La chute du président syrien Assad marque la fin d'une époque

L'ère de la dynastie Assad s'achève avec la prise de Damas par les rebelles et la fuite de Basher Assad en Russie. (AFP/File)
L'ère de la dynastie Assad s'achève avec la prise de Damas par les rebelles et la fuite de Basher Assad en Russie. (AFP/File)
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Publié le Lundi 09 décembre 2024

La chute du président syrien Assad marque la fin d'une époque

  • Ce qui a commencé comme un coup d'État sans effusion de sang par Hafez Assad en 1970 s'est terminé par la fuite de son fils Bashar
  • Bashar Assad a "hérité et développé" le bilan de la répression brutale qui a marqué le long règne de son père

LONDRES: Dans des scènes qui rappellent tous les changements de régime violents de l'histoire récente du Moyen-Orient, des foules en liesse ont renversé, samedi après-midi, à Jaramana, dans la banlieue de Damas, une statue de Hafez el-Assad, fondateur du régime familial qui, jusqu'à ce week-end, avait gouverné la Syrie pendant plus d'un demi-siècle.

La décapitation de ce buste plus grand que nature, capturée sur des images tremblantes filmées par un smartphone, en dit long sur les racines de la crise qui engloutit aujourd'hui la Syrie.

Le président Bachar el-Assad, qui a fui la Syrie et s'est vu accorder l'asile avec sa famille par la Russie, dimanche, a hérité d'un système autocratique que son père avait forgé dans le chaos qui a marqué le paysage politique syrien pendant deux décennies après l'indépendance du pays en 1949.

Avec le Liban, la Syrie, province ottomane depuis le début du XVIe siècle, a été occupée par la France en 1919 après la défaite de l'empire lors de la Première Guerre mondiale, et est devenue en 1923 un mandat français sous les auspices de la Société des Nations.

Ce mandat a déclenché une révolte multiforme contre la domination française, qui a fait rage de 1925 à 1927, avant d'être finalement réprimée par une force militaire française écrasante.

Deux décennies complexes mais relativement paisibles ont suivi jusqu'à ce que, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la Syrie obtienne enfin, en 1946, l'indépendance qu'on lui promettait depuis longtemps.

Mais l'âge d'or attendu par les Syriens n'a pas eu lieu. De 1949 à 1970, le pays a été secoué par une série de 20 coups d'État militaires, ou tentatives de coups d'État.
Pour les Syriens comme pour les observateurs internationaux, la Syrie semblait condamnée à devenir un cas désespéré. Mais un homme attendait dans les coulisses et, avec le temps, il est apparu comme la réponse aux prières de cette nation troublée.
De l'avis général, Hafez, né le 6 octobre 1930, l'un des onze enfants d'une famille d'agriculteurs alaouites pauvres, n'a jamais voulu être un dictateur, ni même s'impliquer dans la politique.

Il voulait plutôt devenir médecin, un rêve qui n'a pu se concrétiser en raison de l'incapacité de son père, Ali Soulayman, à payer ses frais de scolarité (Soulayman adoptera plus tard son surnom local, El-Assad, «le lion», comme nom de famille).
En 1950, Hafez s'inscrit à l'Académie militaire de Homs, apprend à piloter, rejoint l'armée de l'air syrienne et se retrouve mêlé à l'atmosphère fébrile de complots et de contre-complots qui régnait au sein de l'establishment militaire.

En 1955, le président Adib el-Chichakli est renversé par un coup d'État militaire qui marque le retour d'un gouvernement civil en Syrie. Au cours des années qui suivent, Hafez est en service actif, s'entraînant sur des chasseurs MiG en Russie et effectuant des missions de défense aérienne pendant la crise de Suez.

Après la formation par la Syrie et l'Égypte de l'éphémère République arabe unie en 1958, l'officier de l'armée de l'air devient de plus en plus politisé, à tel point qu'en mars 1963, il joue un rôle de premier plan dans le coup d'État militaire baasiste contre le président syrien Nazim el-Kudsi.

