Le programme d'ingénierie féminin de Riyadh Air : un tremplin pour les femmes saoudiennes

La compagnie aérienne devrait lancer ses activités dans le courant de l'année. (Photo Fournie)
La compagnie aérienne devrait lancer ses activités dans le courant de l'année. (Photo Fournie)
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Publié le Dimanche 09 mars 2025

Le programme d'ingénierie féminin de Riyadh Air : un tremplin pour les femmes saoudiennes

  • La compagnie aérienne s’efforce de briser les barrières dans un secteur traditionnellement dominé par les hommes.
  • Sélectionnée parmi des milliers de candidats, leur participation souligne l'engagement de Riyadh Air en faveur de la diversité.

RIYAD : À l'occasion de la Journée internationale de la femme, célébrée le 8 mars, Riyadh Air se distingue comme un pionnier du progrès, mettant la diversité des genres au cœur de l'aviation.

La compagnie aérienne, qui doit lancer ses activités dans le courant de l'année, ne se contente pas de construire un transporteur de classe mondiale, elle s'efforce également de briser les barrières dans un secteur traditionnellement dominé par les hommes.

Un témoignage de cet engagement est son programme d'ingénierie de maintenance des avions, qui a accueilli sa première cohorte entièrement féminine - 27 au total - il y a un an.

L'initiative de Riyadh Air intervient à un moment où les femmes ne représentent que 3% des ingénieurs de maintenance aéronautique dans le monde (Photo fournie).
L'initiative de Riyadh Air intervient à un moment où les femmes ne représentent que 3% des ingénieurs de maintenance aéronautique dans le monde (Photo fournie).

Arab News a rencontré trois d'entre elles : Shahad al-Salmi, Hala al-Zahrani et Alkhuzran al-Roshaidan.

Shahad al-Salmi, 24 ans, originaire de La Mecque et étudiante en physique à l'université d'Umm Al-Qura, a décrit le programme comme une opportunité sans précédent.

La compagnie aérienne, dont le lancement est prévu dans le courant de l'année, est en train de se doter d'un transporteur de classe mondiale.

Son programme d'ingénierie de maintenance aéronautique a accueilli sa première cohorte entièrement féminine il y a un an. 

Sélectionnée parmi des milliers de candidats, leur participation souligne l'engagement de Riyadh Air en faveur de la diversité.

« Se rendre à l'université chaque jour et avoir un avion en dehors de la salle de classe, c'est un sentiment incroyable », a-t-elle déclaré. « Je pense que la raison pour laquelle Riyadh Air a pris cette mesure est que le PDG, Tony [Douglas], le répète tout le temps : "Nous n'avons pas d'héritage qui nous retienne". Et je pense qu'ils ont choisi des femmes spécifiquement parce qu'ils veulent pousser le marché du travail plus loin et offrir plus d'opportunités. Ils veulent quelque chose de nouveau. Nous sommes ici pour changer l'industrie pour l'ensemble du pays. C'est un message fort pour nous tous, » s’est-elle félicitée. 

Riyadh Air établit de nouvelles normes dans l'aviation (Photo fournie).
Riyadh Air établit de nouvelles normes dans l'aviation (Photo fournie).

Mme al-Salmi a également souligné les sacrifices faits par de nombreux stagiaires, y compris elle-même : « La plupart d'entre nous ne venaient pas de Riyad. Nous avons quitté nos familles et nos proches pour saisir cette opportunité, car non seulement nous y croyons, mais nos familles y croient également ». 

Al-Zahrani, une jeune femme de 19 ans originaire de Djeddah, se souvient de la fierté qu'elle a ressentie en apprenant qu'elle avait été choisie.

"Le fait de savoir que j'allais être la première femme sur le terrain - et saoudienne de surcroît - m'a beaucoup motivée", a-t-elle déclaré à Arab News. "Je pense qu'il est vraiment essentiel et crucial pour nous de faire partie de l'histoire. C'est ce qu'ils essaient de faire, non seulement en Arabie saoudite, mais dans le monde entier. C'est très agréable de savoir que nous en faisons partie". 

Alkhuzran Alroshaidan, stagiaire (Photo fournie
Alkhuzran Alroshaidan, stagiaire (Photo fournie)

"Nous allons être les premiers, nous allons être des pionniers, et c'est à la fois effrayant et agréable. Mais je pense que le côté agréable l'emporte sur le côté effrayant, grâce à toute l'aide que nous recevons", a-t-elle déclaré. 

