La Palme d'or à Sean Baker, passage de générations dans le cinéma américain

Le réalisateur américain Sean Baker pose avec le trophée lors d'un photocall après avoir remporté la Palme d'or pour le film "Anora" lors de la cérémonie de clôture de la 77e édition du Festival de Cannes (Photo, AFP).
Le réalisateur américain Sean Baker pose avec le trophée lors d'un photocall après avoir remporté la Palme d'or pour le film "Anora" lors de la cérémonie de clôture de la 77e édition du Festival de Cannes (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 26 mai 2024

La Palme d'or à Sean Baker, passage de générations dans le cinéma américain

  • Le film de 2h18 rembobine efficacement les classiques du cinéma américain et dépeint l'envers du rêve américain
  • Grand favori, l'Iranien Mohammad Rasoulof repart finalement avec un prix spécial

CANNES: Passage de génération à Cannes: le créateur de "Star Wars", George Lucas, a reçu un prix d'honneur avant de remettre la Palme d'or à un représentant du nouveau cinéma indépendant américain, Sean Baker, qui a livré un plaidoyer pour le cinéma en salles.

"Nous devons lutter pour faire des films qui sortent en salles. Il faut que le monde se rappelle que voir un film sur son téléphone portable ou à la maison, ce n'est pas la manière (correcte) de voir des films", a déclaré Sean Baker en recevant son prix.

"En salles, on partage la tristesse, la peur, le rire", a-t-il ajouté sur une scène du Palais des festivals où venaient de se succéder, en forme de passage de témoin, deux légendes d'Hollywood: Francis Ford Coppola, finalement reparti bredouille avec "Megalopolis", et George Lucas, à qui il était venu remettre sa Palme d'or d'honneur.

Sean Baker, qui succède à Justine Triet et son film "Anatomie d'une chute", est un amoureux des personnages en marge, débordant d'humanité, et tourne souvent avec des acteurs débutants ou amateurs.

Détournant les mythes de "Cendrillon" ou de "Pretty Woman", "Anora" passe des bas-fonds de New York aux villas de luxe des oligarques russes, en suivant la relation entre une jeune stripteaseuse Anora et le fils d'un milliardaire.

Actrice transgenre primée

Mafieux, virées dans la communauté russophone de Coney Island, courses nocturnes dans New York, homme de main aux faux airs de Robert De Niro, le film de 2h18 rembobine efficacement les classiques du cinéma américain et dépeint l'envers du rêve américain.

Autre décision marquante du jury de Greta Gerwig, où siégaient également les acteurs Omar Sy, Lily Gladstone et Eva Green, le prix collectif attribué aux actrices de la comédie musicale de Jacques Audiard, "Emilia Perez".

Le prix fera date, puisqu'outre Selena Gomez, Zoe Saldana et Adriana Paz, est distinguée pour la première fois une actrice transgenre, Karla Sofía Gascón. L'Espagnole de 52 ans, qui a entamé sa transition de genre à 46 ans, est la révélation de ce film dont elle tient le rôle principal, celui d'un narcotrafiquant qui se sent profondément femme et change de genre.

Karla Sofía Gascón a dédié son prix à "toutes les personnes trans qui souffrent". "Je veux que ces personnes arrivent à croire comme dans +Emilia Perez+ qu'il est toujours possible de s'améliorer".

Grand favori, l'Iranien Mohammad Rasoulof repart finalement avec un prix spécial pour "Les graines du figuier sauvage", tourné en clandestinité.

Le prix est un symbole pour les artistes iraniens victimes de la répression, et une consécration pour un réalisateur qui a bravé la censure pendant des décennies avant de se résoudre à l'exil, à quelques jours du Festival. Il faisait à Cannes sa première apparition publique depuis.

Hollywood à la fête 

"Permettez-moi d'avoir une pensée pour tous les membres de mon équipe qui ne sont pas avec moi pour célébrer ce prix. Mon chef opérateur, nombre de techniciens, qui sont sous pression. Mon cœur est avant tout avec eux", a déclaré Mohammad Rasoulof.