Hafez est alors responsable de l'armée de l'air syrienne et membre du commandement régional syrien du parti Baas et du comité militaire, un puissant groupe baasiste au sein de l'establishment militaire syrien.aumatisé, qui n'a que trop tardé, soit enfin imminent.

DATES CLÉS DU RÈGNE DE LA FAMILLE ASSAD

 

- 6 octobre 1930: Hafez Assad, fils d'un pauvre agriculteur, naît à Qardaha, dans le nord-ouest de la Syrie.

- 1950l-e Hafez Assad entre à l'Académie militaire de Homs.

- Février 1966: Hafez el-Assad est nommé ministre de la Défense après un coup d'État militaire.

- 12 novembre 1970: Hafez Assad mène un coup d'État sans effusion de sang et devient président de la Syrie en mars 1971.

- 10 juin 2000: Hafez Assad meurt et son fils Bachar Assad lui succède.

- 2012: Les manifestations contre le régime oppressif d'Assad dégénèrent en guerre civile.

- 6 décembre 2024: L'ère de la dynastie Assad prend fin lorsque les rebelles s'emparent de Damas et que Bachar s'enfuit en Russie.

En février 1966, le Comité militaire renverse le Commandement national du parti Baas au pouvoir, et Hafez est nommé ministre de la Défense par le chef du coup d'État Salah Jadid, chef d'état-major de l'armée syrienne.

Pour Jadid, cette nomination s'est révélée être une erreur de calcul désastreuse. Le 12 novembre 1970, Hafez a organisé son propre coup d'État sans effusion de sang. Dans un premier temps, sa «révolution corrective» (Al-Thawra al-Tashihiyya) semblait promettre un nouveau départ pour tous les Syriens.

Selon Patrick Seale, auteur de la biographie «Assad of Syria: The Struggle for The Middle East», le règne de Hafez a commencé avec «un avantage immédiat et considérable: le régime qu'il a remplacé était tellement détesté que toute alternative était un soulagement».
«Comme c'était un secret de polichinelle qu'il était plus libéral que Salah Jadid, sa victoire a marqué le début d'une lune de miel politique. Les gens pouvaient respirer plus librement.»

Selon une évaluation de son héritage publiée en 2005 par la Brookings Institution, le principal exploit de Hafez «a été de transformer l'ordre politique syrien d'un semi-État postcolonial rongé par les coups d'État en un véritable modèle de stabilité autoritaire». Ce faisant, il a mis en place une structure de pouvoir qui a défini des «choix politiques fondamentaux» pour son fils.

Au moment de sa mort en juin 2000, victime d'un arrêt cardiaque à l'âge de 69 ans, la Syrie était depuis 30 ans sous l'emprise d'un «appareil d'État policier hautement développé et coercitif», conçu pour «réprimer les menaces perçues, potentielles et réelles contre le régime».

En conséquence, «le bilan de la répression brutale reste un élément important et inéluctable de l'héritage d'Assad», dont son fils allait hériter et sur lequel il allait s'appuyer.

Comme son père avant lui, Bachar a cherché à faire carrière dans la médecine, étudiant à Damas et travaillant comme médecin dans l'armée syrienne avant de partir au Royaume-Uni dans les années 1990 pour suivre une formation d'ophtalmologiste.

On ne s'attendait pas à ce qu'il entre dans l'entreprise familiale. Son père préparait son fils aîné, Bassel, à lui succéder, mais ce plan a échoué lorsque Bassel est mort dans un accident de voiture en 1994.

Bachar est rappelé en Syrie, où il entre à l'Académie militaire de Homs et passe les six années suivantes à se préparer à succéder à son père, en s'entourant de fidèles partisans baasistes et alaouites au sein du parti et de l'armée.

Seul candidat à la présidence après la mort de son père le 10 juin 2000, Bachar, 34 ans, était sûr d'être élu, une fois la Constitution syrienne amendée pour abaisser la limite d'âge pour le poste, alors fixée à 40 ans.

Dès le départ, Bachar a suivi l'exemple de son père. Sa première tâche a été de prouver qu'il était à la hauteur de la tâche en réprimant sans pitié la vague de contestation qui a suivi la mort de son père.

