WASHINGTON: L'envoi de militaires américains en Israël dans le cadre du déploiement d'un système de défense antimissile témoigne de la détermination de Washington à protéger son allié, mais renforce aussi son implication dans le conflit, notent mardi des analystes.
Le Pentagone a annoncé mardi que les premiers soldats chargés de faire fonctionner ce système de défense antimissiles à haute altitude (Thaad), considéré comme l'un des plus perfectionnés au monde, étaient arrivés lundi en Israël et que d'autres allaient suivre.
Ce déploiement renforce la défense antiaérienne d'Israël, dont les dirigeants ont promis de riposter à l'attaque menée le 1er octobre par l'Iran, qui avait lancé quelque 200 missiles sur son sol.
Il s'agissait de la réponse iranienne à l'assassinat à Téhéran du chef du Hamas palestinien, Ismaïl Haniyeh, imputé à Israël, et du chef du Hezbollah libanais, Hassan Nasrallah, dans une frappe israélienne près de Beyrouth.
Des navires et avions américains avaient aidé Israël à se défendre contre cette attaque et la précédente, le 13 avril. Mais avec ce système de défense antimissile mobile, c'est une centaine de soldats américains qui seront sur le terrain et se retrouveront donc à risque.
"Mettre des soldats américains en Israël montre clairement que Washington est, de manière très visible et tangible, engagé à défendre Israël, et se battra s'il le faut", observe Raphael Cohen, du groupe de réflexion Rand Corporation.
L'administration du président Joe Biden "espère probablement que cette mesure aura un effet de dissuasion accru sur l'Iran et rassurera Israël", ajoute-t-il.
Mais, selon lui, elle pourrait aussi en retour donner aux Etats-Unis une "plus grande influence" sur la réponse d'Israël à l'attaque de missiles iranienne.
- "Une cible très coûteuse" -
Israël dispose déjà de systèmes de défense antiaériens très sophistiqués, mais M. Cohen estime qu'ils ont été mis à l'épreuve par près d'une année de combats avec les différents groupes régionaux alliés de Téhéran.
"Si l'Iran augmente sa capacité de feu et que le Hezbollah continue ses attaques, plus de missiles vont passer et toucher leurs cibles", reprend-il, en référence au mouvement pro-iranien qu'Israël combat au Liban.
Thaad, conçu pour intercepter les missiles à haute altitude et fournissant une protection sur une large zone, sera "pleinement opérationnel dans un avenir proche", a déclaré mardi dans un communiqué le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder.
Ce système, développé dans les années 1990 mais mis en service pour la première fois en 2008, nécessite 95 personnes pour le faire fonctionner.
Il consiste en six lanceurs montés sur des camions, chacun composé de huit intercepteurs, d'un puissant système radar et d'un élément de contrôle des tirs, selon le Service de recherche du Congrès américain.
Tom Karako, directeur du projet de défense missile du Centre américain d'études internationales et stratégiques (CSIS), rappelle que le Thaad, dont le radar coûte un milliard de dollars, est "potentiellement une cible très coûteuse" qu'il convient de correctement protéger.
Les Etats-Unis n'ont qu'un nombre très limité de systèmes Thaad, "ne produisent pas beaucoup de projectiles thaad en ce moment" et doivent donc "mûrement réfléchir" à son utilisation, souligne-t-il.
Le déploiement de Thaad en Israël "ajoute évidemment beaucoup en terme de potentiel et de capacité, mais (...) s'accompagne aussi d'un risque stratégique, et de coûts opérationnels et d'opportunité".