Dans le reste du palmarès, l'acteur américain Jesse Plemons a reçu le prix d'interprétation masculine pour sa performance dans le dernier Yorgos Lanthimos, et la jeune cinéaste indienne Payal Kapadia, représentante d'un 7e art dans l'ombre de Bollywood, a reçu le Grand Prix. "All we imagine as light" était le premier film indien en compétition depuis trente ans.

Une autre réalisatrice a été primée: la Française Coralie Fargeat, primée pour son deuxième long-métrage "The Substance", un film féministe ultra-gore avec Demi Moore, qui a décoiffé la Croisette.

Les grands déçus de ce festival sont les légendes du Nouvel Hollywood, dont les oeuvres, crépusculaires, sont reparties bredouille.

C'est le cas de Francis Ford Coppola, qui briguait à 85 ans une troisième Palme d'or. Et de Paul Schrader, d'abord connu comme scénariste de Martin Scorsese avant de devenir un cinéaste établi, dont le film "Oh, Canada!", avec Richard Gere en vieil homme mourant, a déçu.

Hollywood n'en était pas moins à la fête tout au long de cette édition, marquée aussi par la présentation hors compétition des films de Kevin Costner ou de "Furiosa", dérivé de "Mad Max".

Le palmarès du 77e Festival de Cannes

Voici le palmarès du 77e Festival de Cannes:

Palme d'or 

"Anora" de Sean Baker

Grand Prix 

"All we imagine as light" de Payal Kapadia

Prix de la mise en scène 

Miguel Gomes pour "Grand Tour"

Prix du jury 

"Emilia Perez" de Jacques Audiard

Prix spécial 

"Les graines du figuier sauvage" de Mohammad Rasoulof

Prix du scénario 

"The Substance" de Coralie Fargeat

Prix d’interprétation féminine 

Les actrices d'Emilia Perez de Jacques Audiard: Karla Sofía Gascón, Zoe Saldaña, Selena Gomez et Adriana Paz

Prix d’interprétation masculine 

Jesse Plemons pour "Kinds of Kindness" de Yorgos Lanthimos

Caméra d'or 

"Armand" de Halfdan Ullmann Tondel

Palme d'or du court métrage 

"The man who could not remain silent" de Nebojsa Slijepcevic

Palme d'or d'honneur 

George Lucas


Vers l’infini et au‑delà – Goldorak, 50 ans d’inspiration

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  •  50 ans après sa création, la série animée Goldorak continue de marquer l’imaginaire arabe
  • Arab News Japan s’entretient avec son créateur Go Nagai, des fans du Moyen-Orient, et revient sur l’histoire du robot OVNI chargé de protéger notre planète

​​​​​​LONDON: Peu d’importations culturelles ont franchi les frontières de manière aussi inattendue — et aussi puissante — que Goldorak, le robot géant japonais qui, il y a un demi-siècle, est devenu un héros de l’enfance à travers le monde arabe, et plus particulièrement en Arabie saoudite.

Créé au Japon au milieu des années 1970 par le mangaka Go Nagai, Goldorak s’inscrivait dans la tradition des « mecha », ces récits de robots géants. Le genre, façonné par l’expérience japonaise de la Seconde Guerre mondiale, explorait les thèmes de l’invasion, de la résistance et de la perte à travers le prisme de la science-fiction.

Si la série a rencontré un succès modéré au Japon, c’est à des milliers de kilomètres de là, au Moyen-Orient, que son véritable héritage s’est construit.

L’anime « UFO Robot Goldorak » est arrivé à la télévision dans la région en 1979, doublé en arabe et diffusé pour la première fois au Liban, en pleine guerre civile. L’histoire du courageux Actarus, prince exilé dont la planète a été détruite par des envahisseurs extraterrestres, a profondément résonné chez les enfants grandissant dans un contexte de conflits régionaux et d’occupation par Israël.

