La Syrie tente de rester à l'écart de la guerre à Gaza

Cette photo prise le 6 septembre 2023 montre une vieille tourelle de lancement de roquettes rouillée de la guerre israélo-arabe de 1973, à une position près de la frontière syrienne sur le plateau du Golan annexé par Israël. (AFP)
Cette photo prise le 6 septembre 2023 montre une vieille tourelle de lancement de roquettes rouillée de la guerre israélo-arabe de 1973, à une position près de la frontière syrienne sur le plateau du Golan annexé par Israël. (AFP)
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Publié le Vendredi 26 avril 2024

La Syrie tente de rester à l'écart de la guerre à Gaza

  • "Assad a été clairement prévenu par les Israéliens que si la Syrie était utilisée contre eux, ils détruiraient son régime", affirme un diplomate occidental
  • La frappe du 1er avril qui a visé le consulat d'Iran dans la capitale et tué deux hauts gradés des Gardiens constituait le coup le plus dur pour l'Iran en Syrie

BEYROUTH: Depuis le début de la guerre à Gaza, le régime syrien tente de rester à l'écart du conflit, malgré l'attaque imputée à Israël sur le consulat d'Iran à Damas qui a failli mettre le feu aux poudres dans la région, selon des analystes.

Affaibli par une guerre civile de treize ans, le pouvoir de Bachar al-Assad tente de maintenir l'équilibre entre ses puissants alliés, l'Iran, bête noire d'Israël, et la Russie.

Si les Iraniens et leurs supplétifs affichent leur solidarité avec le Hamas palestinien dans sa guerre contre Israël, les Russes poussent pour la stabilité dans la région.

"Assad a été clairement prévenu par les Israéliens que si la Syrie était utilisée contre eux, ils détruiraient son régime", affirme à l'AFP un diplomate occidental qui a requis l'anonymat.

Andrew Tabler, un analyste du Washington institute, assure pour sa part que la Russie et les Emirats arabes unis, qui ont normalisé leurs relations avec le régime en 2018, "l'ont exhorté à rester à l'écart du conflit" entre Israël et le Hamas.

Depuis le début de la guerre le 7 octobre, les raids ciblés contre l'Iran et ses alliés, attribués à Israël, se sont intensifiés en Syrie, infligeant de lourdes pertes aux Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de Téhéran.

La frappe du 1er avril qui a visé le consulat d'Iran dans la capitale et tué deux hauts gradés des Gardiens constituait le coup le plus dur pour l'Iran en Syrie.

le 13 avril, l'Iran a mené en représailles une attaque sans précédent contre Israël, avec 350 drones et missiles dont la plupart ont été interceptés avec l'aide des Etats-Unis et d'autres pays alliés.

Une semaine plus tard, une attaque imputée à Israël a visé le centre de l'Iran, mais Téhéran l'a minimisée et affirmé qu'il n'y aurait pas de représailles.

Message codé 

L'intensification des frappes et de la guerre à Gaza ont fait craindre une riposte depuis le front syrien, largement dormant depuis des décennies, contre Israël.

Mais si les alliés de Téhéran se sont mobilisés pour soutenir le Hamas depuis le Liban, l'Irak ou le Yémen, ce front est demeuré relativement calme.

Depuis le début de la guerre, seulement 26 attaques à la roquette ont recensées depuis la Syrie contre le Golan occupé par Israël, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

La plupart des roquettes sont tombées dans des zones inhabitées, selon Andrew Tabler. Il estime que cela "a été interprété à Washington et ailleurs comme une sorte de message codé, selon lequel le président syrien veut rester à l'écard du conflit à Gaza".

De plus, l'Iran a récemment réduit sa présence militaire dans tout le sud de la Syrie, notamment les zones limitrophes du plateau syrien du Golan occupé et annexé par Israël, ont révélé à l'AFP une source proche du Hezbollah et l'OSDH.

L'armée russe a pour sa part annoncé début avril avoir établi une position supplémentaire en Syrie "dans la région du plateau du Golan" pour "surveiller le cessez-le-feu et favoriser une désescalade".

Contrepartie 

Pour le diplomate occidental, "Assad espère obtenir des Arabes et des Occidentaux des contreparties à cette retenue, et les Russes l'y poussent".

Affaibli par la guerre civile qui a morcelé son pays et poussé l'économie au bord de l'asphyxie, ostracisé par les Occidentaux, il tente de normaliser ses relations avec les pays arabes.

Alors que plusieurs capitales de la région étaient secouées par des manifestations d'appui aux Palestiniens de Gaza, Damas n'a en outre connu que de timides rassemblements.

