Emmanuel Macron, au risque de la rupture avec les Français

Né à Amiens, où il rencontre sa future épouse Brigitte, de vingt-cinq ans son aînée, ce fils de médecins a multiplié les audaces, et les réussites, pour aller à la conquête de Paris. (AFP)
Né à Amiens, où il rencontre sa future épouse Brigitte, de vingt-cinq ans son aînée, ce fils de médecins a multiplié les audaces, et les réussites, pour aller à la conquête de Paris. (AFP)
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Publié le Jeudi 27 juin 2024

Emmanuel Macron, au risque de la rupture avec les Français

  • Venu de la gauche sociale-libérale, Emmanuel Macron est élu au centre sur la promesse d'un "dépassement" progressiste des clivages traditionnels
  • A force de vouloir être en première ligne, le chef de l'Etat, que ses conseillers diplomatiques présentent volontiers en président-médiateur, est souvent incompris

PARIS: "Je prends mon risque", aime à dire Emmanuel Macron. Adepte des coups de poker, ce jeune président qui a voulu dynamiter la vie politique et a réussi à surmonter d'innombrables crises a peut-être pris le risque de trop.

Après la dissolution de l'Assemblée nationale, son ex-Premier ministre Edouard Philippe a eu ce jugement lapidaire: "C'est le président de la République qui a tué la majorité présidentielle".

La Macronie "dissoute" par Macron? Voire Macron fossoyeur du macronisme, comme l'affirment de plus en plus ouvertement observateurs, opposants et même alliés du chef de l'Etat?

La décision choc de convoquer des élections législatives au soir de la déroute de son camp aux européennes a en tout cas servi d'accélérateur à une fin de règne perceptible dès le début de ce second quinquennat contrarié par l'absence de majorité absolue.

Jadis adulé par ceux qui ont accompagné son ascension fulgurante, respecté par ceux qui l'ont rejoint une fois au pouvoir, Emmanuel Macron, qui risque de ne plus avoir tous les leviers au lendemain du 7 juillet et ne pourra briguer un troisième mandat en 2027, est aujourd'hui lâché ou toisé par de nombreux soutiens.

Ce rejet, spontané et sans complexe, transpire chez bon nombre de Français, ouvrant un peu plus la voie à l'extrême droite.

"C'est pas que je supporte Jordan Bardella mais je veux que Macron soit le plus humilié possible", lance sans détours un quinquagénaire qui a voté Rassemblement national aux européennes.

"Le dégagisme s'installe", grince François Patriat, qui fut l'un des premiers fidèles et restera parmi les derniers quoi qu'il advienne. Pour le patron des sénateurs macronistes, "il y a une volonté de vengeance des politiques qui n'ont pas supporté son arrivée".

«Ancien monde»

Il faut dire qu'elle a secoué l'"ancien monde" alors moqué par son entourage.

Né à Amiens, où il rencontre sa future épouse Brigitte, de vingt-cinq ans son aînée, ce fils de médecins a multiplié les audaces, et les réussites, pour aller à la conquête de Paris.

Avec toujours la même confiance en lui, fondée peut-être sur sa transgression initiale. "Il est tombé amoureux de sa prof de théâtre à 16 ans, il a dit qu'il allait l'épouser et il l'a épousée. C'est costaud quand même", avance un ancien camarade de l'ENA.

Lorsqu'il choisit en 2016 de s'émanciper de François Hollande, le défi paraît impossible pour cet inspecteur des finances qui a travaillé auprès du philosophe Paul Ricoeur avant d'être enrôlé par le président socialiste, à l'Elysée puis comme ministre de l'Economie.

Mais il le fait, crée En Marche! - EM, comme ses initiales - pour personnaliser l'aventure. Et, le 7 mai 2017, le candidat qui promeut dans son livre la "Révolution" remporte l'élection présidentielle à seulement 39 ans.

Même à 46 ans aujourd'hui, les tempes blanchies après sept ans passés à l'Elysée, Emmanuel Macron reste le plus jeune président de la Ve République.

"Je suis le fruit d'une forme de brutalité de l'Histoire, une effraction car la France était malheureuse et inquiète", dira plus tard celui qui se présente comme un "indécrottable optimiste".

«Président des riches»

Au soir de la victoire, après une lente marche solitaire au son de l'hymne européen, il s'engage devant la Pyramide du Louvre à "tout" faire pour que les Français "n'aient plus aucune raison de voter pour les extrêmes".

Un serment qui le poursuivra, à mesure que montera le RN, aujourd'hui aux portes du pouvoir.

Venu de la gauche sociale-libérale, Emmanuel Macron est élu au centre sur la promesse d'un "dépassement" progressiste des clivages traditionnels.

Sa doctrine économique a une constante inébranlable: la politique de l'offre pro-entreprises. Et un dogme: le refus des hausses d'impôts, fût-ce pour mettre à contribution les ultrariches.