Al-Roshaidan, 21 ans, originaire d'Al-Ahsa et diplômée en informatique de l'université du roi Fayçal, considère que le programme s'inscrit dans un mouvement plus large.

"En plus d'être un pionnier, il s'inscrit dans le cadre de la Vision 2030 de l'Arabie saoudite. C'est extraordinaire", s’est-elle félicitée. 

Les stagiaires évoluent dans des environnements d'apprentissage dynamiques qui les poussent à s'adapter rapidement, à l’image du rythme effervescent des changements à Riyad (Photo fournie).
Les stagiaires évoluent dans des environnements d'apprentissage dynamiques qui les poussent à s'adapter rapidement, à l’image du rythme effervescent des changements à Riyad (Photo fournie). 

Désireuse d'explorer différents rôles dans l'aviation, elle ajoute : "Je veux essayer tout ce que je peux essayer, comme la gestion, [être] technicienne - tout. J'aime vraiment me lancer des défis et je pense que cela rendra les choses beaucoup plus faciles et offrira de nombreuses opportunités. Je suis très honorée d'être ici".

En ce qui concerne les disparités entre les hommes et les femmes dans le domaine de la maintenance aéronautique, Al-Roshaidan a déclaré : « Ce n'est pas seulement le cas en Arabie saoudite, mais dans le monde entier ; la maintenance est dominée par les hommes. Je pense que j'apprécie d'autant plus qu'ils [Riyadh Air] veuillent faire un changement à ce sujet. L'essentiel est d'ouvrir des portes aux femmes. J'ai l'impression de faire partie de l'histoire de l'émancipation des femmes ».

Bien que la famille d'Al-Roshaidan ait d'abord été préoccupée par sa décision de participer au programme, elle est maintenant tout à fait d'accord.

Riyadh Air établit de nouvelles normes dans le domaine de l'aviation (Photo fournie)
Riyadh Air établit de nouvelles normes dans le domaine de l'aviation (Photo fournie)

."Pour ma famille, c'était effrayant, mais lorsque qu'ils m'ont vue ici, heureuse et en bonne santé, ils sont devenus fiers. L'un de mes frères, celui qui m'a encouragée à franchir le pas, a aussi poussé ma mère à ne pas avoir peur. Ils m'appellent tous les jours et nous nous envoyons des photos de tout", a-t-elle déclaré.

L'initiative de Riyadh Air intervient à un moment où les femmes ne représentent que 3% des ingénieurs de maintenance aéronautique dans le monde, selon les chiffres de l'Organisation de l'aviation civile internationale.

L'industrie aéronautique étant confrontée à une pénurie de techniciens qualifiés, la nouvelle compagnie aérienne ne se contente pas de pourvoir des postes, mais s'emploie activement à modifier les normes de l'industrie et à créer un vivier de talents durable. Le programme rigoureux associe un enseignement théorique à une formation pratique dans des domaines tels que les systèmes électriques, les structures des aéronefs et les protocoles de sécurité.

Les stagiaires évoluent dans des environnements d'apprentissage dynamiques qui les poussent à s'adapter rapidement, à l’image du rythme effervescent des changements à Riyad.

Ces femmes, qui sont parmi les premières à entrer dans le secteur avec Riyadh Air, représentent une nouvelle génération de professionnels de l'aviation en Arabie saoudite. L'installation à Riyad a constitué une transition majeure pour nombre d'entre elles, car peu d'entre elles sont originaires de la région. Mais malgré les changements, elles ont rapidement tissé des liens, car elles vivent ensemble dans des logements communs.

"Nous avons créé une communauté entre nous et avec l'entreprise. Nous n'avons pas l'impression d'être au travail comme les autres", ont déclaré les stagiaires.

Alors que l'aviation reste un domaine dominé par les hommes, le groupe est déterminé à remettre en question les perceptions.

« Ce programme n'existait pas auparavant », ont-elles souligné à l'unisson. « Il y a tant d'opportunités pour les générations futures, et nous sommes reconnaissantes de faire partie de cette première vague. Il ne s'agit pas seulement d'intégrer les femmes sur le marché du travail, mais aussi de renforcer l'économie. Si vous n'embauchez que des hommes, vous limitez votre main-d'œuvre. »

Alors qu'il leur reste environ 18 mois de formation, les étudiants anticipent déjà la prochaine étape de leur carrière.