"Le régime déteste le Hamas et n'a aucune envie d'appuyer des frères musulmans, dont la victoire ne pourrait que renforcer leurs camarades en Syrie", explique le diplomate occidental.

Le président syrien n'a toujours pas oublié que le Hamas, naguère proche allié de Damas, avait appuyé le soulèvement populaire en 2011.

Le Hamas avait annoncé en 2022 l'ouverture d'une nouvelle page avec Bachar al-Assad mais ce dernier avait estimé qu'il était encore "trop tôt" pour parler "d'un retour à la normale".


L'ONU interdite d'accès au point de passage de Rafah par les autorités israéliennes

Une pancarte accueille ceux qui arrivent à Gaza, avant d'être démolie par un véhicule militaire israélien, alors qu'Israël revendique le contrôle du poste frontière de Rafah dans la bande de Gaza lors de son conflit avec le groupe islamiste palestinien Hamas (Photo, Reuters).
Une pancarte accueille ceux qui arrivent à Gaza, avant d'être démolie par un véhicule militaire israélien, alors qu'Israël revendique le contrôle du poste frontière de Rafah dans la bande de Gaza lors de son conflit avec le groupe islamiste palestinien Hamas (Photo, Reuters).
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  • Quant au point de passage d'Erez, donnant accès au nord de la bande de Gaza et récemment rouvert par Israël, toute l'aide qui pourrait y passer doit être soumise au contrôle des autorités israéliennes à Kerem Shalom
  • L'armée israélienne a déployé des chars mardi dans Rafah et pris le contrôle de la partie palestinienne du point de passage avec l'Egypte

GENEVE: L'ONU s'est vue interdire par Israël l'accès au point de passage de Rafah dans la bande de Gaza, a-t-elle indiqué mardi, soulignant que l'aide ne pouvait plus entrer dans le territoire palestinien, y compris le diesel indispensable pour l'aide humanitaire.

"Nous n'avons actuellement aucune présence physique au point de passage de Rafah car le Cogat (organisme israélien chargé de coordonner la politique israélienne dans les territoires palestiniens occupées, NDLR) nous a refusé l'accès à cette zone", qui est le principal point de passage de l'aide humanitaire, a déclaré Jens Laerke, le porte-parole du Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), lors d'un point de presse régulier à Genève.

"On nous a dit qu'il n'y aurait pas de passage de personnel ou de marchandises dans les deux sens pour le moment... Pour combien de temps ? Je n'en sais rien", a-t-il ajouté.

"Cela a un impact considérable", a-t-il souligné. Aucune aide ne peut plus entrer non plus par le point de passage de Kerem Shalom fermé depuis dimanche par l'armée israélienne après des tirs de roquette.

"Actuellement les deux principales artères pour acheminer l'aide à Gaza sont bloquées. Ce matin est l'un des plus sombres de ce cauchemar qui dure depuis sept mois", a-t-il poursuivi. Si le carburant est bloqué, "ce serait une manière très efficace d'enterrer l'opération humanitaire", a jugé le porte-parole.

Quant au point de passage d'Erez, donnant accès au nord de la bande de Gaza et récemment rouvert par Israël, toute l'aide qui pourrait y passer doit être soumise au contrôle des autorités israéliennes à Kerem Shalom, a indiqué un porte-parole du Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef), James Elder, lors du point de presse. Kerem Shalom étant "fermé", rien ne peut être contrôlé, a-t-il dit.

L'ONU bientôt à court de carburant 

Israël a lancé une vaste opération militaire contre le Hamas dans la bande de Gaza après l'attaque massive du mouvement islamique sur le territoire israélien le 7 octobre.

L'armée israélienne a déployé des chars mardi dans Rafah et pris le contrôle de la partie palestinienne du point de passage avec l'Egypte, et affirmé mener une opération de "contreterrorisme" dans "des zones spécifiques" de l'est de Rafah.

L'ONU est d'autant plus préoccupée qu'il n'y a pas de réserves importantes d'aide dans Gaza: toute celle qui entrait jusqu'à présent a été immédiatement distribuée.

Pour le carburant, selon M. Laerke, il n'entre que par Rafah, la réserve "est pour l'ensemble" de l'opération humanitaire à Gaza et est "très, très courte, environ une journée (...) principalement de diesel, pour faire fonctionner les camions et les générateurs".

A ses côtés, une porte-parole de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Margaret Harris, a confirmé que le point de passage de Rafah est fermé depuis lundi sans exception: "Pas de personnel entrant ou sortant, pas d'évacuations, rien. Et je crois savoir qu'il en va de même aujourd'hui".

