Gaza: L'échec des réseaux sociaux face à la censure, aux discours haineux et à la désinformation 

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Publié le Lundi 05 août 2024

Gaza: L'échec des réseaux sociaux face à la censure, aux discours haineux et à la désinformation 

  • Depuis l’attaque menée par le Hamas le 7 octobre, déclencheur du conflit à Gaza, les réseaux sociaux sont submergés de contenus liés à la guerre
  • Meta, TikTok, X et Telegram ont promis de créer un environnement en ligne plus sûr et moins toxique, mais le processus manque de transparence

LONDRES : Meta, le mastodonte du numérique, vient d'annoncer une nouvelle politique de modération. L'entreprise s'apprête à supprimer les publications employant le terme « sioniste » pour désigner les Juifs ou les Israéliens, plutôt que les seuls partisans de l'idéologie politique. Cette mesure vise à endiguer la vague d'antisémitisme qui déferle sur ses plateformes.

La société mère de Facebook et Instagram avait précédemment déclaré qu’elle lèverait son interdiction générale du terme le plus modéré sur toutes ses plateformes – « shaheed », ou « martyr » en français – après qu’un examen d’un an par son conseil de surveillance ait jugé cette approche « trop large ».

TikTok, X et Telegram se sont également engagés à intensifier leurs efforts contre les discours haineux et la désinformation liés à la guerre à Gaza. 

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Des activistes dénoncent la censure exercée par les géants des médias sociaux, qui suppriment notamment des publications documentant les atteintes aux droits de l'homme à Gaza. (Images Getty)

Cependant, ces initiatives, censées assainir l’environnement en ligne, se révèlent souvent insuffisantes, voire contreproductives.

Nadim Nashif, directeur de l’ONG 7amleh, déclare à Arab News : « Les plateformes ont échoué à éviter la censure et à freiner les discours haineux sur le conflit à Gaza. La suppression de contenus a entravé la documentation des violations des droits humains sur le terrain. »

Nashif affirme que les discours haineux et l'incitation à la violence restent « généralisés », en particulier sur les plateformes Meta et X, où les contenus antisémites et islamophobes continuent « de se répandre largement ».

Depuis l'offensive du Hamas le 7 octobre, une déferlante de contenus liés au conflit a submergé les réseaux sociaux. Ces plateformes sont devenues une fenêtre essentielle sur les événements tragiques qui secouent la région. Elles se sont imposées comme une source cruciale d’informations en direct, permettant également de mettre en lumière les agissements des forces israéliennes.

On a reproché aux partisans du Hamas et aux sympathisants du gouvernement israélien la diffusion de contenus mensongers et incendiaires sur leurs profils respectifs.

En Bref

1,050
Suppressions et autres restrictions de contenus publiés sur Instagram et Facebook par des Palestiniens et leurs partisans, documentées par Human Rights Watch entre octobre et novembre 2023.

Malgré l’ampleur du phénomène, aucun géant du web – que ce soit Meta, YouTube, X, TikTok, ou encore les messageries comme Telegram – n’a présenté publiquement de stratégie concrète pour endiguer les propos haineux et les appels à la violence liés au conflit.

Ces plateformes demeurent ainsi submergées par un flot ininterrompu de propagande belliqueuse, de rhétorique déshumanisante, de propos génocidaires, d'incitations directes à la violence et de discours racistes. Paradoxalement, on observe des cas où ces mêmes réseaux censurent des contenus pro*palestiniens, bloquent des comptes et recourent parfois au shadow ban à l’encontre d’utilisateurs manifestant leur solidarité avec la population de Gaza.

Vendredi, l’autorité turque des communications a bloqué l’accès à Instagram. Les médias locaux ont rapporté que cette mesure faisait suite à la suppression par Instagram de publications d’utilisateurs turcs exprimant leurs condoléances après le récent assassinat à Téhéran du chef politique du Hamas, Ismaïl Haniyé.

La veille, le Premier ministre malaisien Anwar Ibrahim avait accusé Meta de lâcheté après la suppression de son post Facebook sur l’assassinat de Haniyé. « Que ceci serve de message clair et sans équivoque à Meta : cessez cette démonstration de lâcheté », a écrit Anwar, qui a maintes fois condamné la guerre d’Israël à Gaza et ses actions en Cisjordanie occupée, sur sa page Facebook.

Parallèlement, des vidéos choquantes circulent sans entrave sur les réseaux. On y voit prétendument des soldats israéliens détruisant mosquées et habitations, profanant le Coran, maltraitant des prisonniers palestiniens les yeux bandés, les exhibant ligotés sur des capots de véhicules militaires, ou encore se réjouissant d’actes qualifiables de crimes de guerre. Ces images restent aisément consultables sur tous les appareils mobiles.