Il défend l'image du "premier de cordée", celui qui réussit et peut tirer les moins aisés dans sa montée. C'est ce qui justifie la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), et qui vaut d'emblée à l'ex-banquier d'affaires chez Rothschild l'étiquette de "président des riches".

La retraite à 64 ans, imposée au forceps malgré une contestation rare dans la rue et au Parlement, vient renforcer cette image.

"Si j'aimais l'argent", "j'aurais pas fait de politique", répond-il.

Le président en est persuadé, son bilan économique parle pour lui: la réindustrialisation, avec ce titre tant vanté de pays le plus attractif d'Europe pour les investissements étrangers; et la fin du chômage de masse, dont on parle trop peu à ses yeux.

Il aimerait qu'on le crédite pour les premiers succès de son "écologie à la française", mais autour de lui, on reconnaît un discours "beaucoup trop techno".

Il ne cesse de rappeler le dédoublement des classes en CP et CE1, mais admet qu'il n'est pas allé assez loin pour "l'émancipation" et "l'égalité des chances".

«Grand Européen»

Et puis, Emmanuel Macron est aussi un président de crises. Affaire Benalla, gilets jaunes, Covid-19, guerre en Ukraine, émeutes urbaines... Le "retour du tragique dans l'Histoire" qu'il narre dans ses discours, il l'affronte en première ligne.

Autant de crises dont il arrive tant bien que mal à se sortir.

Les "grands débats" pour apaiser la "France des ronds-points" contribuent à forger l'idée d'un président qui ose "aller au contact". La réouverture des écoles malgré la pandémie, en mai 2020, s'avérera être la bonne intuition.

En Europe, sa voix porte, même quand elle heurte.

"Il ne faut pas chipoter. Il est le grand Européen de son époque", applaudit Daniel Cohn-Bendit, alors même qu'il a pris ses distances.

Pour l'écologiste franco-allemand, "le problème de Macron c'est parfois son caractère, être persuadé d'avoir raison". Cet "hubris" dénoncé par feu Gérard Collomb, l'ex-maire de Lyon qui avait quitté le ministère de l'Intérieur en mettant en garde contre le "manque d'humilité" des macronistes.

A force de vouloir être en première ligne, le chef de l'Etat, que ses conseillers diplomatiques présentent volontiers en président-médiateur, est souvent incompris.

Lorsque Moscou envahit l'Ukraine, en février 2022, le soutien de la France à Kiev est à l'unisson de l'Occident. Mais Emmanuel Macron agace nombre d'alliés en continuant à dialoguer avec Vladimir Poutine et en appelant à ne "pas humilier la Russie".

Deux ans plus tard, c'est l'inverse: en refusant d'exclure l'envoi de troupes sur le sol ukrainien, le président français s'attire les critiques occidentales.

Vers la droite 

Emmanuel Macron a une formule pour décrire le macronisme: "en même temps" de gauche et de droite. Mais au fil du temps, il s'est déplacé de plus en plus à droite, au risque d'être taxé d'opportunisme.

Le même qui s'inspire d'un vieux slogan du Nouveau Parti anticapitaliste pour se faire réélire en 2022 ("nos vies valent plus que leurs profits") reprend, plus tard, celui de l'extrême droite version Eric Zemmour, "pour que la France reste la France". De l'art de la "triangulation", qui consiste à aller picorer sur les terres lexicales ou idéologiques des adversaires pour leur couper l'herbe sous le pied.

La loi sur l'immigration, votée fin 2023 avec les voix de l'extrême droite qui applaudit une "victoire idéologique" sur la "préférence nationale", scelle déjà un point de non retour pour beaucoup de "marcheurs" historiques.

"Il tourne le dos au logiciel doctrinal de 2017 et aux valeurs humanistes", se désole alors son ex-conseiller spécial Philippe Grangeon.

Pour un membre influent de son entourage, pourtant, point de "tournant droitier": "le président s'adapte à une opinion qui est mouvante".

"Il a une plasticité, une incroyable confiance en lui qui est en même temps sa force et sa faiblesse", analysait Marine Le Pen, sa double rivale au second tour de la présidentielle avec laquelle s'est installé un face-à-face durable.

Petites phrases 

D'autres lui reprochent d'avoir, ainsi, contribué à la montée des extrêmes.

Lui répond qu'il a, par deux fois, battu l'extrême droite dans le scrutin suprême.

Avec des résultats variables, il a multiplié les initiatives - des gadgets, disent ses détracteurs - pour se sortir des moments difficiles, contourner ces corps intermédiaires qu'il juge responsables d'une forme d'inertie, ou surmonter l'absence de majorité absolue du second quinquennat.

Mais la méthode de gouvernement de ce président "jupitérien" reste verticale. Et, s'il s'est un peu assagi et a esquissé quelques mea culpa, les petites phrases des débuts sur les "Gaulois réfractaires au changement" ou les chômeurs qui n'auraient qu'à "traverser la rue" pour trouver un emploi ont laissé des traces. "Il y a un paquet de gens qui pensent que je suis hautain", admet-il.

Pourtant, ce boxeur peut avoir le contact chaleureux.