Ses thèmes — la défense de la patrie, la résistance à l’agression et la protection des innocents — faisaient douloureusement écho aux réalités de la région, transformant la série d’un simple divertissement en un véritable refuge émotionnel.

Une grande partie de l’impact de la série tenait à la réussite de son arabisation. Le doublage arabe puissant et le jeu vocal chargé d’émotion, notamment celui de l’acteur libanais Jihad El-Atrash dans le rôle d’Actarus, ont conféré à la série une gravité morale inégalée par les autres dessins animés de l'époque.

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Au début des années 1980, Goldorak s'était répandu à travers le Moyen-Orient, inspirant des communautés de fans en Arabie saoudite, au Koweït, en Irak et au-delà. (Fourni)

Le générique de la série, interprété par Sami Clark, est devenu un hymne que le chanteur libanais a continué à interpréter lors de concerts et de festivals jusqu’à son décès en 2022.

Au début des années 1980, Goldorak s’était répandu à travers le Moyen-Orient, inspirant des communautés de fans en Arabie saoudite, au Koweït, en Irak et au-delà. Pour beaucoup, il s’agissait non seulement d’un premier contact avec les anime japonais, mais aussi d’une source d’enseignements sur des valeurs telles que la justice et l’honneur.

L’influence de Goldorak dans la région a été telle qu’il a fait l’objet de recherches universitaires, qui ont non seulement mis en lumière la manière dont le sort des personnages résonnait auprès du public du Moyen-Orient, mais ont aussi relié sa popularité aux souvenirs générationnels de l’exil, en particulier à la Nakba palestinienne.

Un demi-siècle plus tard, Goldorak demeure culturellement vivant et pertinent dans la région. En Arabie saoudite, qui avait pleinement adopté la version originale de la série, Manga Productions initie aujourd’hui une nouvelle génération de fans à une version modernisée du personnage, à travers un jeu vidéo, The Feast of The Wolves, disponible en arabe et en huit autres langues sur des plateformes telles que PlayStation, Xbox et Nintendo Switch, ainsi qu’une nouvelle série animée en langue arabe, «  Goldorak U », diffusée l’an dernier.

Cinquante ans après les débuts de la série, « Goldorak » est de retour — même si, pour toute une génération de fans de la série originale, dont les étagères regorgent encore de produits dérivés et de souvenirs, il n’est en réalité jamais vraiment parti.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com
 


En ce Noël, unissons-nous pour souhaiter la paix dans toute la région

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  • Noël au Moyen-Orient incarne un message puissant d’harmonie interconfessionnelle, de résilience et de respect mutuel
  • De Bethléem à Riyad, les célébrations deviennent un acte d’espoir partagé et un appel sincère à la paix régionale

RIYAD : Fidèle à une tradition initiée en décembre 2022, Arab News souhaite un joyeux Noël à ses lecteurs chrétiens et à tous ceux qui célèbrent cette fête. Cette édition spéciale met cette année en lumière Noël à travers le Moyen-Orient, en soulignant l’harmonie interconfessionnelle, la résilience et l’intégration culturelle. Le tout est porté par un message particulier, sincère et plein d’espoir : voir la paix se diffuser dans toute la région en 2026.

En tête de cette couverture figure une tribune exclusive du grand érudit Dr Mohammad bin Abdulkarim Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale et président de l’Organisation des savants musulmans. Son message rappelle un principe essentiel : « Il n’existe aucun texte de la charia interdisant de féliciter les non-musulmans à l’occasion de leurs fêtes religieuses, y compris Noël. » Il présente cette bienveillance non comme un affaiblissement de la foi, mais comme l’expression de sa force — une force qui affirme la dignité humaine et favorise l’harmonie sociale si nécessaire aujourd’hui.

