qui pourrait selon lui rassembler 50.000 à 100.000 personnes.

Les autorités s'attendent à une mobilisation massive, avec plus de 250 cortèges annoncés qui pourraient réunir jusqu'à 900.000 personnes à travers le pays, soit cinq fois plus que lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre lancé sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical.

Cette mobilisation lancée par les huit syndicats français, unis pour la première fois depuis le 6 juin 2023, vise les mesures budgétaires "brutales" préconisées cet été par le Premier ministre François Bayrou pour réduire le déficit de la France (coupes dans le service public, réforme de l'assurance chômage, gel des prestations sociales notamment).

Son gouvernement alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l'Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur Sébastien Lecornu - troisième Premier ministre d'Emmanuel Macron depuis juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 - s'est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des "ruptures sur le fond" en matière budgétaire.

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n'en ont pas moins maintenu leur mot d'ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

- "Démonstration de force" -

"Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", s'est indignée lundi la leader de la CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre.

L'abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou est "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a-t-elle estimé.

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est "plus que jamais motivée pour aller dans la rue", a fait savoir sa responsable Marylise Léon qui attend "des faits et des preuves" du nouveau chef de gouvernement, et notamment un "besoin d’efforts partagés".

Elle a apprécié à cet égard que le successeur de François Bayrou se dise selon elle conscient de la nécessité de "faire quelque chose" au sujet de la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat.

"Le budget va se décider dans la rue", estime Mme Binet, qui évoque une "démonstration de force" et laisse entrevoir une mobilisation dans la durée.

Côté transports, le trafic sera "perturbé" voire "très perturbé" dans la capitale, ainsi que pour les trains interurbains.

Ce sera moins le cas pour les trains régionaux et les TGV. Un service proche de la normale est attendu dans les aéroports, le principal syndicat de contrôleurs aériens ayant reporté sa grève.

A l'école, un tiers des enseignants du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) seront grévistes. L'ampleur du mouvement dans la fonction publique en générale reste encore à préciser.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.