La France commence à voter samedi pour des législatives historiques

Le député européen Raphael Glucksmann (à droite) arrive pour prononcer un discours lors d'une visite de soutien à la campagne d'un candidat local de la coalition de gauche "Nouveau Front Populaire" pour les élections législatives, à Rouen avec la cathédrale en arrière-plan, dans le nord-ouest de la France, le 28 juin 2024. (Photo Lou Benoist  AFP)
Le député européen Raphael Glucksmann (à droite) arrive pour prononcer un discours lors d'une visite de soutien à la campagne d'un candidat local de la coalition de gauche "Nouveau Front Populaire" pour les élections législatives, à Rouen avec la cathédrale en arrière-plan, dans le nord-ouest de la France, le 28 juin 2024. (Photo Lou Benoist AFP)
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Publié le Samedi 29 juin 2024

La France commence à voter samedi pour des législatives historiques

  • Quelque 49 millions d'électeurs français sont appelés à renouveler la totalité de l'Assemblée nationale, soit 577 députés, lors de ce scrutin à deux tours, dimanche et le 7 juillet, qui pourrait bouleverser durablement l'horizon politique de la France
  • Samedi, les électeurs français de Saint‑Pierre‑et‑Miquelon ont ouvert le bal à 08H00 locales (10H00 GMT) et ceux des Antilles, de Guyane, de Polynésie française ou encore ceux vivant sur le continent américain leur emboîtent le pas

PARIS : Le premier tour d'élections législatives historiques a débuté samedi en France avec l'ouverture des bureaux de vote de certains territoires d'outre-mer et la participation est attendue en forte hausse ce week-end à ce scrutin où l'extrême droite est donnée favorite loin devant le camp du président Emmanuel Macron.

Quelque 49 millions d'électeurs français sont appelés à renouveler la totalité de l'Assemblée nationale, soit 577 députés, lors de ce scrutin à deux tours, dimanche et le 7 juillet, qui pourrait bouleverser durablement l'horizon politique de la France.

Le chef de l'Etat a provoqué ces élections anticipées en annonçant le 9 juin la dissolution de l'Assemblée, le soir même de la victoire de l'extrême droite aux élections européennes.

Samedi, les électeurs français de SaintPierreetMiquelon, archipel de l'Atlantique Nord proche du Canada, ont ouvert le bal à 08H00 locales (10H00 GMT) et ceux des Antilles, de Guyane, de Polynésie française ou encore ceux vivant sur le continent américain leur emboîtent le pas.

Les Français de métropole se rendront aux urnes dimanche.

Report de vacances, explosion du nombre de procurations, les électeurs devraient être nombreux à se mobiliser pour ce scrutin à suspense, dont la principale inconnue est de savoir si l'Assemblée nationale sera dominée pour la première fois de la Ve République par l'extrême droite.

Le jeune responsable du parti d'extrême droite du Rassemblement national (RN) Jordan Bardella, 28 ans, peut-il remplacer au poste de Premier ministre Gabriel Attal, le chef de la majorité sortante ? La gauche peut-elle créer une surprise ? A défaut de réponses définitives, les premiers résultats attendus dès 20H00 dimanche devraient permettre d'y voir plus clair.

La campagne éclair s'est achevée vendredi à minuit. Jusqu'à dimanche soir, les candidats n'ont plus le droit de parole dans les médias ou de se déplacer sur le terrain et la publication des sondages est interdite.

Sondeurs et politiques s'attendent à une participation en très forte hausse par rapport aux législatives de 2022, pour lesquelles 47,51% des électeurs s'étaient déplacés. Cette fois-ci, la participation pourrait atteindre voire dépasser les deux tiers des inscrits.

Ce regain est dû en partie aux conséquences potentiellement historiques de ces législatives qui, pour la première fois depuis 1997, ne seront pas alignées avec le scrutin présidentiel.

- Le camp Macron sous pression -

Signes de la forte mobilisation attendue les 30 juin et 7 juillet : le nombre de procurations a grimpé en flèche pour dépasser les 2 millions, et le vote en ligne ouvert jusqu'à jeudi aux Français résidant à l'étranger a atteint un record (410.000 votes contre 250.000 en 2022).

Deux enquêtes d'opinion parues vendredi (Ifop pour LCI-Figaro-Sud Radio, et Odoxa pour Public Sénat-presse régionale-Nouvel Obs) créditaient le camp d'extrême droite de 35 à 36,5% des voix.

