Du poison à Amman aux missiles à Doha

Le Premier ministre israélien Netanyahu s'adresse aux législateurs américains à Jérusalem. (Reuters)
Le Premier ministre israélien Netanyahu s'adresse aux législateurs américains à Jérusalem. (Reuters)
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Publié le Mardi 16 septembre 2025

Du poison à Amman aux missiles à Doha

Du poison à Amman aux missiles à Doha
  • C'est l'homme le plus dangereux
  • Plus dangereux que David Ben-Gourion, le cerveau et le fondateur d'Israël

Le Moyen-Orient n'a jamais manqué d'hommes forts, mais il s'est surpassé cette fois-ci. Il nous a livré l'homme le plus dangereux que nous ayons jamais rencontré et que nous ne pouvons plus tolérer.

Personne, dans son pays ou ailleurs, ne peut rivaliser avec lui. Il a accumulé les records : personne n'a tué plus de Palestiniens que lui. Il a créé un flot ininterrompu de cadavres, de veuves et d'orphelins. Son arsenal militaire est impressionnant : les meilleurs jets américains, des roquettes qui ne manquent jamais leur cible et une machine à tuer moderne qui utilise l'intelligence artificielle pour produire les formes les plus horribles de famine.

Personne n'a autant violé les cartes et les lois internationales que lui. Personne n'a assassiné autant de dirigeants palestiniens que lui. Il les a poursuivis partout. Il a violé les cieux, les lois et les normes pour les atteindre. Ils ne sont pas autorisés à vivre. Pour lui, les Palestiniens ont été tués ou devraient être tués. Il ne voit aucune raison à leur existence sur leur terre. Un guerrier terrifié n'a aucune pitié, ni pour les enfants innocents, ni pour les personnes âgées portant un keffieh. Pour lui, ils sont tous morts. Il brûle les tentes et démolit les bâtiments. Il a forcé leur déplacement à de nombreuses reprises. Il rêve d'une Gaza dépourvue de ses habitants.

C'est l'homme le plus dangereux. Plus dangereux que David Ben-Gourion, le cerveau et le fondateur d'Israël. Il l'a déjà vaincu en étant le premier ministre israélien le plus longtemps en fonction. Il est plus dangereux que Levi Eshkol, dont le mandat a été témoin de l'éclatement de la guerre de 1967. Il déteste les Palestiniens plus que Golda Meir. Il est plus dangereux que Menachem Begin, dont l'armée a envahi Beyrouth pour expulser Yasser Arafat, qui brandissait le signe de la victoire. Il est plus dangereux qu'Ariel Sharon, qui a détruit les accords d'Oslo. Il fait passer Yitzhak Rabin pour un amateur. Sa liste d'assassinats dépasse celle d'Ehud Barak. Il méprise sans doute aussi Shimon Peres, qui était passé maître dans l'art de dissimuler ses intentions malveillantes sous un air charmeur.

Il se moque des larmes des Palestiniens et du flot ininterrompu de petits cadavres. Il se réjouit de la destruction des maisons et des hôpitaux. Il est paranoïaque à l'idée de trouver les tunnels du Hamas et voit dans chaque keffieh le rêve d'un État palestinien. C'est un guerrier blessé et téméraire. Il ordonne chaque jour des assassinats, des frappes aériennes et des attaques de drones.

Il ne s'arrête pas aux déclarations de la Ligue arabe ou aux larmes d'Antonio Guterres. Il méprise l'ONU et sa charte. Il se moque que ses drones violent la souveraineté d'autres pays ou que les Européens soient mécontents et que les États-Unis le réprimandent. Il pense que la clé de la victoire réside dans la modification des faits sur le terrain. Plus tard, il s'agira de nettoyer son image et de remédier aux pertes médiatiques et diplomatiques.

Sa sauvagerie meurtrière ne connaît pas de limites. Il élimine Gaza, punit la Cisjordanie, commet des assassinats quotidiens au Liban, déstabilise la Syrie d'Ahmad Al-Sharaa après l'éviction de Bachar Assad, frappe le Yémen et contrôle l'espace aérien de l'Iran, assassinant ses généraux et ses scientifiques et détruisant ses radars.

