Trois récits dominants se disputent l'avenir de Gaza et de la Palestine, mais un seul se traduit par des actions concrètes: le récit israélien de domination et de génocide. Cette vision singulière et violente est la seule à être soutenue par la force brute de la politique et des faits.
Le premier récit est celui de l'administration américaine, largement adopté par les alliés occidentaux de l'Amérique. Il repose sur l'affirmation selon laquelle le président américain Donald Trump a personnellement résolu la crise du Moyen-Orient, inaugurant une paix qui aurait échappé à la région pendant des milliers d'années. Des personnalités comme Trump, son gendre Jared Kushner et l'ambassadeur américain en Israël Mike Huckabee sont présentées comme les architectes d'un nouvel ordre régional.
Ce récit est exclusif, dominateur et centré sur les États-Unis. Il a été illustré par Trump lui-même lorsqu'il a déclaré que le conflit de Gaza était "terminé" et qu'il a présenté un plan de paix qui évitait stratégiquement tout engagement clair en faveur de la création d'un État palestinien. L'ensemble de cette vision repose sur une diplomatie transactionnelle et un rejet du consensus juridique international, faisant de l'approbation des États-Unis la seule mesure de légitimité.
Le second récit est celui des Palestiniens, soutenu par les nations arabes et une grande partie du Sud. Ici, l'objectif est la liberté et les droits des Palestiniens, fondés sur le droit international et les principes humanitaires.
Ce discours est souvent influencé par les déclarations de hauts responsables arabes. Le ministre égyptien des affaires étrangères, Badr Abdelatty, par exemple, a affirmé en avril que la solution des deux États était le seul moyen "d'assurer la sécurité et la stabilité dans cette région". Il a ajouté une mise en garde : Il a ajouté un avertissement : "Si nous ne tenons pas compte du droit international, cela ouvrira la voie à la loi de la jungle". Ce récit continue d'insister sur le fait que le droit international est essentiel à une véritable paix régionale.
Le troisième récit est celui d'Israël - et c'est le seul qui soit soutenu par une politique concrète et agressive. Cette vision se traduit par une violence soutenue et systématique à l'encontre des civils, des saisies de terres agressives, des démolitions délibérées de maisons et des déclarations explicites du gouvernement selon lesquelles un État palestinien ne sera jamais autorisé. Ses acteurs agissent dans une impunité effrayante, créant rapidement des faits irréversibles sur le terrain. L'incapacité à faire respecter l'obligation de rendre des comptes pour cette violence omniprésente est la principale raison pour laquelle Israël a pu poursuivre son génocide dévastateur à Gaza pendant deux années entières.
Ce récit n'est pas théorique ; il s'articule autour des actes et des pressions législatives des plus hauts responsables du gouvernement israélien.
La semaine dernière, le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, est apparu lors d'une séance de la Knesset portant un pin's en forme de nœud coulant alors qu'il défendait un projet de loi sur la peine de mort visant les prisonniers palestiniens. Le ministre a déclaré que le nœud coulant n'était "qu'une des options" permettant d'appliquer la peine de mort, citant également "la pendaison, la chaise électrique et ... l'injection létale".
La stratégie officielle d'Israël est l'expansion territoriale pure et simple et le refus permanent de l'autodétermination palestinienne.
Ramzy Baroud
Le ministre des finances, Bezalel Smotrich, a quant à lui annoncé l'affectation de 843 millions de dollars à l'expansion des colonies illégales au cours des cinq prochaines années, ce qui constitue une étape massive vers l'annexion formelle. Ce financement sans précédent est spécifiquement destiné au déplacement des bases militaires, à l'établissement de groupes d'habitations mobiles et à la création d'un registre foncier spécifique afin d'officialiser le contrôle du gouvernement israélien sur la Cisjordanie.
Cette politique d'expansion territoriale est cimentée par le chef du gouvernement, puisque le Premier ministre Benjamin Netanyahu lui-même a déclaré clairement qu'"il n'y aura pas d'État palestinien". C'est très simple : il ne sera pas créé". Il a qualifié sa création potentielle de "menace existentielle pour Israël". Ce rejet sans équivoque confirme que la stratégie officielle du gouvernement israélien est l'expansion territoriale pure et simple et le refus permanent de l'autodétermination palestinienne.
Aucun de ces responsables israéliens n'a montré le moindre intérêt pour le plan de paix de Trump ou pour la vision palestinienne d'un État. L'objectif principal de Netanyahou est de s'assurer que le droit international n'est jamais appliqué, qu'aucun semblant de souveraineté palestinienne n'est établi et qu'Israël peut enfreindre le droit au moment et de la manière qu'il choisit.
Le fait est que ces récits ne peuvent continuer à coexister. Seule une véritable responsabilisation - par le biais de pressions politiques, juridiques et économiques - peut stopper la progression d'Israël vers la poursuite de sa campagne génocidaire, de ses destructions et de sa législation punitive. Cela doit inclure l'imposition rapide de sanctions à l'encontre d'Israël et de ses hauts fonctionnaires, des embargos complets sur les armes à destination de Tel-Aviv afin de mettre un terme aux guerres en cours, ainsi que l'obligation de rendre des comptes à la Cour pénale internationale et à la Cour internationale de justice.
Tant que les partisans du discours pro-palestinien n'auront pas les moyens de faire respecter ses principes, Israël et ses soutiens occidentaux ne verront aucune raison de changer de cap. Les États doivent remplacer les gestes symboliques et donner la priorité à des mesures de responsabilisation agressives et proactives. Cela signifie qu'il faut aller au-delà de la simple condamnation verbale et exercer une pression juridique et économique concrète.
Israël est aujourd'hui plus isolé que jamais, l'opinion publique s'effondrant rapidement au niveau mondial. Les forces pro-palestiniennes doivent tirer parti de cet isolement par une action diplomatique coordonnée et décisive, en poussant à la constitution d'un front mondial unifié qui exige l'application du droit international et la responsabilisation d'Israël et de ses nombreux criminels de guerre pour les crimes qu'ils continuent de commettre.
Une paix durable ne peut être construite que sur la base de la justice, et non sur la réalité militaire établie par un agresseur qui n'hésite pas à recourir au génocide au service de ses desseins politiques. Telle est la frontière morale indéniable : affronter et démanteler l'impunité qui permet à un État de poursuivre l'extermination en tant qu'outil politique.
Ramzy Baroud est journaliste, auteur et rédacteur en chef de The Palestine Chronicle. Son dernier livre, "Before the Flood", sera publié par Seven Stories Press.
Son site web est www.ramzybaroud.net.
X : @RamzyBaroud
NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section leur sont propres et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.