Les revendications des manifestants, qualifiées de «printemps de Damas», ont été formulées dans la «Déclaration des 99», un manifeste signé par des intellectuels appelant à une nouvelle ère de liberté d'expression et à la fin de l'oppression de l'État et de l'emprisonnement des opposants politiques.

De multiples arrestations et mesures de répression ont mis fin au printemps de Damas, mais les graines qu'il avait semées n'étaient que dormantes, pas mortes.

Les fils de Hafez el-Assad, Maher (à droite) et Majed (3e à droite), son frère Jami (2e à droite), son gendre, le général syrien Assef Shawkat (2e à gauche), et le secrétaire général adjoint du parti Baas syrien, Abdallah al-Ahmar (à gauche). (AFP)

En mars 2011, dans le cadre du Printemps arabe, une série de manifestations de masse en faveur de la démocratie a éclaté dans toute la Syrie, les manifestants réclamant la fin du régime Assad.

Ces manifestations ont fait l'objet d'une répression brutale, ce qui a entraîné le pays dans ce que l'ONU a officiellement déclaré être une guerre civile en juin 2012 – une guerre qui a impliqué de nombreux acteurs différents, dont Daech et Al-Qaïda.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme, en mars de cette année, 13 ans après le début de cette guerre apparemment sans fin, la guerre en Syrie a tué plus d'un demi-million de personnes. Parmi elles, plus de 164 000 civils, dont plus de 15 000 femmes et 25 000 enfants, et des millions d'autres personnes déplacées.

Dans sa tentative désespérée de s'accrocher au pouvoir, le régime Assad a utilisé toute une série d'armes barbares, notamment des «bombes barils», rudimentaires mais mortelles, larguées sur les civils depuis des hélicoptères.

En violation du droit international, le régime a aussi régulièrement déployé des armes chimiques, notamment le gaz sarin, un puissant neurotoxique contre les civils et les factions armées.

En 2012, dans le cadre d'un accord conclu avec son allié russe pour écarter les menaces d'attaques aériennes des États-Unis, Assad a promis de renoncer à ses armes chimiques et d'adhérer à la convention sur les armes chimiques.

Mais ce n'est que l'année suivante, en août 2013, que sont apparues des photos choquantes d'enfants victimes d'attaques chimiques menées contre des zones tenues par des groupes militants dans la banlieue est de Damas.

Le mois dernier, l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques a révélé que les promesses d'Assad de remettre toutes ces armes n'avaient toujours pas été tenues.
Au fur et à mesure que les sanctions occidentales imposées dans le sillage de la violence d'État en 2011 s'aggravaient, le régime Assad est devenu un narco-État, de plus en plus dépendant, pour ses rentrées d'argent, des ventes de la drogue Captagon, qui a dévasté la vie de tant de jeunes gens et de leurs familles dans l'ensemble du Moyen-Orient.

Comme l'a révélé une étude approfondie d'Arab News publiée en février 2023, «la grande majorité des dizaines de millions de pilules qui inondent la péninsule Arabique chaque année sont principalement fabriquées en Syrie et avec la participation active du régime du président Bachar el-Assad».

Caroline Rose, analyste principale à New Lines, a déclaré à Arab News qu'il ne faisait aucun doute que le Captagon était «produit et trafiqué par un ensemble d'individus très proches du régime Assad, dont certains sont des cousins et des parents de membres du régime».

Parmi eux, le frère de Bachar, Maher, affilié à la production et à la contrebande en tant que commandant de la quatrième division blindée, une unité militaire dont la mission principale est de protéger le régime syrien contre les menaces internes et externes, joue le rôle le plus important.

Depuis le début de la guerre civile syrienne il y a dix ans, ce qui avait commencé comme un filet d'eau dans la région s'est transformé en un déluge. Confronté à des sanctions mondiales qui l'ont privé de revenus, le régime syrien s'est lancé dans la fabrication de drogues, travaillant avec des milices soutenues par l'Iran en Syrie et au Liban pour introduire en contrebande des quantités industrielles de captagon en Arabie saoudite et dans les autres États du Golfe, par voie terrestre, maritime et aérienne.
Selon un rapport publié en avril 2022 par le groupe de réflexion de Washington New Lines Institute for Strategy and Policy, la Syrie déchirée par la guerre est devenue "la plaque tournante d'une production de taille industrielle". Le rapport ajoute que "des éléments du gouvernement syrien sont les principaux moteurs du commerce du Captagon, avec des complicités ministérielles dans la production et la contrebande, utilisant le commerce comme moyen de survie politique et économique dans un contexte de sanctions internationales".

