Au procès des grossistes d'Aubervilliers, les rouages du blanchiment d'argent

Cette photo prise le 10 avril 2015 montre une vue des unités du CIFA - Fashion Business Center (Centre International de Commerce de Gros France-Asie) au "Sentier Chinois" à Aubervilliers. (AFP).
Cette photo prise le 10 avril 2015 montre une vue des unités du CIFA - Fashion Business Center (Centre International de Commerce de Gros France-Asie) au "Sentier Chinois" à Aubervilliers. (AFP).
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Publié le Vendredi 22 mars 2024

Au procès des grossistes d'Aubervilliers, les rouages du blanchiment d'argent

  • Eliav S., Franco-Israélien de 38 ans, est ce qu'on appelle dans ce dossier un "affairiste" ou un intermédiaire
  • Les grossistes en textile de la communauté chinoise, accusés d'être les pivots d'un réseau international de blanchiment d'argent issu du trafic de stupéfiants -du cannabis importé du Maroc-, ont choisi le mutisme

PARIS: Il a voulu tout expliquer. Les sacs de cash, les virements bancaires effectués en échange, les commissions... Bref, tout le mécanisme du blanchiment d'argent qui gangrène la communauté des grossistes d'Aubervilliers, au coeur d'un procès tentaculaire à Paris depuis début mars.

Eliav S., Franco-Israélien de 38 ans, est ce qu'on appelle dans ce dossier un "affairiste" ou un intermédiaire. Fines lunettes transparentes, veste de costume grise, lui se décrit plutôt, à la barre, comme un "commercial".

Depuis l'ouverture du procès, il est le seul à s'être réellement ouvert, parmi les 21 prévenus qui comparaissent pour blanchiment en bande organisée et association de malfaiteurs.

Les grossistes en textile de la communauté chinoise, accusés d'être les pivots d'un réseau international de blanchiment d'argent issu du trafic de stupéfiants -du cannabis importé du Maroc-, ont choisi le mutisme ou invoqué des trous de mémoire sur les faits qui remontent à 2014-2015.

S'il nie avoir eu connaissance de l'origine de l'argent, Eliav S. a en revanche reconnu les opérations de blanchiment qui gravitaient autour des grossistes d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), dressant le schéma d'un système sophistiqué par le nombre d'intermédiaires à l'oeuvre.

D'un côté, des réseaux criminels qui génèrent d'énormes flux de liquidités, qu'ils doivent blanchir.

De l'autre, décrit-il, confirmant les suspicions des enquêteurs, des grossistes en prêt-à-porter qui brassent eux aussi d'importantes sommes d'espèces, d'abord parce qu'ils sous-déclarent les marchandises importées de Chine par conteneurs, puis qu'ils les écoulent massivement au noir.

Tous ont besoin d'intermédiaires capables d'échanger ce cash contre des virements bancaires, noyés dans des flux de commerce légaux.

"J'étais dans ce système de +décaisseur+, entre l'offre et la demande. Je devais trouver des Chinois qui acceptent ce système. Les sociétés qui veulent décaisser pouvaient ventiler (l'argent) sur plusieurs entreprises" capables d'émettre des virements bancaires contre des "fausses factures", avait expliqué mercredi Eliav S., avant que le ministère public ne requiert quatre ans d'emprisonnement dont un ferme à son encontre.

« Engrenage »

Une fois le virement réceptionné en Chine, "je retournais chez les Chinois (d'Aubervilliers) pour récupérer les espèces" d'un montant équivalent, agrémentés d'une commission généralement de 2%, a-t-il reconnu devant le tribunal, concluant ses phrases par des "tout simplement".

"Pour moi, l'intérêt, c'était d'avoir des commissions. Les clients avaient besoin de plus en plus de virements parce qu'il y avait de plus en plus d'espèces", a-t-il déroulé.