L'alliance du Nouveau Front populaire qui réunit tous les partis de gauche dont La France Insoumise (LFI, gauche radicale), est, elle, donnée autour de 27,5-29% des voix, quand le camp macroniste serait relégué autour des 20,5-21% des suffrages, selon ces instituts.

Et selon certaines enquêtes d'opinion, l'obtention d'une majorité absolue (289 députés au moins) est désormais envisageable pour le Rassemblement national et ses alliés.

Les projections en siège se heurtent toutefois à de sérieuses inconnues, à commencer par le nombre de triangulaires (trois candidats au second tour) dimanche soir, attendu en très forte hausse là encore, et le nombre de désistements dans les heures qui suivront pour tenter d'unir des voix contre le RN.

C'est sur le camp d'Emmanuel Macron que la pression est la plus forte. Le président français a promis jeudi «la plus grande clarté» sur l'attitude à suivre dans l'entre-deux tours. Plusieurs figures du camp présidentiel poussent de leur côté pour un accord de désistement clair, voire pour la fin de la tentation du «ni RN, ni LFI».

- Faire plus et mieux -

La campagne, qui a duré trois semaines, a été marquée par des incidents sur le terrain avec plusieurs candidats et militants agressés dans un contexte d'antagonismes exacerbés entre les trois blocs qui s'accusent mutuellement de violences.

Elle s'est achevée sur les accusations de Gabriel Attal de racisme à l'encontre de candidats du RN.

Vendredi, sur la chaîne de télévision M6, le Premier ministre a assuré avoir «compris le message qui a été envoyé au moment des élections européennes».

L'étoile montante des centristes espère toujours déjouer des pronostics défavorables pour le camp présidentiel.

«On nous dit qu'il faut faire plus et mieux sur le pouvoir d'achat, la sécurité notamment. On nous dit qu'il faut aussi faire différemment, associer davantage les Français à nos décisions (...)», a déclaré le Premier ministre, appelant à pouvoir «appliquer» lui-même ce programme à l'issue du scrutin.

Le chef de l'Etat Emmanuel Macron réunira lundi à midi Gabriel Attal et ses ministres au palais présidentiel de l'Elysée à six jours du second tour, a appris l'AFP de sources gouvernementales. Les questions des désistements et de la stratégie face à l'extrême droite seront sans aucun doute au menu des discussions.


Salamé au 20H: Glucksmann «très fier» mais reconnaît une «incompatibilité» s'il concourt en 2027

L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027. (AFP)
L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027. (AFP)
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  • Interrogé sur la position de Léa Salamé s'il venait à concourir à la présidentielle en 2027, il a reconnu que "c'est évident que ce sera dans ce cas-là un problème et une incompatibilité", sans lever davantage le voile sur ses intentions
  • "On est en 2025 et une femme n'a pas les opinions politiques de son mari et je peux vous garantir d'ailleurs que, en l'occurrence, c'est probablement très vrai sur certains sujets"

PARIS: L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027.

"J'ai été extrêmement fier et j'ai trouvé que c'était un moment incroyable pour elle donc c'est ma fierté pour elle, pour ce qu'elle représente, pour ce à quoi elle aspire", a déclaré le chef de Place publique sur franceinfo, rappelant que le couple "a toujours su bien être complètement séparés dans (ses) carrières".

Interrogé sur la position de Léa Salamé s'il venait à concourir à la présidentielle en 2027, il a reconnu que "c'est évident que ce sera dans ce cas-là un problème et une incompatibilité", sans lever davantage le voile sur ses intentions.

"On est en 2025 et une femme n'a pas les opinions politiques de son mari et je peux vous garantir d'ailleurs que, en l'occurrence, c'est probablement très vrai sur certains sujets", a ajouté le responsable politique, qui s'exprime très rarement sur sa vie privée.

Ne sont-ils pas d'accord sur tout ? "Ah ben non, non, d'ailleurs, c'est un fait que je partage devant vous", a-t-il ironisé.

Mais "à la fin, je vous dis, il n'y aura pas de conflit d'intérêts en cas de" candidature à la présidentielle, a-t-il conclu.

Alors que le gouvernement Bayrou est à quelques jours de sa très probable chute, les manœuvres vont bon train pour sa succession, le PS souhaitant être appelé à former un gouvernement.

"Je veux une personnalité de gauche", a expliqué Raphaël Glucksmann, soucieux "d'essayer autre chose", "une autre méthode" après "deux gouvernements minoritaires de droite successifs".