« Chaque jour, nous nous rendons en classe et nous voyons un avion. Nous savons que nous travaillons pour quelque chose de plus grand », ont-elles déclaré.

Alors que Riyadh Air se prépare à effectuer son premier vol en 2025, ces jeunes femmes sont prêtes à jouer un rôle crucial dans la construction de l'avenir de la compagnie aérienne et leur présence marque un changement important dans le secteur de l'aviation en Arabie saoudite.

Leur parcours, marqué par des sacrifices personnels et une ambition sans relâche, constitue une déclaration forte pour la nation et la communauté aéronautique mondiale.

À l'occasion du 50e anniversaire de la Journée internationale de la femme, l'engagement de Riyadh Air en faveur de l'autonomisation des femmes dans l'aviation témoigne de l'impact transformateur de l'investissement dans les femmes.

"Nous voulons tous servir notre pays et le voir prospérer, et cela ne doit pas se faire au détriment de qui que ce soit", a ajouté al-Salmi. "Nous ne remplaçons pas les hommes, nous travaillons à leurs côtés - c'est ce que je crois que l'autonomisation des femmes signifie".

Les femmes considèrent le programme comme une rampe de lancement pour d'autres réalisations. « Comme Shahad [Al-Salmi] l’a mentionné précédemment, le ciel est la limite. J’ai dit, d’accord, mais nous allons être DANS le ciel. Ce n’est pas notre limite – nous n’avons vraiment pas de limites », a-t-elle conclu.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com  


L’intelligence artificielle, levier d’émancipation pour les femmes selon la directrice de la DCO

Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré : « On ne peut pas dire que l’intelligence artificielle est une bonne ou une mauvaise chose en soi, explique-t-elle, mais je suis très optimiste quant aux opportunités qui existent pour les femmes. » (Photo fournie)
Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré : « On ne peut pas dire que l’intelligence artificielle est une bonne ou une mauvaise chose en soi, explique-t-elle, mais je suis très optimiste quant aux opportunités qui existent pour les femmes. » (Photo fournie)
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  • Pour la directrice générale de la Digital Cooperation Organization (DCO), Hajar El Haddaoui, l’intelligence artificielle (IA) représente une opportunité considérable pour les femmes sur le marché du travail, à condition toutefois de réduire les fractures
  • Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré

PARIS: Pour la directrice générale de la Digital Cooperation Organization (DCO), Hajar El Haddaoui, l’intelligence artificielle (IA) représente une opportunité considérable pour les femmes sur le marché du travail, à condition toutefois de réduire les fractures numériques, de renforcer la coopération internationale et d’intégrer cette technologie au cœur des stratégies nationales de développement.

Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré : « On ne peut pas dire que l’intelligence artificielle est une bonne ou une mauvaise chose en soi, explique-t-elle, mais je suis très optimiste quant aux opportunités qui existent pour les femmes. »

« On voit de plus en plus de femmes s’intéresser à l’IA et aux algorithmes dans différents domaines ; il faut s’en saisir comme d’une opportunité », souligne El Haddaoui, dont l’organisation, fondée à Riyad en 2020, regroupe 16 États membres et compte plus de 40 partenaires issus des secteurs technologique et financier.

Œuvrant essentiellement autour de deux axes stratégiques — la résilience technologique et la prospérité numérique —, la DCO s’est vu accorder un siège d’observateur à l’Assemblée générale des Nations unies en 2022.

L’accès à l’intelligence artificielle n’est cependant pas uniforme à l’échelle mondiale, plaide El Haddaoui, dont l’organisation œuvre pour l’inclusivité numérique et technologique.
« Non, il n’y a pas d’égalité entre les pays, affirme-t-elle sans détour. Certains ont énormément investi dans l’IA et disposent des ressources nécessaires, tandis que d’autres en sont encore loin. »

Elle insiste sur l’importance de la coopération régionale pour réduire ces écarts : « Il faut échanger les bonnes pratiques et, surtout, soutenir les pays en retard par de grands investissements », souligne-t-elle, rappelant que « certains pays n’ont même pas la 5G, ce qui rend toute avancée en IA très difficile ».