« Historiquement, les plateformes ont toujours eu du mal à modérer les contenus sur Israël et la Palestine », a déclaré Nashif. « Tout au long de la guerre à Gaza, et du génocide plausible en cours, cela n'a fait que s'aggraver. »

Dans un rapport cinglant intitulé Les Promesses en l’air de Meta, publié en décembre, Human Rights Watch fustige le géant des réseaux sociaux. L’ONG dénonce une « censure systématique en ligne » et une « mise en œuvre arbitraire et obscure des règles de modération ». Ces pratiques, selon le rapport, contribuent à étouffer les voix propalestiniennes et les défenseurs des droits humains en Palestine sur Instagram et Facebook.

L'étude va plus loin, accusant Meta de manquer à ses « obligations de vigilance en matière de droits de l'homme ». Elle pointe du doigt des engagements restés lettre morte depuis des années et censés mettre fin à des « politiques de répression disproportionnées ».

Jacob Mukherjee, responsable du programme de master en communication politique à Goldsmiths, Université de Londres, a déclaré à Arab News : « Je ne suis pas sûr que l’on puisse même vraiment parler d'efforts pour arrêter la censure. »

« La plateforme Meta s’était engagée à revoir ses pratiques – une promesse qui remonte à la flambée de violence israélo-palestinienne de 2021 et qui a été réitérée avant les événements du 7 octobre dernier. Pourtant, à y regarder de près, les changements de fond restent minimes. Certes, l’entreprise a dû se défendre face aux accusations de censure, mais ces réponses semblent relever davantage d’une opération de communication que d’une véritable remise en question. »

Entre octobre et novembre 2023, Human Rights Watch a documenté plus de 1 050 suppressions et autres restrictions de contenus publiés sur Instagram et Facebook par des Palestiniens et leurs partisans, y compris des contenus sur les violations des droits de l’homme.

Sur ces cas, 1 049 concernaient des contenus pacifiques en soutien à la Palestine qui ont été censurés ou indûment supprimés, tandis qu’un seul cas concernait la suppression d’un contenu en soutien à Israël.

Toutefois, la censure n’est que la partie émergée de l’iceberg.

L’observatoire de la violence en ligne de 7amleh, qui analyse en temps réel les contenus violents en hébreu et en arabe sur les réseaux sociaux, a recensé plus de 8,6 millions de publications problématiques depuis l’éclatement du conflit.

Selon Nashif, cette prolifération de contenus violents et préjudiciables, majoritairement en hébreu, s’explique en grande partie par le sous-investissement des plateformes dans leurs dispositifs de modération.

Ces publications, ciblant essentiellement les Palestiniens sur Facebook et Instagram, ont servi de pièces à conviction à l’Afrique du Sud dans son action contre Israël devant la Cour internationale de justice.

Meta n’est cependant pas le seul acteur mis en cause dans ce que les juristes sud-africains qualifient de premier génocide retransmis en direct sur smartphones, ordinateurs et télévisions.

X se trouve également dans la ligne de mire, critiqué tant par les sympathisants propalestiniens que pro-israéliens. On lui reproche de laisser proliférer des comptes notoirement connus pour propager de fausses informations et des images manipulées, contenus souvent relayés par des figures influentes du monde politique et médiatique.

« L’un des principaux problèmes des systèmes actuels de modération de contenu est le manque de transparence », a déclaré Nashif.

« Concernant l’IA, les géants du Web restent évasifs sur les modalités d’utilisation de ces technologies dans leur processus de modération. Leurs politiques, souvent nébuleuses, leur offrent une latitude considérable dans leurs actions. »

Mukherjee voit dans cette opacité un enjeu profondément politique. Selon lui, les plateformes sont contraintes de jongler entre les pressions politiques et « les attentes de leur base d'utilisateurs », cherchant un équilibre délicat.

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Des activistes dénoncent la censure exercée par les géants des médias sociaux, qui suppriment notamment des publications documentant les atteintes aux droits de l’homme à Gaza. (Images Getty)

« Ces algorithmes d'IA peuvent servir de bouclier aux véritables décideurs, les mettant à l'abri des critiques et de toute responsabilité. C’est là que réside le véritable danger », souligne-t-il.

« Ces plateformes sont des monopoles privés qui sont essentiellement responsables de la régulation d'une partie importante de la sphère publique politique. »

« En d'autres termes, elles contribuent à façonner et à réguler l’arène dans laquelle les conversations prennent place, où les gens se forgent une opinion et à partir de laquelle les politiciens ressentent la pression de l’opinion publique. Pourtant elles ne sont absolument pas tenues responsables. »

Malgré des cas avérés de censure de contenus propalestiniens, révélés notamment par Arab News en octobre, les géants du numérique avaient déjà signifié, bien avant l’embrasement à Gaza, que la suppression massive de contenus allait à l’encontre de leurs intérêts.