Mais, a-t-il prévenu, "la personnalité qui doit faire un travail qui est très ingrat" comme Premier ministre sans majorité parlementaire, "ne doit pas être suspecté d'avoir des ambitions pour la suite parce que sinon, les forces politiques a priori de toute façon refuseront de lui faire des cadeaux".

"Je serais suspecté de cela", a-t-il estimé.


LR ne censurera «ni un gouvernement PS, ni un gouvernement RN», assure Wauquiez

La ministre déléguée et porte-parole du gouvernement français Sophie Primas, le ministre français des Outre-mer Manuel Valls et le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement Patrick Mignola quittent l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 3 septembre 2025. (AFP)
La ministre déléguée et porte-parole du gouvernement français Sophie Primas, le ministre français des Outre-mer Manuel Valls et le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement Patrick Mignola quittent l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 3 septembre 2025. (AFP)
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  • Selon son entourage, le patron des députés LR a défini cette ligne "dès l'été 2024" après la dissolution, lorsqu'il s'était engagé à "ne censurer d'office aucun gouvernement, sauf s'il y a des ministres LFI"
  • "Mais évidemment, on ne s'interdit rien ensuite en fonction de la politique qui est menée", a ajouté cette source

PARIS: Les Républicains ne censureront "ni un gouvernement PS, ni un gouvernement RN" pour éviter "une instabilité catastrophique", a assuré jeudi le patron des députés LR Laurent Wauquiez qui a cependant précisé qu'un "grand nombre" de ses troupes ne votera pas la confiance lundi à François Bayrou.

"On ne censurera pas un gouvernement socialiste, on ne censurera pas un gouvernement RN", a affirmé le député de Haute-Loire sur BFMTV.

"Nous ne faisons pas partie de ceux qui font tomber des gouvernements dans ce pays, tout simplement (...) parce que je pense que l'instabilité est catastrophique pour le pays".

Selon son entourage, le patron des députés LR a défini cette ligne "dès l'été 2024" après la dissolution, lorsqu'il s'était engagé à "ne censurer d'office aucun gouvernement, sauf s'il y a des ministres LFI".

"Mais évidemment, on ne s'interdit rien ensuite en fonction de la politique qui est menée", a ajouté cette source.

Comme Nicolas Sarkozy dans Le Figaro mardi, Laurent Wauquiez a estimé que le Rassemblement national "fait partie de l'arc républicain", tout en reprochant au parti d'extrême droite de ne pas vouloir "réguler l'assistanat".

"Un parti qui se présente à des élections, qui a des élus et qui n'est pas interdit et qui est légal, bien sûr qu'il est dans l'arc républicain", a affirmé celui qui a plaidé ce printemps pour une alliance des droites allant de Gérald Darmanin à Sarah Knafo (Reconquête).

Avant le vote de confiance de lundi à l'Assemblée, qui devrait acter la chute du gouvernement, il s'est déclaré "déçu" par François Bayrou, qui ne s'est pas engagé publiquement à revenir sur la suppression de deux jours fériés, alors qu'il "m'avait donné son accord" lors d'une réunion avec la direction de LR mardi à Matignon.

"J'espère qu'aujourd'hui ou demain ce sera clarifié de façon beaucoup plus nette", a ajouté le député de Haute-Loire, laissant entendre que tous les députés LR ne suivront pas dans ces conditions les mots d'ordre du parti pour soutenir le chef du gouvernement.

"A l'intérieur aujourd'hui des Républicains, si jamais la voix de la France qui travaille n'est pas entendue, il y a un grand nombre de députés qui ne voteront" pas la confiance, a-t-il assuré, précisant que lui-même la votera "sans enthousiasme, mais par esprit de responsabilité".


Entre Bayrou et le PS, la défiance règne

Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais de l'Élysée après une réunion hebdomadaire du cabinet, le 3 septembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais de l'Élysée après une réunion hebdomadaire du cabinet, le 3 septembre 2025. (AFP)
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  • La tentative de François Bayrou de construire un "grand courant central" en s’alliant à l’aile modérée du PS a échoué, sur fond de malentendus historiques et tensions autour du budget 2025
  • Le Parti socialiste refuse désormais tout compromis, dénonçant une "provocation" dans la méthode Bayrou

PARIS: A Matignon, François Bayrou devait assurer la stabilité en nouant des accords avec le PS. Neuf mois plus tard, le Premier ministre est proche de la chute, ultime chapitre d'une "histoire d'actes manqués" entre les socialistes et le fondateur du MoDem.