"Il est extraordinairement séduisant dans la relation directe donc il vous entourloupe", raconte un soutien historique. "Est-ce qu'il ne s'entourloupe pas lui-même?"

A l'heure de la dissolution, le poids de son entourage, essentiellement masculin, dans ce palais du 55 rue du Faubourg Saint-Honoré qui enferme et isole, est plus décrié que jamais.

"Il a toujours préféré les coups, et leur effet de +blast+, aux conséquences d'une décision", lâche un ex-conseiller de l'exécutif. "Il n'a pas de réseaux de terrain. Les gens auprès de lui sont pareils, ils ne représentent pas l'humeur du temps", renchérit un ancien ténor du gouvernement.

Rares sont ceux qui osent lui dire qu'il a tort. Brigitte Macron en fait partie. "Elle a toujours été un agent de tempérance", résume son camarade de l'ENA.

Emmanuel Macron balaie ces critiques: "Les décisions les plus lourdes, vous les prenez seul".


La France rapatrie treize femmes et enfants depuis les camps en Syrie, une première depuis deux ans

La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
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  • La France a rapatrié dix enfants et trois femmes détenus dans des camps jihadistes en Syrie, marquant la première opération du genre depuis deux ans
  • Deux femmes ont été placées en garde à vue, et une troisième présentée à un juge antiterroriste

PARIS: La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui étaient détenus dans des camps de prisonniers jihadistes dans le nord-est de la Syrie, une première depuis deux ans.

Parmi les femmes, "deux ont été placées en garde à vue, sur commission rogatoire du juge d'instruction", a annoncé le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué.

"Une autre femme, faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, sera présentée à un juge d'instruction dans la journée" en vue d'une possible mise en examen, a-t-il ajouté.

"Les mineurs sont pris en charge dans le cadre de procédures d'assistance éducative sous la responsabilité du parquet" de Versailles, a indiqué le Pnat, qui "assurera le suivi centralisé des mineurs concernés, en lien avec les parquets territoriaux".

"La France remercie les autorités syriennes de transition ainsi que l'administration locale du Nord-Est syrien qui a rendu possible cette opération", a déclaré de son coté le porte-parole du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

Cette opération est une première depuis juillet 2023 en France, où ces retours restent une question sensible, dix ans après la vague d'attentats jihadistes sur le sol national.

Au total, 179 enfants et 60 femmes adultes ont été rapatriées depuis 2019, précise une source diplomatique.

Mais ces opérations avaient cessé à l'été 2023, faute de volontaires selon les autorités, et ce malgré des condamnations internationales dont celle de la Cour européenne des droits de l'Homme en 2022.

- "Arbitraire" -

"Pour les familles qui attendaient leurs petits-enfants, neveux et nièces depuis plus de six ans, c'est un immense et indescriptible soulagement", a déclaré l'avocate des femmes rapatriées, Marie Dosé, dans un communiqué transmis à l'AFP.

Mais "la France laisse derrière elle 110 autres enfants français, toujours détenus dans le camp Roj", l'un des camps contrôlés comme d'autres centres et prisons par les forces kurdes, depuis plus de six ans, dénonce-t-elle.

Des dizaines de milliers de personnes, d'une cinquantaine de nationalités et soupçonnées de liens avec l'organisation jihadiste État islamique, sont retenues dans ces camps.

En juin, quelque 120 enfants et une cinquantaine de femmes françaises y étaient encore retenus, selon le Collectif des Familles unies, qui rassemble leurs proches.

Après ce rapatriement nocturne, ce collectif a rediffusé sur X mardi matin son message habituel dénonçant la détention sur place d'enfants "coupables de rien" dans "des conditions indignes".

Car pour ces familles, rien n'est encore réglé. "Une nouvelle fois, la France fait le choix de l'arbitraire", regrette Marie Dosé.

"La France, qui refusait de rapatrier des enfants tant que leurs mères n'avaient pas donné leur accord, refuse aujourd'hui leur retour alors qu'ils sont devenus majeurs. Ce faisant et plus que jamais, la France décide donc de faire payer à ces enfants le choix de leurs parents", estime-t-elle aussi.

Elle dénonce également le sort de femmes sans enfant ou dont les enfants sont décédés, et que la France refuse désormais de rapatrier, ainsi que d'enfants nés en France et "conduits de force en Syrie" avant de pouvoir acquérir la nationalité, ou de jeunes majeurs enfermés dans d'autres lieux de détention syriens.

Pour Matthieu Bagard, responsable du pôle expertise Syrie de l'ONG Avocats sans frontières France, "ce rapatriement démontre une nouvelle fois que la France a la possibilité d'organiser ces opérations". Mais il déplore lui aussi la situation des femmes et jeunes majeurs toujours "illégalement détenus".

En février, l'administration kurde a annoncé, en coordination avec l'ONU, son intention de vider d'ici fin 2025 les camps du nord-est de la Syrie des déplacés syriens et irakiens, y compris les proches présumés de jihadistes.


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
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  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.