« Ne nous y trompons pas », analyse Mukherjee, « ces plateformes n’ont pas été conçues dans un souci d’intérêt général. Leur objectif n’est pas de former une population éclairée, capable de se forger une opinion éclairée à partir d'un large éventail de points de vue. »

« La réalité est que ces modèles économiques se développent sur la base d’une abondance de contenu, qu’il soit propalestinien ou autre. L’essentiel est qu’il capte l’attention et suscite l’interaction. Dans le jargon du secteur, on parle de contenu 'engageant'. Et qui dit engagement, dit données et, in fine, revenus. »

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com  

 


Le chef d'état-major libyen est mort dans un "accident" d'avion en Turquie (officiel)

Photo prise et diffusée par le ministère turc de la Défense le 23 décembre 2025, montrant le chef d'état-major libyen, le général Muhammad Ali Ahmad Al-Haddad. (AFP/ministère turc de la Défense)
Photo prise et diffusée par le ministère turc de la Défense le 23 décembre 2025, montrant le chef d'état-major libyen, le général Muhammad Ali Ahmad Al-Haddad. (AFP/ministère turc de la Défense)
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  • Le chef d’état-major libyen Mohamed al-Haddad et plusieurs hauts responsables militaires sont morts dans un accident d’avion après leur départ d’Ankara
  • Les autorités turques évoquent une urgence liée à un dysfonctionnement électrique ; la Libye observe trois jours de deuil national et a dépêché une délégation pour enquêter

TRIPOLI: Le chef d'état-major libyen et plusieurs autres responsables militaires sont morts dans un "accident" d'avion après avoir quitté la capitale turque Ankara, où ils étaient en visite, a annoncé mardi soir le Premier ministre libyen, Abdelhamid Dbeibah.

"C'est avec une profonde tristesse et une grande affliction que nous avons appris la nouvelle du décès du chef d'état-major général de l'armée libyenne, le général de corps d'armée Mohamed Al-Haddad (...), à la suite d'une tragédie et d'un accident douloureux lors de (son) retour d'une mission officielle dans la ville turque d'Ankara", a déclaré M. Dbeibah sur sa page officielle sur Facebook.

Les autorités turques ont annoncé que l'épave de l'avion qui le transportait avait été retrouvée. Elles avaient auparavant indiqué que le contact avait été perdu avec l'appareil moins de 40 minutes après son décollage d'Ankara.

Le général Mohamad al-Haddad, originaire de Misrata (ouest), avait été nommé à ce poste en août 2020 par l'ancien chef du gouvernement Fayez al-Sarraj.

Plusieurs autres responsables militaires se trouvaient à bord selon le Premier ministre libyen: le chef d'état-major de l'armée de terre, le général Al-Fitouri Ghraybel, le directeur de l'Autorité de l'industrie militaire, Mahmoud Al-Qatioui, et le conseiller du chef d'état-major, Mohamed Al-Assaoui Diab.

Un photographe, Mohamed Omar Ahmed Mahjoub, les accompagnait.

M. Dbeibah a déploré une "grande perte pour la patrie"". "Nous avons perdu des hommes qui ont servi leur pays avec loyauté et dévouement", a-t-il noté.

Le gouvernement d'union nationale (GNU) de M. Dbeibah, basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale, a décrété un deuil national de trois jours.

Il a aussi demandé au ministère de la Défense d'envoyer une délégation officielle à Ankara pour faire la lumière sur les circonstances de l'incident, selon un communiqué du gouvernement.

L'appareil "a signalé une urgence due à un dysfonctionnement électrique au contrôle aérien et a demandé un atterrissage d'urgence", a précisé la présidence turque.

Le maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est libyen, a de son côté présenté ses condoléances et dit sa "profonde tristesse".


Le ministre israélien de la Défense promet de ne "jamais quitter" Gaza

Des enfants jouent dans le camp de Nuseirat pour Palestiniens déplacés, dans le centre de la bande de Gaza, le 22 décembre 2025. (Photo : Eyad Baba / AFP)
Des enfants jouent dans le camp de Nuseirat pour Palestiniens déplacés, dans le centre de la bande de Gaza, le 22 décembre 2025. (Photo : Eyad Baba / AFP)
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  • Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré qu’Israël « ne quitterait jamais Gaza » et évoqué la création d’avant-postes, avant que son ministère ne précise qu’il n’y a aucune intention de recolonisation
  • Ces propos interviennent alors qu’une trêve fragile est en vigueur et que les médiateurs appellent à la mise en œuvre du plan Trump, qui prévoit un retrait complet israélien de Gaza

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien Israël Katz a affirmé mardi qu'Israël "ne quitterait jamais Gaza", évoquant la possible création d'avant-postes dans le territoire palestinien ravagé par la guerre, avant que ses services ne modèrent ses propos.