François Bayrou connaît ses classiques. Hors micro, il lui arrive de citer cette réplique d'un film dialogué par Michel Audiard: "J'ai été enfant de choeur. Mon père tenait un bistrot. Et j'ai été militant socialiste. C'est dire si j’ai entendu des conneries dans ma vie".

Fasciné par François Mitterrand, mais ancien ministre d’Édouard Balladur et d'Alain Juppé, le patron du MoDem n'est pas d'obédience socialiste. Mais depuis qu'il a choisi d'émanciper le centre de la droite, la frange sociale-démocrate du PS fait l'objet de ses convoitises dans le but de forger ce "grand courant central de la vie politique française". Contrariant ainsi le parti à la rose et son logiciel d'union de la gauche.

"Quelle différence entre Delors et moi ? Entre Jean-Yves Le Drian et moi ? Aucune", a régulièrement plaidé, en privé, le Premier ministre, qui a longtemps espéré le soutien de Michel Rocard en 2007.

Entre François Bayrou et le PS, le premier épisode de cette "histoire d'actes manqués" --expression du premier vice-président du MoDem Marc Fesneau-- date de cette année-là, Ségolène Royal, en ballotage défavorable face à Nicolas Sarkozy, cherchant en vain l'alliance avec le centriste, jusque sous ses fenêtres du 7e arrondissement de Paris.

Le malentendu s'est accentué en 2012 quand François Bayrou, après avoir voté pour François Hollande --"c'est moi qu'il l'ai fait élire", estime-t-il-- se retrouve battu aux législatives par une candidate PS.

Renversement de tendance en 2017: François Bayrou s'allie avec Emmanuel Macron. Moribond après le quinquennat de François Hollande, le PS subit la fuite de ses cadres. Mais sept ans plus tard, le vent a tourné, le président a dissout l'Assemblée et le PS, bien qu'allié avec La France insoumise, est redevenu incontournable.

Après l'échec de Michel Barnier, censuré par le RN dont il convoitait la mansuétude, "le pari de Bayrou était de traiter avec les socialistes", explique un proche. Lesquels, moyennant quelques concessions, laissent passer le budget 2025.

-"Provocation"-

"On a considéré qu’il fallait lui laisser le bénéfice du doute. On se disait que le budget était plutôt imaginé par Attal et élaboré par Barnier. Mais là, c’est le sien. Ce qu’il propose le 15 juillet, c’est une véritable provocation", explique le président des sénateurs socialistes, Patrick Kanner.

Dès l'hiver, les relations se sont rapidement dégradées. Après sa sortie sur le "sentiment" de "submersion" migratoire, les socialistes déposent une motion de censure. "François les a atomisés", se remémore un proche.

L'affaire Bétharram fournit un nouvel épisode, avec une question piquante posée à l'Assemblée par Colette Capdevielle, députée PS des Pyrénées-Atlantiques, le fief du Premier ministre.

Nouvelle contrariété avec la réélection d'Olivier Faure, artisan de l'alliance avec LFI, à la tête du PS. Jusqu'à l'échec du "conclave" sur les retraites qui fragilise la méthode Bayrou.

Dès les annonces du 15 juillet, les socialistes promettent la censure. François Bayrou ne quitte pas Paris mais aucune négociation ne s'enclenche. "Ils étaient en vacances", avance le Premier ministre. Nouveau psychodrame.

"Je me suis dit: un Bayrou qui s’est imposé comme Premier ministre à Macron, il va aussi imposer une méthode, une façon de travailler différemment. Et il ne se passe rien. C'est l'inverse", explique le député PS Jérôme Guedj.

"Bayrou n'a mis personne en condition de voter la confiance. Même avec la meilleure volonté du monde, c'était compliqué", explique une proche de François Hollande. Lequel a pourtant "activement travaillé contre la censure".

François Bayrou annonce un vote de confiance, le PS la lui refuse quasi-immédiatement. Le contre-budget proposé par le PS achève de convaincre le MoDem qu'aucun compromis n'est possible. Rupture consommée.

"Le PS nous a toujours renvoyés dans un camp, n'a jamais ouvert son jeu aux modérés. Continûment, par confort, ils n’ont jamais accepté qu’on puisse être autre chose que le camp de la droite ou le camp Macron, en nous y enfermant", regrette Marc Fesneau.