En août 2012, le président américain Barack Obama a déclaré que Bachar "a perdu sa légitimité (et) doit se retirer. Jusqu'à présent, il n'a pas compris le message et, au lieu de cela, il a redoublé de violence contre son propre peuple".
Il a ajouté : "La communauté internationale a envoyé un message clair selon lequel, plutôt que d'entraîner son pays dans une guerre civile, il devrait s'engager dans la voie d'une transition politique. Mais à ce stade, la probabilité d'un atterrissage en douceur semble assez éloignée".
Aujourd'hui, alors que Bachar se montre à Moscou et que Damas est aux mains des rebelles, les Syriens ne peuvent que prier pour que, la dynastie Assad étant apparemment écartée du pouvoir après un demi-siècle de tyrannie, l'atterrissage en douceur de leur pays tr


« La Syrie n’est pas condamnée » : les leçons d’un an de transition, selon Hakim Khaldi

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  • Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
  • Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide

PARIS: La Syrie post-Assad, carnets de bord, de Hakim Khaldi, humanitaire chez Médecins sans frontières, publié chez L’Harmattan, n’est pas seulement un récit de témoins, mais une immersion dans la réalité d’un pays brisé mais pas vaincu, où la chute d’un pouvoir omnipotent n’a pas suffi à étouffer l’exigence de dignité.
Ce qu’il raconte, c’est l’envers des discours diplomatiques, la géographie vécue d’une société projetée brutalement hors d’un demi-siècle d’autoritarisme dans un vide politique, économique et moral.

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel.

Dans ses carnets, comme dans ses réponses à Arab News en français, revient une même conviction : la chute d’un régime ne signifie pas la naissance immédiate d’un pays. La Syrie, aujourd’hui, est entre les deux, « en état de transformation ».

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel : « On ne savait pas si c’était la fin d’une époque ou le début d’une autre tragédie », confie-t-il.
Dans les villes « libérées », les scènes oscillent entre euphorie et sidération ; la population découvre, sans y croire encore, la possibilité de parler librement, de respirer autrement.

Il raconte ces familles qui, pendant quarante ans, n’avaient jamais osé prononcer le mot « moukhabarat » (services secrets en arabe), ne serait-ce qu’à voix basse chez elles.
Et brusquement, les voilà qui se mettent à raconter : les disparitions, les tortures, les humiliations, et la peur devenue routine.
Des parents ressortent des photos d’adolescents morts sous la torture, des certificats de décès maquillés, des lettres écrites depuis la prison mais jamais envoyées.

Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
Ce qui l’a le plus frappé, c’est « ce sentiment presque physique d’un poids qui tombe. C’est ce que j’ai le plus entendu », affirme-t-il.

Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide. En quelques jours, l’État s’est évaporé : plus de police, plus d’électricité, plus d’école, plus de justice.
Les anciens bourreaux disparaissent dans la nature, mais les réseaux de corruption se reconstituent, et les premières milices locales émergent, prêtes à occuper le terrain déserté par les institutions.

Pourtant, au fil de ses déplacements, Khaldi est frappé par la force de résilience et d’auto-organisation de la population : « Les Syriens n’ont jamais cessé d’exister comme société, même quand l’État les avait réduits au silence », assure-t-il.
Dans les villages, des comités improvisés se forment et organisent la distribution alimentaire, la remise en marche d’une station d’eau, la sécurité ou la scolarisation d’urgence.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides.