Pour elle, la réduction de cette fracture nécessite des partenariats solides entre États, des échanges d’expériences et un appui financier ciblé, afin « de permettre à davantage de pays d’intégrer l’intelligence artificielle dans leurs priorités nationales ».

Cependant, les disparités ne sont pas seulement internationales, souligne El Haddaoui : elles sont également internes, car « dans certains pays, les zones rurales n’ont même pas accès à Internet, alors que d’autres régions abritent des hubs d’innovation très avancés », observe-t-elle.

Cette fracture numérique interne constitue, selon elle, un défi majeur. La solution passe par une stratégie globale d’éducation et d’inclusion : « Il faut prendre en compte l’éducation dès le plus jeune âge, développer des applications accessibles dans les langues locales et former les talents nationaux pour diffuser les connaissances liées à l’IA au sein même du pays. »

Ce n’est qu’une fois ces bases posées que la réduction de la fracture pourra s’étendre aux niveaux régional et mondial.

Interrogée sur le risque de voir le financement de l’IA se faire au détriment d’autres secteurs essentiels, El Haddaoui se veut rassurante : « Si l’intelligence artificielle est intégrée dans la stratégie numérique nationale et appliquée à tous les secteurs — santé, finance, économie ou éducation —, elle ne concurrence pas les autres investissements, elle les renforce », explique-t-elle.

Elle met toutefois en garde contre une approche sectorielle trop étroite : « Dans les pays où l’investissement est concentré uniquement sur l’IA sans vision transversale, le risque existe. Il ne faut pas répéter les erreurs commises lors de la transformation digitale dans certaines régions. L’IA doit être pensée comme une stratégie cross-industry, présente dans tous les secteurs et non en silo. »

Pour cette raison, ajoute-t-elle, la DCO travaille avec de nombreux États membres, dont le Maroc : « Nous sommes présents sur le terrain dans plusieurs pays membres afin d’accompagner le développement numérique local », précise-t-elle.


La ministre de la transition numérique marocaine: l’IA une opportunité pour l’émancipation des femmes

L’intelligence artificielle (IA) peut devenir un outil puissant pour renforcer la place des femmes dans la société et sur le marché du travail. C’est le message porté par la ministre marocaine de la Transition numérique, Amal El Fallah Seghrouchni. (Photo fournie)
L’intelligence artificielle (IA) peut devenir un outil puissant pour renforcer la place des femmes dans la société et sur le marché du travail. C’est le message porté par la ministre marocaine de la Transition numérique, Amal El Fallah Seghrouchni. (Photo fournie)
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  • Le Maroc multiplie les initiatives pour démocratiser l’accès à ces technologies
  • En juillet dernier, les Assises nationales de l’intelligence artificielle ont réuni 2 500 acteurs publics et privés

PARIS: L’intelligence artificielle (IA) peut devenir un outil puissant pour renforcer la place des femmes dans la société et sur le marché du travail.
C’est le message porté par la ministre marocaine de la Transition numérique, Amal El Fallah Seghrouchni, qui voit dans cette technologie une opportunité majeure pour réduire les fractures sociales et économiques, à condition de s’y préparer dès maintenant.

Nommée ministre en 2024, Seghrouchni est une pionnière de l’intelligence artificielle. Elle est même décrite par certains comme « l’Elon Musk du Maroc », mais elle se distingue de ce dernier par son engagement éthique et son attachement à l’inclusion et à la justice sociale liées à l’avènement des nouvelles technologies.
Dans le cadre de ses fonctions et responsabilités, elle poursuit sa quête d’une utilisation raisonnée de l’intelligence artificielle, au profit de tous.

