Législatives: le flou du RN sur la TVA sur les carburants

De manière générale, les propositions du RN visant à réduire la facture énergétique des Français sont critiquées par des instituts économiques marqués à droite comme à gauche. (Photo, AFP)
De manière générale, les propositions du RN visant à réduire la facture énergétique des Français sont critiquées par des instituts économiques marqués à droite comme à gauche. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 28 juin 2024

Législatives: le flou du RN sur la TVA sur les carburants

  • A deux jours du 1er tour des législatives, Jordan Bardella, qui ambitionne de devenir le premier chef de gouvernement d'extrême droite de la Ve République, promet une baisse de 20 à 5,5% de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur l'essence et le diesel
  • Pour étayer leur argumentaire, les responsables du RN citent régulièrement l'exemple de la Pologne, qui aurait abaissé sa TVA sur les carburants à 8,5%

PARIS: Une baisse de la TVA sur les carburants à 5,5% inapplicable au regard des textes européens, un exemple polonais relevant d'une situation exceptionnelle: le flou domine dans les promesses du RN pour réduire la facture à la pompe des Français.

A deux jours du 1er tour des législatives, Jordan Bardella, qui ambitionne de devenir le premier chef de gouvernement d'extrême droite de la Ve République, promet une baisse de 20 à 5,5% de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur l'essence et le diesel, au même titre que celle promise pour l'électricité, le gaz et le fioul "dès l'été".

Les automobilistes profiteront d'une baisse du coût de leur plein pour leur départ en vacances, a assuré Jean-Philippe Tanguy, le "Monsieur économie" du RN, alors que les taxes représentent quelque 60% des prix de l'essence et du gazole.

Ce n'est pourtant pas si simple: pour respecter ses objectifs climatiques, l'UE ne prévoit pas les mêmes possibilités en matière de réduction de TVA pour l'essence et le gazole d'une part, l'électricité et le gaz naturel d'autre part.

Afin d'harmoniser la fiscalité entre les Etats membres, une directive européenne de 2006, révisée en avril 2022, fixe le "taux normal" de TVA à au moins 15% et permet bien de descendre à au moins 5% pour 29 catégories de biens et services, dont l'électricité et le gaz, sans qu'il soit nécessaire de demander une dérogation à Bruxelles, et "sans limite temporelle", explique la Commission européenne à l'AFP.

Mais "les carburants ne peuvent pas bénéficier d’un taux réduit", indique-t-elle aussi: ils ne font pas partie des biens et services listés par la directive.

Baisser leur taux à 5,5%, ce n'est donc "pas du tout possible", confirme Vincent Couronne, enseignant chercheur en droit à l'Université Versailles St-Quentin-en-Yvelines.

Le faire serait "illégal", commente Nicolas Goldberg, associé énergie chez Colombus Consulting et responsable énergie au sein du think tank Terra Nova, de tendance social-démocrate, le 17 juin sur RMC.

"Quand la France parle, l'Europe doit suivre"

Sur RTL le 21 juin, Jean-Philippe Tanguy a expliqué que le RN anticipait une négociation "ardue" avec Bruxelles sur les carburants pour obtenir une "dérogation temporaire" puis une "dérogation définitive", plus "difficile à négocier".

"Si on sent que l'UE est réticente, on baissera d’abord la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, NDLR), mais l'objectif final, c'est bien de baisser la TVA. La France est la deuxième contributrice de l’UE: quand la France parle, l'Europe doit suivre", fait valoir un responsable du RN auprès de l'AFP.

Mais "dans la directive TVA, il n'y a pas de possibilité de demander de dérogation" sur les carburants, relève Vincent Couronne.

Quant à renégocier le texte dans son entièreté, des experts soulignent l'extrême difficulté de la chose.

Dans Le Monde, l'ex-candidate à la présidentielle Marine Le Pen a évoqué un scénario: "Dans l'attente de négocier à Bruxelles l'autorisation de baisser la TVA sur le carburant à 5,5%, nous l'abaisserons au taux intermédiaire autorisé, soit 15%, et nous baisserons l'accise – en l'occurrence la TICPE - du montant équivalent".