"Au moins, vous parlez, ça change des journées précédentes!", a réagi la présidente Armelle Briand, jugeant son témoignage d'autant plus crédible qu'Eliav S. est mis en examen dans un autre dossier similaire et que son activité de "compensateur" est "plus large que les grossistes d'Aubervilliers".

Dans ce dossier, "chacun a un intérêt", a résumé le procureur Alexis Liberge.

Le Centre international de commerce de gros France-Asie (Cifa) d'Aubervilliers, régi par un "fonctionnement clanique", est un "terrain favorable au blanchiment", a abondé l'autre représentante du ministère public, Clémence Girard: "Il génère beaucoup de cash, qu'il va ensuite falloir écouler".

Bingwu Z., grossiste de 38 ans dont l'entreprise a joué un rôle central dans ce dossier, est aussi le seul à avoir esquissé une explication, lors de son audition le 13 mars.

"Dès lors que j'ai commencé à accepter des espèces, c'était un engrenage. Parce qu'après, je ne pouvais plus payer mes fournisseurs" avec de l'argent non déclaré, a reconnu le gérant d'une société accusée d'avoir "lavé" 1,1 million d'euros en deux mois.

"C'est systématiquement la personne qui nous fait des virements qui nous sollicite", s'est toutefois dédouané celui qui se faisait appeler "John" dans ce milieu.

Le mécanisme, a repris Eliav S., est loin d'être propre au textile chinois. Ainsi, les 307.530 euros en liquide retrouvés sous le lit de ses parents, dans le XVIe arrondissement de Paris, lui ont été confiés par des "Yougoslaves balèzes" qui lui auraient dit: "Tiens, l'argent, tu te débrouilles pour me l'envoyer par virement".

Plus généralement, lui a demandé la présidente Briand, qu'a-t-il fait des commissions empochées ? "Je l'ai dépensé. J'étais dans une spirale de blanchiment, je faisais tout ce qui était pas bien. Quand on est dans la bêtise, on va jusqu'au bout".

La présidente a tenu à le corriger: "Ce n'est pas de la bêtise, monsieur. C'est de la délinquance".


Un homme tué par balles près de Grenoble

Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police. (AFP)
Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police. (AFP)
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  • L'homme a été retrouvé par une passante, vers 02H00, gisant inanimé au sol dans une mare de sang
  • La Division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS, ex-PJ) a été saisie de l'enquête

GRENOBLE: Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police.

L'homme a été retrouvé par une passante, vers 02H00, gisant inanimé au sol dans une mare de sang, la mâchoire brisée, avec une trottinette à ses pieds. En arrêt cardio-respiratoire, il a été déclaré décédé sur place par le SAMU.

Deux impacts de balles dans son dos et dans sa mâchoire ont été relevés par la suite par le médecin légiste, selon même la source.

La Division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS, ex-PJ) a été saisie de l'enquête.


«Mieux vaut être un homme en politique»: quand les députés testent le programme Evars

En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an. (AFP)
En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an. (AFP)
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  • Prévu dans la loi depuis 2001 et doté d'un contenu depuis la rentrée, le programme d'Education à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) aborde, de façon adaptée à chaque âge, la santé reproductive, la prévention, l’égalité filles-garçons
  • A l'Assemblée, une petite vingtaine de députés, sur 577, ont répondu mardi après-midi à l'invitation de Marie-Charlotte Garin (écologiste), Véronique Riotton (EPR) et le Collectif pour une véritable éducation à la sexualité

PARIS: "Mieux vaut être un homme, en politique, qu’une femme". Comme des collégiens ou des lycéens, des députés ont suivi une séance d'Evars, un programme proposé aux élèves pour notamment remettre en cause les stéréotypes sexistes.

Prévu dans la loi depuis 2001 et doté d'un contenu depuis la rentrée, le programme d'Education à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) aborde, de façon adaptée à chaque âge, la santé reproductive, la prévention, l’égalité filles-garçons, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, ainsi que les questions d’orientation et d’identité sexuelles.