Présente à Paris à l’occasion de la 16ᵉ édition des Rencontres économiques, organisées par l’Institut du monde arabe, la ministre a insisté, en réponse à Arab News en français, sur la nécessité d’intégrer les femmes dans cette révolution technologique.
« Aujourd’hui, l’intelligence artificielle est utilisée dans tous les secteurs de la vie professionnelle : la santé, l’agriculture, l’art, la culture, le droit ou encore la fintech », indique-t-elle. « Et si les femmes maîtrisent l’intelligence artificielle, elles peuvent accéder à un marché de l’emploi beaucoup plus vaste. »

Selon la ministre, l’IA permet aux femmes d’améliorer leur productivité et d’accéder à des ressources jusqu’ici moins accessibles, comme la traduction automatique, les calculs complexes ou la recherche d’informations ciblées : « autant d’usages concrets qui peuvent faciliter leur insertion professionnelle ».
Elle met également en avant le potentiel des outils d’IA pour les femmes entrepreneures, dirigeant des petites ou moyennes entreprises, qui peuvent ainsi s’appuyer sur le commerce électronique pour dépasser les limites des marchés locaux.
« Il existe aujourd’hui des plateformes qui permettent aux femmes d’accéder à un marché global grâce à l’intelligence artificielle », explique-t-elle.

La formation à l’IA représente un investissement, concède la ministre, mais celui-ci reste accessible et rentable. De nombreux programmes, soutenus par des organisations internationales ou des initiatives nationales, visent à réduire cette barrière financière.
« Nous avons lancé un programme qui s’appelle Elevate pour le commerce électronique : il aide gratuitement des femmes à accéder à ces plateformes », précise-t-elle. Et même si certaines formations sont payantes, les coûts restent modérés « au regard du retour sur investissement potentiel ».

La ministre reconnaît cependant l’existence de plusieurs niveaux de fracture : alphabétisation, numérique, et désormais intelligence artificielle.
Mais elle estime que « la question n’est pas de savoir s’il va y avoir une fracture, mais si nous allons pouvoir maîtriser ces technologies pour ne pas rester sur le bord du chemin », car il ne s’agit pas de subir ces transformations, mais « de les utiliser comme leviers de réduction des inégalités ».

Le Maroc multiplie les initiatives pour démocratiser l’accès à ces technologies. En juillet dernier, les Assises nationales de l’intelligence artificielle ont réuni 2 500 acteurs publics et privés.
Le pays a lancé des plateformes de formation, un programme de soutien aux start-up, ainsi qu’un vaste réseau d’instituts de recherche et de développement baptisé Jazari.

« Rien n’arrive tout seul », rappelle la ministre. « Le coût est là, mais aussi la volonté d’apporter les moyens humains, financiers et techniques nécessaires. C’est un grand chantier que nous voulons mener à bien, avec la détermination des femmes à monter dans ce que j’appelle le train de l’IA. »

La métaphore est claire : l’intelligence artificielle avance rapidement, et il faut savoir monter à bord au bon moment. En misant sur la formation, l’accès aux outils et l’accompagnement des femmes, la ministre entend faire de l’IA non pas une nouvelle ligne de fracture, mais une voie d’émancipation et d’ouverture.


Les Rencontres Économiques de l’IMA: la place des femmes dans l’économie à l’ère de l’IA

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  • Quatre tables rondes, réunissant le temps d’une journée des personnalités féminines éminentes du monde arabe et de la France, ont échangé sur la manière de mettre en lumière le rôle des femmes dans la transformation numérique
  • Parmi la trentaine de participantes figuraient notamment la ministre marocaine de la Transition numérique Amal El Fallah Seghrouchni, l’ancienne ministre française de la Culture Rima Abdul Malak, aujourd’hui à la tête d’un média francophone libanais

PARIS: Organisée par l’Institut du Monde Arabe à Paris autour du thème « Femmes, business et innovation », la 16ᵉ édition des Rencontres économiques du monde arabe a décortiqué tous les aspects de l’économie au féminin.

Quatre tables rondes, réunissant le temps d’une journée des personnalités féminines éminentes du monde arabe et de la France, ont échangé sur la manière de mettre en lumière le rôle des femmes dans la transformation numérique, l’entrepreneuriat et la création, ainsi que sur les moyens de favoriser des synergies franco-arabes.

Parmi la trentaine de participantes figuraient notamment la ministre marocaine de la Transition numérique Amal El Fallah Seghrouchni, l’ancienne ministre française de la Culture Rima Abdul Malak, aujourd’hui à la tête d’un média francophone libanais, des femmes d’affaires telles que Hajar El Haddaoui, directrice générale de Digital Cooperation Organization (Maroc–Arabie saoudite), ou encore Olfa Zorgati, membre du conseil d’administration d’Ubisoft, ainsi que des ambassadrices comme Delphine O, et Shayna Al Zuhairi, directrice générale du Iraq Business Women Council.