Pour Vincent Couronne, il pourrait certes être possible de demander à Bruxelles une dérogation pour réduire la TICPE, qui est un "droit d'accise", un impôt indirect, sur les carburants, comme le permet l'article 19 de la directive européenne de 2003 sur ces mêmes droits. Mais la procédure prendrait, selon lui, plusieurs mois.

Contexte exceptionnel en Pologne

Pour étayer leur argumentaire, les responsables du RN citent régulièrement l'exemple de la Pologne, qui aurait abaissé sa TVA sur les carburants à 8,5% grâce à une dérogation de "plus de 18 mois".

Mais si Varsovie l'a effectivement réduite de 23% à 8% pendant une dizaine de mois, entre février et décembre 2022, dans le cadre d'un "bouclier anti-inflation", c'était pour faire face à la crise énergétique intervenue dans le sillage de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Une décision exceptionnelle dans un contexte exceptionnel.

"A l'époque, aucune dérogation n'était nécessaire car il y avait une crise du carburant et les prix de toutes les sources d'énergie montaient en flèche", rappelle Andrzej Szczęśniak, expert dans le domaine énergétique.

Depuis, le taux polonais de TVA sur les carburants est revenu à 23% au 1er janvier 2023.

De manière générale, les propositions du RN visant à réduire la facture énergétique des Français sont critiquées par des instituts économiques marqués à droite comme à gauche parce que le financement du manque à gagner de plusieurs milliards d'euros qu'induiraient les réductions de taxes est jugé imprécis, ou parce que ces mesures risqueraient de compromettre les objectifs climatiques de la France.

 

 


La "loi spéciale" au Parlement, rendez-vous en janvier pour reparler budget

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu et le ministre français de l'Économie et des Finances Roland Lescure quittent l'Élysée après la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu et le ministre français de l'Économie et des Finances Roland Lescure quittent l'Élysée après la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • Faute d’accord sur le budget de l’État, le Parlement vote une loi spéciale pour reconduire provisoirement le budget 2025 et assurer le fonctionnement de l’État
  • Les débats budgétaires reprendront en janvier, sur fond de déficit élevé, de tensions politiques et de discussions autour d’un possible recours au 49.3

PARIS: Le Parlement pose une rustine sur ses désaccords budgétaires. L'Assemblée nationale et le Sénat devraient voter tour à tour mardi la "loi spéciale" présentée par le gouvernement pour continuer de financer provisoirement l'État et les administrations.

Les votes des deux assemblées ponctuent deux mois et demi de débats budgétaires qui se soldent par un échec partiel pour le Premier ministre Sébastien Lecornu.

Le dialogue privilégié engagé par le Premier ministre avec le Parti socialiste a permis l'adoption du budget de la Sécurité sociale pour 2026, au prix de concessions sur les retraites et le financement de la Sécurité sociale.

Mais les profondes divergences entre l'Assemblée nationale et le Sénat, tenu par des partis de droite et du centre hostiles à tout prélèvement supplémentaire, ont empêché l'approbation du second texte budgétaire, celui sur le financement de l'État.

Les parlementaires se retrouveront donc en début d'année pour de nouvelles joutes sur ce texte, alors que la France est confrontée à un endettement croissant et que les discussions budgétaires n'ont pas permis de dessiner une trajectoire de réduction des déficits.

"Nous devrons au plus vite, en janvier, donner un budget à la nation" qui "devra tenir l'objectif de 5% de déficit et financer nos priorités", a déclaré Emmanuel Macron lundi soir lors du Conseil des ministres, selon la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

"L'Élysée commence à s'impatienter", glissait lundi un cadre du camp gouvernemental.

Rentré d'Abou Dhabi où il était allé célébrer Noël avec les troupes françaises, Emmanuel Macron a présidé lundi soir un Conseil des ministres de crise pour la présentation de la loi spéciale.

