Vote crucial sur la réforme de la politique migratoire de l'UE

Le roi Philippe de Belgique (à gauche) s'entretient avec la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, avant leur réunion bilatérale et leur session plénière au Parlement européen à Bruxelles, le 10 avril 2024. (Photo John Thys AFP)
Le roi Philippe de Belgique (à gauche) s'entretient avec la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, avant leur réunion bilatérale et leur session plénière au Parlement européen à Bruxelles, le 10 avril 2024. (Photo John Thys AFP)
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Publié le Mercredi 10 avril 2024

Vote crucial sur la réforme de la politique migratoire de l'UE

  • Ce «Pacte sur la migration et l'asile» durcit les contrôles des arrivées aux frontières du bloc et met en place un système de solidarité entre États membres
  • Il suscite l'opposition d'une grande partie de l'extrême droite, et de l'autre côté des Verts, de la gauche radicale et de certains socialistes

BRUXELLES : Les eurodéputés ont entamé mercredi leurs débats avant un vote crucial, encore incertain, sur la vaste réforme de la politique migratoire européenne, fruit d'un difficile compromis sur un sujet qui a alimenté tensions et divisions entre les Vingt-Sept depuis des années.

Ce «Pacte sur la migration et l'asile» durcit les contrôles des arrivées aux frontières du bloc et met en place un système de solidarité entre États membres.

Une dizaine de législations au total seront soumises au vote du Parlement à partir de 17H00 (15H00 GMT), lors d'une mini-session plénière à Bruxelles. L'approbation de certains textes n'est toutefois pas garantie, ce qui fait peser une incertitude sur le sort de l'ensemble.

«Nous sommes face à nos responsabilités», a déclaré dans l'hémicycle l'eurodéputée française Fabienne Keller (Renew Europe, centristes et libéraux), estimant que voter contre ce pacte était «offrir un victoire à l'extrême droite européenne».

«Ce pacte ne résoudra pas tout, mais c'est un pas en avant, un pas de géant», a encore estimé l'élue, rapporteure de l'un des règlements-clés, portant sur les procédures d'asile.

La refonte des règles est basée sur une proposition de la Commission présentée en septembre 2020 après l'échec d'une précédente tentative de réforme, dans la foulée de la crise des réfugiés de 2015-2016.

- «Moment historique» -

Ce Pacte migratoire, auquel sont favorables dans l'ensemble les trois principales familles politiques européennes - PPE (droite), Socialistes et démocrates (S&D) et Renew Europe - suscite l'opposition d'une grande partie de l'extrême droite, et de l'autre côté des Verts, de la gauche radicale et de certains socialistes.

«C'est serré, on verra», a estimé Manfred Weber, président du PPE, premier groupe du Parlement, avant l'ouverture des débats.

«C'est un moment historique. En tant qu'Européens, après huit ans de discussions intensives, nous avons trouvé un compromis entre une protection stricte des frontières contre les passeurs et la mafia, d'une part, et le maintien de nos valeurs, l'asile et la convention de Genève, d'autre part», a-t-il déclaré à l'AFP.

La réforme a fait l'objet d'un accord politique en décembre et a été approuvée en février en commission parlementaire, avec l'objectif d'une adoption finale avant les élections européennes de juin, mais les différents rapporteurs de ces textes ont exprimé mardi leur inquiétude sur l'issue du vote.

A côté de cette réforme, qui ne s'appliquera que courant 2026, l'UE multiplie les accords avec les pays d'origine et de transit des exilés (Tunisie, Mauritanie, Egypte) pour tenter de réduire le nombre d'arrivées à ses frontières.

L'UE fait face à une hausse des demandes d'asile, qui ont atteint 1,14 million en 2023, soit leur plus haut niveau depuis 2016, selon l'Agence européenne pour l'asile. Les entrées «irrégulières» dans l'UE sont elles aussi en augmentation, à 380.000 en 2023, selon Frontex.

La réforme met en place un «filtrage» obligatoire des migrants arrivant aux frontières de l'UE, consistant à les enregistrer dans la base de données commune Eurodac.

Une «procédure à la frontière» est prévue pour ceux qui sont statistiquement les moins susceptibles d'obtenir l'asile: ils seront retenus dans des centres le temps que leur dossier soit examiné de façon accélérée, dans le but de renvoyer les déboutés plus rapidement.

Quelque 161 organisations de défense des droits humains, dont Human Rights Watch, Amnesty International, l'International Rescue Committee, ou encore Oxfam, ont appelé les eurodéputés à rejeter le Pacte, s'inquiétant des «détentions de familles avec enfants» et une «criminalisation» des exilés.

- «Effondrement des valeurs» -

Mêmes griefs à gauche de l'échiquier politique. «C'est un effondrement des valeurs», a fustigé l'élu français Mounir Satouri (Verts). A l'inverse, à l'extrême droite, les nouvelles règles sont jugées insuffisamment restrictives.

La commissaire européenne Ylva Johansson, à l'origine de la proposition de Pacte, a dénoncé mardi «les forces politiques qui veulent que l'immigration soit un sujet toxique impossible à gérer».

La règle en vigueur selon laquelle le premier pays d'entrée dans l'UE d'un migrant est responsable de sa demande d'asile est maintenue avec quelques aménagements.

Mais pour aider les pays où arrivent de nombreux exilés, comme l'Italie, la Grèce ou l'Espagne, un système de solidarité obligatoire est organisé.

Les autres États membres doivent contribuer en prenant en charge des demandeurs d'asile (relocalisations) ou en apportant une contribution - financière ou matérielle - au profit du pays sous pression migratoire. Une façon de tenter de surmonter l'opposition de la Hongrie et la Pologne à tout quota de réfugiés - même si ces deux pays restent hostiles à la réforme.

Après le vote, le Pacte devra encore être formellement approuvé par les États membres. La Commission européenne présentera d'ici juin un plan de mise en œuvre. Car de nombreuses questions sont laissées en suspens, suscitant des incertitudes sur le fonctionnement du système.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com