«Pire qu'à Rafah»

Pour le porte-parole de l'Unicef, il est "difficile de voir comment les agences d'aide peuvent éviter la famine dans la bande de Gaza si cette porte est fermée pendant une longue période".

L'armée israélienne (IDF) a largué des tracts appelant les habitants à évacuer "vers la zone humanitaire élargie d'al-Mawasi", à une dizaine de kilomètres de Rafah.

"Les IDF ont facilité" à al-Mawasi "la construction d'hôpitaux de campagne, de tentes" ainsi que l'arrivée d'eau, de nourriture et de matériel médical, a assuré un porte-parole de l'armée, Nadav Shoshani, lors d'un briefing mardi.

"La situation dans les zones où les gens ont reçu l'ordre de se rendre est incroyablement pire qu'à Rafah", a souligné le porte-parole de l'Unicef. Des habitants et des organisations humanitaires y décrivent des secteurs déjà surpeuplés ou détruits par la guerre tandis que Rafah abrite le dernier grand hôpital de Gaza, l'hôpital européen, qui, selon M. Elder, "est l'une des dernières bouées de sauvetage pour les civils".


L’offensive israélienne à Gaza se répercute sur les Palestiniens de Cisjordanie

Depuis le 7 octobre, les colons israéliens ont mené 603 attaques contre des Palestiniens en Cisjordanie. (AFP)
Depuis le 7 octobre, les colons israéliens ont mené 603 attaques contre des Palestiniens en Cisjordanie. (AFP)
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  • «L’accélération fulgurante» des formes de discrimination, d’oppression et de violence contre les Palestiniens a poussé la Cisjordanie au «bord du précipice», selon l’ONU
  • Israël a démoli, à une vitesse qui n’avait jamais été enregistrée auparavant, 917 structures appartenant à des Palestiniens en Cisjordanie depuis le 7 octobre

LONDRES: Les ondes de choc provoquées par l’opération militaire israélienne à Gaza ont entraîné des répercussions en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, où les forces de sécurité et les colons juifs enhardis auraient intensifié leurs attaques contre les communautés palestiniennes.

Depuis que l’attaque menée par le Hamas le 7 octobre a déclenché le conflit à Gaza, les colons israéliens ont mené 603 attaques contre des Palestiniens en Cisjordanie, expulsant 1 222 personnes qui provenaient de 19 communautés d’éleveurs, selon les chiffres de l’ONU.

Des colons armés ont également tué au moins neuf Palestiniens, tandis que les forces de sécurité israéliennes en ont tué 396 autres au cours des derniers mois.

De même, l’armée israélienne a intensifié ses raids. Le 4 mai, les forces israéliennes ont attaqué Toulkarem et tué cinq Palestiniens, dont quatre membres du Hamas. Le 20 avril, les forces israéliennes ont mené un raid dans le même gouvernorat, qui abrite plus de 6 400 réfugiés, tuant quatorze Palestiniens.

Abir, qui dirige une petite entreprise à Jénine, note une «recrudescence des attaques de colons, la prolifération des points de contrôle, des raids quotidiens contre les maisons palestiniennes, la destruction des infrastructures, le meurtre de jeunes Palestiniens et l’augmentation des frappes aériennes militaires israéliennes».

L’armée israélienne a intensifié ses raids dans certaines parties de la Cisjordanie. (AFP)
L’armée israélienne a intensifié ses raids dans certaines parties de la Cisjordanie. (AFP)

Certes, des attaques similaires avaient régulièrement lieu avant le 7 octobre, mais Abir déclare à Arab News qu’«elles ont doublé et sont devenues plus atroces» depuis le début de la guerre à Gaza.

Jénine «est depuis deux ans environ une cible spécifique pour l’armée israélienne, puisque la ville abrite quelques groupes de résistance», poursuit-elle.

Selon un rapport du Haut-Commissariat des nations unies aux droits de l’homme (HCDH) publié en mars, «l’accélération fulgurante» des formes de discrimination, d’oppression et de violence contre les Palestiniens a poussé la Cisjordanie au «bord du précipice».

Israël a démoli, à une vitesse qui n’avait jamais été enregistrée auparavant, 917 structures appartenant à des Palestiniens en Cisjordanie depuis le 7 octobre, ce qui a conduit au déplacement de 1 015 Palestiniens. Parmi ces structures, 210 se trouvent à Jérusalem-Est et 285 sont des immeubles résidentiels, ajoute le rapport.