- Pas de dépense nouvelle -

Le texte reconduit temporairement le budget de 2025, il permet de lever l'impôt et de payer les fonctionnaires. Mais il ne comprend pas de dépenses nouvelles, y compris sur la défense, érigée en priorité face à la menace russe.

Ce projet de loi spéciale devrait être voté mardi en toute fin d'après-midi par l'Assemblée nationale, puis dans la soirée par le Sénat. A l'unanimité ou presque. Avant d'être promulgué dans les jours suivants par le chef de l'État.

Déjà l'an dernier, l'exécutif avait dû y avoir recours après la chute du gouvernement de Michel Barnier, renversé par une motion de censure sur le budget de la Sécurité sociale. Les deux textes budgétaires 2025 avaient finalement été approuvés au mois de février, quelques semaines après l'arrivée de François Bayrou à Matignon.

Anticipant la reprise des débats en janvier, Sébastien Lecornu a reçu dimanche et lundi les forces politiques, à l'exception de la France insoumise et du Rassemblement national. Un ballet devenu habituel de responsables politiques exprimant leurs exigences et lignes rouges rue de Varenne, à l'issue de ces entretiens.

Le premier secrétaire du PS Olivier Faure a appelé à un budget qui ne fasse pas "peser les efforts sur les plus modestes" et préserve les investissements en matière d'écologie.

Quant à la cheffe des députés écologistes Cyrielle Châtelain, elle s'est inquiétée d'une copie budgétaire trop calquée sur les positions du Sénat. En cas de 49.3, les Ecologistes choisiront "la censure", a-t-elle prévenu.

Car on reparle de plus en plus de cet outil constitutionnel permettant de faire adopter un texte sans vote, sauf motion de censure.

Écarté par le Premier ministre à la demande des socialistes, qui le jugent brutal, il est évoqué avec insistance par des responsables de droite et du bloc central qui lui demandent de revenir sur son engagement.

Il faudrait alors pour le gouvernement trouver avec les socialistes des conditions de non-censure. Pour espérer enfin tourner la page du débat budgétaire.

Mais pour l'heure, Sébastien Lecornu s'y refuse, jugeant le projet de budget "encore votable sans intervention du gouvernement", selon Mme Bregeon.


France: Conseil des ministres spécial pour tenter de sortir de l'impasse budgétaire

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron convoque un conseil des ministres extraordinaire pour présenter une loi spéciale afin d’assurer le financement de l’État face à l’impasse budgétaire
  • Les discussions sur un budget 2026 reprendront rapidement : le gouvernement vise une adoption d’ici fin janvier, dans un contexte de fortes divergences

PARIS: Le président français Emmanuel Macron préside lundi un conseil des ministres extraordinaire qui devrait conduire à l'adoption rapide par le Parlement d'une loi spéciale, destinée à financer l'Etat et ses administrations malgré l'impasse budgétaire.

Le Premier ministre Sébastien Lecornu doit poursuivre dans la journée de lundi ses consultations des différentes formations politiques "pour trouver les conditions d'une solution".

Une commission de sénateurs et députés a échoué vendredi à trouver un accord sur le projet de loi de finances pour l'année à venir.

A l'issue de ces discussions, un conseil des ministres de crise destiné à présenter le projet de loi spéciale est prévu en fin de journée, au retour du président Emmanuel Macron d'Abou Dhabi, où le chef d'État a annoncé devant des militaires français le coup d'envoi de la construction du futur porte-avions destiné à remplacer le Charles De Gaulle.

Dans la foulée, les commissions des Finances de l'Assemblée nationale et du Sénat auditionneront lundi soir et mardi le ministre de l'Économie Roland Lescure et la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin, sur ce projet de loi. L'objectif est que ce texte spécial puisse être voté mardi par les deux chambres.

Mais il faudra dès la rentrée reprendre les discussions pour tenter de trouver un budget 2026, car la loi spéciale "c'est un service minimum", a martelé Amélie de Montchalin.

La ministre a indiqué dimanche soir sur la chaîne BFMTV que l'objectif est d'adopter une véritable loi de finance 2026 avant "la fin janvier", y compris avec "quelques hausses d'impôts", une des demandes notamment du Parti socialiste - partenaire privilégié de Sébastien Lecornu lors de l'examen du budget de la Sécurité sociale, et à qui il a concédé notamment la suspension de la réforme des retraites.