Ce même esprit de solidarité face à la souffrance résonne depuis Bethléem, où le pasteur palestinien, le révérend Dr Munther Isaac, explique que le christianisme palestinien est indissociable de l’identité nationale. En réponse à la dévastation de Gaza, sa communauté a érigé une crèche faite de gravats, l’enfant Jésus enveloppé dans un keffieh. « C’était un message de foi », affirme-t-il. « Le Christ est solidaire de ceux qui souffrent… parce qu’il est né dans la souffrance. »

De cette profondeur naissent aussi des récits de renouveau. À Damas, les illuminations festives réapparaissent alors que des Syriens de toutes confessions s’accrochent à une paix fragile. Au Liban, les célébrations percent la morosité politique par des instants de joie. En Jordanie, les espaces publics s’illuminent de sapins et des hymnes de Noël de Fairouz, tandis qu’aux Émirats arabes unis, la diaspora multiculturelle s’anime dans une effervescence festive et unitaire.

La profondeur historique et intellectuelle de l’héritage chrétien de la région est mise en lumière par le Dr Abdellatif El-Menawy, qui rappelle le rôle indispensable de l’Égypte dans la transformation du christianisme, passé d’un message spirituel à une véritable civilisation. Cet héritage ancien trouve aujourd’hui une expression moderne et dynamique.

En Arabie saoudite, la période des fêtes est reconnue à travers une hospitalité innovante, où des chefs réinventent les menus de Noël en y intégrant des saveurs locales et une identité culinaire créative.

Cette édition spéciale offre bien plus qu’une simple atmosphère festive. Elle dépeint un Moyen-Orient où les différentes confessions approfondissent leurs propres racines en respectant celles des autres, où les célébrations sont tissées de résistance historique, et où le message de Noël — espoir, paix et humanité partagée — résonne avec confiance et optimisme.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le prince héritier parraine le lancement d’un centre de calligraphie arabe à Médine

Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
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  • Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz

RIYAD : Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes à Médine lundi.

Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz, gouverneur de la région de Médine.

Il était accompagné du ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdallah ben Farhane, qui a visité les espaces d’exposition du nouveau centre et assisté à des présentations sur la programmation culturelle et les réalisations du centre.

Ils ont également découvert des collections mettant en valeur l’importance artistique et historique de la calligraphie arabe.

Lors de l’inauguration, le prince Badr a déclaré : « Depuis cette terre d’érudition et de savoir, nous lançons fièrement une plateforme mondiale dédiée à la calligraphie arabe, un patrimoine culturel inestimable. »

Il a ajouté que le soutien « généreux et illimité » du prince héritier envers le secteur culturel avait rendu ce projet possible.

Le ministre a précisé que le centre montrait au monde l’héritage de la calligraphie arabe tout en soulignant l’engagement de l’Arabie saoudite à préserver son identité et son patrimoine culturel.

Selon le prince Badr, le centre représente une vision ambitieuse visant à élever la calligraphie arabe comme outil universel de communication et élément central de l’héritage, de l’art, de l’architecture et du design arabes.

Le centre a également pour objectif de renforcer l’identité culturelle du Royaume et sa présence internationale, en ciblant calligraphes, talents émergents, artistes visuels, chercheurs en arts islamiques, institutions éducatives et culturelles, ainsi que les passionnés d’art et de patrimoine à travers le monde.

Il proposera des programmes spécialisés, incluant services de recherche et d’archivage, enseignement de la calligraphie, bourses académiques, musée permanent, expositions itinérantes, association internationale de calligraphie et incubateur soutenant les entreprises liées à la calligraphie.

D’autres initiatives incluent des programmes de résidence d’artistes, des ateliers dirigés par des experts, l’élaboration de programmes pédagogiques standardisés, ainsi que des partenariats éducatifs internationaux visant à la conservation du patrimoine et à la promotion mondiale de cet art ancestral.

L’établissement du centre à Médine revêt une signification particulière, compte tenu du rôle historique de la ville comme berceau de la calligraphie arabe et de son association avec la transcription du Coran et la préservation du savoir islamique.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com