A l'Assemblée, une petite vingtaine de députés, sur 577, - principalement de la gauche au centre-droit - ont répondu mardi après-midi à l'invitation de Marie-Charlotte Garin (écologiste), Véronique Riotton (EPR) et le Collectif pour une véritable éducation à la sexualité (Planning familial, Sidaction, Fédération des centres d' information sur les droits des femmes et des familles...) qui milite depuis 2023 pour la généralisation de ces séances.

"Nous voulons faire de la pédagogie auprès des députés pour qu’ils deviennent nos ambassadeurs dans les territoires", explique Marie-Charlotte Garin, en signalant que les députés reçoivent des courriers de parents opposés au programme, notamment de l'association Parents vigilants.

"Nous voulons faire vivre ces séances aux députés pour leur donner des arguments, il y a beaucoup de fantasmes autour de ce programme", observe Mme Riotton, présidente de la Délégation aux droits des femmes.

"On galère" 

Après une première partie sur des sujets à destination des CP (vocabulaire des parties intimes, prévention des violences sexuelles), le Planning familial propose ensuite aux élus de tester "la rivière du doute", outil utilisé cette fois au collège pour réfléchir aux stéréotypes sexistes.

"Je vais vous dire une affirmation et ceux qui sont d'accord se placent à gauche, ceux qui sont contre à droite: +Il vaut mieux être un homme en politique qu’une femme+, lance sa présidente Sarah Durocher.

Chez les députés présents, six sont d'accord. Et comme en classe, le dialogue s’engage.

"Je dis oui, mais c’est ce qu’il faut changer", commence Jean-Francois Rousset (EPR).

"C'est plus difficile d'être une femme, on galère, c'est difficile de se faire entendre", confirme Soumya Bourouaha (GDR). "Il y a beaucoup à changer et ça ne viendra pas des hommes" , renchérit une autre élue.

Second stéréotype: "Les hommes savent naturellement prendre la parole en public. D'accord ou pas?"

"Qu'ils soient compétents ou pas, la réalité montre qu’ils osent plus", remarque Anne-Cécile Violland (Horizons). "Tout à l'heure, j’ai pris spontanément la parole et je ne m’en suis même pas aperçu", constate Jean-Francois Rousset.

 "Sujet politique" 

"Nous voulons que ce programme devienne un sujet politique, dont s'emparent les députés. Il permet d'éviter les LGBTphobies, les féminicides, les maladies sexuellement transmissibles, c'est bénéfique pour les individus et collectivement", plaide Sarah Durocher.

En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an.

Depuis 2001, la loi impose trois séances annuelles d’information et d’éducation à la sexualité dans les écoles, collèges et lycées, mais elles n’ont jamais été généralisées.

Saisi par le Planning familial, Sidaction et SOS Homophobie, le tribunal administratif de Paris a reconnu mardi que l’État avait manqué à ses obligations, en tardant jusqu'en février dernier pour adopter le programme Evars. Dans son jugement, il écarte les arguments avancés par le ministère de l'Education qui avait fait valoir "la sensibilité du sujet et les controverses qu'il suscite" pour expliquer ce retard.

Les trois associations demandent "la reconnaissance" du "rôle central des associations" dans sa mise en œuvre". "Nous avons formé 150.000 jeunes dans 3.600 établissements, mais nous avons refusé autant de demandes faute de moyens", explique la présidente du Planning.

Pour Sandrine Josso (Horizons), "les députés devraient aussi suivre une formation sur les violences sexistes et sexuelles. Il en existe une depuis 2022 et personne n’y va".


Ukraine: Zelensky accueilli par Macron à Paris pour faire le point sur les négociations

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
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  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée
  • Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride

PARIS: Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine, a constaté un journaliste de l'AFP.

Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride, et à la veille d'une rencontre à Moscou entre l'émissaire de Donald Trump, Steve Witkoff, et le président russe Vladimir Poutine.