Reste qu'après deux mois de discussions qui n'ont pas permis d'aboutir, le doute subsiste sur la capacité du Premier ministre à obtenir ce compromis, entre une droite sénatoriale attachée aux économies et aux baisses d'impôts et une Assemblée où la gauche réclame plus de recettes et moins de coupes budgétaires.


Macron donne le coup d'envoi du futur porte-avions lors du Noël avec les troupes

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux troupes françaises lors d'une cérémonie à la base du 5e régiment de cuirassiers à Zayed Military City, près d'Abou Dhabi, le 21 décembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux troupes françaises lors d'une cérémonie à la base du 5e régiment de cuirassiers à Zayed Military City, près d'Abou Dhabi, le 21 décembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux troupes françaises lors d'une cérémonie à la base du 5e régiment de cuirassiers à Zayed Military City, près d'Abou Dhabi, le 21 décembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux troupes françaises lors d'une cérémonie à la base du 5e régiment de cuirassiers à Zayed Military City, près d'Abou Dhabi, le 21 décembre 2025. (AFP)
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  • Plus grand et plus puissant, ce bâtiment symbolise l’ambition stratégique et industrielle de la France, malgré les contraintes budgétaires et les débats sur l’évolution des menaces

ABOU DHABI: Emmanuel Macron a donné dimanche le coup d'envoi de la construction du futur porte-avions français destiné à remplacer le Charles De Gaulle et qui doit entrer en service en 2038.

"Ce nouveau porte-avions sera l'illustration de la puissance de notre nation, puissance de l'industrie, de la technique, puissance au service de la liberté sur les mers et dans les remous du temps", a-t-il assuré.

L'annonce du lancement officiel de la construction était très attendue malgré l'impasse budgétaire dans laquelle se trouve le gouvernement, alors que le mur d'investissements nécessaires et l'évolution des menaces mettent le projet sous pression.

"Conformément aux deux dernières lois de programmation militaire, et après un examen complet et minutieux, j'ai décidé de doter la France d'un nouveau porte-avions", a annoncé le chef de l'Etat français lors du Noël avec les troupes à Abou Dhabi.

"La décision de lancer en réalisation ce très grand programme a été prise cette semaine", a-t-il ajouté.

Lui aussi à propulsion nucléaire, le nouveau porte-avions sera beaucoup plus massif que l'actuel. Il fera près de 80.000 tonnes pour environ 310 mètres de long, contre 42.000 tonnes pour 261 mètres pour le Charles De Gaulle. Avec un équipage de 2.000 marins, il pourra embarquer 30 avions de combat.

Le risque d'un "choc dans trois, quatre ans" face à la Russie évoqué par les armées fait craindre que les budgets ne filent vers des priorités plus pressantes.

De récents propos du chef d'état-major des armées, le général Fabien Mandon, jugeant qu'on "ne peut pas se contenter de reproduire un outil qui a été conçu à la moitié du siècle dernier", semblent mettre aussi en question le concept du porte-avions.

Le général a notamment souligné le "besoin de permanence à la mer" du bâtiment et sa capacité d'emport de "drones de tous types".

Un seul bâtiment, en l'occurence le Charles De Gaulle, est disponible 65% du temps, selon la Marine. Un décalage de la construction et donc de l'entrée en service de son successeur laisserait la Marine sans porte-avions.

Une étude menée à l'occasion du prochain arrêt technique majeur du Charles De Gaulle permettra de dire en 2029 si le bâtiment peut être prolongé de quelques années au-delà de 2038, en fonction de l'état de ses chaufferies nucléaires et de sa structure.

Le président français Emmanuel Macron a fait cette annonce lors d'une visite aux Emirats arabes unis, allié militaire avec lequel Paris souhaite renforcer son "partenariat stratégique" et dont il espère plus de coopération dans sa lutte contre le narcotrafic.