Yasmine el-Hassan, responsable des plaidoyers à l’Union des comités de travail agricole, une organisation non gouvernementale qui soutient les communautés rurales palestiniennes, décrit la situation en Cisjordanie comme «absolument abominable».

«L’expansion de l’entreprise coloniale israélienne en Cisjordanie se produit parallèlement à la guerre génocidaire contre Gaza», confie-t-elle à Arab News.

«L’occupation a créé de nombreux nouveaux avant-postes de colons et des routes pour colons en Cisjordanie», note-t-elle, ajoutant que le gouvernement israélien «a approuvé des milliers de nouveaux logements pour colons en Cisjordanie».

Depuis le 7 octobre, les colons israéliens ont mené 603 attaques contre des Palestiniens en Cisjordanie. (AFP)
Depuis le 7 octobre, les colons israéliens ont mené 603 attaques contre des Palestiniens en Cisjordanie. (AFP)

Même si les violences israéliennes en Cisjordanie n’ont pas atteint l’ampleur de celles de Gaza, Yasmine soutient que «l’intensité de la violence coloniale israélienne dans toutes les régions de la Palestine historique s’est exacerbée au cours des six derniers mois».

«L’impunité» accordée par les autorités israéliennes a enhardi les colons juifs de Cisjordanie, souligne-t-elle.

Les colons qui attaquent les communautés palestiniennes sont «de plus en plus armés par le gouvernement de l’occupation israélienne et leurs actes ne sont aucunement punis», déplore-t-elle.

S’exprimant lors de la 55e session du Conseil des droits de l’homme, au mois de mars, Nada al-Nachif, la Haute-Commissaire adjointe des nations unies aux droits de l’homme, a déclaré que, après le 7 octobre, le HCDH a documenté «des cas de colons vêtus d’uniformes complets ou partiels de l’armée israélienne, portant des armes à feu, harcelant et attaquant des Palestiniens, tirant par ailleurs à bout portant».

Elle a également affirmé qu’au 31 octobre les forces de sécurité israéliennes auraient distribué environ 8 000 armes aux «escouades de défense des colonies» et aux «bataillons de défense régionale» en Cisjordanie.


Israël dit avoir pris le contrôle du côté gazaoui du point de passage de Rafah avec l'Egypte

Photo distribuée par l'armée israélienne montrant les chars de l'équipe de combat de la 401e brigade entrant du côté palestinien du poste frontière de Rafah entre Gaza et l'Égypte, dans le sud de la bande de Gaza, le 7 mai 2024 (AFP)
Photo distribuée par l'armée israélienne montrant les chars de l'équipe de combat de la 401e brigade entrant du côté palestinien du poste frontière de Rafah entre Gaza et l'Égypte, dans le sud de la bande de Gaza, le 7 mai 2024 (AFP)
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  • «Nous avons le contrôle opérationnel de la zone», a affirmé l'armée israélienne lors d'un point de presse
  • L'armée israélienne a refusé d'indiquer combien de temps durerait cette opération

JÉRUSALEM : L'armée israélienne a annoncé mardi avoir pris le contrôle de la partie palestinienne du point de passage de Rafah entre la bande de Gaza et l'Egypte et que des troupes au sol avaient entamé une "opération ciblée de contreterrorisme" dans l'est de Rafah.

"A l'instant présent, des forces spéciales passent au peigne fin le point de passage" de Rafah, "nous avons le contrôle opérationnel de la zone", a affirmé l'armée israélienne, précisant parler "uniquement du côté gazaoui du point de passage".

"Nous avions des indices, parmi lesquels les tirs" de roquettes dimanche, contre le point de passage de Kerem Shalom entre Israël et Gaza qui ont tué quatre soldats israéliens, "mais aussi du renseignement que la partie gazaouie du point de passage de Rafah (...) était utilisé par le Hamas à des fins terroristes", a expliqué l'armée.

Alors qu'Israël martèle depuis des mois son intention de mener une offensive terrestre d'ampleur sur Rafah, localité surpeuplée du sud de la bande de Gaza, où affirme-t-il se terrent les derniers bataillons du Hamas, l'armée israélienne a martelé mardi que l'opération "de contreterrorisme" était localisée et d'ampleur limitée.

«Zones limitées»

"Nous opérons dans des zones spécifiques de l'est de Rafah. Nous n'opérons pas dans la totalité de la zone" mais "dans une zone précise d'une zone déjà déterminée" de Rafah, a indiqué l'armée. Il s'agit "d'une opération très ciblée, d'une ampleur très limitée contre des cibles très précises".