"Nous sommes au cœur de Gaza et nous ne quitterons jamais Gaza", a déclaré M. Katz en déplacement dans la colonie de Beit-El en Cisjordanie occupée, lors d'un discours filmé par des médias israéliens.

"Nous sommes là-bas pour empêcher ce qui s'est passé" de se reproduire, a-t-il ajouté, en référence à l'attaque meurtrière du Hamas palestinien en Israël le 7 octobre 2023.

M. Katz a évoqué l'installation d'avant-postes dans le nord de Gaza, pour remplacer des colonies évacuées par Israël lors de son retrait unilatéral de 2005, citant le modèle de "Nahal", associant présence militaire et implantation agricole.

"Au moment opportun (...) nous établirons dans le nord de Gaza, des avant-postes Nahal à la place des communautés (des anciennes colonies) qui ont été déracinées", a-t-il dit.

Ses services ont rapidement tempéré ses propos, assurant qu'ils "s'inscrivaient exclusivement dans un contexte sécuritaire."

"Le gouvernement n'a aucune intention d'établir des colonies dans la bande de Gaza", selon un communiqué.

Les déclarations du ministre interviennent dans le contexte d'une fragile trêve entrée en vigueur le 10 octobre entre Israël et le Hamas, sous l'égide de Washington et de médiateurs régionaux.

Les pays médiateurs --Qatar et Égypte-- appellent à la mise en œuvre de la deuxième phase du plan de paix du président américain Donald Trump. Cette étape prévoit notamment un retrait complet des forces israéliennes de la bande de Gaza, et le plan stipule qu'"Israël ne va ni occuper ni annexer Gaza."

Les propos de M. Katz ont suscité de vives critiques dans l'opposition.

"Le gouvernement vote d'une main en faveur du plan Trump, et de l'autre il vend des fables sur des centres de peuplement isolés à Gaza", a assené sur X Gadi Eizenkot, ancien ministre et ancien chef d'état-major.

Jeudi dernier, quelques dizaines d'Israéliens ont pénétré illégalement dans la bande de Gaza, en violation des consignes de l'armée, et y ont planté symboliquement un drapeau israélien, pour appeler à la réoccupation et à la recolonisation du territoire palestinien, réclamée notamment par les ministres d'extrême droite du gouvernement Netanyahu.


Liban: l'Italie souhaite maintenir sa présence militaire après le départ de la force de l'ONU

L'Italie est le deuxième pays contributeur à la force de maintien de la paix de la FINUL dans le sud du Liban. (AFP/Archives)
L'Italie est le deuxième pays contributeur à la force de maintien de la paix de la FINUL dans le sud du Liban. (AFP/Archives)
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  • L’Italie confirme qu’elle maintiendra une présence militaire au Liban même après le retrait progressif de la Finul à partir du 31 décembre 2026
  • Rome met en avant le rôle clé des forces armées libanaises pour la stabilité du Liban et de la région, et appelle à des résultats concrets pour éviter toute exploitation de l’instabilité

ROME: L'Italie souhaite maintenir sa présence militaire au Liban, après le départ des Casques bleus de l'ONU qui commence le 31 décembre 2026, a indiqué lundi le ministère italien de la Défense.

"Même après" le départ de la force de maintien de la paix dans le sud du Liban (Finul) de l'ONU, l'Italie continuera à jouer son rôle soutenant avec conviction la présence internationale" dans ce pays, selon les propos du ministre de la Défense Guido Crosetto sur X.

Interrogé par l'AFP pour savoir si cela signifiait une "présence militaire" italienne, un porte-parole du ministère a confirmé que oui.

M. Crosetto a également souligné "le rôle fondamental" des forces armées libanaises "pour garantir la stabilité non seulement au Liban mais dans toute la région".

Le ministre a en outre assuré que Rome œuvrait à ce que les discussions en cours dans la région se traduisent par "des résultats concrets et que personne ne puisse tirer des avantages d'une situation d'instabilité dans le sud du Liban".

L'Italie est, avec 1.099 militaires, le deuxième contributeur de la Finul, derrière l'Indonésie (1.232) et cinq généraux italiens ont été parmi les chefs des Casques bleus au cours des 20 dernières années.