Netanyahou est devenu le plus grand danger pour la région. Ses politiques constituent une forme d'arme de destruction massive à laquelle la région et le monde entier doivent faire face.

Ghassan Charbel


Il ne faut pas s'étonner de la situation actuelle après avoir jeté un coup d'œil sur l'histoire de ce guerrier intolérant. L'homme est en effet le produit de sa propre histoire. Lors de sa première rencontre avec Arafat en 1996, il s'est montré brutal et impoli. Il lui a dit : "Monsieur Arafat, vous connaissez ma position sur les accords d'Oslo que vous avez signés avec Rabin et Peres. J'étais contre ces accords. Il s'agit d'un nouveau gouvernement israélien. Je vous informe que ces accords sont terminés pour nous".

Il ne supportait pas l'idée qu'Arafat existe sur le sol palestinien et qu'il s'adresse à Israël à partir de là. Depuis, il considère l'Autorité palestinienne comme plus dangereuse que le Hamas car elle jouit d'une légitimité et utilise le langage de la paix adopté par le monde arabe et la communauté internationale.

La semaine dernière, à Doha, Benjamin Netanyahou a fait preuve d'une extrême imprudence en ordonnant des frappes contre les dirigeants du Hamas. Le 25 septembre 1997, le chef du politburo du Hamas, Khaled Meshaal, s'apprêtait à entrer dans son bureau d'Amman lorsqu'il a été attaqué par deux agents du Mossad qui étaient entrés en Jordanie en se faisant passer pour des touristes canadiens. Ils ont empoisonné Meshaal et se sont enfuis. Ils ont été rattrapés après une course-poursuite. Au bout de deux heures, les effets du poison ont commencé à se faire sentir et le seul moyen de sauver Meshaal était de lui administrer un antidote.

Le roi Hussein était furieux. Son pays, allié des États-Unis, avait signé un traité de paix avec Israël en 1994. Il a envoyé aux États-Unis un message clair et ferme qui a contraint Netanyahou à ordonner la livraison de l'antidote. Il a également été contraint de libérer le fondateur du Hamas, le cheikh Ahmed Yassine, qu'Israël allait plus tard assassiner. L'accord de paix conclu entre Israël et la Jordanie et les liens étroits qu'entretient Amman avec Washington n'ont pas dissuadé Netanyahou de poursuivre son comportement imprudent.

L'attaque de Doha était plus importante et plus dangereuse que celle d'Amman. Netanyahou n'a pas tenu compte du rôle de médiateur du Qatar ni de ses relations stratégiques avec les États-Unis. Il incombe donc au sommet arabo-islamique d'urgence de Doha de dissuader l'agression israélienne excessive. La situation actuelle est différente de celle qui prévalait au moment de l'attaque d'Amman. Les pays arabes du Golfe ont un poids économique et politique plus important et leurs liens avec les États-Unis affectent l'économie mondiale. Cette situation s'est clairement manifestée lors de la vaste offensive diplomatique lancée par l'Arabie saoudite et la France, qui a conduit à l'adoption de la déclaration de New York sur la solution à deux États.

La meilleure punition pour l'aventure de Netanyahou est l'utilisation efficace et rationnelle par le sommet de Doha de plusieurs cartes de pression à sa disposition pour convaincre l'Occident, en particulier l'Amérique de Donald Trump, que la création d'un État palestinien est nécessaire pour préserver la stabilité au Moyen-Orient et les intérêts occidentaux qui s'y trouvent. Le sommet doit être réaliste et reconnaître que cet objectif ne peut être atteint qu'avec le soutien des États-Unis. Seule la solution des deux États rendra Israël à Israël et renverra ses soldats des territoires de ses voisins et ses avions de l'espace aérien des pays de la région.

Du poison à Amman aux missiles à Doha, Netanyahou est devenu le plus grand danger pour la région. Ses politiques constituent une forme d'arme de destruction massive à laquelle la région et le monde entier doivent faire face.

Ghassan Charbel est rédacteur en chef du journal Asharq Al-Awsat.

X : @GhasanCharbel

Cet article a été publié pour la première fois dans Asharq Al-Awsat.

NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.