Cette responsabilité populaire est, pour Khaldi, l’un des rares points lumineux du paysage syrien, la preuve qu’une société peut exister en dehors de l’appareil répressif qui prétendait être l’État.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides, de milices rivales, de zones d’influence et d’ingérences étrangères. « Une mosaïque qui ne ressemble plus au pays d’avant », estime Khaldi.
Le territoire est éclaté entre forces locales, groupes armés (notamment les milices druzes à Soueida, au nord-est du pays), gouvernances provisoires ou structures étrangères. Les routes sont coupées, les administrations doublées ou contradictoires.

Avec des infrastructures détruites, une monnaie en chute libre et un secteur productif quasi paralysé, la survie quotidienne est devenue un exercice d’équilibriste.
Les Syriens ne nourrissent plus d’illusions sur l’arrivée immédiate d’un modèle démocratique idéal : il s’agit d’abord de survivre, de reconstruire, de retrouver un minimum de continuité.

Le traumatisme est profond, à cause des disparitions massives, de l’exil et des destructions psychologiques. Pourtant, affirme Khaldi, « jamais je n’ai entendu un Syrien regretter que la dictature soit tombée ».

De ses observations et des témoignages qu’il a collectés en arpentant le pays, Khaldi tire les priorités pour éviter que la Syrie ne devienne ni un conflit gelé ni un espace livré aux milices.
De son point de vue, la reconstruction politique ne peut se réduire à remplacer un gouvernement par un autre : il faut rebâtir les fondations, à savoir une justice indépendante, une police professionnelle et des administrations locales.

Des dizaines de groupes armés contrôlent aujourd’hui une partie du territoire, et une transition politique sérieuse est impensable sans un processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration, soutenu par une autorité légitime et par un cadre international solide.
Au-delà des aides internationales, la Syrie a besoin d’un cadre empêchant la capture des fonds par les anciens réseaux de corruption ou les factions armées.
Elle doit donner la priorité à la relance de l’agriculture, au rétablissement de l’électricité, des réseaux routiers et des petites industries, les seules capables à court terme de soutenir la vie quotidienne.

Le pays porte une blessure immense : celle des prisons secrètes, des fosses communes, des disparitions et des exactions documentées. « Sans justice, il n’y aura pas de paix durable », affirme Khaldi.
Il ne s’agit ni de vengeance ni de tribunaux-spectacle, mais de vérité et de reconnaissance, conditions indispensables à une réconciliation nationale.

De cet entretien se dégage une idée forte : malgré la faim, la peur, les ruines, malgré la fragmentation politique et l’ingérence étrangère, les Syriens n’ont pas renoncé à eux-mêmes.
Ils ouvrent des écoles improvisées, réparent des routes avec des moyens dérisoires, organisent l’entraide, résistent au chaos. « La Syrie n’est plus la Syrie d’avant, mais elle n’est pas condamnée pour autant », affirme Khaldi.
Son témoignage rappelle qu’un pays ne meurt pas quand un régime tombe ; il meurt lorsque plus personne ne croit possible de le reconstruire. Et les Syriens, eux, y croient encore.


Liban: Israël annonce des frappes dans le sud, appelle à des évacuations

L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
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  • Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région"
  • Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région.

Cette annonce survient au lendemain d'une rencontre entre responsables civils libanais et israélien, lors d'une réunion de l'organisme de surveillance du cessez-le-feu entré en vigueur il y a un an, présentée comme de premières discussions directes depuis plus de 40 ans entre les deux pays toujours techniquement en état de guerre.

Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région", a annoncé le colonel Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne pour le public arabophone.

Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter.

Accusant le Hezbollah de se réarmer dans le sud du pays et de violer ainsi les termes de la trêve entrée en vigueur fin novembre 2024, l'armée israélienne a multiplié depuis plusieurs semaines les frappes aériennes dans le sud du Liban mais a marqué une pause dans ses attaques pendant la visite du pape Léon XIV cette semaine.

Israël a même frappé jusque dans la banlieue de Beyrouth le 23 novembre pour y éliminer le chef militaire du Hezbollah, Haitham Ali Tabatabai.

Le Liban dénonce ces attaques comme des violations patentes du cessez-le-feu.

