Au Soudan, une génération d'enfants «détruite» en une année de guerre

Des enfants transportent des colis d'aide humanitaire dans une école abritant des Soudanais déplacés qui ont fui les violences dans un Soudan déchiré par la guerre, près de la ville de Gedaref, dans l'est du pays, le 10 mars 2024. (AFP)
Des enfants transportent des colis d'aide humanitaire dans une école abritant des Soudanais déplacés qui ont fui les violences dans un Soudan déchiré par la guerre, près de la ville de Gedaref, dans l'est du pays, le 10 mars 2024. (AFP)
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Publié le Jeudi 11 avril 2024

Au Soudan, une génération d'enfants «détruite» en une année de guerre

  • Dans le camp de déplacés d'Otach, monté il y a deux décennies au Darfour-Sud, les rations de bouillie de maïs n'arrivent plus
  • Déjà, selon Médecins sans frontières, au moins un enfant meurt toutes les deux heures dans le camp de déplacés de Zamzam au Darfour-Nord

PORT-SOUDAN: Amna Ishaq, déplacée du Darfour, ne nourrit plus ses enfants "qu'une fois par jour, voire pas du tout". Après une année de guerre au Soudan, "une génération entière pourrait être détruite" prévient l'ONU avec des millions d'enfants déplacés, affamés, forcés de se battre ou de se marier et menacés de mort.

Dans le camp de déplacés d'Otach, monté il y a deux décennies au Darfour-Sud, les rations de bouillie de maïs n'arrivent plus. "Nous sommes tous malades et nos enfants avec nous, nous n'avons rien à manger et l'eau qu'on trouve est polluée", raconte Mme Ishaq à l'AFP, son long pagne rose noué autour des hanches.

Ici, depuis l'atroce guerre du Darfour des années 2000, une génération est née et a grandi. Mais quand la guerre est repartie, cette fois-ci de Khartoum, le 15 avril 2023, les diplomates et les humanitaires ont quitté le pays en masse, et cessé de fait d'aider les plus vulnérables.

Les pillages, les combats, les frappes aériennes et les routes coupées par les belligérants ont achevé d'isoler chaque région du pays, grand comme quatre fois la France. Aujourd'hui, estime l'ONU, 90% des Soudanais arrivés au dernier palier avant la famine sont inatteignables.

Enfants «vendus»

Parmi eux, prévient l'ONU, "222.000 enfants pourraient mourir de faim d'ici quelques semaines ou quelques mois" --et "plus de 700.000 cette année".

Déjà, selon Médecins sans frontières (MSF), au moins un enfant meurt toutes les deux heures dans le camp de déplacés de Zamzam au Darfour-Nord tandis que dans le camp de Kalma, au Darfour-Sud, "depuis le mois de mars, 15 enfants intègrent l'unité de soins intensifs chaque jour avec plus de deux enfants qui meurent toutes les 12 heures", s'alarme l'ONG d'aide humanitaire Alight.

Dans la capitale, rapporte le journal médical The Lancet, le petit hôpital pédiatrique Al-Buluk admet "chaque semaine 25 enfants souffrant de malnutrition aiguë, et chaque semaine deux ou trois d'entre eux meurent".

En tout, près de trois millions d'enfants souffrent de malnutrition et 19 millions sont déscolarisés, mettant en danger l'avenir du Soudan, où 42% de la population a moins de 14 ans.

Adam Regal, porte-parole de la Coordination générale pour les réfugiés et les déplacés du Darfour, dit avoir vu mourir "des dizaines d'enfants".

"A cause de l'entêtement" de l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane et des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohammed Hamdane Daglo qui se disputent le pouvoir depuis un an, "les aides alimentaires et humanitaires n'arrivent plus", raconte-t-il à l'AFP.

Faute d'accès, mais aussi parce qu'à Khartoum, l'usine qui préparait les compléments nutritionnels pour enfants a été écrasée sous les bombes. Les usines de vaccins pour les nouveaux-nés, elles, ont été pillées alors que, partout, du Darfour dans l'ouest jusque sur la mer Rouge épargnée par les combats, dans l'est, le choléra, la rougeole et le paludisme sévissent.

Et au risque sanitaire s'ajoute l'horreur de la guerre. De plus en plus, des associations soudanaises tirent la sonnette d'alarme: pour pouvoir nourrir leurs enfants, des parents, disent-elles, "vendent" l'un d'entre eux.

Ici, une ONG locale, raconte qu'un père a vendu sa fille de 15 ans contre des sacs de grain sur un marché.

Viols et enfants-soldats 

Là, l'ONU évoque des cas de "mariages d'enfants" dus à "des séparations familiales" --des mères ou des pères ont perdu leur conjoint ou leurs enfants en fuyant des violences dans la panique-- ou à "des violences sexistes et sexuelles dont le viol et les grossesses non désirées".

Les fillettes et les jeunes filles, comme les femmes, sont victimes, poursuit l'ONU, "d'enlèvements, de mariages forcés et de violences sexuelles liées au conflit au Darfour et dans l'Etat d'al-Jazira", au sud de Khartoum où se trouve une bonne part des déplacés.

Les experts du Conseil des droits humains de l'ONU disent avoir récolté "des informations sur des femmes et des jeunes filles vendues sur des marchés aux esclaves dans des zones sous contrôle des FSR et d'autres groupes armés, notamment au Darfour-Nord".

Le danger qui guette les garçons, lui, est autre: l'armée, les paramilitaires mais aussi les milices tribales et ethniques, accusent ces experts, "recrutent et utilisent des enfants au Darfour, au Kordofan, à Khartoum et dans l'est du pays". Certaines parties forcent même "des enfants venus d'un pays voisin à participer activement aux hostilités", ajoutent-ils.

Depuis les premiers jours de la guerre, des vidéos misent en ligne par soldats et paramilitaires montrent régulièrement des adolescents juchés sur des pick-ups ou fusils automatiques en main.

C'est la "catastrophe d'une génération" ne cessent de marteler les responsables onusiens.

Dans un pays où, avant la guerre, près de la moitié des enfants avaient "un taux de retard de croissance de 40%" et où 70% des élèves de 10 ans étaient incapables de lire et de comprendre une phrase simple.


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.