IA et leadership

Parmi les temps forts figuraient un fireside chat sur l’intelligence artificielle et le leadership, plusieurs tables rondes réunissant cheffes d’entreprise et responsables d’institutions, ainsi qu’une keynote consacrée à la transformation des médias.

Dans le fireside chat dédié à l’IA et au leadership, Amal El Fallah Seghrouchni et Anne Bouverot (envoyée spéciale pour l’IA en France) ont croisé leurs visions, soulignant l’importance d’une gouvernance responsable et partagée de l’IA entre l’Europe et le monde arabe, conciliant innovation et protection des droits.

Elles ont également mis en avant la place centrale des femmes et de l’éducation dans la formation, pour réduire la fracture numérique et encourager l’industrialisation de solutions locales.

La programmation, détaillée par l’IMA, a alterné débats sur l’intelligence artificielle et le leadership, sessions sur les industries culturelles et créatives (ICC), et interventions consacrées au financement et à la coopération institutionnelle.

Les intervenantes issues du monde de la tech et du secteur privé (start-up, entreprises, écosystèmes) ont discuté des opportunités de co-développement entre acteurs français et arabes, ainsi que du besoin d’écosystèmes favorables (financement, cadres réglementaires, formation) pour transformer le talent féminin en entreprises viables.

La transformation des médias à l’ère des transitions

Une autre table ronde, réunissant un panel mixte de diplomates et de femmes actives dans les secteurs des financements publics, du droit et de l’IA, a insisté sur la nécessité d’aligner les réponses aux défis climatiques, énergétiques et numériques à travers des partenariats bilatéraux et multilatéraux.

Rima Abdul Malak a prononcé une courte keynote sur la transformation des médias à l’ère des transitions, montrant comment innover avec l’IA tout en préservant la déontologie et la diversité culturelle.
Elle a également souligné le rôle des femmes dirigeantes dans la recomposition du paysage médiatique.

Les tables rondes de l’après-midi ont porté sur les industries culturelles et créatives, les synergies franco-arabes pour la création artistique, les modèles de financement (fondations, philanthropie, fonds publics) et la médiation culturelle à l’ère de l’IA.

Sur le fond, deux lignes directrices ont traversé les discussions. D’abord, l’idée que l’émancipation économique des femmes constitue un levier stratégique de développement. Les intervenantes, issues des secteurs public et privé, ont insisté sur la nécessité de traduire les discours en dispositifs concrets : accès au financement, incubateurs dédiés, formations techniques et réseaux de mentorat.

Ensuite, la nécessité d’une coopération pratique à travers des partenariats, des centres d’excellence et des mécanismes de financement conjoints, plutôt que de simples déclarations d’intention.

Tout au long de la journée, les intervenantes françaises et arabes ont appelé à bâtir des cadres éthiques communs et des programmes de formation destinés à réduire la fracture numérique.
L’enjeu n’est plus seulement technique, a-t-il été rappelé, mais également politique. Il concerne la régulation, la souveraineté technologique et la capacité des pays du Sud à développer des solutions adaptées à leurs usages.

La table ronde dédiée aux industries culturelles et créatives a insisté sur l’importance des modèles hybrides — mécénat, fonds d’impact, structures de coopération publique-privée — permettant de soutenir la création sans l’enfermer dans des logiques purement marchandes.

Les intervenantes issues du monde de l’art et des fondations ont partagé leurs retours d’expérience et proposé des pistes concrètes pour professionnaliser les filières tout en préservant la diversité culturelle.

Plusieurs participantes ont également souligné l’importance d’instruments financiers adaptés : garanties publiques, fonds de capital-risque dédiés aux entrepreneures et dispositifs de venture philanthropy pour accompagner les premières étapes des projets culturels et technologiques.

Ces rencontres confirment la maturation d’un agenda franco-arabe centré sur l’économie du savoir et la création, et réaffirment que la question du genre ne peut demeurer un simple enjeu symbolique, mais doit se traduire par une véritable architecture d’accompagnement (financement, formation, incubateurs, réglementation).

Pour que les promesses tiennent, les participantes ont appelé à une feuille de route opérationnelle, assortie de calendriers, de budgets et d’indicateurs, afin de transformer l’énergie du plaidoyer en actions mesurables.