Mais Israël, qui peut compter sur l'aval tacite des Etats-Unis pour ces frappes, affirme qu'il ne fait qu'appliquer la trêve en empêchant le Hezbollah, allié de la République islamique d'Iran, ennemie d'Israël, "de se reconstruire et de se réarmer".

Tout en déclarant que les discussions directes de mercredi avec le Liban s'étaient déroulées dans "une atmosphère positive", le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rappelé mercredi soir que le désarmement du Hezbollah restait une exigence "incontournable" pour son pays.


Soudan: le chef des droits de l'homme de l'ONU appelle à cesser les combats «immédiatement»

Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a appelé jeudi les belligérants à "cesser immédiatement les combats" dans le sud du Soudan, affirmant craindre une nouvelle vague d'atrocités après les massacres d'El-Facher. (AFP)
Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a appelé jeudi les belligérants à "cesser immédiatement les combats" dans le sud du Soudan, affirmant craindre une nouvelle vague d'atrocités après les massacres d'El-Facher. (AFP)
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  • Depuis le 25 octobre, date à laquelle les FSR ont pris le contrôle de la ville de Bara, dans le Kordofan-Nord, le Haut-Commissariat a recensé "au moins 269 morts parmi les civils, victimes de frappes aériennes, de tirs d'artillerie et d'exécutions
  • "Il est véritablement choquant de voir l'histoire se répéter au Kordofan si peu de temps après les événements terrifiants d'El-Facher", a déclaré le Haut-Commissaire

GENEVE: Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a appelé jeudi les belligérants à "cesser immédiatement les combats" dans le sud du Soudan, affirmant craindre une nouvelle vague d'atrocités après les massacres d'El-Facher.

"Nous ne pouvons rester silencieux face à cette nouvelle catastrophe", a déclaré Volker Türk dans un communiqué. "Ces combats doivent cesser immédiatement et l’aide humanitaire vitale doit parvenir aux personnes menacées de famine".

Les combats se sont intensifiés cette semaine dans la région du Kordofan, dans le sud du Soudan riche en pétrole, l'armée cherchant à repousser les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) loin de l'axe routier vital reliant la capitale Khartoum au Darfour.

Depuis le 25 octobre, date à laquelle les FSR ont pris le contrôle de la ville de Bara, dans le Kordofan-Nord, le Haut-Commissariat a recensé "au moins 269 morts parmi les civils, victimes de frappes aériennes, de tirs d'artillerie et d'exécutions sommaires".

Et il affirme avoir relevé "des cas de représailles, de détentions arbitraires, d'enlèvements, de violences sexuelles et de recrutements forcés, y compris d'enfants".

"Il est véritablement choquant de voir l'histoire se répéter au Kordofan si peu de temps après les événements terrifiants d'El-Facher", a déclaré le Haut-Commissaire, en référence aux exactions commises par les FSR après la prise fin octobre de la dernière grande ville du Darfour (ouest) qui échappait à leur contrôle.

"Nous ne devons pas permettre que le Kordofan devienne un autre El-Facher", a insisté M. Türk.

Dans son communiqué, le Haut-Commissariat rapporte que le 3 novembre dernier, un drone des FSR avait frappé une tente où des personnes en deuil étaient rassemblées à El Obeid, dans le Kordofan du Nord, tuant 45 personnes, principalement des femmes.

Il indique aussi que le 29 novembre, une frappe aérienne des Forces armées soudanaises (SAF) à Kauda, dans le Kordofan du Sud, aurait fait au moins 48 morts, pour la plupart des civils.

Selon l'organisation, "de violents combats se poursuivent depuis dans les trois États du Kordofan". "La situation humanitaire est catastrophique : la famine est confirmée à Kadugli et un risque de famine persiste à Dilling", ajoute le Haut-Commissariat, affirmant que "toutes les parties entravent l’accès et les opérations humanitaires".

"Nous ne pouvons (...) laisser d’autres Soudanais devenir victimes de terribles violations des droits de l’homme. Nous devons agir", a insisté M. Türk.

Depuis avril 2023, les combats ont fait des dizaines de milliers de morts, forcé le déplacement de 12 millions de personnes et plongé le pays dans la plus grande crise humanitaire au monde, selon l'ONU.